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Citation :

Salut, appelle moi sur ce numéro: 646 839 1880
J'ai quelque chose d'important à te dire.

Un morceau de papier. La journée prenait fin, tout le monde était installé dans le QG. Une trentaine de survivants. La défaite était amère, et Lenna profitait enfin de ce temps de repos pour changer ses vêtements encore collés par le sang séché qu'elle avait accumulé en déplaçant les cadavres.
Le papier était tombé de sa poche, et le message l'avait plus qu'interpellait.
Qui pourrait donc prendre pareille précaution ?

Elle s'isola dans un coin du dortoir et composa le numéro rapidement.
La sonnerie retentit 3 fois avant que quelqu'un ne décroche. Mais personne ne parla. Quelqu'un était-il au bout du fil ?

Allô ? Qui êtes vous ?

C'est moi.

Qui ça moi ? Mais elle figea ses mouvements alors qu'une émotion froide et pesante envahissait toute l'échine de son dos. Merde. Russel ?

Je voulais trouver une occasion de te parler.

Pourquoi restait-elle au bout du fil. Raccroche, mais raccroche ! La haine s'emparait de son coeur, et faisait remonter tout leur passé à la surface.

De te dire des choses sans qu'on en vienne à s'entre-tuer dans le processus.

Alors accouche, vieux traitre, foutu trou du cul. Les phalanges de sa main blanchirent sous la pression qu'elle mettait à son téléphone, serrant l'appareil à l'en broyer. Je n'ai qu'une envie, moi c'est de te tuer.

Au final... Il y a bien peu de chose que j'ai le droit de te dire mais je veux que tu saches... Que

Bordel, elle ne pouvait pas en entendre plus. Sa voix s'insinuait en elle comme un serpent, et sa main fit ce qu'elle aurait dû faire depuis le début. Elle envoya valser le téléphone dans le dortoir. Elle serra les poings pour contenir sa rage et prit quelques respirations pour se calmer. Comment osait-il !

Elle finit par aller chercher le téléphone. A peine abimé, à part une petite encoche là. L'appel avait coupé. Elle rangea l'outil, attendant de trouver quoi faire.

Avant d'avoir le temps de finir tout ce qu'il avait à dire, la jeune femme raccrocha. Sans trop de surprise en réalité. C'était déjà un miracle qu'elle n'est pas raccroché après qu'il se soit présenté. Il ne restait donc plus qu'à envoyer un SMS au numéro qui venait de l'appeler. Il aurait préféré le dire à vive-voix, mais il fallait croire qu'il n'avait pas vraiment le choix. Et alors qu'il commençait à taper son message, une pensée lui vint en tête. Il avait fait en sorte qu'elle le déteste... Mais en soi, est-ce que ça aurait été nécessaire ? En y pensant, simplement lui dire les choses, calmement, aurait permit d'éviter qu'elle soit mise en danger sans avoir besoin de passer par des méthodes aussi crues...

"Ah..." Lâcha-t-il. Le trentenaire venait de réaliser. Pour lui, cette affaire avec Lenna était comme une punition qu'il s'était infligé. Il était néfaste pour elle. Non pour quiconque.

[Je suis désolé, et même si ça peut t'apparaître faux, je suis heureux que tu sois en vie. Que les Nephils apprennent l'emplacement du QG Seraph n'était pas prévu. Je pensais que là-bas au moins, tu serais en sécurité...]

En même temps qu'il écrivait ce message, il se relisait en essayant de se mettre à la place de Lenna. Il n'y avait pas moyen qu'elle avale un traître mot de ce message. Un soupir. Au final, il ne savait pas comment transmettre ce qu'il souhaitait. Il voulait simplement qu'elle quitte cette ville, qu'elle ait une vie normale. Elle le mérite...

[Je suis désolé, et même si ça peut t'apparaître faux, je suis heureux que tu sois en vie. Que les Nephils apprennent l'emplacement du QG Seraph n'était pas prévu. Je pensais que là-bas au moins, tu serais en sécurité...Lenna, quitte cette ville, ait une vie normale. Passe à autre chose.]

