Lentement, sans que je n'y fasse vraiment attention, déjà une certaine routine s'était mise en place. J'avais de la chance, les jumeaux faisaient partis de ces bébés facile à vivre, qui dormait sagement en règle général, ne faisaient pas d'histoires pour se nourrir et bien que tout doivent être fait en double, je parvenais à m'en sortir sans trop de difficultés, du moins à mes yeux. Certes, je ne serais jamais une mère parfaite, la maman idéale, mais je faisais de mon mieux.

Pour preuve de ma bonne volonté, j'étais en train de cuisiner. Oui, car les infirmières m'avaient bien fait comprendre que pour allaiter correctement les enfants, je me devais d'avoir une alimentation saine et correcte. Alors, ce soir, c'était hachis parmentier à la façon de Joe. Bon, c'était mon premier essai alors il ne sera sans doute pas aussi bien réussi mais au moins, j'aurais essayé. Je finis de mettre le plat au four avant de retourner voir les jumeaux, sagement installés dans leurs berceaux dans la salle à manger, toujours à portée de vue, lorsque la sonnette de l'entrée résonne.

Un peu surprise, j'hésite une seconde avant de déposer le torchon que j'avais dans les mains sur la table proche avant d'aller ouvrir la porte. Bien sur, ma première réaction est de regarde qui est là par le judas de la porte mais cette silhouette que je devine me laisse sans voix. Dans un seul et même mouvement, je déverrouille la porte et l'ouvre presque en grand, retenant mon souffle. Non, je n'ai pas rêvé, il est bien là, en chair et en os. Entier et vivant.

Et j'en suis tellement soulagée que je ne réfléchis pas davantage. Je viens le prendre dans mes bras, dévorant le peu de distance qui nous sépare, sans me soucier d'une possible présence alentour. Déjà, il n'y a pas de Seraphs, je le saurais. Et s'il est là, c'est qu'aucune menace Nephil ne doit planer non plus, je lui fais confiance à ce sujet.

"- David... "

Je voudrais lui dire tellement de choses mais rien ne sort de ma gorge tellement cette dernière est nouée. Je n'ai même pas remarquée les fleurs qu'il apporte, trop heureuse de simplement le savoir en bonne santé. Je retiens mes larmes, même si mes yeux doivent briller malgré moi. J'avais si peur de ne plus le revoir que sa présence me semble tout simplement magique. Je finis par le relâcher, reculant un peu en souriant bêtement, les joues colorée d'un brin de gêne avant de me décaler un peu pour lui laisser le passage libre.

"- Je suis désolée, tu vas prendre froid à rester ainsi dehors. Rentre, je t'en prie. Il fait meilleur à l'intérieur."

Pitié, ne me dis pas que tu es simplement passé nous voir en coup de vent et que tu comptes déjà repartir. Pas avant d'avoir au moins pu voir tes enfants.

Bonsoir Naoto. 

Oui, même le son de ma voix m'avait manqué. Horriblement. Et son étreinte et plus rassurante que tous les discours qu'il pourrait me sortir. A cet instant, j'ai tout oublié des douleurs et des épreuves que nous avons traversées et qui nous attendent encore. Il n'y a plus que lui et moi, nos cœurs tambourinant à l'unisson dans nos cages thoraciques presque trop petites pour les contenir. Mais déjà, je me sépare de lui pour l'inviter à entrer, priant de toutes mes forces pour qu'il accepte.

D'accord. Je ne te dérange pas au moins? 

"- Non, pas du tout. Jamais, voyons. "

Comment le pourrait-il alors qu'il est la personne qui m'est la lus chère au monde? Il serait sans doute faux de dire que je n'avais que lui car malgré tout, il existait encore quelques personnes sur qui je pouvais compter mais David était à part. Il valait tellement plus à lui seul que tout le reste du onde réuni à mes yeux. Mais je doutais qu'il en ai conscience et je ne pourrais pas le lui dire. Pas après ce qu'il s'était passé.

Je suis heureux de te voir. Tu es magnifique.

"- Je ne te crois pas là, par contre. Je dois encore avoir de la chapelure qui traîne partout sur mes affaires alors niveau mode, je repasserais. Mais moi aussi, je suis ravie de te voir.... "

Oui, se mettre à la cuisine ne promet pas des miracles dès les premiers essais aussi je sais bien que contrairement aux grands chefs, je m'en suis mise un peu partout, malgré le tablier que j'avais mis durant un temps et vite ôté, le trouvant plus gênant qu'autre chose. Et je ne sais pas si c'est d'avoir entendu le bruit de la sonnette, la porte ou la voix de leur père mais déjà, Hana se manifeste depuis son berceau, rapidement imité par son frère, plus doucement cependant.

"- Et je crois qu'il y a deux jeunes gens qui ont hâte de te revoir, eux aussi. "

Je n'ai pas besoin de ses mots pour savoir que lui aussi partage réellement ma joie de le revoir. Ce sourire, si précieux, si chaleur et si vrai, même à moi, il ne me l'a offert que trop peu souvent mais je l'ai gravé à chaque coin de mon cœur, de mon âme et des mes souvenirs. Et je m'y suis accrochée comme à une bouée de sauvetage quand je faisais naufrage malgré tout mes efforts. Le voir me l'offrir de nouveau est presque trop beau et une seconde, mes yeux brillent avant que les jumeaux se rappellent à nous.

"- Viens, ils sont installés dans le salon. "

Je le sens s'accrocher à mon pull, légèrement, et rester en retrait. Quelque part, sa réaction e ferait presque sourire. Lui si fort, tellement inébranlable, le roc qui a lui seul m'a permis de rester debout, sembler ainsi effrayer par ses propres enfants, cela à de quoi paraître amusant. Mais je n'en oublie pas que jusqu'à il y a 2 ou 3 jours, même encore parfois, je réagis exactement de la même manière que lui. Nous avons commencés à nous apprivoiser, tous les 3, mais il nous reste encore bien du chemin à parcourir.

Je l'accompagne jusqu'à me placer à ses côtés devant les deux berceaux. Evidemment, c'est notre fille qui réagit la première, remuant assez pour faire comprendre qu'elle en avait du berceau. les bras sont tellement plus confortables. Et quelque part, en cherchant bien, on pourrait presque l'imaginer tendre les bras vers David. Et cette image, me fait légèrement rosir tandis que je rajoute en souriant tendrement.

"- On dirait bien que c'est toi qu'elle réclame. Son papa requin lui a manqué, elle veut en profiter. Allez, vas-y."

Voir David hésiter un peu simplement devant Hana me fait un brin sourire même si une seconde, cela m'inquiète aussi. Le fait de ne pas les voir, de ne pas pouvoir être avec eux, est-ce que cela aurait pu le faire regretter de les avoir vu naître maintenant? Où moi qui les vois tous les jours, aurais-je raté un détail les montrant malheureux, malades ou quoi que ce soit de ce genre? Oui, je manque de me mettre à paniquer mais déjà, il vient la saisir avec un vraie délicatesse avant de la caler dans ses bras et de se mettre à rougir violemment. Si Doc' voyait ça, je ne doute pas une seule seconde qu'il s'en donnerait à cœur joie pour se moquer de lui, tiens.

Elle... elle est si légère ! Bonsoir Hana! 

J'observe le papa et sa fille devant moi, cherchant à graver au mieux chaque détail de cet instant dans ma mémoire. Les petits doigts d'Hana jouant maladroitement avec le pull, sa tête bien calée contre David, lui qui sourit encore davantage en posant son regard sur Julian, un peu plus sage mais commençant à se manifester aussi. Un peu jaloux? Sans doute. Alors, c'est moi qu'il vient fixer du coup.

Et bonsoir, Julian. Tu es encore tout petit, toi! 

La voix de son père qui s'adresse à lui l'attire malgré tout, curieux. Oui, tu la connais, tu le sais. Tu l'as déjà entendu. Je suis persuadée que tu t'en rappelles, même si cela doit te paraître très lointain. Et cela ne fait que me pincer un peu plus le cœur, l'espace d'une seconde. Je ne dois pas penser à ça.

Ils ne sont pas trop difficiles? Tu t'en sors avec eux deux? Tu as... quelqu'un pour t'aider?

"- Le fait qu'ils soient deux n'est pas toujours évident à gérer mais nous avons de la chance. Ce sont des bébés sages, mêmes les infirmières en étaient surprises. Ils ne pleurent pas tant que ça et dorment bien.
Après, je ne peux pas me dédoubler alors parfois, c'est un peu compliqué mais pour l'instant, j'y arrive. "

Non, je ne veux pas qu'il se sente coupable de ne pas être avec nous. De ne pas pouvoir me seconder. C'est en grande partie ma faute si la situation est ce qu'elle est aujourd'hui alors il n'a pas de reproche à se faire, même si je sais pertinemment qu'il s'en fera malgré tout. En tout cas, Hana est littéralement aux anges dans les bras de son père. Et du coup, Julian semble bouder de son côté. Alors, je viens le prendre dans mes bras, pour le rapprocher de son père, me tournant de façon à ce que notre fils puisse observer David, lui aussi.

