Walmart de Palema:

Ah, le Walmart. Un lieu fantastique où l’on peut trouver de tout, dans un seul endroit. Vous avez besoin de vêtements ? Vous pouvez aller chez Walmart. Vous avez besoin de nourriture ? Vous pouvez aller chez Walmart. Votre vaisselle s’est brisée et votre coutellerie a été volée ? Vous pouvez aller chez Walmart. Vous voulez un film ? Walmart. Ce lieu est une véritable mine d’or de produits et elle fait des centaines de milliers de clients satisfaits chaque mois. Dit comme ça, le Walmart semble être un lieu génial, une véritable utopie. Par contre, ce monde fantastique est aussi un royaume où une forte hiérarchie s’est installée. Les clients n’en savent rien, ils sont trop préoccupés par leurs achats. Dans l’ère médiévale, on parlait de rois et de reines. Ceux-ci possédaient richesses et ils avaient le pouvoir. Ils avaient le contrôle.

Maintenant, ce système est encore en place à plus petite échelle. La démocratie a remplacé la monarchie comme régime politique, elle ne l’a pas détruit. Chez Walmart, on ne parle pas de rois ou de reines, mais plutôt de gérants et de gérantes de succursales. Ces êtres tyranniques ont le contrôle sur tous leurs employés. Sous la gouverne totale des gérants, il y a les associés de sections aussi appelés les gérants de quartier. Leur rôle est de s’assurer que les employés fassent ce qu’ils doivent faire correctement. Les gérants de sections sont comme les seigneurs et les employés sont comme les paysans. Chacun écoute son supérieur. Cependant, il y a une catégorie d’employé qui n’a pas encore été mentionnée. Il s’agit des commis de paniers ou simplement commis. Ceux-ci sont les esclaves dans la hiérarchie Walmart. Ils font le sale boulot. Ils s’occupent des paniers. Ils sont à l’accueil où ils doivent sourire aux clients en leur tendant le chariot, ils doivent aller dehors ramener les paniers. Ils se promènent dans les stationnements pour aller chercher les pauvres caddies qui ont été abandonnés loin des enclos. Ils font cela, sans relâche et ce, peu importe la température. En plein orage on peut les voir, tirer leurs paniers comme des chevaux avec une charrette. Et, ce n’est pas tout.

Voyez-vous, les commis de paniers, les « esclaves », font plus que leur boulot. Ils sont au bas de la hiérarchie, au fin fond de la chaine alimentaire. Pour survivre, ils doivent se plier aux ordres de leurs supérieurs. Quand un employé fait une connerie et qu’il ne veut pas la réparer, il peut simplement se rendre à l’une des bornes téléphoniques, à entrer le code le 738 et ensuite donner leur message.

« Un commis est demandé… »

Leur message pousse toujours un commis de panier à se rendre dans l’un des départements et de faire ce que l’employé lui demande. Les commis de paniers sont des esclaves.

Jason Reed travaille au Walmart depuis déjà quelques années. Jamais il n’a eu l’occasion de grimper dans la hiérarchie. Il se tient là, à l’entrée du Walmart devant une foule de paniers en en ayant un dans les mains, prêt à accueillir un client, prêt à lui donner un panier. Jason était de bonne humeur malgré son poste de merde. Ses graffitis commençaient à être vus, il avait lu un article sur lui dans le journal ! La flèche. Ce nom lui allait bien.

Le bruit des portes automatiques se fit entendre. Un homme entre dans le magasin. Jason Reed sourit et poussa jusqu’au client le caddie.

« Bonjour et bienvenue chez Walmart ! »

Walmart.
Eh merde.
Je ne pensais honnêtement pas me retrouver un jour dans un magasin de ce genre. Un intellectuel comme moi ne saurais apprécier une institution tel que le Walmart, sans raffinement, basé sur la consommation et manipulation capitaliste de masse, dont leurs seules qualités de vente sont leurs bas prix, accommodation bien plaisante d’une surproduction d’employés du tiers-monde exploités.
Et pourtant, aujourd’hui, je compte bien dépenser de l’argent ici, dans cette création du diable. Pourquoi? Car l’argent est… Disons que mon plan de devenir milliardaire implique aussi de limiter mes dépenses au minimum, et aussi que, bien que j’ai fait ce qu’il faut de dévier la police de mes traces depuis que j’ai tiré une balle dans la tête de mon frère Ottavo, je n’ose pas acheter des choses en ligne ou dans des magasins spécialisés, aux registres mieux entretenus que ceux d’une succursale dans le genre de Walmart. Et j’ai besoin d’acheter des choses très diversifiés…

Le problème est que, autre que le fait que je dois mettre de côté mes valeurs morales de justice social, est que :
Je ne suis jamais entré dans un Walmart.

Ayant vécu toute ma vie dans le Quartier Ouest, lors de mes sorties, jamais une seule fois me suis-je promener dans un bâtiment du genre.
Mais bon, si 99% des américains savent y naviguer, la majorité de ceux-ci étant des attardés de première, un génie tel que moi y réussira surement sans effort!
N’est-ce pas?

Je suis vêtu de mon horriblement détruite veste blanche de laboratoire, bien qu’elle soit maintenant tellement tâchée d’ordure et de mixtures inlavables qu’elle ne respecte aucune loi de la stérilité scientifique requises à son utilisation première. J’entre tel un clodo dans le bâtiment, et je me fais accueillir par un jeune homme souriant.

-Bonjour et bienvenue chez Walmart !

Urgh, est-ce que c’est son travail que de me dire ça? Triste vie.
J’empoigne le caddie qu’il me tend, et je lui grommelle quelques salutations. J’espère qu’il ne va pas me demander ce que je viens foutre ici, ou proposer de m’aider à trouver mon chemin. Je m’en sentirais vachement insulté : comme je l’ai déjà dit, des imbéciles peuvent naviguer ce magasin, ce n’est très certainement pas moi qui va demander de l’aide et des indications.
De plus, mes achats étant un peu… particuliers, je n’ai pas envie qu’on envahisse ma vie privée.