Il avait le sentiment qu'il écrivait autant pour elle que pour lui. Les conseils qu'il se permettait de donner à la faucheuse, il devrait bien les suivre lui-même. Il appuya sur le bouton envoyé, accompagnant ce geste d'une gorgée de sa mignonnette.

Le téléphone vibra. Si c'était lui, elle ne comptait pas décrocher. Fais chier, il allait falloir changer de numéro maintenant. A moins qu'on ne puisse le localiser ainsi ? Naoto saurait comment s'y prendre. Elle était flic après tout.
Un message. Du même numéro qu'elle avait appelé. L'ouvrir ? Non. Elle refusait de communiquer avec lui.
Elle verrouilla l'appareil et le rangea. Elle ne le lirait pas. Mais pour le supprimer, il allait bien falloir l'ouvrir. Russel tu fais chier putain !

~ Lendemain ~

Elle avait tenu toute la journée, mais la curiosité était la plus forte. Et puis, peut-être pouvait-il livrer des informations ? Ce serait sans danger. Elle devait juste éviter de stocker le téléphone au QG. Si jamais il remontait jusqu'à eux... Ils seraient finis.
Dans un parc, elle finit par ouvrir le message.

Citation :

[Je suis désolé, et même si ça peut t'apparaître faux, je suis heureux que tu sois en vie. Que les Nephils apprennent l'emplacement du QG Seraph n'était pas prévu. Je pensais que là-bas au moins, tu serais en sécurité...Lenna, quitte cette ville, ait une vie normale. Passe à autre chose.]

Répondre ? Non. Si ?

Citation :

Connard.

Ouais ça faisait du bien.

Citation :

T'y étais. T'as participé. C'est trop tard.

Qu'est-ce que ça pouvait lui foutre qu'elle soit en sécurité hein ? Il était stupide ou quoi ?

C'était tellement frustrant. N'y avait-il rien qu'il ne puisse faire pour entamer un dialogue avec Lenna. Comment faire pour la convaincre de quitter cette ville ? Comment parvenir à faire en sorte qu'elle ne l'écoute ? Au final, abandonnant une quelconque réponse, Russel passa le reste de son temps entre son travail de détective, avec Gamaliel puis à boire dans un bar quelconque.

Le lendemain, alors qu'il traînait toujours dans un bar, son portable vibra. Il s'en alla le prendre et un message avec un seul mot. Une insulte pour être exacte. Il s'agissait de Lenna. Peu de temps après, elle le blâma d'avoir participé à l'opération. Un sourire s'inscrivit sur son visage à la lecture du message. Elle avait raison. Il y avait participé. Même s'il n'avait tué personne. Il avait été là et avait soutenu son élue dans la tentative d'assassinat de deux Seraphs. Il ne pouvait pas le nier.

[Cette guerre doit prendre fin. Le sang a déjà assez coulé. Les Seraphs ont perdu. Tu n'es donc plus en sécurité avec eux. C'est pourquoi, tu devrais aller dans une autre ville.]

Il tapotait ces mots sans grande réflexion. En réalité... Il avait abandonné l'idée de la convaincre.

[Tu...veux qu'on se voit ? Pour discuter ? Sans s'entre-tuer si possible. Même si à priori, il y a peu de chance que j'attente à ta vie.]

L'alcool avait tapoter son second message. Probablement un refus qui viendrait donc il ne s'ennuyait pas à réfléchir non plus.

Il se trompait. Ils avaient échoués. Nous étions toujours là. Toujours en vie. Et la vengeance finirait par sonner. Lenna allait répondre quand un deuxième message s'ajouta au premier.

Se voir ? Lenna manqua rire et s'en étouffer. Il n'était pas sérieux, là si ?

Elle répondit, balayant la demande de Russel d'un revers de la main, aussi facilement que si ça avait été une mouche.