"- Et pour le moment, je me débrouille surtout seule. Je sais bien que je ne pourrais pas les garder éternellement avec moi mais ces histoires de nourrice ou autre... Je préférerais m'en passer autant que possible."

Problème de confiance. Je sais bien que cela sera impossible. Même si je ne travaille plus ou que je trouve un métier que je puisse exercer depuis la maison pour continuer à m'occuper d'eux, il me restera le côté Seraph de mon existence, duquel je ne pourrais pas me soustraire.

"- Et puis, ce n'est pas comme si j'étais vraiment toute seule. Je sais que tu es là, quoi qu'il arrive. Et cela m'aide beaucoup."

Le bras de David qui vient saisir ma taille me ferait presque rougir pour le coup. Oui, dans un sens, c'est la première fois que nous parvenons à nous retrouver si proche l'un de l'autre depuis que nous sommes parents. Avec l'arrivée des jumeaux, encore récente, nous n'avons pu que rester éloigné alors, lorsque ses lèvres viennent chercher ma joue puis ma bouche, je les lui offre de très bonne grâce.

Tu t'en sors si bien. Ils sont heureux, avec toi. Ça se voit. Je suis presque jaloux...
 

"- Je fais de mon mieux. En espérant qu'il en apprécient encore davantage les moments où tu seras avec nous. "

Oui, à force de m'avoir en leur compagnie constamment, ils finiront vite par en avoir assez de leur mère envahissante et sur-protectrice. Et même si je doute qu'ils puissent profiter de la présence de David autant que nous le voudrions, je souhaite sincèrement qu'ils aient la possibilité de le voir le plus souvent possible. Et autant qu'ils le voudraient. Pour quoi même, plus tard, de choisir avec qui il resterait en devenant plus grand. Car je doute encore plus que sérieusement d'être une bonne mère.

David observe les jumeaux avec des yeux à la fois curieux et inquisiteurs, surpris et attendris. Je grave cette image dans ma mémoire alors que son étreinte sur ma taille se resserre. Mais Hana vient récupérer son attention en venant jouer avec sa chaîne tout en venant jouer de ses doigts tout potelés sur son visage. C'est adorable, tout simplement. Julian se contente de tout observer, bien calé contre mon épaule, tandis que David me relâche pour éviter à Hana de mettre ses pendentifs à la bouche.

Ça ne se mange pas, jeune fille!  

En tout cas, elle a l'air de trouver ses doigts à son gout. Quelle chipie celle-là. Mais qu'est-ce qu'elle est mignonne en faisant ça. Elle ressemble tellement à David en plus. Car oui, je trouve beaucoup plus de ressemblance des enfants envers leur père que de mon côté. Enfin, ce n'est pas forcément plus mal non plus.

"- C'est vrai qu'il va être l'heure du repas, bientôt. Tu as déjà mangé? Sinon, je peux t'inviter. Au menu, c'est du hachis parmentier. Mais je ne promets rien, c'est un premier essai, je te préviens. "

Oui, je sais que niveau nourriture, il est comme moi. Il ne mangeait déjà quasiment pas humain et à présent, c'était encore pire. Mais si j'arrive à faire l'effort pour les jumeaux, peut-être que cette excuse sera suffisante pour le garder un peu plus auprès de nous. Julian babille, essayant de venir toucher du bout de ses doigts le visage et le pull de David à mes côtés, pas vraiment jaloux mais curieux, sans aucun doute. Après tout, David est aussi la première personne à entrer ici, cela les intrigue forcément.

J'en serais ravi. Tu as besoin d'aide pour quelque chose?

"- Juste que tu surveilles les jumeaux, le temps que je mettes la table et que je finisse de tout préparer. Et puis, je suis certaine que tes fleurs apprécieront de se trouver enfin dans un vase, non?"

Oui, avec tout ça, nous nous étions pour le moment contentée de les déposer là, sur la table, bien plus préoccupés par les bébés que par ces dernières. mais c'était normal aussi, surtout pour lui. Enfin, comme j'allais avoir besoin de mes deux bras de libre, je viens reposer doucement Julian dans son berceau. Son regard quand je fais cela est digne des yeux du chat Potté et quand à chaque fois, je me sens presque coupable de le laisser là. Mais il fat bien que je m'y habitue et lui aussi. Surtout que je ne pars pas loin. Je viens reposer sa peluche dans ses petites mains malhabiles tandis que la voix de David m’interpelle.

Elle... Qu'est-ce qu'elle fait?

"- Là, elle profite de son Papa, tout simplement. Et visiblement, tu dois faire un matelas bien plus confortable que son berceau."

Je rigole un peu à la fois attendrie et amusée. David, toujours si sur de lui, si fort et puissant, mis ainsi en défaut par son petit bout de fille, oui, je trouve cela trognon. En même temps, ils sont tellement mignons tous les deux comme ça. Je voudrais les prendre en photo mais avec nos vies respectives, je ne suis pas certaine que cela soit une bonne idée. Je viens passer le bout des doigts sur la tête d'Hana, volant un baiser à mon fiancé avant de me diriger vers la cuisine.

A peine ais-je eu le temps de trouver de quoi mettre les fleurs à leur avantage que le four sonne. Je l'éteins aussitôt avant de finir de mettre la table et d'en sortir le plat que j'ai tenté de préparer. Bon, il n'a pas une si mauvaise tête que cela mais c'est loin d'être digne d'un restaurant. Même la brasserie de la dernière fois faisait bien mieux. En tout cas, ça sent plutôt bon.

"- Bon, eh bien, je crois que le dîner est servi..."

Ils font souvent ça? Discuter en... en bébé? 

"- Ça leur est déjà arrivé mais pas autant. Juste... quelques babillages comme ça, sans raison spécifique. Du moins à mes yeux."

Je ne rêvais donc pas en les entendant tous les deux chantonner depuis la cuisine. C'est drôle mais j'aime bien ce bruit de fond qu'ils créent ainsi. Je crois que, tout au fond de moi, cela réveille des souvenirs enfouis dont je n'ai même pas conscience. Avions-nous, bébés, ce genre de rapports avec Minato? C'est étrange mais je n'arrive pas à l'imaginer. Pour moi, il y a toujours eu un trop grand fossé entre nous pour que ce genre d'échange puisse avoir eu lieu mais au fond, qu'en sais-je réellement?

Le plat mis sous cloche pour rester chaud, je rejoins mes 3 amours dans le salon. David s'est assis à côté du berceau de Julian et semble aussi captivé qu'un peu inquiet devant le manège des jumeaux. En tout cas, que ce soit Hana ou Julian, ni l'un ni l'autre ne semblent prêt à le lâcher. Pour un peu, je pourrais en être jalouse.

Désolé. Je dois te paraître ridicule. Je... Je ne sais pas comment... me comporter. Je...
Je ne sais pas ce que je dois faire...

"- Tu n'es pas seul pour ça. Je suis là, moi aussi..."

Je suis venue m'agenouiller en face du berceau de Julian, une main venant passer dans le dos d'Hana que David tient comme la prunelle de ses yeux, et l'autre tapotant doucement sur la couverture au niveau de pieds de notre fils. C'est vrai que c'est assez impressionnant de les voir ainsi communiquer, sans pouvoir les comprendre. Mais se parlent-ils vraiment? Enfin, ont-ils des choses à se dire ou est-ce seulement une façon qu'ils ont de se manifester? Je n'en sais rien au final.

"- Mais autant être honnête, je ne suis pas vraiment beaucoup plus avancée que toi au final. Je crois que... nous ne sommes pas doués... pour être parents..."

Après tout, David n'a jamais vraiment connu sa mère et son père n'a été à ses yeux qu'une figure, un modèle et rien de plus. Moi... Je ne sais même pas si on peut vraiment considérer que j'ai eu des parents, ayant plus été élevée par notre majordome qu'autre chose. Je laisse échapper un léger soupir alors que malgré tout, je souris doucement. Ils sont tellement mignons, ces deux-là. Et je vais tout faire pour qu'ils n'aient pas à vivre ce que nous avons vécus, qu'ils n'aient pas à connaitre une enfance similaire aux nôtres.

"- Contente-toi... de suivre ton instinct. D'être toi-même. C'est ce que l'on m'a répété pendant tout ma grossesse et finalement... pour le moment, ça a plutôt l'air de ne pas trop mal fonctionner...
Et même si nous commettons des erreurs,... ce qui arrivera forcément... et bien nous apprendrons à composer avec."

Je crois que ce sera difficile pour moi. Mais j'apprendrai.

"- Moi je sais que tu y arriveras...."

Oui, il est évident qu'il a du mal à s'en convaincre et pourtant, si nous regardons le chemin que nous avons parcouru ensemble depuis que nous nous sommes rencontrés, n'avons-nous pas réalisé l'impossible dans un sens? Nous, si différents, tellement opposés en tout, nous ne nous trouvions aujourd'hui heureux que réunis, auprès des jumeaux. Ça ne pouvait pas ne rien dire.