À trois ou quatre mètres de distance du garçon, une autre employée : une jeune fille qui j’imagine beaucoup pourraient trouver jolie, mais à mes yeux à l’air d’une lourde idiote. Elle a des piercings partout dans le visage et parle avec une autre fille qui me fait dos, aux cheveux aussi noirs que la première. Bien que je ne sois pas vraiment plus vieux qu’elles, je m’en désintéresse et passe mon chemin.
Il y a depuis bien longtemps déjà que les jeunes de mon âge, naïfs et manipulables, ne m’intéresse plus.

Jason était habitué à ce que les clients prennent son panier sans rien dire. Pourtant, un simple merci ne coûte pas grand-chose et c’est toujours apprécié. Jason reprit un autre panier, prêt à ce qu’un autre client ait « besoin » de ses services. Personne n’était en vu, alors il en profita pour aller parler à Léonie. Léonie avait 19 ans, 1 an de plus que lui, et elle avait eu son premier piercing à 15. Depuis, elle s’en faisait faire 2 par années. Son visage donnait l’image d’un poisson qui aurait été attrapé par plusieurs pêcheurs en même temps. Elle avait un anneau dans le nez en plus d’avoir les oreilles, les joues et les lèvres percées. Malgré tout cela, elle était jolie. Elle faisait partie de la bande d’amis de Jason, la bande de vandales.

Jason se rapprocha, mais il décida de faire demi-tour. Elle parlait à Sarah. Merde, Jason détestait Sarah. Celle-ci travaillait dans le département de pharmacie, elle devait être en pause. Elle avait toujours des histoires bizarres à raconter comme les expériences sexuelles d’un de ses amis homosexuels. Elle donnait toujours trop de détails. Si on écrivait cette histoire sur un forum, l’article serait supprimé. En plus cela elle était narcissique. Une fois, Jason a entendu un client lui dire « Wow t’es jolie toi » et elle a répondu avec un, « Je sais ». C’était une fille de riche qui travaillait surement sous ordre de ses parents. Une petite princesse. Jason ne pouvait pas la tolérer alors il préféra rebrousser chemin.

Ça tombait pile au moment où un client arrivait, il avait l’air pressé. Jason fit un mini sprint jusqu’au panier pour le pousser vers le client.

« Bonjour et bienvenue chez… »

« TAGUEULE » dit le client en s’emparant du panier et en s’aventurant dans le royaume magique du Walmart.
Jason resta planté là. C’était quoi son problème à lui ? Est-ce que j’ai fait quelque chose pour mériter ça ? Le client devait simplement vivre quelque chose en ce moment et être bête avec un commis de panier lui a fait du bien, c’est tout. La journée de Jason ne serait pas gâchée avec cette simple interaction.

Alors que je pousse mon caddie en m’éloignant de l’entrée, grognant intérieurement alors que les roues mal masse-produites me tire sur le flanc gauche malgré ma poussée droite, un énergumène enragé vient me déstabiliser encore plus. Il me dépasse, la rage au volant de son panier gris, et disparait dans une allée du Walmart.

Sans y porter plus d’intérêt, j’avance dans le magasin. Et bien ça alors, ce n’est pas si difficile que ça que de trouver son chemin : tout est écrit sur de gens écriteaux accrochés au plafond! Alors voyons voir : ayant besoin de produits benzéniques pour créer du Trinitrotoluène, je peux facilement apporter des modifications grâces à des halogénations à des parfums simples. Je devrais passer chercher du chlore dans l’équipement pour piscine, mais commençons par le plus dur à trouver : les parfums fait des bons composés benzéniques aromatiques.

J’avance donc vers la section nommé : cosmétiques. Après avoir dépassé un long corridor de mascara et de produits du visage, j’arrive au tournant de l’allée, où la vision d’une petite bouteille de parfum me donne espoir d’arriver à destination.
Mais en tournant le regard, je vois une chose qui me fige sur place. Une dame morbidement obèse renverse toute une rangée de parfum sur le sol. Les bouteilles de verre tombent au sol en une incroyable cascade de liquide colorés et de vitre tranchante. Le bruit en est monstrueux, et les dégâts monétaires et matériels, élevés. Je jette un regard à la grosse dame : Elle quitte l’allée comme si de rien n’était ! Elle porte des écouteurs sur les oreilles et n’a même pas entendu ou remarquer les dégâts qu’elle vient de causer ! Elle disparait au tournant, me laissant seul devant le désastre et les étagères dégoulinant de parfum. Inutile de préciser que les arômes sont forts dans mon nez.

Je reste un instant là, à me demander si un employé allait venir. Et soudainement, du coin du regard, je localise le parfum que je recherchais, et, sans égard pour la scène sous mes pieds, je m’enfonce au centre de l’apocalypse pour récupérer le plus de fioles de parfum possible, chargeant mon caddie, crissant sur le sol odorant. Au même moment, un employé apparait au bout de l’allée. Elle me regarde un instant, figée, et j’en fais de même. Puis, elle pousse un soupir et ressort un petit talkie-walkie de sa poche arrière, commençant sa phrase alors qu’elle disparait à son tour de mon champ de vision :

-Un commis est demandé au quartier des cosmétiques…

Jason attendait patiemment l’arrivée d’un client. Léonie et Sarah étaient encore en pleine discussion lorsque Jason entendit un appel. Une voix omniprésente dans le royaume enchanté du Walmart se fit entendre. Quand cela arrive, les employés sont censés y prêter attention.

« Un commis est demandé au quartier des cosmétiques, je répète, un commis est demandé au quartier des cosmétiques, merci. »

Jason se tourna vers Léonie, normalement c’était rendu à son tour de répondre à l’appel, de partir en quête dans l’un des quartiers où tout peut arriver. Cependant, Léonie avait complètement ignoré l’annonce, elle était beaucoup trop concentrée dans sa discussion avec Sarah. Le vandale voulait éviter d’être près de Sarah, alors il laissa tomber l’idée d’aller informer Léonie sur la situation.

Bon, c’est juste dans les cosmétiques, ça doit juste être une boite trop lourde.