Citation :

Si je te vois, je te tue.

Citation :

A priori hein.

Citation :

Tu ne m'auras pas encore.

Il s'imaginait quoi ? Qu'elle allait encore tomber dans le panneau ? Il était fou. Elle éteignit le téléphone, préférant l'ignorer pour le moment. Une ombre semblait rôder dans le quartier.

Lorsqu'on est détective, on évite de poser des certitudes et on laisse toujours un doute plané... Il fallait croire qu'ici, il n'aurait pas du poser le doute. Un soupir alors qu'il relisait la réponse cruelle de Lenna. Il répondit, après une gorgée de son whisky bas de gamme.

[Je ne t'ai jamais eut Lenna, ni même cherché à t'avoir. Je sais que j'ai dérapé ce jour-là... Mais ce qui s'est passé ensuite, n'a jamais été que pour ton bien. Même si les méthodes que j'ai employées t'ont fait souffrir, sache qu'elles m'ont également fait souffrir. Je me suis punis en même que j'essayais de te protéger.]

Il jouait carte sur table, l'alcool aidant grandement à se révéler de la sorte. En temps normal, il aurait été bien trop embarrassé pour dire ces choses. Non, plus encore, il aurait eut le sentiment que tout ceci n'était que des excuses... Pourtant, les choses ont changé, la situation n'est plus la même qu'au temps où ils étaient simple Nephil et Seraph. Sans qu'elle le sache, ils étaient tout deux dans la même misère.

Elle ne ralluma l'appareil que bien plus tard dans la soirée, alors qu'elle s'était assise à un bar pour se mêler un peu à la foule humaine, repérer les éventuels nephils ou dépressifs. Non, elle ne s'était pas arrêté pour boire un verre et se détendre. Elle ne faisait que donner le change.

Il divaguait ce mec. Elle ne comprenait rien.

Citation :

Qu'est-ce que tu veux?

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Me protéger en tuant mon voeu ? Ouais clairement pas la bonne méthode.

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Va te faire.

Elle ferma rageusement le téléphone, s'en voulant de continuer cette conversation. Mais malgré tous ses travers elle n'avait jamais pu lui résister. A croire qu'elle était complètement sado.

Un soupir alors qu'il observait son verre, puis après quelques temps, son portable se mit à vibrer. Un message qu'il lisait avec une grimace. Ce qu'il voulait...Comment le dire sans paraître pour un menteur ? En soi, il l'avait déjà dit. Il voulait qu'elle quitte la ville, qu'elle oublie tout ça. Mais...Ce n'est pas comme si les choses allaient changer. De toute façon, sur ce point, le trentenaire doutait honnêtement que la faucheuse l'écouterait. Elle lui en voulait, et le premier point pour qu'il se fasse écouter, était de rétablir la confiance qu'ils avaient eut antan. Or, est-ce chose possible ? Le Nephil avait tout fait pour que la Seraph ne lui fasse plus confiance.

Puis vint l'argument de Julien. Russel grimaça. Ce jour-là, il avait vraiment... Il n'était plus le même depuis son contrat, et ce jour passé chez Lenna avait marqué ce changement plus qu'il ne l'aurait jamais cru. Il n'était pas un saint, c'est une évidence. Jusqu'à aujourd'hui, il avait été un bel hypocrite... Peut-être même encore aujourd'hui, en conversant ainsi avec la jeune femme. Le dernier message le fit sourire légèrement. Elle pouvait l'insulter, l'envoyer bouler autant qu'elle le souhaitait, il n'avait aucun droit de la contredire.

[Il avait menacé ta vie.]

Certes, cela ne se serait probablement pas produit s'il ne s'était pas pointé dans un premier temps. Mais si ce simple incident était suffisant pour ce Julien utilise Lenna comme otage, alors il valait mieux éliminer la menace. Sur ce point, il n'avait pas de regret. Ce qui était paradoxal venant d'un ancien inspecteur qui a démissionné principalement parce qu'il ne pouvait pas tirer sur quelqu'un et ce même pour protéger son collègue...