Je l'observe remettre Hana dans son berceau, demoiselle qui semble bouder un peu de devoir quitter les bras de son père mais qui apprécie de retrouver la couverture et la peluche qui sont siennes. Julian est déjà presque partis au pays des songes lui, se remettant à émettre cet étrange gazouillis dans lequel j'aime à imaginer des similitudes avec cette chanson au sujet des petits poissons.

En attendant, David m'aide à me relever avant que je ne le guide jusqu'à la cuisine où je l'invite à prendre place. Mon plat n'a pas la présentation sophistiquée de ceux de Joe mais il ne fait pas encore trop raté non plus. En même temps, je n'ai pas commencé par le plus compliqué qui soit non plus mais il faut bien dire que je suis réellement du genre débutante aussi.

"- Tu as déjà du en manger souvent chez toi mais là, c'est une version 'Naoto' alors je ne sais pas trop ce que ça vaut. Et rassure-toi, si c’est vraiment mauvais, tu as tout à fait le droit de tout laisser, je ne t'en ferais aucun reproche."

Oui, je me sens un peu idiote en venant servir une part de ma création à mon fiancé. Pourtant, c'est bien ainsi que les gens normaux peuvent simplement profiter d'un moment ensemble. A croire que nous, nous ne savons nous retrouver que lorsqu'il y a des ennuis à l'horizon. Et puis, je sais qu'il ne mange pas alors, pas la peine qu'il se force. Moi, c'est une autre histoire. Je le fais surtout pour les enfants.

"- Voilà. J'espère que ça te plaira quand même. Et bon appétit."

C'est drôle, ce que nous partageons là est tout simplement un vrai moment en famille. Pourtant, ni lui ni moi ne sommes vraiment à l'aise. Le manque d'habitude, sans doute? J'espère surtout ne pas avoir fait quoi que ce soit qui puise encore le faire souffrir, je m'en veux toujours tellement.

Je ne suis pas fier cuisinier non plus. Tu me rappelles que je dois m'y mettre. Les enfants commenceront bientôt à manger des purées et des compotes. Moi qui ne mangeais que des plats préparés ou des fast-foods. J'arrive à peine à me faire un steak.

Cette confession me fait doucement rigoler, même si je m'y attendais. J'avoue que m'imaginer David derrière des fourneaux autres que ceux de sa forge ne me paraissait pas très réaliste. Mais nous étions devenus parents alors, l'impossible n'était plus vraiment une notion nouvelle pour nous. Et si j'avais réussi à surmonter ce handicap, il y arriverait également, je n'en doutais pas. Enfin, pour le moment, place à la dégustation.

'Merci. Bon appétit à toi'.

Ces mots en français e touchent. Oui, j'ai continué, même sans lui, mon apprentissage de cette langue, mais ce n'est pas aussi simple que je l'aurais cru. Le simple fait d'en entendre les sonorités me renvoi à ses souvenirs communs, si doux et agréables, alors parfois, j'hésite à arrêter, pour ne plus me faire de mal inutilement. Nous nous voyons si peu déjà. Arriverons-nous seulement à continuer ainsi quand les jumeaux grandiront? Non, ne pas penser à cela, profiter du moment présent et manger.

Il est très bon. Comme toujours tu apprends vite. 

"- La recette de Joe était particulièrement bien détaillée alors il n'a pas été trop difficile de la suivre, même pour une néophyte comme moi. Mais je suis contente qu'il te plaise. Si tu veux, la prochaine fois, on pourra le préparer ensemble...."

Oui, je m'imagine une journée hors du temps ou, simplement en famille, il m'aiderait à faire la cuisine tandis que nous nous occuperions des enfants à tour de rôle. J'espère qu'il pourra être là pour tous les grands moments de leur vie: les premiers pas, les premiers mots, la première dent perdue... Et je picore doucement mon plat, bercée par ses images auxquelles je m'accroche. Il n'y a pas de raison pour que nous ne puissions pas vivre notre vie de famille de façon heureuse. même si pour cela, nous devons nous cacher.

Naoto. Je voudrais te demander... Si un jour je te demande quelque chose, une seule chose... Pourras-tu le faire, même si je ne t'explique pas pourquoi? Sans me poser de questions?

La fourchette que j'allais porter à ma bouche vient se reposer dans mon assiette. Pourquoi me poses-tu cette question-là, pourquoi maintenant? Que se passe t'il? Tu sais qui je suis, ce que j'ai toujours été. Un sale flic, une poucave, un détective. Me demander ça serait comme demander à un poison rouge de ne plus respirer sous l'eau. Pourtant, je sais que je ne peux pas refuser. Alors, mon regard vient se planter dans le sien.

"- Tu sais que tu me fais peur quand tu me demandes ça? "

Oui, je préfère qu'il le sache. Même si je dois me taire, me forcer pour ne as chercher à en apprendre davantage, je n'aime pas ça. Parce que nous avons trop secrets encore entre nous, sauvegardés pour notre propre survie et celle des enfants. Jamais je ne saurais tout de lui, encore moins maintenant, au vu de notre situation. Mais je l'aime et comme l'adage le dit si bien, l'amour rend aveugle...

"- Promet-moi seulement que... Quoi qu'il se passe... Tu seras prudent et que tu reviendras... "

Pas pour moi, mais pour eux. Je refuse de devoir un jour apprendre à mes enfants que leur père n'est plus. Je ne veux pas que ce cauchemar qu'il m'avait raconté ne devienne réalité. Je soupire avant de revenir à mon assiette que j'ai du mal à reprendre. Pourtant, le repas est toujours aussi bon. Seulement, à présent, j'ai la gorge nouée. Mais j'ai promis et je ne romps jamais une promesse.

Je suis désolé. Mais j'ai besoin de savoir.

Oui, ça je ne peux pas ne pas le comprendre. Ce besoin de savoir, de comprendre, d'avoir des certitudes au lieu de continuels doutes. Alors, je me contente de déglutir avant de lui demander la seule chose que je me sens encore autorisée à lui réclamer. Au fond, je lui ai tout prix. Il a en parti tout perdu par ma faute alors, je n'ai pas le droit de lui en demander trop. Mais j'espère avoir une réponse rapide et surtout sincère.

Je crois bien que je ne peux pas, Naoto. Être prudent, bien sûr, je le suis, mais si je te demande cette faveur, c'est bien parce que je ne suis pas sûr de revenir. Pas dans les jours à venir... mais un jour, sans doute.
Je voudrais te dire ce que tu veux entendre, Naoto. Mais je ne peux pas te faire une promesse que je ne tiendrais pas. Je suis désolé. Sincèrement désolé.

Pas sûr de revenir? Non, pas ça. Qu'est-ce qu'il est en train d'essayer de me faire comprendre? Que va t'il tenter? Qu'a t'il donc prévu de si gros pour avoir à ce point besoin de la certitude que je lui obéirais au moins sur cette fois-là? Pourtant, je comprends. Cette histoire de promesse qu'il ne serai pas capable de tenir, je suis pareil. Les mots ont trop de valeurs à mes yeux et à mes oreilles. C'est pour cela que je les manie avec autant de parcimonie. Et c'est bien parce qu'il me connait et le sais que lui aussi les utilise avec une prudence et un art plus que millimétré, dont personne à part nous deux ne peut avoir conscience.

Tu sais, Je suis Solitaire, depuis l'incident à la fête foraine. J'ai refusé de rester dans ma faction parce qu'on m'a demandé quelque chose que je me savais incapable de faire. 

Un Solitaire, vraiment? Alors, Manori avait tout compris. Et depuis tout ce temps, il continuait alors à avancer seul, envers et contre tous. Alors que moi, j'étais encore et toujours bien à l'abri. Cela explique peut-être aussi l'absence totale de réaction de la part des Nephils à notre mariage. Mais avec les enfants, je ne me sens pas capable de devenir Solitaire. une fois de plus David est tellement plus fort que moi, qui retient mes tremblements alors que son sourire cassé ne doit pas manqué le fait que les couleurs quittent lentement mon teint déjà pâle.

Pourtant, je continue de suivre les clauses du contrat de Bey. Et son ordre de tuer des Seraphs si l'occasion se présente, même si l'occasion est dangereuse. Tous sauf toi. Jamais toi... 

Cette dernière partie-là est sans doute celle qui m'étonne le moins. Mais cela ne me rassure nullement. Car s'il vient à me le dire c'est qu'il y a une raison derrière. Laquelle? Je crains de le découvrir et pourtant, je ne demande qu'une chose: savoir. Comprendre. Lui qui ne parle jamais, toujours si secret, si aujourd'hui il se livre ainsi, c'est forcément qu'il a quelque chose en tête. Et il faut que je sache quoi. Pourtant, ma première réponse sera toute autre.