Jason quitta l’entrée du magasin. Sa veste bleue avec son tag le faisait sortir du lot de clients. Il s’avança sur la route principale du royaume, celle qui mène les voyageurs d’un bout à l’autre du magasin. Jason localisa Nancy. Cette femme avait 45 ans et elle avait 2 enfants un peu plus jeunes que Jason. Le commis lui avait déjà parlé quelques fois, mais jamais bien longtemps. Les seules informations qu’il a pu en tirer étaient son âge et l’âge de ses enfants.

« Oui Nancy, qu’est que je peux faire pour toi ? »

« Euh, va chercher la vadrouille, on a un petit dégât dans cette allée-là… » Elle pointait du doigt l’une des allées du quartier des cosmétiques. Jason voulait savoir de quel genre de dégât il s’agissait pour s’équiper en conséquence. Oh non.

C’était un véritable désastre. Des flacons de verre de tout format gisaient sur le sol, soient fendus ou alors complètement éclatés ! Il y en avait tellement qu’il ne pouvait même pas les compter. Mais encore pire que cela c’était l’odeur. Déjà que lorsqu’une personne met trop de parfum, ça sent mauvais, imaginez une multitude de fragrances mélangées ! L’odeur était tout simplement nauséabonde. De quoi rendre l’odeur des camions de poubelles jalouse ! Nancy s’approcha de Jason et lui tendit une poubelle en plastique.

« C’est peut-être mieux de ramasser les bouteilles avant finalement. » Elle avait l’air soulagée. Évidemment ! Elle venait de s’éviter du travail supplémentaire ! Elle ne resta pas dans les parages plus longtemps, l’odeur devait la dégouter.

Bon… Pas le choix.

Jason se pencha et ramassa tous les morceaux de verres. Il était plutôt chanceux, il avait évité de faire tremper son pantalon dans le liquide. L’odeur ne le suivrait donc pas.

Jason rapporta la poubelle au comptoir des cosmétiques. Nancy lui lança un bref sourire. Il se mit en route vers l’entrée, le lieu saint où se trouvent les vadrouilles et les autres produits nettoyants. La flèche pénétra dans le lieu saint, il prit une chaudière et le fit remplir d’eau. Pendant ce temps, il versa une bonne quantité de produits nettoyants dans un sceau à roulette (À ROULETTE !). Jason commença le transfert de l’eau jusqu’au sceau. Il prit la chaudière dans ses mains, mais un mouvement brusque fit sortir de l’eau. Celle-ci alla se poser sur la main de Jason. Il ne put s’empêcher de laisser un petit cri de douleur. Il finit le mélange puis il déposa la chaudière. Il était enfin prêt à nettoyer le dégât.

Jason commençait à perdre patience. La brulure sur sa main lui faisait mal, mais il avait une mission à accomplir. Il poussa le sceau avec sa vadrouille et il arriva dans « l’allée du drame ». Il n’était toujours pas habitué à l’odeur. C’était tellement horrible. Jason s’empressa de frotter. L’odeur citronnée de son eau savonneuse élimina rapidement l’odeur des mille parfums.

Jason soupira, et un problème de réglé.

Après avoir ramassé mes choses, chargeant mon caddie d’une tonne de parfums, je quitte l’allée pendant qu’elle est encore vide de vie et que le commis n’est pas encore arrivé. Je pousse le tout en direction de ma prochaine acquisition : de grandes quantités de chlore. Ainsi donc, il me faut de l’équipement pour piscine, que je trouverais probablement dans le bien horriblement nommé « Quartier des Articles Extérieurs ». Je me dirige dans le bâtiment en regardant les écriteaux au plafond.

J’en arrive finalement à la dîtes section, et je découvre que le choix est multiple. Par contre, ils semblent assez chiant sur les composés pour nettoyage de piscine. Ils me donnent toujours des mélanges de chlore et de d’autres groupements. Je n’ai absolument pas envie d’isoler du chlore, je n’ai pas les composés ou la machinerie lourde pour purifier ces composés.
Après avoir cherché pendant un bon moment, je tombe finalement sur un produit qui qualifie à ma recherche, pour l’entretien de spas. Ils ne se vendent pas en très grande quantité… Tant pis, je mets chaque petite boite que je vois dans mon panier, et je n’en laisse pas une seule.

Satisfait, je pousse mon caddie vers ma prochaine destination, lorsque soudainement, une paire de main m’arrête, se posant sur mon véhicule. Levant mon regard, je découvre le client un peu pressé de quelques moments auparavant, m’ayant bousculé à l’entrée. Ses yeux sont creux, ses mentons, ronds et au compte de deux.

-Vous venez-vous excuser de votre comportement?
-Toi, ta gueule. Pourquoi t’as pris tout le chlore?
-Pardon?

Impossible que cet énergumène est la moindre curiosité pour mes achats. Je lis donc dans ces pensées, car je n’ai pas envie de perdre de temps de temps à déchiffrer ses paroles incompréhensible.
J’u découvre qu’il désire lui aussi avoir du chlore pour son spas et qu’il s’inquiète que j’ai pris tous les produits pour moi seul.

-Vous en avez une centaine dans votre panier, pouvez bien en laissez aux autres bordels de merde.
-Ne vous inquiétez pas monsieur, il reste d’autres produits contenant des procédés chimiques plus efficaces encore pour l’entretien de votre eau et de vos tuyaux.
-J’ai dit ta gueule toi!

Sur quoi, il prend une des boites dans mon panier. Ma main droite vient saisir son poignet, l’interceptant.

-Pardonnez-moi, mais cet objet est dans MON caddie, et s'il me manque ne serait-ce que quelques moles de produits, je ne pourrais plus…

Mais mes paroles tombent dans le vide, alors qu’il se dégage de ma poigne et se met à courir avec ma petite boite de chlore.
Outragé, je regarde autour de moi et au plafond. Ah quelle connerie, pas une seule caméra de surveillance dans cette allée pour voir la scène et plaider en ma faveur?
Bon et bien, autant en profiter.

N’étant pas surveillé, j’invoque mon bouclier, puis je le lance tel un frisbee sur la crâne de l’homme s’enfuyant au pas rapide. Il s’écrase au sol, la boite toujours en main. Je fais disparaître mon arme d'âme, puis je me mets à courir vers lui, poussant mon caddie à toute vitesse. Alors qu’il se relève, je le percute dans l’estomac, le faisant retomber à terre. Pas fait fort le gaillard, ça alors. Je m’avance de façon à le dominer, puis de ma chaussure, je lui écrase la main et les doigts tenant ma boite de chlore. Il la lâche dans un petit cri de douleur, mais je continu quelque instants à lui écraser les doigts, juste par vengeance.

