♦ BlackJack était plongé dans la lecture d’une lettre qu’un futur patient lui avait envoyé. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas eu une opération à réaliser. Les blessés graves pouvant payer les sommes faramineuses qu’il exigeait ne courraient pas les rues. La lettre lui demandait simplement de venir quelque part à Palema afin de rencontrer un homme soi-disant extrêmement malade. S’arrachant à son travail, il observa par la fenêtre la forêt toute proche. Il allait bientôt devoir y retourner, certains ingrédients, notamment des plantes médicinales, à ses traitements commençaient à manquer.

Il jeta un dernier coup d’œil à la lettre et la posa sur son bureau, parmi d’autres papiers divers. Que c’était ennuyeux d’avoir à se déplacer. Il préférait quand les patients venaient le trouver.

Le médecin se leva, traversa le salon, faisant craquer le parquet, et sortit s'installer sur sa rocking-chair. Il ressemblait peut-être à un vieil homme, ainsi assit, mais c'était son endroit favori.

Il observa le petit sentier désert, espérant apercevoir un visiteur, qui le sortirait de son ennui.

♦ « Tiens, bonjour ! »

BlackJack leva la tête, regardant d'un air blasé l'ahuri se tenant devant sa cabane. N'avait-il pas lu la pancarte ?

« Hum... Excusez-moi, j'ai perdu mon chemin. J'ai vu cette cabane, et donc, je suis parti dans sa direction... »

Le médecin n'en croyait pas ses oreilles... Depuis quand était-il guide forestier ? Il décida tout de même de l'ignorer superbement, peut-être allait-il partir..

« Ha, et je m'appelle William. »

Seuls les idiots ne changent pas d'avis. BlackJack se leva, descendit son Perron et avança lentement jusqu'à cet homme inconnu. Il n'avait que faire d'une personne qui ne lui rapporterait rien.

« Écoutez-moi attentivement, le lépreux. » commença-t-il une fois près de lui, remarquant son masque. « Je suis chirurgien. Pas guide touristique. Et je ne supporte pas que l'on m'interrompe dans mes pensées parce qu'on a le sens de l'orientation d'une pierre. Alors, si vous n'êtes pas un patient qui a les moyens de se payer mes services, vous pouvez dégager ma propriété. »

♦ "Joli chaise à bascule ! Vous m'ouvrez ? J'aimerai discuter un instant !"

Le pestiféré s'incrustait joyeusement chez BlackJack, certainement dans l'intention de l'énerver. Ce dernier savait être très peu chaleureux, mais la majorité du temps, un tel discours d'accueil effrayait suffisamment les indésirables pour qu'ils déguerpissent fissa.

Le médecin resta parfaitement calme et stoïque. Il avait déjà eu auparavant de ces situations où la personne n'avait que faire de son discours de bienvenue. Il savait se maîtriser, même si cela l'énervait profondément.

"Entrez donc si vous voulez discuter. Je n'y vois aucun inconvénient, tant que je ne perds pas mon temps."

BlackJack grimpa les quelques marches et rentra chez lui, attendant que l’énergumène le suive. Après, tout cela pouvait être intéressant.

♦  "Mais je vous en prie, expliquez-moi un peu ce qu'un chirurgien fait en plein milieu de la forêt. Et quel est votre nom, mon bon docteur ?"

BlackJack ne fit pas attention au fait que ce William ne lui témoignait aucun respect.

"Je me nomme BlackJack, et je vis ici car je ne supporte pas la ville. Ceux qui ont réellement besoin de mes services n'hésitent pas à venir."

Tout en répondant, il s'assit sur son canapé, invitant son invité à faire de même sur le fauteuil, en face de lui.

"Que me voulez-vous ? Je ne pense pas que vous vouliez entrer simplement pour connaître mon nom..."

♦ « Vous êtes chirurgien, pas vrai ? Combien il vous faudrait pour m'effacer une marque sur le dos de la main ? »

William retira son gant et montra sa main à BlackJack. Une étrange marque spiralée y était dessinée, comme un tatouage.

« Pas pour tout de suite, bien entendu. Je veux juste que vous me donniez vos prix. Pour plus tard. »

Le médecin prit quelques minutes pour examiner la main marquée, croisa les jambes et fixa son invité.

« Vous souhaitez enlever ce tatouage ? Sachez que les greffes et tout ce qui est dermabrasion ne sont plus utilisées. Aujourd’hui, le monde de la médecine privilégie ce qu’on appelle le laser pigmentaire, c’est-à-dire que je vais détruire les particules de pigments présentes dans la peau. Et sachez que ça sera douloureux, mais aussi long, car une seule séance ne suffira pas. Le traitement peut durer jusqu’à deux ans, mais vu la taille de votre tatouage, je ne pense pas que ça ira jusque là. Parlons tarifs maintenant. Je fais payer séance par séance, pas de crédit. Hmm... Je dirais une séance à $10 000. »