"- J'ai été nommée Accomplie lorsque tu es devenu Solitaire. J'étais surveillée mais on me trouvais plus utile dans la faction qu'en dehors. Sans doute ont-ils espéré que je leur offre des informations complémentaires mais en vain. "

Je ne tente plus de sourire, je me contente de lui expliquer, sur un ton que je voudrais confiant mais qui ne dissimule pas assez mon inquiétude. Il se livre dangereusement à moi, il me fait confiance, alors je veux qu'il sache que la réciproque est valable. Je crois en lui, plus qu'en n'importe qui sur cette Terre, et ce peut importe les événements à venir.

"- Avec ma grossesse, j'ai ralenti mes activités et malgré mes 'égarements', ils continuent de me préférer en leur compagnie que de risquer de savoir que je puisse me retourner contre eux."

Car malgré tout, ils savent que je suis assez forte pour tenir tête à l'Elue Nephil. Que j'ai David parmi mes relations et que cela pourrait un jour leur servir. Mais jamais ils ne l'approcheront grâce à moi. Jamais via ma personne. Je ne leur offrirais sur lui, jamais. Ils savent aussi que j'ai déjà tué Ombres et Nephils sans distinction et que je suis un très bon enquêteur, malgré mes 'travers'. Mais maintenant, je ne peux plus tourner autour du pot. Il faut que je le lui demande, même si mon regard trahit ma crainte de sa réponse.

"- Qui ?... Qui as-tu tué et.... Quelle est ta prochaine cible?... "

Je suis littéralement pendue à ses lèvres, écoutant, analysant, dépeçant chacun de ses mots pour le tourner dans tous les sens et en extraire le sens caché s'il en a un. Et il y a des phrases sur lesquelles je ne peux que l'approuver. Par rapport au mariage par exemple. Mais la suite par contre, a de quoi me terrifier.

Un jour viendra où je m'attaquerai sans doute à plus fort que moi. Ce jour-là peut-être, je ne m'en sortirai pas. Je sais que si ça arrive, tu ne dois pas m'en vouloir, ni en vouloir à ceux qui me tueront. C'est une guerre et c'est normal que ceux qui la font tuent ou meurent. Tu feras de même, tu l'as déjà fait. Mais je... veux que tu saches que si je te demande une chose, une seule, j'ai besoin que tu la fasses.  

Non, ce jour n'arrivera jamais. Tu es le plus puissant, le roc inébranlable contre lequel toutes les vagues se brisent. même seul sans ta faction, même loin de moi, tu avances et continues ton ascension sans même ralentir ne serait-ce qu'une seconde. Tu t'en sortiras toujours. Je veux m'en persuadée alors que le simple ton de sa voix me fait douter. Non, je ne veux pas l'entendre dire ce genre de choses. Pas maintenant et pas avec cette requête qu'il attend de moi tout en me la dissimulant toujours.

Ses mots suivant sont encore une fois plus une preuve d'amour qu'autre chose. Comment peut-il encore ainsi penser à moi, aux bébés et à tout avant lui? C'en est inimaginable. Et je réalise seulement à quel point, malgré toutes mes faiblesse et mes erreurs, il peut encore tenir à moi. Aussi imparfaite sois-je, il continue encore et toujours à croire en moi. Il m'offre sa confiance, que même son meilleur ami n'avait pas. Mais ces derniers mots me glacent le sang au point de me faire cesser de respirer.

Et s'il m'arrivait malheur, sache que j'ai pris des dispositions pour toi et les enfants.

"- Il ne t'arrivera rien, jamais!"

Je suis montée dans les aigus, sans doute encore plus surprise que lui. Non, je ne veux pas penser à cela. Arête, en parler ne pourrait qu'attirer le mauvais oeil comme diraient certains. Je sais que tu es réaliste et c'est justement cela qui me blesse le plus. Je n'envisage pas la vie sans toi ni après toi alors que dans ton monde de requin, c'était comme si déjà tu avais préparé ta propre fin et cela me terrorise. Car tu as tant d'ennemis au-dehors, et je suis tellement impuissante à ce niveau.

C'est à peine si j'ai senti ses doigts venir se poser sur les miens pourtant, moi qui ne ressent plus grand choses, je peux sentir leur chaleur sur ma peau fraîche. Est-ce un effet pervers de ces révélations qui fait que j'en ai perdu ma chaleur en plus de mes couleurs? Je ne peux plus détacher mon regard de lui, guettant, cherchant un indice de la suite de ce qu'il va m'annoncer car maintenant, je ne crains plus le pire. Je l'attends....

Mais surtout, je veux que tu sache que je t'aime, plus que je n'ai jamais aimé personne. Et sache que je te mettrai toujours en premier dans mes priorités. Ta sécurité, ta santé, ta vie, mais aussi celles de Julian et Hana sera toujours ce qui importera le plus à mes yeux.. 

Mes doigts viennent serrer si violemment les siens, comme un réflexe non maîtrisé, que même moi je ne m'en rend spas compte. Il y a tant de choses que je voudrais dire et faire en cet instant. Crier, hurler, pleurer le gifler pour oser simplement me rappeler toute la violence de cette vérité que je ne voudrais plus voir ni connaitre. Au lieu de ça, je serre les dents et me force à respirer profondément. Avant de parvenir à articuler quelque chose, les regard définitivement baissé sur mon assiette qui à cet instant me répugne.

"- Tu es le seul qui compte. Toi, et les jumeaux, je n'ai que vous.... Et tu sais mieux que quiconque ce que cela fait de grandir avec un parent en moins alors, ne me demande pas... De cautionner ça.... Je ne suis pas aussi forte que toi.... Je ne pourrais... Tout assumer sans te savoir quelque part....  "

Oui, au pire, je préfère te savoir à l'autre bout du monde mais vivant s'il le faut. Seule, je n'ai plus la force de me battre. Mon personnage le pouvait mais la femme que je suis devenue n'est qu'une gamine pleurnicharde devenue mère avant même d'avoir compris ce que voulait dire être une fille. J'ai encore tant de retard à combler, tant d'efforts à faire pour seulement lui arriver à la cheville alors non, je ne peux plus supporter de l'entendre parler de mourir.

"- Ce risque existe tous les jours, pour tout le monde. En traversant la rue, en glissant sur le pas de sa porte, en changeant une ampoule ou en se faisant piquer par un guêpe et que sais-je encore.
Je ne veux pas être ta priorité principale si celle-ci signifie ta mort. Je le refuse!"

Je pousse un peu violemment l'assiette devant moi, secouée et incertaine. Il ne m'a pas dit tout cela pour rien, je le sais. J'ai l'appétit coupé, le souffle court car pris par l'inquiétude. Nous nous sommes jurés la vérité et alors qu'il me m'offre, je fais ma pauvre gamine capricieuse. Toutes mes félicitations, Naoto. Enfin, je finis par demander, de l'angoisse plein la voix.

Que veux-tu... que je fasse?... Je ne poserais... Plus de questions... 

Si tu as peur de ma mort, imagine ce que m'inspire la tienne, Naoto. Je sais ce que c'est de perdre un parent. Je sais aussi que mon père, même vivant, n'a pas été là pour moi. Je sais qu'avec le Clan, je serais forcé d'écarter les jumeaux, ou de les faire entrer dans ce monde dangereux et que je risque de le faire beaucoup trop, d'un côté ou de l'autre. Je sais que ce n'est pas le futur qu'il faudra aux enfants, et que s'il faut choisir, ma mort... est préférable à la tienne. Mille fois. Pour toi, et pour eux. Je suis désolé de te demander de penser déjà à ça, mais je sais que c'est une possibilité.

Je voudrais refuser, lui débiter un de ces discours dont j'ai toujours été si fière et que faisait de moi le Petit Prince, celui que l'on craignait à cause justement de sa justesse de raisonnement et de la puissance de ses mots, de l'exactitude de ses paroles et et l'horrible vérité qui en découlait. Mais je ne peux rien faire aujourd'hui rien dire. Car il a raison, et je le sais.

Aussi douloureuse que sois la pilule à avaler, aussi tranchant que soit ce pieu qu'il enfonce davantage dans ma poitrine, tout est correct, comme s'il avait déjà préparer ce speech depuis une éternité. Peut-être même est-ce le cas? Mais alors pourquoi me le sortir aujourd'hui? Il n'y a au final qu'un seul détail sur lequel je suis en désaccord avec lui et, peut-être simplement dans un regain d’orgueil blessé, je me permets de le relever, dans un murmure difficile.

"- S'il faut choisir.... Aucune mort n'est jamais préférable à l'autre..."

Voilà. Oui, ce n’est qu'une façon pour moi de dire que je ne suis pas d'accord, mais il le sait déjà. Ce n’est rien de plus que la seule façon que j'ai trouvé pour faire croire que je pouvais encore tenir ce rôle qui avait été si souvent le mien, à savoir celle qui dénouait tout et trouvait toujours la solution, quelle qu'elle soit. Aujourd'hui, ce n'est rien de plus qu'un aveu de faiblesse supplémentaire de ma part. Il a accepté et avance là ou de nouveau, je suis paralysée et loin derrière lui.