-Vous allez-vous excuser de votre comportement, oui ou non?

Mais il ne me regarde pas, son regard se veut suppliant, mais envers une autre entité. Au coin d’une autre allée, un employé se tient là, confus, regardant la scène.

Et voilà, je me mets encore dans de beaux draps…

L’employé resta figé quelques instants, le regard rivé sur les deux hommes. Il laissa échapper un cri, il se retourna et il se mit à courir à toute vitesse. De temps en temps il hurlait de nouveau.

Jason entendait des cris en intermittence. Ce doit être des enfants qui jouent pendant que leurs parents magasinent, quelque chose comme ça. Le jeune vandale se rendait au comptoir des cosmétiques pour annoncer à Nancy que le dégât était nettoyé. Les cris étaient de plus en plus près. Jason se retourna pour regarder d’où ces cris venaient.

« MAMAN ! »

C’était l’un des enfants de Nancy. Il courait et il haletait comme un obèse morbide qui monte une côte.

« MAMAN ! AIDE-MOI ! » Cet employé devait avoir 15 ans maximum, probablement moins. Il était tout petit et tout maigre, comme si la puberté ne l’avait pas encore attaqué. Il pleurait à grosses larmes.

Sa mère avait l’air plutôt calme, comme si c’était une situation habituelle pour elle.

« MAMAN » le jeune garçon fonça sur sa mère et il l’a pris dans ses bras. Celle-ci le serra fort, sans dire un mot. C’est sûr que ce genre de situation arrivait fréquemment. Elle savait comment agir pour le calmer, simplement le serrer jusqu’à ce qu’il se calme. Le rythme cardiaque du jeune agité ralentissait tranquillement.
Jason regardait la scène avec un peu de douleur. Il pensait à sa mère, comment allait-elle de son côté ?

« J’ai eu tellement peur… » Le jeune avait les yeux fermés. Il avait vraiment l’air de quelqu’un qui a vu une situation horrible.

« Qu’est ce qui s’est passé mon chéri ? » Nancy avait une voix douce, relaxante.

« J’ai vu un meurtre… »

Quoi !? Un meurtre !?

Nancy flattait tranquillement les cheveux de son fils.

« Et il était où ce meurtre ? » La mère avait toujours une voix rassurante, elle n’était pas du tout agitée par la situation. Comment peut-elle garder son sang-froid en sachant qu’il y a un meurtrier ?

« Dans les articles extérieurs. »

Nancy se retourna vers Jason.

« Jason, va voir ce qui se passe. Je vais m’occuper de lui. » Elle embrassa le front de son enfant. La flèche se mit alors en route vers les articles extérieurs.

Le casse-tête se mit en place dans l’esprit de Jason. Le fils de Nancy doit souffrir d’une quelconque maladie et il a des crises. Cela expliquerait pourquoi sa mère sait comment le calmer. Il doit sûrement exagérer les faits, c’est pourquoi sa mère ne craignait pas qu’il y ait vraiment eu un meurtre.

Environ 5 minutes s’étaient écoulées entre la « découverte du meurtre » et la « quête de Jason ».

Mon regard croise celui du petit garçon servant d’employé. Ce dernier se pisse dessus et puis repars en courant.
N’ayant toujours pas entendu les excuses de l’homme à mes pied, je pense un instant à lui foutre un coup au visage. Puis, je réalise que ça n’en vaut pas la peine. Je soupire, puis je fou le camp avec mon panier. Si vous pensez que je vais rester là, vous vouez trompez largement. Du coup, j’enlève même ma blouse de laboratoire et la lance dans mon panier, pour ne pas être reconnu sur le champ par les informations que le petit garçon pourrait donner aux gendarmes.
Je disparais en vitesse.

Bon, prochain objet sur la liste.

En effet, il est trop tôt pour partir du Walmart. Je n’ai pas encore fini ma liste d’objets à acheter. Prochain arrêt : la pharmacie du Walmart. J’ai été étonné d’apprendre qu’ils avaient cette chose ici, mais autant en profiter.

J’arrive vers la section du magasin. Ici, les choses sont arrangées d’une façon différente, un petit mur séparant l’intérieur du quartier pharmaceutique et le reste du bâtiment, donnant un peu d’intimité aux clients. Je passe à l’intérieur. Je sais vaguement ce que je recherche. Évidemment, tout serait plus facile si je pouvais me prendre tout ce que je voulais au comptoir avec un pharmacien, mais sans signature du médecin, ils ne te donneront rien du tout de spécialisé. Du coup, je me mets à chercher dans les allées pour des produits contenant du Potassium. Et surtout, du Potassium facilement extractible et purifiable.
Le biologiste aguerrit sait bien qu’une bonne dose de Potassium ou de Calcium est l’arme la plus mortelle qui soit, pour des raisons qui ne seront pas expliquer ici.

Je fais les étagères, et je ne trouve pas grand-chose. Mais soudainement, je remarque un petit espace qui attire mon attention. Un petit recoin du mur ou sont afficher à la vente quelques préservatifs. Mais ce n’est pas ça qui m’intéresse (Même si j’en mets quelques boîtes dans mon panier), mais sa location à l’abri des caméras. Cela me donne une idée.
J’ouvre mon Kekkai.

En deux temps trois mouvements, je remets ma blouse de laboratoire, ressemblant aux sarraus des pharmaciens, je saute par-dessus le comptoir de la pharmacie, et je me mets à la tâche. Je referme le Kekkai et agit le plus rapidement possible dans l’arrière-boutique, ramassant tout le Potassium et autres substances dont je pourrais avoir besoin. Et finalement, j’empaquette le tout avec une fausse signature d’employé. J’ouvre de nouveau mon Kekkai, puis je retourne sur les lieux de ma disparition, les objets dans les bras, que j’enroule dans ma blouse que je remets dans mon caddie.

Et voilà, un vol réussit avec facilité.