[Je veux juste que tu sois saine et sauve... Que tu sortes de toutes ces manipulations. Ce monde...n'est pas le tien.]

Lenna est une femme qui aide les autres, quand bien même elle n'y trouve aucun intérêt. Elle mérite une vie heureuse, pas celle du monde des contractants qui consiste à tuer et encore tuer dans un intérêt purement malsain. Non en soi, l'intérêt est peut-être noble. Après tout, ils servent tous une cause 'juste' si on se place du bon point de vue. Mais quand bien même... Qu'ils aillent aux diables, tous ce qu'ils en sont.

[Retrouve une vie heureuse. Quitte cette ville, trouve toi un homme bien, fais des gosses, je ne sais pas. N'importe quoi qui te rendrait réellement heureuse. Mais avant toute chose, oubli tout ça.]

Il en avait de bonnes lui. Qu'est-ce qu'il en avait à faire de son bonheur ? C'était lui la cause de son malheur. Lui qui l'avait voué corps et âme à sa faction et à la mort.
Il n'avait qu'aider à détacher d'elle tout sentiments humains qui pouvaient lui rester.

Citation :

C'est trop tard.

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Je suis déjà morte.

Sa peau froide, son coeur absent, son manque de sommeil, d'appétit. Comment pouvait-elle encore prétendre à une vie humaine ?

Citation :

Personne à part un contractant ne pourrait l'accepter.

Citation :

Tu n'es qu'un idiot de croire qu'on peut s'enfuir.

Et même si... Ce cirque commençait à l'agacer et à faire remonter en elle des souvenirs qu'elle avait enterré. Il fallait en finir. Aussi, au lieu de renvoyer un énième sms, elle choisit la fonction appel, et écouta la première sonnerie résonner dans tout son corps. Elle ne pensait pas ressentir de l'adrénaline en appelant volontairement un ennemi Nephil.

Déjà morte... En ce sens ils avaient tout deux un point commun. Voir un miroir de lui-même sous la forme de la faucheuse n'était pourtant pas son objectif premier. Surtout lorsqu'il se voyait mal contredire sa propre image sur la question de se voir comme un cadavre. Pourtant, c'était un exercice qu'il allait devoir exécuter s'il voulait tenter de la convaincre du contraire.

Les messages continuaient de venir de la part de la Seraph et alors que Russel en sirotant son verre songeait plus précisément à la manière dont il allait répondre. C'est à ce moment là que son téléphone vibra plus fréquemment. Un appel, du même numéro que celui avec qu'il échangeait des messages. Il déposa un billet sur le comptoir, puis se dirigea vers l'extérieur qui était plus calme avant de finalement décrocher.

"Allo ?" Fit-il.

Nul doute que Lenna devait pas mal prendre sur elle-même pour se résoudre à appeler. Maintenant, que voulait-elle entendre ? Peut-être une réponse aux SMS qu'elle a envoyé quelques secondes plus tôt ?

"... Si tu étais vraiment morte Lenna... Alors pourquoi prendrais-tu la peine de me répondre ?"

Une première étape, la convaincre qu'elle n'est pas un cadavre. Une action aussi difficile que s'il tentait de se convaincre lui-même qu'il n'en était pas un. Mission impossible donc ?

Elle regrettait déjà de parler à ce félon. Simple mot pour ne pas dire d'autres insultes. Mais il devait comprendre. Il semblait tellement loin de la réalité.

Lenna l'humaine est morte. Je n'ai plus rien d'humain.

Elle devait poursuivre. A force d'enfoncer les arguments dans sa tête de pioche, p'tèt qu'il arrêterait de la couver de rêves utopistes?

Mon camp est tout ce qu'il me reste. Tu me dis de fuir, mais je n'ai rien à gagner à fuir.

Il allait lui ressortir le coup de refaire sa vie, faire des enfants, tout ça...