A ma dernière question, David se lève pour venir se rapprocher de moi et s'accroupir à ma hauteur. Même ainsi, il est bien assez grand pour me prendre dans ses bras dans lesquels je me jette presque, cherchant simplement à profiter de sa chaleur et du son si commun et rassurant des battements de son cœur. Mais ce n’est pas qu'une impression, le sien aussi bat vite et fort, même si ce n'est pas autant que le mien. Pourtant, il semble toujours si calme et inébranlable. Comment fait-il?

Si un jour, je te fais un signe, je t'appelle ou t'envoie un message, si je t'envoie quelqu'un pour te parler, je t'en prie, je t'en supplie, viens ici, et restes-y avec les enfants.
Et pardonne-moi d'être si égoïste.

Un instant, ses paroles me font frissonner. Pourquoi ainsi exprimées ces dernières me font-elles penser à la dernière volonté d'un condamné à mort? J'ai la certitude qu'il se trame quelque chose d'énorme, de tellement gros que cela ne devrait pas pouvoir m'échapper et pourtant, je ne comprends pas. Je ne sais pas ce qu'il prévoit mais je n'ai qu'une certitude: cela sera du quitte ou double pour lui.

"- Je n'ai rien... à te pardonner... C'est moi, la fautive..."

Oui, tout est de ma faute, depuis le début. C'est moi qui me suis laissée aller. Moi qui ai toujours cédé au final, moi qui n'ai pas la force de simplement demeurer à ses côtés sans l'aide du reste de cette faction qui finalement est autant un abri de fortune qu'une véritable épine dans mon pied. Là ou il est seul et puissant, je ne suis rien sans lui. Même aujourd'hui, encore plus aujourd'hui, il m'est tout simplement indispensable.

"- Je le ferais... C'est promis... "

Mon front est venu se caler dans le creux de son cou alors que ma respiration se calme. Non pas apaisée mais parce que ma volonté le lui oblige. Il n'a pas à subir mes sautes d'humeur, mes angoisses et mes peurs alors que déjà, je suis la cause de la plupart des siennes. Je dois arrêter de faiblir, cesser d'être toujours à la traîne, pour le rejoindre et le rattraper définitivement. Je m’agrippe cependant à lui, comme craignant qu'il ne disparaisse juste après ses mots.

Je ne peux rien faire de plus que de promettre de lui obéir. Je ne peux pas le rassurer, je ne peux rien lui offrir et au final, je crois que c'est ce qui me désole le plus. Une fois de plus, je suis l'élément rajouté, celle qui suis, qui restera dans l'ombre de l'autre. Parce que même si j'ai voulu y croire fut un temps, je ne suis pas faite pour la lumière. Si lui brille même dans l'ombre, je reste terne même en plein jour. Et blottit dans ses bras, je suis incapable de réagir davantage.

Merci. De tout mon cœur....

Sa tête venue se caler contre la mienne m'offre un début de sérénité. Non, je ne suis pas vraiment rassurée pour autant mais au moins, il est là, avec moi. Il m'aime, toujours, au moins autant que je l'aime et finalement, n'est-ce pas cela le plus important? Je reste profondément blottit dans ses bras le temps de retrouver un souffle et un rythme cardiaque plus calme avant que ce ne soit de nouveau lui qui brise le silence.

Nos vies sont si compliquées, si imprévisibles. Ce que nous arrivons à accomplir n'est pas toujours à la hauteur de nos ambitions, même les plus simples. Nous ne vivrons peut-être jamais comme une famille normale, nos rêves et nos projets ne s'accompliront peut-être jamais et nous perdrons peut-être un jour l'espoir d'être heureux ensemble.

Mais je sais que je n'arrêterai jamais de me battre, même dans le désespoir ou la douleur, pour te rendre heureuse. Je ne cesserai jamais de te chercher quand tu es loin de moi. Je pense toujours à toi et à un moyen de te voir. Alors il peut se dresser mille obstacles devant moi, je me battrai, et je n'abandonnerai jamais. Jusqu'à ce qu'ils tombent tous, et jusqu'à ce qu'on puisse être ensemble, et vivre ensemble. Jusqu'à ce que je puisse te dire ces mots.

Un sourire un peu timide est revenu sur mon visage. Moi aussi, je suis prête à me battre de nouveau. Pour toi, pour les enfants, pour nous. Pour cet avenir dont nous avons rêvé et qui pourrait encore se réaliser un jour. Qui sait, tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Alors moi aussi, je vais y croire et tout faire pour le rendre réalité. A ma façon, avec mes méthodes mais toujours avec un seul objectif à poursuivre. Lui.

Mais il me relâche pour venir poser un genou à terre devant moi avant de serrer ma main dans la sienne. Sa dernière phrase avait en effet laissé comme une question en suspens et, une seconde, je repense à cet événement raté, qui m'a tant coûté et me coûte toujours autant. Et mes yeux s'écarquillent un instant de surprise.

Moi, David, je te prends, toi, Naoto, comme épouse, telle que tu es. Et je promets de t'aimer, de te respecter, de t'encourager et t'aider à travers les embûches et les triomphes de notre vie, à tous les deux. Je m'engage avec amour et loyauté, à partager tes joies, tes bonheurs, tes tristesses, tes peurs, tes forces et tes faiblesses, à respecter la promesse que j'ai faite devant ton frère, et à vivre avec toi le reste de ma vie.
Alors attends-moi.

"- Toute me vie et même plus s'il le faut. Je t'attendrais et te guetterais, je saurais être là pour toi, dans la joie comme dans la peine, dans le bonheur comme dans la douleur, pour partager tes rires et tes larmes, tes réussites et tes erreurs. Pour t'offrir ce que j'ai de meilleur même si cela ne vaut pas grand chose et toujours te prouver mon amour inconditionnel. Alors moi, Naoto, je te prends, toi, David, comme époux, tel tu as été, que tu es et que tu seras."

Je suis en larmes, mon sourire noyée par les perles que j'ai tentées vainement de retenir. Les mots sont sortis tous seuls et même si je avec du recul je me trouverais minable, je m'en moque. Je l'aime, c'est définitivement acté aujourd'hui. Et je me laisse tomber à genou pour venir le serrer au plus près de moi. Mon cœur et mon même elles aussi ont besoin de le sentir si proche, si vivant. Je viens l'embrasser, avant de le fixer avec un peu de recul, perdu entre ce reste de frayeur encore présent et ce véritable baume au cœur qu'il vient de m'offrir.

"- Et sache que si un jour tu devais tomber.... Ce sera dans mes bras...."

Je ne mourrai pas autrement.

Comme je voudrais y croire, en être persuadée. Mais je ne t'imagines pas dans un lit ni même ayant réussi à rentrer pour finir par t'éteindre au moins apaisé d'avoir pu me retrouver. Tu es un homme d'action, un être de mouvements que rien ne peut arrêter. Et j'ai tellement ne chance de ne pas pouvoir être là pour toi. Alors, je me console en me jurant d'être au moins toujours là pour eux. Ses lèvres reviennent se poser sur mon front avec douceur et tendresse alors que notre étreinte s'éternise. Si seulement le temps pouvait s'arrêter en cet instant.

Je suis désolé. J'ai gâché ton repas. Mais nous devrions le finir. Tu as besoin de force.

"- Tu n'as rien gâché, loin de là. Mais je suis d'accord pour le repas. Car il y en a deux qui risquent de réclamer très prochainement."

Je jette un coup d'oeil amusés aux jumeaux qui pour le moment sont d'un calme olympien mais maintenant, je commence à avoir l'habitude. L'heure est proche. Nous nous relevons et repassons à table. Finalement, cette assiette qui me dégouttait plus tôt me fait envie à présent et je la mange de bon appétit alors que, les dernières fourchettes avalées, Hana commence à se mettre à pleurer, ce qui me tire une léger sourire.

"- Notre fille est une véritable horloge. Et elle aussi à faim. "

Je me contente de me lever et de retourner dans le salon avant de la sortir de son berceau pour la prendre dans mes bras. Même si elle se calme un peu, elle ne cesse pas de chouiner. J'ai inviter David du regard à venir nous rejoindre, après tout, ça aussi, c’est un moment en famille. Puis je m'assied sur le canapé avant de déboutonner ma chemise et de libérer mon sein que la petite vient chercher avec une réelle avidité.

"- Eh, doucement, toi. Il ne va pas s’envoler. Gourmande, va."

David me rejoint et tandis que je m'occupe de subvenir aux besoins alimentaires de notre fille, mon fiancé vient s'installer à côté de nous, venant prendre Julian dans ses bras et jouer avec lui tandis que Hana se repaît joyeusement et goulûment. Je jette de temps à autre un coup d'oeil sur les deux hommes de ma vie assis à mes côtés mais la demoiselle se débrouille toujours pour accaparer toute mon attention. Elle, je n'ai pas hâte qu'elle fasse ses dents, je sens que je vais avoir droit à quelques coups de dents.