-Hey Marie, on manque d’Iodure de Potassium. J’aurais juré en avoir déposé ici ce matin pour les mauvaises thyroïdes! Tu en as pris?
-Non, c’est bizarre. Tu veux que je demande pour savoir si un employé y aurait touché?

Jason arriva dans le quartier des articles extérieurs. Cette section du magasin était autrefois appelée « Quartier saisonnier » puisque l’inventaire changeait chaque saison. À l’automne, c’est dans cet endroit que l’on peut trouver des déguisements et des décorations d’Halloween. Durant l’hiver, on y trouve des pelles et des articles pour le temps des fêtes. Les gérants avaient décidé de changer leur affiche pour que ce soit plus clair pour les clients. Jason était d’accord avec le changement de nom de ce département. Il a dû guider des centaines de clients vers cet endroit puisqu’ils n’étaient pas capables de comprendre que dans « saisonnier » il y a le mot « saison ».

Bref, Jason arriva dans le quartier des articles extérieurs et il vit « le cadavre ». Le quartier était désert mis à part une personne, le « cadavre ». L’histoire du fils à Nancy était erronée, le « cadavre » était encore bien vivant. Un homme était devant Jason. Il avait le front fendu et une ligne de sang y coulait telle une rivière. L’homme était visiblement en colère. Le commis de panier reconnut l’homme, c’était le même qui lui avait dit de se taire de façon assez irrespectueuse. L’homme se rapprocha de Jason en serrant le poing.

« Non, mais c’est quoi votre problème ici ? Il n’y a pas de sécurité, pas de caméra, pas de rien ! Vous laissez vos clients se faire agresser par d’autres sans rien faire ? Il y avait un employé, un gars comme toi… » L’homme poussa Jason avec ses deux mains. Le jeune recula de deux pas et il utilisa ses bras pour couvrir son corps de manière défensive, au cas où le client décidait de le frapper.

« … qui m’a seulement regardé sans même intervenir ! Je sais qu’en venant ici je ne m’attends pas à voir des prix Nobel, mais je m’attendais à voir mieux que des imbéciles sans avenir ! » L’homme agrippa Jason par le chandail et il le tira vers lui pour le lancer plus loin. Jason eut le temps d’agripper le bras de son adversaire, mais il ne put lui résister plus que ça. Le jeune employé perdit presque l’équilibre, mais il resta en place. Il se tenait désormais exactement à l’endroit ou le voleur de chlore était tombé après avoir reçu une lancée de bouclier.  

Jason ne savait pas trop comment réagir, normalement, il devrait rester courtois et s’excuser auprès du client. Après tout, le client a toujours raison ! Mais Jason savait pertinemment que personne n’était dans les environs. Le client en colère se rapprocha de Jason.

« Là je vais te dire ce que tu vas faire, premièrement tu vas t’excuser parce que tu es une merde, puis après tu vas aller me chercher du chlore et tu vas me supplier pour pas que je te casse la gueule. Dépêche je suis pressé. »

La dernière intervention du client avait mis Jason en colère. Comment osait-il lui donner des ordres ? Le client a toujours raison seulement quand un gérant est dans les environs. Jason se mit à sourire au client, un sourire faux et il lui donna un immense direct du droit en plein visage. Le client ne s’attendait pas du tout à cela. Il tomba par terre, inconscient. Le coup de Jason seul n’aurait pas amené le client à perdre conscience, mais grâce à la précédente attaque de Diechi il a pu mettre KO son adversaire.

Jason regarda autour de lui rapidement, personne ne l’avait vu. Il se pencha et il prit l’homme. Les bras de l’employé étaient enroulés sur la poitrine de l’autre homme. Il traina l’homme jusqu’à l’entrée principale où se trouvait la trousse de premiers soins. Il croisa plusieurs autres clients qui le regardaient étrangement. Jason savait bien que cela allait se produire, les clients n’avaient pas l’habitude de voir l’un des leurs se faire trainer par un commis de panier. Jason le laissa au comptoir des retours et échanges où une fille prit le client en charge. Évidemment, elle lui demanda ce qui s’était passé, Jason a simplement dit qu’il l’avait trouvé inconscient dans une allée. Un mensonge efficace, la jeune fille ne posa pas plus de questions. Le vandale n’avait jamais vu cette fille, c’était probablement une nouvelle. Il commençait à l’admirer quand son walkie-talkie émit un son.

« Un commis est demandé à la pharmacie, je répète, un commis est demandé à la pharmacie merci. »

Jason regarda vers l’entrée, Léonie était au téléphone cette fois. Il était donc obligé de répondre à l’appel sinon il risquait de se faire renvoyer. Si jamais on apprend que j’ai frappé un client, c’est sûr que je me fais renvoyer… Je suis mieux de donner une bonne impression si on me pose des questions !

Jason prit donc une marche vers la pharmacie. Rendu là, on le questionna sur un produit qu’il ne connaissait pas.

« Non je n’y ai pas touché et je ne sais pas si quelqu’un y a touché, mais je peux aller voir dans l’entrepôt s’il en reste une boite. »

Les pharmaciens s’échangèrent un bref regard, puis ils donnèrent à Jason la mission de « trouver de l’iotruc de potachose ».

Finalement, cette petite sortie commençait à devenir une vraie aventure.
Qu’est-ce qui se passe encore? Et bien je viens de retrouver la grosse dame ayant détruit toutes les étagères de parfums. En fait, je l’ai sentie avant même de la voir.

Je me dirigeais vers la section alimentaire (Et oui, il y a aussi une épicerie dans ce lieu…), avec une idée en tête. Je voulais chercher pour des piments, car si j’en trouvais des particulièrement fort, je pourrais les transformer en poudre et en armes chimiques intéressantes. Donc, surtout guidé par ma curiosité naturelle, je me dirige vers la section des assaisonnements. Je trouve des choses assez intéressantes, mais rien d’aussi puissant que ce que j’avais en tête. Je trouve un empaquetage disant : « Piments Scorpion Trinidad Séchés, Édition limité du piment le plus brûlant du monde, 1 400 000 Unités Scoville! »
Mensonge, il existe plus fort que ça. Voilà qui a de quoi me mettre en colère. Je déteste la désinformation.