Pas un humain ne peut vouloir de moi. Mon corps... Il n'y a pas de bonheur pour moi. Pour aucun d'entre nous. Tu devrais le savoir. Je sais pas ce que tu cherches à faire, mais si ce que tu dis es vrai alors tu es bien naïf...

S'il pensait la convaincre aussi bêtement, il se trompait. Il était bien loin de ses préoccupations actuelles. Si tant est qu'elle en ait encore.

Il ne comprenait rien à rien. Pourquoi continuait-elle cette conversation stérile ? Peut-être parce qu'elle voulait se convaincre que les Nephils étaient plus mauvais qu'elle. Elle se posa à nouveau sur son tabouret de bar, et soupira, faisant tourner son verre sur lui même de son autre main.

Russel, pourquoi tu veux que je fuis ?

L'herbe n'était pas plus verte ailleurs.

La guerre est partout. Cela ne changera rien à ma situation.

A moins que ce Nephil ne soit plus fourbe qu'il n'y paraît.

Si tu espères que les seraphs partiront d'ici et vous laisseront champ libre...

Il l'avait déjà trompé une fois, il pouvait encore recommencer.

Non, elle ne comprenait pas. Ce n'était pas clair. Si alors ce n'était pas dans l'intérêt des Nephils pourquoi persistait-til à la savoir en vie ? Il avait tout de même attenté à sa vie.

Pourquoi t'y tiens tant ? A ce que je survive ?

On ne pouvait à pas parlé de vie en soi, puisque la vie est le propre de l'homme. Eux, les contractants, ne faisaient que se dépatouiller du piège dans lequel ils étaient tombés.

Quoi ? Tu peux pas être plus clair ? Qu'est-ce qu'a à perdre Bey si les Seraphs disparaissent ?

Le sujet de la conversation avait radicalement changé, attisant la curiosité de Lenna. Merde, elle était encore en train de tomber dans le panneau.

Merde Russel, lâche moi.

Elle raccrocha aussitôt au nez de son interlocuteur, trop énervée à l'idée de se faire embarquer dans un nouveau plan foireux. Elle n'avait pas oublié Isabella...

Il rappelle.
Lenna observa le téléphone d'un oeil morne. Une vraie moule à son rocher. Elle allait devoir changer de numéro. Il ne lui laisserait pas d'autre choix.
Mais l'envie d'en finir une bonne fois pour toute, pesait dans la balance.

Elle décrocha donc à la dernière sonnerie, et colla l'appareil sur son oreille.

Sois bref et clair.

Sinon je raccroche pour de bon, et tu peux toujours courir pour réussir à me joindre.

La Seraph répondit, exigeant une réponse succincte. Russel pondéra un instant, dévoilant alors une thèse que tout les contractants connaissaient.

"As-t-on besoin d'une raison pour souhaiter qu'une personne qu'on a aimé survive ?" Fit-il dans un premier temps. Puisqu'elle lui donnait une sorte de compte à rebours, il ne s'attarda guère plus longtemps sur ça. Se concentrant sur sa question par rapport aux intérêts de Bey.

"Bey a besoin d'énergie, comme tu le sais, les contractants donnent plus d'énergie que les ombres. Au vu de votre position désavantageuse, il sera aisé pour les Nephils que de tuer les Seraphs comme on tue les ombres."

Bien entendu, ce n'était pas forcément vrai, mais l'important était de convaincre, pas de dire la vérité absolue.

Ce n'était pas ce qu'elle appelait franchement de l'amour.

Oui, surtout quand on en a l'a torturé et tenté de la tuer. Donc je repose ma question : pourquoi ?

Lenna soupira profondément, tout ce cirque commençait à l'agacer sérieusement. Heureusement qu'il n'était pas en face d'elle, ce serait le moment où elle aurait voulu que la discussion cesse en lui plantant sa lame en plein coeur.