Pourtant, ce que j'aperçois est vraiment ravissant. David est d'une tendresse incroyable envers Julian et cela me met du baume au coeur. J'entends également gazouiller joyeusement notre fils et l'entendre ainsi babiller me tire un sourire supplémentaire. Même si toute mon attention est portée sur Hana dans mes bras, que je couve d'un regard tendre, je reste très attentive à ce qu'il se passe du côté de mes deux grands garçons.

Oui, mon grand, je te vois. C'est juste que ta mère est si belle. Tu auras ses yeux, et sans doute les mêmes cheveux. Tu seras un joli garçon, comme ta sœur sera très jolie fille, grâce à elle.

"- Hana a déjà ton regard et tes cheveux. Avec ça, il va falloir la surveiller car elle aura forcément beaucoup de succès auprès des garçons de son âge. Le charme français, sans aucun doute. "

J'ai rougi malgré tout sous son compliment. Je ne me sens pas belle, à peine un peu plus féminine du fait d'être devenue maman mais rien de plus. Mais quand David est là, avec moi, j'ai toujours l'impression d'être tellement mieux que ce que je ne suis vraiment. Plus jolie, plus forte, plus maline. Pour lui, je deviendrais la meilleure, pour qu'il ne puisse plus jamais rien nous arriver. Ni à nous, ni à eux deux.

Hana termine de téter et à peine l'ais-je déposée contre mon épaule qu'elle fait son rot de bébé, comme une gentille fille bien élevée. Puis, elle gazouille en battant des bras en direction de son père, comme pour bien lui signaler qu'elle est un peu jalouse de ne pas être dans ses bras alors que Julian, si. Je la reprends dans mes bras plus traditionnellement tandis qu'elle chouine un peu, se manifestant bien plus que son frère, toujours sage.

"- Je crois que tu es réclamée par cette petite demoiselle. Me céderas-tu notre fils le temps de t'occuper un peu d'elle comme tu l'as si bien fait avec lui?"

Qui sait, peut-être que Julian préférera rester encore un peu avec son père, quitte à manger plus tard. Ils ont l'air de tellement bien s'entendre tous les deux. A croire que David était fait pour être Père.

Arrête, je vais la mettre aux arts martiaux et lui apprendre à avoir peur des autres garçons.
C'est tellement irresponsable. Pardon Hana. 

"- La première partie de l'idée n'est pas forcément mauvaise. Mais vu son caractère, et sachant de qui elle tient, je doute qu'elle ai peur de qui que ce soit. "

J'avoue que l'idée de leur apprendre les arts martiaux ou une autre discipline de ce genre me parait plutôt une bonne idée. Finalement, ne pratiquais-je pas moi-même l'aïkido ainsi que des bases de judo apprises dans mon enfance? Et puis, dans ce monde, apprendre à se défendre ne sera jamais une mauvaise chose. Mais ils n'avaient pas encore un mois, ils avaient encore tout le temps de voir venir, et nous aussi.

Hana réclamant clairement son père, nous faisons un échange de bon procédé, mon fils venant atterrir dans mes bras tandis que David récupère sa fille avec lui. Et déjà, la petite sourit et gazouille joyeusement, parfaitement éveillée. De mon côté, je viens caler un instant Julian contre ma poitrine et tout seul, il se met également à réclamer, de façon bien moins avide que sa jumelle. Et alors que le petit commence lentement à téter à son tour, on attention est attirée un instant par David et Hana.

Alors? Comment était ce repas? 

Et déjà, la voilà qui rigole alors que David la cajole avec tout l'amour possible. Ses gestes sont doux et assurés, Hana en pleine confiance, ce qui prouve bien qu'il est parfaitement dans son élément en cet instant. Avec sa famille.

Rien à faire, je suis complètement gaga de mes enfants...
...Et complètement dingue de ma femme.

Je rigole doucement lorsqu'il vient m'embrasser, le sourire d'Hana étant vraiment le même que son père. Cela ne semble pas perturbé Julian qui continue de boire tranquillement, curieux malgré tout de ce qui se passe autour de lui. Son regard écarquillé cherche à comprendre un peu mieux et même en mangeant, il esquisse un brin de sourire de sa bouche pleine.

"- Sache que c'est parfaitement réciproque. Pour moi, tu le savais déjà mais maintenant, tu as en plus la preuve que tes enfants t'adorent."

Je me laisse un peu tomber sur le côté, venant me caler un peu plus contre l'épaule de David tandis que Julian termine son repas. Je ferme les yeux un instant, profitant de cette ambiance si douce et sereine. Je n'ai même pas l'impression que David ait jamais été aussi franc et naturel depuis que nous nous sommes rencontré. Les enfants seront sans aucun doute source d'obligations nouvelles voir de complications éventuelles pour nous mais ils auront réalisés un miracle que rien n'a jamais pu égaler. Ils nous ont rendus heureux. Tous les deux.

"- Je sais que je te l'ai déjà dit mais... Tu es la meilleure chose qui me sois arrivée. Et ils en sont la preuve vivante. Tu es vraiment quelqu'un de merveilleux, n'en doute jamais. "

Je me tord le cou pour parvenir à déposer juste une seconde mes lèvres sur les siennes, avant de revenir à Julian, qui nous observe toujours de son air curieux et attentif. Oui, toi aussi, tu es craquant.

"Sache que c'est parfaitement réciproque". Et tu es aussi ce que j'ai de plus précieux, avec les enfants.  

Je profite du bras de David qui vient m'enlacer pour me caler encore davantage contre lui. Ces moments sont si rares qu'ils n'en sont que plus précieux. Et puis, ils sont les premiers. Nos premiers véritables instants en famille, ensemble, juste tous les 4. Alors ceux-là ont un goût tellement doux et sucrés que je tiens à m'en rappeler. Julian dans mes bras gazouille au contact de la main de son Père sur sa tête tandis que sa sœur commence à bâiller.

J'en connais une qui ne va pas faire long feu avant d'aller dormir.  

"- C'est le pouvoir magique de la digestion. Une fois qu'ils ont mangés, ils ne tardent jamais à rejoindre le pays des rêves. "

Par réflexe, je me suis mise à bercer Julian qui somnole déjà doucement alors que sa soeur semble lutter contre le sommeil. Elle est déjà tellement accroc à son papa qu'elle ne veut plus le quitter visiblement. mais Morphée reste le plus fort et la voilà déjà qui s'endort malgré tout, blottit de son mieux contre David alors que les dernières notes de la chanson des poissons résonnent et achèvent d'emporter Julian avec sa jumelle.

Regarde! Elle s'est endormie!

"- Julian aussi. Je crois que pour eux, la soirée est terminée."

Je dépose une bise sur le front d'Hana, complètement agrippée aux mailles du pull de son père tandis que je me redresse avant de déposer Julien dans son berceau. Il chouine un instant, le temps que la peluche soit déposée à ses côtés et la couverture remontée, avant de retrouver tout son calme. Puis, je me tourne vers David, un brin amusée.

"- Maintenant, je vais te laisser te débrouiller pour faire en sorte que ta fille te lâche. Parce qu'elle a l'air bien accrochée, mine de rien.
Attention jeune fille, je veux bien partager mais ton papa est à moi avant tout. "

Mais mon regard attendri et mon ton délicat prouvent bien que je ne suis pas sérieuse. Elle aussi à le droit de profiter de la présence de David. Même si quelque part, je suis un peu jalouse. Moi aussi, j'aimerais bien être simplement lovée dans ses bras.

Et à jamais.  

Ses mots me touchent, laissant monter le rouges à mes joues tandis que je l'observe avec curiosité. Alors, comment va t'il s'y prendre pour la faire lâcher prise? Parce que j'avoue avoir déjà essayé et je ne m'en suis que rarement sortie avec les honneurs. Hana à une poigne de fer pour son âge. Et j'ai tellement peu envie de risquer de la réveiller qu'en général, j'abdique. Mais lui, que fera t'il? Après tout, David n'est pas moi.

Aussi, je reste attentive à ses gestes et, en comprenant ce qu'il est en train de faire, je retiens un léger rire. Ah oui, carrément? Remarque, c'est une option comme une autre. En tout cas, il n'a pas l'air d'avoir de grandes difficultés à ôter son pull pour finalement venir le laisser à Hana qui sommeille comme une bienheureuse en le serrant fort contre elle tandis que son père se retourne vers moi, souriant et fier de lui.

Problème résolu!

"- Félicitation. Mais ce n’est pas comme si je doutais encore de te savoir plein de ressources. "

Est-ce que je suis jalouse? Peut-être un peu. De quoi exactement, je n'en sais rien. Et puis, est-ce réellement de la jalousie? N'y a t'il pas autre chose? Toujours cette culpabilité qui, au fond de moi, me rappelle que  c'est par ma faute qu'il ne peut pas demeurer avec nous. Il semble tellement heureux avec eux. Mais déjà, c'est moi qu'il vient prendre dans ses bras et je répond à son étreinte sans me faire prier.