Et au moment où cette pensée transverse mon esprit, je le vois. Dans un cul de sac, au bout de la rangée de produits épicés, il est là. Le roi de tous les piments. Le Carolina Reaper, entouré de notices des dangers posés par ce piment. 2 200 000 unités Scoville, et pouvant être purifié pour créer une monstruosité. Il possède déjà de base autant de puissance qu’une bombe d’auto-défense. Je pourrais en extirper de la capsaïcine pure, puis la transformer en quelque chose de formidable. Du coup, même mon manque de talent au combat n’y changera rien, je pourrais vaincre n’importe quel humain.

J’abandonne mon panier rempli à ras bord de parfum et de chlore, et je me dirige vers le fond de l’allée. C’est là que se passe cet évènement fort fâchant.

S’installe la grosse dame dans l’allée. Elle est si large, elle bloque complètement le chemin. Je me trouve dans un cul de sac, et elle se tient entre moi et la sortie, entre moi et mon panier.
Je me rapproche d’elle. Elle a encore ses écouteurs aux oreilles. Elle ne sent même pas ma présence. Elle regarde les étagères, le regard vide. J’essaie de me faufiler, mais c’est sans espoir. J’essaie de la pousser un peu, lui demandant de vive voix de se déplacer. Aucune réaction.
Aussitôt, je saute dans sa tête…
Elle est vide.
Je veux dire, honnêtement, je n’y trouve rien. Seulement les paroles chrétiennes-protestantes de sa chanson jouant dans ses écouteurs. Je suis entré dans l’esprit d’une folle, ou je n’y trouve absolument rien. Je n’existe pas à ses yeux, elle ne sent même pas mon bras qui tente de la pousser de toutes mes forces. Elle doit peser une tonne.

Je reste alors là, pris au piège, alors qu’elle continue à marcher à l’horizontal, se rapprochant de plus en plus du fond du cul de sac, et me menaçant de me presser comme du jus entre elle et le mur de piments Carolina Reaper.

Jason se mit alors en direction de l’entrepôt du Walmart. Jason filait entre les allées comme une voiture de course. Il voulait en finir le plus vite possible. Plus vite il se renierait à l’entrepôt, plus vite il retournerait à son poste de collecteur de panier. Oui, son travail c’était de la merde, mais répondre à l’appel de chaque département était encore pire. Son poste habituel était désagréable, mais le travail qu’il était en train de faire présentement était de la vraie torture. Jason n’aimait pas se faire regarder de haut, comme s’il n’était pas un être humain. Le jeune employé marchait à travers les allées débordantes de marchandises, il esquivait adroitement tous les paniers et les clients en zigzaguant telle une gazelle propre. Enfin, la terre promise était à portée. Devant Jason se dressait le portail vers la dimension parallèle de l’entrepôt. Le royaume du Walmart était accessible à tous, mais pour se rendre dans l’entrepôt il fallait avoir une autorisation du roi. D’ailleurs, il y a toujours un magicien qui garde les lieux. Aujourd’hui, il s’agissait de Tony. Tony était un vieil homme de 65 ans qui avait décidé de devenir agent de sécurité dans un Walmart après sa retraite. Son poste était simple. Il s’assurait que personne qui ne porte pas fièrement la veste Walmart avec un nom ne puisse entrer.

Jason salua l’homme d’un geste de tête rapide puis il s’enfonça dans le portail. C’était vraiment un changement radical. La section magasin était grandement éclairée avec des néons omniprésents. Peu importe où l’on regarde, il y a de la lumière. L’entrepôt était beaucoup plus sombre. Au lieu de néons il y avait de grandes ampoules séparées par une dizaine de mètres. Le plancher était en béton gris foncé et les étagères étaient noires. Jason s’avança d’un pas décidé. Il allait trouver une responsable de l’entrepôt pour qu’il vérifie s’il y a vraiment de l’iotruc de potachose en stock quelque part. Jason s’avança jusqu’à un croisement entre allées. À sa droite au fond se trouvait une salle de supervision, il ne savait pas trop à quoi elle servait, il n’y était jamais allé. À sa gauche se trouvait le but de sa quête, un responsable d’entrepôt. Le vandale se mit en direction de l’homme, enfin il pourrait retrouver le calme d’antan. Les rêves de repos de Jason se brisèrent, ou plutôt explosèrent, en mille morceaux lorsque ses glandes olfactives détectèrent un doux parfum de cannabis à 6 mètres de l’homme. Il n’y avait aucun doute, pour sentir aussi fort la marijuana à cette distance, le responsable de l’entrepôt devait être gelé comme une balle. Celui-ci regardait ses mains de façon contemplative. C’était un peu comme s’il venait de retrouver ses mains après un voyage dans un autre univers. Quoique, il était encore probablement dans cet autre univers. L’homme se tourna vers Jason et il eut un frisson de terreur.

« AH ! Renvoie-moi pas papa ! »

Jason se figea à son tour, cet homme venait-il vraiment de l’appeler papa ? L’homme en question avait l’air rassuré après avoir vu Jason.

« Qu’est ce que tu veux au juste ? »

Jason pris une courte pause pour expirer, ce drogué pourrait-il vraiment l’aider ?

« Ouais, euhm, il te reste tu une boite d’iotruc de pota… quelque chose ? C’est la pharmacie qui m’envoie. »

L’homme se mit à pointer une palette sur laquelle étaient posées plusieurs boites fermées.

« Ce que tu cherches… »

ENFIN ! La quête de Jason était terminée ! Le repos, la paix, la tranquillité, tout ça à portée de main ! Le drogué pointait la palette, c’est sûr que ce qu’il cherche est juste là !

« … n’est pas là. »

Ou pas.

« Mais vu que t’es là, amène ça dans le coin alimentation. »

Jason était à bout de nerfs. Il allait exploser de rage. Le drogué se retourna et marcha dans l’autre direction, faisant dos à Jason. Le vandale allait lui sauter dessus. Se calmer en le frappant en plein dans le visage. Juste au moment où il allait bondir sur lui, un frisson lui traversa la nuque. Une voix bien trop familière. La voix de son gérant.