Je me fiche de ce que pense Kyu et Bey. Je n'ai pas de raison de partir. Que je meurs ici ou ailleurs ne change rien.

Torturé... Peut-être que ce serait facile de rejeter cette faute sur elle. Ces balles ne font que remémorer des regrets passées. Si ces regrets torturent la personne, alors elle ne peut s'en prendre qu'à elle-même. Mais voilà qui serait une affirmation des plus lâches venant de la bouche du trentenaire. Cependant, la tuer n'a jamais été une de ses pensées. Même lorsqu'il a coupé terme à leur relation, sa comédie n'avait pour but que de la convaincre qu'il ne pouvait plus se voir...

Pourtant, l'ivrogne avait été le premier à essayer de reprendre contact avec la Seraph. Il se sépare d'elle, puis essaie de se rapprocher... Un comportement des plus égoïstes et contradictoires. Preuve qu'il n'avait déjà plus toute sa tête à ce moment là.

"Tu n'as pas à me croire, mais si j'avais voulu te tuer, nous ne serions pas là à nous parler."

Inutile de mettre des formes, la faucheuse devait le savoir au fond elle. Qu'il n'avait jamais voulu vraiment la tuer.

"... Cela ne te dérange pas d'être utilisé par eux ?" Fit-il en désignant les contracteurs. Peut-être en disait-il trop, mais honnêtement, il se sentait frustré de ne rien pouvoir faire.

La lumière faisait doucement jour dans l'esprit de Lenna. S'il n'avait pas souhaité la tuer... ce qu'il disait alors pouvait peut-être être vrai.
Elle s'agita sur sa chaise, mal à l'aise à l'idée de ce que ça pouvait impliquer. Son ton n'en fut plus que cassant.

Je me fiche de qui m'utilise.

Puisqu'on en était à révéler les quatre vérités... autant aller jusqu'au bout.

Si je ne suis pas morte, c'est parce que je n'ai pas réussi à me tuer.

Alors, dans tout ça, si quelqu'un se servait d'elle... grand bien lui fasse ! La mort était sa compagne, elle n'avait pas peur de rejoindre ses bras. Rien, plus rien ne la retenait sur cette planète à part sa lâcheté.

Autre chose ou t'as fini?

Au revoir Russel.

Lenna raccrocha et reposa son téléphone. Elle allait devoir changer de numéro. Elle espérait que Russel en ferait autant, car elle allait devoir confier son numéro aux seraphs.
Elle aurait souhaité que les choses évoluent autrement, mais on ne pouvait rien contre le destin.
Ce type l'agaçait. Une boule lui serrait la gorge.
Il fallait enterrer tout ça sous une nouvelle couche de haine et de vengeance.
Et elle ne connaissait qu'un seul moyen pour ça.

Elle sortit du bar et s'enfonça dans la nuit, qui promettait d'être longue.

Après que la Seraph ait raccroché, l'ivrogne balança son portable au sol, le fracassant. Ceci calma légèrement sa frustration mais bien trop légèrement. Il claqua la langue, mettant alors la paume de sa main sur son front. Se demandant s'il avait au moins essayé au final d'écarter Lenna de tout ça. Mais non, il n'avait rien fait, juste parler, remémorer un passé qui était douloureux pour elle et pour lui sans au final parvenir à un résultat qui le satisfasse.

"Bon sang..." Jura-t-il en grinçant des dents.

Peut-être que demain, la faucheuse le tuera. Au moins... Elle avait eut la patience de l'écouter, même s'il est peu probable qu'elle ne l'ait cru. Au final, que ce soit les Seraphs ou les Nephils, ils resteront sous le joug des contracteurs, spécialisé dans le mensonge par omission. Bey ne ment pas, probablement que Kyu non plus. Mais ne pas mentir ne veut pas dire qu'ils disent tout. L'ivrogne s'écarta du bar où il était, changeant naturellement de lieu. Au final, seule la dépression l'habitait, peu importe les litres d'alcools que son corps emmagasinait.