Et me voilà revenu à toi.

"- Tu es revenu à moi, ou te suis-je revenue ? "

Oui, cette question n'a aucun sens. Lui pour moi, moi pour lui, nous deux, ensemble, unis. Par quelque chose de beau et de plus puissants que le mariage même. Simplement par nos cœurs et nos sentiments partagés. Sans compter maintenant la présence des enfants. Mais maintenant que le repas est terminé et que les jumeaux dorment, ma crainte revient. Va t'il rester? Ne faisait'il que passer? Alors, venir m'agripper un peu plus contre lui, me blottissant davantage dans ses bras, j'ose la question dont je crains tant la réponse.

"- Et si moi aussi, je refuse de te lâcher, resteras-tu également à mes côtés le temps que je m'endorme? "

J'ai légèrement rougi tandis que mon regard est revenu fixer le sien. Oui, tu me manques, tu n'imagines pas à quel point. Mais je sais aussi que je n'ai pas le droit de t'imposer tout cela. Pourtant, malgré tout, je t'aime et mon coeur te le crie à sa façon. Moi aussi, j'ai besoin de toi.

Le résultat reste parfait dans les deux cas.

Oui, seul le résultat comptait au final. Et ce dernier me convenait à merveilles. Dans ces instants de partagent connus et n'appartenant qu'à nous, je pouvais trouver la force de tout oublier des douleurs et des blessures qui guettaient toujours. Car je ne pouvais pas ne pas oublier que David ne resterait pas. Et même si je savais qu'il était inconscient de ma part de réclamer sa présence, je ne pouvais pourtant pas m'en empêcher.

Dois-je te chanter une berceuse et te border aussi?

"- Si cela te fait plaisir, je ne dirais pas non. "

Je rigole doucement, venant voler un baiser à ses lèvres sucrées avant de laisser ma tête se caler davantage dans le creux de son cou. Sa peau, son odeur, cette force qu'il dégage. Tout en lui m'avait manqué. Tellement. Mais après quelques instants, je me détache malgré tout de lui, venant récupérer le berceau de Julian avec une délicatesse rare.

"- Tu connais la maison mais tu m'aides à les couchers comme il faut? Il seront mieux dans leur chambre, tu ne crois pas? "

Oui, c'est avec moi que je veux qu'il reste mais en les emmenant dans leur chambre, nous nous rapprocherons aussi de la notre. Enfin, de celle que nous devrions partager si nous étions une famille comme les autres. Cette chambre de parents dans laquelle seule, je n'ai encore jamais réussi à dormir, restant en générale dans un coin de celle des jumeaux ou somnolant en journée sur le canapé. Mais ça, il n'a pas besoin de le savoir.

"- Je te laisse porter Hana? Ou tu veux prendre les deux en même temps? Ce n'est pas évident mais c'est faisable malgré tout, si tu veux essayer. "

Je préfère éviter de présumer de mes forces. Il ne faut pas les réveiller.

Je l'observe se saisir du berceau d'Hana et me suivre à l'étage où se trouve la chambre des petits. Je suis certaine qu'il connait le chemin par coeur, après tout c'est lui qui l'a choisit cette maison. Je marche à pas mesurés et fluides, afin de ne surtout pas risquer de trop remuer le berceau pour que Julian continue de dormir.

Une fois arrivée dans la chambre, je viens déposer le berceau de Julian à côté de son lit, jumelé à celui de sa soeur. Ainsi, ils restent proche sans être vraiment séparés mais en gardant malgré tout de la place pour chacun d'entre eux. Je n'ai rien touché à ce que David avait mis en place depuis l'achat de la demeure alrs il devrait s'y reconnaître.

Elle leur convient? Ils y dorment bien?

"- Ils font de très bonnes nuits, oui. Et à ma connaissance, à part une perte de doudou qui avait réveillé Julian en pleine nuit, ils ne font pas de cauchemar. Leur sommeil est tranquille. "

Après tout, ils ne parlent pas. Peut-être ne font-ils que des cauchemars et que moi, bêtement, je ne suis pas capable de m'en rendre compte? Mais ils ne semblent pas craindre ce lieu ils aiment même si retrouver alors, je préfère penser qu'ils s'y plaisent. Je sors doucement Julian de son berceau avant de venir le glisser sous ses draps, le bordant avec attention tandis qu'il gazouille un peu, sans même le savoir. je me demande bien ce qu'il peut vouloir raconter.

"- Tu as vraiment très bien choisi cette maison. Et la chambre est vraiment on ne peut plus pratique pour les jumeaux. Encore une fois, tu as tout prévu. "

La lumière de la pièce est tamisée pour ne pas risquer de les réveiller. Je laisse David s'occuper de sa fille, reculant un peu. Depuis l’entrebâillement de la porte, cette vision qui s'offre à moi est juste magique. Le père de mes enfants avec eux. Un détail, quelque chose qui devrait être tellement habituel au lieu de devenir à ce point exceptionnel pour nous. Mais maintenant que les enfants dorment, je sens comme une pointe de fatigue poindre et me tirer un bâillement discret.

"- Il est l'heure de laisser les petits poissons se reposer. "

Si David n'était pas là, je me serais installée sur le siège à l'entrée de la chambre, sur lequel je me serais sans doute endormie une fois de plus. Mais là, je reste éveillée à la fois attendrie et un peu inquiète. Il a dit qu'il resterait mais je sais bien que ce n'est que reculer l'échéance de notre séparation obligatoire. La vie est injuste mais tant qu'il reste là, encore peu, je ne veux pas y penser.

Tu avais d'autres soucis. La grossesse n'a pas été facile pour toi. Il fallait bien que je travaille à ma manière sur leur arrivée.  

Je ne peux m'empêcher de sourire à ses mots mais ce dernier est à la fois un peu joyeux certes mais aussi rempli de mélancolie. Si j'avais su, il y a tant de choses que j'aurais fait autrement. Tellement de situations que j'aurais gérée différemment, de mots que j'aurais dit, de peurs que j'aurais gardées pour moi afin de ne pas les voir se réaliser. Mais malgré tout, je ne regrette pas le résultat. Certes la situation était loin d'être optimale, encore moins celle dont nous rêvions tous les deux, mais au moins nous sommes vivants, tous les deux, et capables encore de nous retrouver pour partager ensemble des moments heureux en compagnie de nos enfants. Et je prie Kyu, Bey, le ciel et Dieu seul sait quoi encore pour que les choses puissent encore continuer de la sorte. Voir s'améliorer? Si seulement.

Il serait temps que toi, tu te reposes.

"- Je ne vois vraiment pas ce qui te fais dire ça. "

Oui, c'est une gentille provocation de ma part. Je le sens, que je suis fatiguée alors que normalement, je n'ai plus le besoin humain de dormir. mais les jumeaux pompent encore dans mes propres forces alors je sais que je devrais céder au sommeil. Mais pas maintenant, pas encore. Pas tant que je peux profiter de sa présence, si rare et si désirée.

"- Laissons-les dormir tranquillement. A leur âge, le sommeil est primordial. "

je referme doucement la porte, la laissant un minimum entrebâillée malgré tout pour ne pas qu'ils risquent de se sentir enfermés. Puis, je viens prendre David dans mes bras et l'embrasser doucement, avant de revenir poser mon nez dans cou. Oui, chaque contact, la moindre sensation que me procure sa proximité m'arrache un frisson. Je sais qu'il doit partir mais je ne veux pas le voir déjà disparaître alors... Oserais-je le lui demander?

"- Tu parlais de me border tout à l'heure mais... Je ne suis pas encore couchée. Et je n'ai pas envie d'y aller tout de suite... Pas toute seule... "

Je rougis, ma tête toujours nichée dans son cou et mes paroles sont à la fois tentatrices et un peu malhabiles. Je me sens tellement idiote de demander cela. Mais je le veux tellement. Profiter encore un peu de lui. Seulement tous les deux, lui et moi. Le temps d'oublier le reste du monde et les dangers qui ne cessent de peser sur nous. Juste le temps de quelques heures.

Alors allons-y ensemble. 

Ses lèvres qui viennent sceller les miennes sont comme un morceau de rêve arraché à cette réalité trop cruelle qui nous malmène à longueur de temps. Je lui rend son baiser, avec plus de fièvre déjà sans pour autant le dévorer. Pas encore. Mais mes bras l'enserrent toujours et je profite odieusement de l'absence de son pull pour parcourir toute la surface de sa peau laissée à ma portée. Et de façon idiote, je ne peux m'empêcher d'y rechercher les cicatrices et autres marquent qui y dessine cette vie qui est la sienne et dont je en partie responsable.

Certaines sont récentes, je peux les sentir sous mes doigts. Soignées de façon humaine, par pas la magie dont il pourrait disposer à son QG. Par ma faute. Puisqu'il est devenu Solitaire. Mais non, tu ne seras jamais seul pour autant car moi, je serais là, toujours. Je te le promets.