« Tu apporteras ce colis dans le coin de l’alimentation, n’est-ce pas Jason ? »

Jason se retourna lentement pour découvrir le visage de son gérant avec un sourire en coin diabolique. Un grand homme roux mesurant environ 195 cm. Jason le regardait avec une contreplongée. Le visage du démon était découpé par la noirceur et ses yeux brillaient comme une chandelle. À contrecœur, Jason acquiesça avec un signe de tête. Il prit la boite et il se dirigea vers le coin alimentation. Sur sa boite était collé un étiquette. [Carolina Reaper, rangée 9, alimentation].

La grosse dame à la tête vide menace un peu plus à chaque seconde de m’écraser contre les piments.

Cédant un peu à la panique, me rappelant quelques évènements traumatisant où j’avais déjà rencontré des gens avec qui il est impossible de raisonner, je commence à pousser la grosse dame, tentant de me faire un chemin. Comme si elle sentait un débalancement, elle se met à résister en avançant plus vite vers le mur du fond. Autant dire que je n’ai pas la force physique pour déplacer un tel rempart de viande. Je me penche, tenant de passer dans l’espace entre ses jambes. Honnêtement, l’idée m’emplie d’horreur, et j’y renonce finalement, réalisant que ses jambes sont aussi grosse que le reste de son corps. Je ne serais pas capable d’y passer, mes sacs de Carolina Reapers en mains…

Je décide donc de prendre l’action un peu plus logique :
Je retire ses écouteurs de ses oreilles, et je lui cri :



Elle me regarde en retour, avec de gros yeux. Ah, finalement, elle reconnait mon existence. Je saute dans ses pensées de nouveau.
Ah non. Ça ne va pas du tout.
Je ne peux y lire qu’un enchainement d’injures sans fins. Aucune réflexion logique ou marque de respect. Et comme il n’y a pas de fumée dans feu, ça n’en prend pas long que les mots vulgaires sortent de a bouche. Je ne les répéterais pas ici, mais il s’agit d’un flot constant envers ma personne. Certains de ces mots sont d’un niveau douteux sur la « charte des insultes », avec des termes tels que : « espèce d’orchidoclaste! » Ah, elle a plus de culture que je pensais cette dame : qu’est-ce qu’on lui apprend donc à l’église? Mais bon, elle ne se pousse pas.
En fait, devant se sentir en puissance face au maigre petit moi, elle se met à me pousser : pas avec ses mains, avec son ventre. Si bien que je perds un peu l’équilibre et je tombe vers l’arrière, sur l’étalage de piments, qui tombe à terre mollement.

De mon nouveau point de vue, je peux voir, au travers d’un petit espace de ma vision non recouvert par la présence de la dame, un employé. Il s’agit du jeune homme m’ayant salué à l’entrée. J’essaie de me souvenir de son nom : usant de toute la puissance de ma mémoire quasi photographique, je peux revoir son badge l’étiquetant sur la poitrine : Jason. Il s’approche de l’allée, et voit mon panier d’épicerie.
Il est empli de chlore, de parfums et d’une blouse de laboratoire entourant mes produits pharmacologiques. Avec le rayon de 5m de mon pouvoir, il est juste un peu trop loin pour que je puisse voir à quoi il pense. Peu importe, il est mon meilleur espoir de sortir de cette situation :



Autant l’insulter: ce n’est pas comme si elle pouvait tomber plus en colère qu'elle ne l'était déjà contre ma personne.

Jason s’arrêta net et il tourna son regard vers l’allée. On venait de l’interpeller par son prénom, ça n’arrivait jamais. Plus intriguant encore, il s’agissait de l’homme qui avait pris le panier en prononçant quelques mots que Jason n’a pas été capable de comprendre. Il était persuadé que l’homme ne lui avait pas accordé d’importance. Or, il était là, à quelque pas de lui, à l’appeler par son prénom. Jason s’approcha de lui en tout en tenant sa boite de piments. La grosse dame continuait de balancer des injures, de toute évidence, elle était en colère, la question était : pourquoi ?

« Qu’est-ce qui se passe ici ? » demanda Jason.

La grosse dame se retourna vers le jeune employé. Comme un mitrailleur dans un hélicoptère, la dame changea de cible, mais elle n’arrêta pas de tirer. Elle continua son monologue rempli d’injures et elle ajouta des menaces. Si Jason ne punissait pas l’homme, son superviseur allait entendre parler de lui ! Jason fut capable de discerner la situation. Selon la dame, l’homme lui avait manqué de respect il l’avait ensuite insulté parce qu’elle lui bloquait le chemin.

Je n’ai aucune idée si c’est vrai, mais cette dame est définitivement folle. Je vais m’arranger pour lui donner ce qu’elle veut, histoire de désamorcer la bombe.

Jason utilisa ses talents d’acteur pour convaincre la dame. « Oh, mais c’est inacceptable ! Les jeunes de nos jours, hein ! Monsieur, veuillez me suivre. Madame, laisser le passer je vais l’escorter jusqu’à la direction. »

Je vais l’amener au bout de l’allée, puis le laisser partir. L’important c’est que la grosse pense qu’elle a gagné. Vieille vache.

Le regard de Jason se dirigea ensuite dans le panier de Diechi. Celui-ci était plein d’items dont du parfum et des boites de médicaments. Jason hésita une seconde.

Est-ce que c’est de l’iotruc de potachose ?

La vieille dame n'avait pas bougé.

Tout de suite, je vois que j’ai bien fait de faire de Jason mon allié. Il prend automatiquement pour ma personne, et pas pour la grosse dame. Ça n’a rien d’étonnant vraiment : Je suis un autre jeune, je l’interpelle par son nom, et cette dame est plus que désagréable à écouter crier.
Je peux lire son plan dans sa tête, alors qu’il tente de calmer la dame et l’emmener plus loin. Je me retiens de pouffer de rire lorsqu’il la traite de vieille vache.
Mais je dois aussi retenir mon cri de victoire : la dame ne s’est toujours pas poussée.
En fait, je me corrige : C’est un cri de colère que je retiens surtout.

