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 Certains pensaient que la vie d’un étudiant consistait en des études, ce qui semblait logique sémantiquement mais se révélait être assez éloigné de la réalité. L’université américaine – celle de Palema en tout cas – laissait suffisamment de temps libre à ses étudiants pour que ceux-ci développent des activités extra-scolaires, parfois au détriment des parcours académiques de leurs étudiants, mais ceux-ci étaient probablement trop attachés à leurs libertés pour qu’on leur retire clubs, fraternités et soirées. Parmi ces soirées, il y en avait plusieurs qui prenaient une dimension importante, touchant l’ensemble du campus universitaire de Palema. La plus connue était celle d’intégration, en début d’année, parce que c’était d’elle que les lycéens de la ville parlaient avec anticipation, mais il y en avait quelques autres dont une soirée fêtant la fin des partiels pour l’ensemble des filières, ce qui faisait qu’elle était programmée après le mois de Janvier.

 Celle-ci avait été organisée dans l’un des bâtiments dédiés aux sororités et fraternités, dans lequel on trouvait des salles suffisamment vastes pour organiser un tel évènement. Plusieurs salles étaient utilisées ce qui faisait que les participants pouvaient choisir à leur guise où ils allaient et le type de musique qu’ils voulaient entendre. À certains endroits il s’agissait plutôt de soirées dansantes un peu chic tandis qu’à d’autres l’ambiance était plus proche qu’une boite de nuit. En tout cas, c’était le cas l’année passée lorsque Gamaliel y avait participé. Et les trois précédentes également, ainsi que la plupart des fêtes d’envergures qui étaient organisées à l’université.

 Cette année encore, il avait décidé d’y aller même s’il n’était plus tant étudiant que détective. L’année n’était pas finie donc avoir un emploi ne l’empêchait pas d’être toujours inscrit sur les listes étudiantes, et sa carte était toujours en cours de validité. Il n’avait donc aucune raison de ne pas sortir s’amuser de temps à autres et c’était l’un des meilleurs moments de l’année pour le faire. Parce que ça lui permettrait de décompresser et d’oublier le fait qu’il avait un boulot, chose qui ne le gênait pas en soi mais causait encore chez lui quelques incertitudes. Une fois arrivé, l’étudiant pu retrouver ses repères puisque tout, mis-à-part les chansons choisies et les décorations, était semblables aux années passées.

 Il se dirigea vers les salles les plus festives avec pour seul objectif de s’amuser. Boire un peu, danser, rencontrer des gens et passer du bon temps en tant qu’étudiant. En espérant qu’il ne rencontre pas de personnes qu’il n’appréciait pas – et même si cela arrivait, il pourrait toujours les éviter en allant ailleurs.

La première étape, c’était de se diriger vers le bar pour s’offrir une bière hors de prix – parce que les organisateurs tenaient à faire du profit. En soi ça n’était pas nécessaire et il aurait pu aller danser ou discuter, mais puisqu’il avait décidé d’aller là où l’ambiance était proche d’une boite de nuit, il était plus simple de commencer par prendre un verre parce que cela lui permettrait d’avoir le temps d’observer un peu les environs, de repérer des personnes plus ou moins sociales – parce que même si la plupart des personnes venant à ce genre d’évènements l’étaient, certains préférait rester seuls pour une raison inconnue de Gamaliel. Et comme il respectait les gens la plupart du temps, il n’allait pas aborder quelqu’un au hasard d’entrée de jeu. Et puis, il pourrait prendre le temps de repérer des personnes lui plaisant ou semblant sympathique, donc c’était tout bénef’.

 Il s’enfila là où il y avait de la place, c’est-à-dire près d’un blondinet qui ne lui inspirait pas vraiment confiance et auquel il ne tenta pas d’adresser la parole, se contentant tout simplement de passer commande et d’attendre qu’on lui serve sa bière pour en boire une gorgée. Cela faisait d’ailleurs quelques temps que le liquide alcoolisé n’avait pas franchi ses lèvres, puisqu’il avait eu tendance à préférer d’autres breuvages. Mais il n’allait pas commander autre chose dans un tel évènement, vu qu’il doutait clairement de la qualité de qu’on lui servirait. Là au moins, s’il était déçu cela voudrait dire que tout le monde avait eu droit au même truc dégueulasse, et c’était déjà ça.

  Le temps qu’il boive son verre en regardant autour de lui, il put constater qu’on lui souriait, peut-être parce que la fille aux cheveux verts qu’il avait regardée avait décidé de l’observer au même moment, qu’importait. Et le mec, celui qui était un peu louche mais qui pouvait bien faire ce qu’il voulait de toute façon, décida de partir, laissant à l’ancien étudiant – quoi qu’il le soit encore – la possibilité de se lever sans gêner personne et il en profita donc pour aller discuter un peu avec la fille qu’il avait vu précédemment. Il ne la connaissait pas, mais vu qu’elle avait souri, cela voulait probablement dire qu’elle n’était pas l’une de ses personnes qui restait dans leur coin qu’il cherchait à ne pas déranger, mais plutôt quelqu’un comme tout le monde qui acceptait les interactions sociales. Et puis après, il irait voir quelqu’un d’autre, ou danser, ou grignoter en fonction de ce qu’il se passerait ou de son humeur du moment.

« - Salut ! » Lança-t-il, en attendant de voir si on allait lui répondre. Il pensait que ça allait être le cas, mais bon. Histoire d’engager un peu la conversation si elle était réceptive – et de l’éviter dans le cas contraire – il ajouta un simple « - Tu cherches quelqu’un ? ».

Des questions qui restent sans réponse, à l’image de nombreuses autres. Un instant, il crût qu’il se serait pu qu’elle ne lui réponde pas, mais celle à laquelle il venait d’adresser la parole le fît, faisant par-là même naître d’autres questionnements, Gamaliel ne comprenant pas vraiment pourquoi elle répondait comme ça, lui demandant si elle le dérangeait alors que c’était lui qui lui avait adressé la parole. Même si… Il secoua un peu la tête, comme pour répondre non, tout en notant qu’effectivement, elle semblait ouverte à la discussion et que sa réponse n’était pas une façon étrange de lui communiquer une absence de volonté dans ce domaine.

« - Non, non, absolument pas, pas besoin de s’inquiéter. »

 Il se retînt de dodeliner de la tête face à l’évidence qu’il venait de dire – ce qui lui semblait être une évidence en fait. À la place, son cerveau essaya d’aller réfléchir à la raison pour laquelle elle aurait pu trouver qu’elle le dérangeait, si c’était un ton de voix particulier qu’il avait laissé échapper ou s’il avait l’air plus fatigué qu’à l’accoutumé, ou si le verre qu’il venait de boire avait des résultats qu’il n’avait pas pu prédire sur son langage non-verbal. Il s’aperçut tout de même que laisser ses pensées dériver n’était pas ce qu’il voulait et qu’il fallait peut-être qu’il parle, qu’il pose des questions, s’il voulait se distraire sans commettre le faux-pas d’ignorer quelqu’un à qui il venait lui-même de poser la parole.

« T’es venue là pour boire un verre ? Tu as l’air un peu perdue. » demanda-t-il donc, sans trop réfléchir, laissant sortir ce qui lui venait sur le moment. Seule, perdue, c’était ce qui lui semblait, même s’il était peu probable que quelqu’un soit ici par hasard. Dans tous les cas, ça avait piqué la curiosité du jeune homme, donc il en avait profité pour y glisser une allusion tout en espérant que ça ne la froisse pas. Mais on ne fait rien en espérant ne pas froisser les gens, ça ses études le lui avaient appris. Donc qu’importe.