Toujours entre ses bras, je recule. Doucement, à pas lents et mesurés pour m'assurer qu'il ne tâche même pas de se délivrer de mon étreinte. Le couloir n'est pas un lieu pour ça. Les bébés sont tout à leurs rêves, qu'ils laissent ceux des adultes à leurs parents qui se retrouvent enfin.

Mes lèvres ont quittés les siennes, venant mordiller son oreille et son cou tandis que ma main a trouvé la poignée de la porte dans mon dos et l'a ouverte. Ce n'est pas la chambre, pas encore. Erreur ou volonté cachée, c'est dans la salle de bain que nous sommes à présent enfermés tous les deux. Et alors que mon regard revient enfin croiser le sien, un éclat nouveau y brille. Malice, timidité, mélange subtil des deux? Toujours est-il que mes joues sont toujours un peu rougies lorsque je finis par m’exprimer.

"- On ne peux pas aller se coucher comme ça. Je ne serais pas digne d'être ta femme si je te laissais dormir tout habillé. Tu ne crois pas?"

Et doucement, lentement, mes mains viennent saisir le bas de son débardeur pour venir le remonter le long de son corps musclé et si bien dessiné, que je connais par coeur tout en le redécouvrant à chaque seconde, avant de le lui ôter, le laissant tomber sur le rebord de la baignoire toute proche. Un instant, je profite de son torse simplement offert à ma vue avant de revenir me coller à lui, mes mains s'attardant cette fois sur la ceinture de son pantalon qu'elles défont presque comme par magie. L'attache défaite, le vêtement n'a pas besoin d'aide autre que la gravité pour rejoindre le sol tandis que de nouveau, je m'écarte un peu de David.

Mais il n’est pas question de le fuir, loin de là. Plutôt de gagner l'espace nécessaire pour mieux le rejoindre. Ma chemise me semble soudain présenter une résistance inconnue et malgré ma bataille contre l'un des boutons, elle aussi finit par quitter ma peau avant que je ne retire le pantalon qui couvrait encore mes jambes. En sous-vêtements, je ne me sens malgré tout pas à l'aise, les paroles de Fox revenant parasiter mon esprit. Lui et ces conneries d'histoires de vergetures, pour le coup, j'en aurais presque peur.

Alors, histoire de ne pas trop risquer de le choquer, si jamais mon corps est vraiment devenu aussi difforme que ce que l'autre imbécile aurait réussi à me faire croire, je commence à faire couler l'eau, jouant avec le mitigeur pour en déterminé la température idéal.

"- Pour l'eau... Tu préfères qu'elle soit... tiède ou... chaude?"

 Crois-moi, à ce rythme, il ne te restera bientôt plus de vêtements.

Comment fait-il pour simplement réussir un tel frison par ses simples mots? Je rougis davantage mais ne cesse pas pour autant ma tâche. Nous mettre à égalité. D'ailleurs, maintenant que j'y pense, ce doit être une des première fois qu'il me voit avec un soutien gorge, ayant délaissée les bandes afin de pouvoir venir allaiter les jumeaux avec plus de facilité. Enfin, maintenant que nous en sommes là je ne trouve rien de plus stupide à dire que de lui demander comment il préférerait la température de la douche. Ridicule.

Je préfère qu'on s'occupe d'autre chose que de l'eau... 

"- Moi aussi..."

Euh, j'ai vraiment sorti ça, moi? Oulà, c'est encore un coup des hormones ou bien? Dans le fond, je crois que je m'en fiche. Ses mains sur ma peau sont si douce et caressantes, tellement agréables. Et son regard est tellement profond, presque abyssal, que je n'ai pas besoin de l'eau qui coule autour de nous pour m'y noyer.

Mes bras reviennent prendre possession de son corps, redessinant du bout des doigts chaque emprunte marque et tatouage qui y figure, comme pour mieux me l'approprier. Il est à moi, oui. je deviens possessive quand il est  mes côtés et ce soir, je ne veux pas le lâcher. Et est-ce un brin de jalousie mal placée ou que sais-je encore mais ce soir, je veux qu'il ne pense qu'à moi. Et que toutes ses autres conquêtes, ses anciennes amantes et autres maîtresses ne soient plus rien pour lui, même plus du souvenir.

Mes lèvres viennent littéralement dévorées les siennes, y cherchant ce qui m'a tant manquer durant son absence. Ce gout d'interdit, ces épreuves surmontées, ces merveilles partagées et notre amour qui a grandi sans jamais faiblir. Je ne me souviens pas bien de mes mouvements, de enchaînements des événement mais je sais que j'ai finis par venir de moi-même ôter les derniers morceaux de tissus qui nous couvraient encore, pour laisse au mieux nos peaux s'enflammer d'elles-même à leur simple contact.

Et même l'eau qui vient doucement couler sur nos corps enlacés, alors que nous voilà comme par enchantement arrivés sous le jet de la douche, ne refroidit en rien nos ardeurs. Oui, il pleut sur nos têtes mais jamais mon coeur, lui n'a été autant à la fête. Tandis que je viens articuler dans un français presque parfait 3 mots très simples mais dont je veux qu'il soit persuadé.

- Je t'aime, David.

Moi aussi, je t'aime. Naoto.

Dieu que ses mots sont doux à mes oreilles. Et si puissants en même temps. Quelques syllabes simplement mises bout à bout se retrouvent à avoir plus de pouvoir que tous les chats magiciens du monde quand je suis dans ses bras. Et cette phrase m'en rappelle une autre, qu'il m'avait glissée la première fois que nous nous sommes unis l'un à l'autre. Il faudrait se prévoir des jours où nous ne sommes pas blessés, ni l'un ni l'autre. On pourra... faire plus de choses. Eh bien, finalement, aujourd'hui, aucun de nous n'était blessé alors, c'était le moment où jamais.

"- Alors faisons.... plus de choses...."

=> Ellipse

L'eau dans la baignoire a sérieusement fraîchi mais je n'ai pas froid pour autant. Pas avec David auprès de moi. Mais il ne serait pas sérieux de demeurer plus longtemps ainsi dans la moiteur qui commence dangereusement à rafraîchir de la salle de bain. Alors, à contre cœur, je quitte les bras de mon compagnon avant l'aider à sortir également de la baignoire pour le laisser se sécher tandis que je fais de même. J'ai les joues toujours très colorées mais mon sourire est immense et mon visage apaisé.  

- Bon, comme tu as pu le vérifier, la salle de bain fonctionne parfaitement. Maintenant, la suite de la visite passera par la chambre à coucher.

Oui, je me la joue fausse employée d'agence immobilière et à mon avis, mon jeu d'actrice doit être vraiment ridicule. Mais au fond, je m'en fiche. Du moment qu'il reste avec moi. D'ailleurs, enveloppée dans ma serviette, je reviens doucement me blottir contre lui, sa chaleur me manquant déjà.

Tandis que je pousse la porte de la chambre, il est évident au premier regard que la pièce est d'une propreté parfaite, presque trop nette. Les draps trop tirés, chaque affaire trop bien rangée  sa place. David n'aura aucune difficulté à se rendre compte de la vérité, lui qui devine toujours tout à mon sujet. Et son sourire qui diminue me prouve que j'ai vu juste.

Tu n'y dors jamais? 

"- Non. Seule, elle me faisait... peur."

Je me suis promise d'être honnête avec lui. Cette chambre est celle d'un couple, d'un mari et d'une femme, de deux êtres qui s'aiment. Et seule à l'intérieur, j'avais peur. Peur de m'imaginer qu'un jour, je serais contrainte de me retrouver seule de façon définitive, au cas où il aurait disparu, pour une raison quelle qu'elle soit. Alors, je reste un peu bloquée devant cette prote que je peine toujours à franchir.
Et soudain, je me sens soulevée de terre avant de me retrouver tout bonnement jetée sur le lit en compagnie de David, qui sourit de nouveau.

Il est pourtant génial, ce matelas! Quans les jumeaux seront grands, on pourra même faire du trampoline dessus! 

"- C'est vrai qu'il est drôlement agréable."

Ou des batailles de polochons, ou les batailles de chatouilles, des petits déjeuners au lit... !

Et me voilà victime d'un attaque de chatouilles de la part de David. Hors, je crains énormément les chatouilles, encore plus qu'auparavant. Alors ma seule défense est de tenter de me trémousser en tous sens pour échapper à ses doigts agiles tandis que de mon côté, je tente de le chatouiller à mon tour comme je peux.  

"- Arrête... ahahah... Pitié... Grâce... Je demande grâce... "

Non, je n'arrive à rien à part à rigoler à gorge déployée. J'ai perdu ma serviette d'ailleurs dans la bataille mais je ne m'en souci guère. Je suis tellement heureuse de pouvoir simplement profiter de sa présence, d'avoir la chance de le garder auprès de rien, ne serait-ce que pour une simple nuit. Alors, comme je ne parviens plus à me défendre, je tente autre chose. Je viens l’attraper pour le serrer contre moi le plus fort que je peux.

- Et une attaque... de câlins.... ça compte?