Et finalement, la situation tourne pire encore. Comme pour démontrer que, oui, c’était encore possible que d’être plus dans la merde que ça…
Mon Iodure de Potassium est visible. Je ne l’ai pas bien enroulé dans mon sarrau de laboratoire, et un bout de l’emballage est bien visible. Mais bon, l’écriture n’est quand même pas vraiment visible, et personne ne peut lire la chose…

Est-ce que c’est de l’iotruc de potachose ?

… C’est une blague?
Vraiment, une hypothèse comme ça, et il doit, par pure coïncidence, tomber sur la bonne réponse? Le hasard n’est vraiment pas de mon côté aujourd’hui… à moins justement qu’on lui a demandé de retrouver cette chose. Est-ce que le produit a déjà été porté disparu? Ce fut bien trop rapide, merde…

Et je ne peux même pas agir! La grosse dame me bloque encore le chemin, et rien n’empêche Jason d’aller jusqu’à mon panier et prendre l’Iodure de Potassium et confirmer son hypothèse. Je dois faire quelque chose… Je me relève.
Est-ce que je peux ouvrir un Kekkai? Pendant que Jason à le dos tourné? Je disparaitrai sous le regard de la grosse dame mais, elle déjà folle, elle peut bien croire qu’elle hallucine un peu. Au moins, elle réalisera peut-être qu’elle a un problème dans la tête.
Il y a-t-il autre chose que je puisse faire?
Je regarde à ma droite : une allée de piments. Je regarde à ma gauche. D’autres assaisonnements. Du poivre, du sel, du curry…
Pile au moment où cette pensée me vient, la grosse dame s’énerve encore plus : Elle fait cahoter les étagères, et des produits tombent au sol. C’est d’ailleurs d’un gros sac de sel, de la sauce soya et d’une boite d’épices indiennes. Contrairement aux deux autres produits, qui survivent la chute, le sac de sel s’ouvre et éclate sur le plancher.
Du sel?



Voyant bien que ma demande le prends par surprise, je tente de rajouter un petit quelque chose pour le motiver, me basant sur un fait et sur une hypothèse de mon cru :



Peu après ça, la dame me pousse, et je retombe de nouveau sur le cul.

Jason avait donc devant lui la responsable des dégâts dans l’allée des parfums. Pas trop surprenant vu son comportement extrêmement désagréable et violent. Jason ne pensait plus à l’iodure de potassium, il devait s’occuper de la dame, non, il devait s’occuper de la vieille vache. Si elle continuait, elle allait certainement blesser le pauvre homme. Que pouvait-il faire ?

Je pourrais la frapper comme l’autre. Est-ce que c’est risqué ?

Jason regarda plus haut, il y avait une caméra de sécurité dirigée directement sur lui. Avec de la chance, quelqu’un avait vu la scène et était en route, mais ce n’était sûrement pas le cas.

Avec la caméra sur moi, je dois appeler la sécurité, sinon je vais perdre mon emploi.

Pour contacter la sécurité, il y a plusieurs façons de faire. La première est la moins pratique. Il suffit de s’époumoner en criant « À L’AIDE ! » à répétition jusqu’à ce que quelqu’un contacte la sécurité à sa place. La deuxième façon est d’utiliser le walkie-talkie fourni par l’entreprise pour communiquer avec les départements. Ces outils sont fort utiles, mais on ne les donne pas à ceux au bas de l’échelle. En effet, les commis de paniers n’ont pas droit à un tel équipement. Finalement, la troisième manière de contacter la sécurité est de se rendre à une « borne de communication ». C’est comme ça que les employés nomment les colonnes de ciments et les comptoirs sur lesquelles on a fixé un téléphone. La seule option envisageable pour Jason était la troisième : trouver un téléphone. Le commis de panier localisa mentalement la « borne de communication » la plus près.

Ok, téléphone, il y’en a un là-bas, je crois.

Jason se mit en marche, mais son regard se posa sur la vieille vache. Elle agrippa un pot de sauce en vitre. Ces intentions étaient plutôt claires. Elle allait l’éclater sur le pauvre homme.

Ça va faire un sale dégât si je ne l’arrête pas ! J’ai déjà ramassé les parfums et je vais devoir ramasser le sel, vrai que je vais nettoyer de la sauce en plus !

Jason se mit à courir vers la dame et il attrapa le contenant de sauce. Il essaya de lui enlever des mains, mais elle ne lâchait pas prise.

La vache est forte.

« Calmez-vous madame, pas la peine de lui faire mal. »

Évidemment, ces mots n’atteignirent pas la dame, elle était aveuglée par la rage. Jason regarda l’homme.

« En sortant de l’allée sur votre gauche, il va y avoir une colonne qui soutient le bâtiment, de l’autre côté il y a un téléphone. Allez appeler la sécurité, le numéro est 337. »

Après avoir dit cela, la dame donne un solide coup de coude sur le nez de Jason. Il tomba sur les fesses. La dame lança le contenant de sauce vers Diechi.

L’employé ne m’envoie jamais ce que je lui demande…
Et les choses tournent mal.

Il tente d’arrêter le mouvement de la dame, avant de découvrir qu’il n’a pas la force nécessaire pour s’y opposer. Il me donna des instructions pour appeler la sécurité, et alors qu’il est repoussé sur le postérieur, la dame s’élance pour me projeter le contenant de sauce sur la figure, me donna une ouverture.
Je me projette en un projectile entre sa hanche et son bras levé.
Je retombe au sol en faisant une culbute.

Me voilà libre!
En une course rapide, je suis de retour à mon chariot, mon cœur pompant sous l’adrénaline. Je peux partir!
Je jette un regard derrière moi. Le pauvre Jason est maintenant aux prises de la dame, impuissant… Il veut que j’appelle la sécurité. Mais après mon vol, est-ce judicieux? Ça me semble risquer, alors que je peux simplement partir maintenant… Et de plus, il ne m’a pas écouté comme je l’avais demandé…

La dame fracasse le crâne du jeune homme avec le pot de verre.
Je fais demi-tour.

Trop tard pour lui, il est mort.

RIP Jason.

Je pousse mon panier vers les caisses, m’éloignant de la scène, payant le tout, puis quittant le Walmart.
Je finirais mes achats une autre fois.

[RP TERMINÉ]
[Aurevoirs Jason, nous sommes tous en deuil.]