Demeure Brun:

[Ce RP se passe en été 2003]

Furieux, Théodore se roulait sur son lit, frappant du poing mou contre son oreiller. Il en avait marre que Georges l’empêche d’aller s’amuser avec ses amis sur la colline ; à chacune fois c’était pareil. Dès que son père s’absentait – c’est-à-dire la plupart du temps -, il ordonnait aux domestiques de la maison de veiller sur les sorties et sur son fils fugueur afin que celui-ci demeure cloisonné chez lui. Monsieur Brun détestait voir sa progéniture allait fricoter avec des pauvres, à la lisière du quartier Sud – et il était prêt à tout pour le garder loin de ça.

Mais le garçon ne comprenait rien à toutes ces raisons, et voulait simplement s’amuser avec amis à leur endroit habituel, loin de cette maison hautaine et ennuyante à mourir. Mettant un terme à ses pleurs, il mit un peu d’ordre dans ses vêtements et commença à s’assoir pour réfléchir. Un plan pour sortir, c’était ce qu’il devait trouver – mais, comment ?

L’enfant passa la tête à travers la fenêtre, mais c’était définitivement trop élevé pour ses petites jambes. S’enfuir en courant serait aussi trop difficile, étant donné qu’il  était trop lent pour ça ; il lui fallait autre chose. Son regard balaya sa chambre, en quête d’une solution soudaine, mais rien ne venait. Il soupira, et se rallongea.

Quelque chose pouvait peut-être marcher. Enfin, c’était une idée plutôt tordue, mais rien ne lui coûtait d’essayer ; mise à part une fessée et une engueulade mémorables. Tout bien réfléchi, ça valait tout à fait le coup.

Quelques jours auparavant, il avait chapardé la clé du cellier pour pouvoir manger la nuit, et il avait compris le fonctionnement du gaz de la cuisine à force d’être obligé de rester à côté de la gouvernante. Alors, en alliant les deux, il pourrait peut-être attirer l’intention assez de temps dans la cuisine, et pouvoir passer à la suite des opérations – et l’artifice utilisé dans ce mélange serait tout simple : du maïs, beaucoup de maïs, dans une casserole chauffée à fond. De quoi envahir la cuisine de délicieux mets, et de monopoliser momentanément l’intérêt de la gouvernante.
Un souci de réglé donc, trois restant.

L’étape suivante, était antérieure en réalité : défoncer les toilettes pour inonder l’étage. Simple, concis, efficace. Un de moins.

Un plan en béton donc, il ne restait plus qu’à se préparer et à le mettre en place. A cet instant, Théodore se sentait comme un prisonnier de guerre qui tentait de s’évader ; un jeu avant le jeu, c’était presque plaisant. Comme quoi, l’enfoiré qui lui servait de père était capable de le rendre, indirectement, heureux parfois.

Un sac à dos pour le maïs, les clés au fond de la poche, une lampe torche pour ne pas allumer la lumière du cellier ; une glace pour faire comme dans les films, une cordelette fragile et une balle à rebonds, l’agent Brun était prêt à agir.

Mais avant que tout cela commence, il restait la première étape. Ouvrir la porte de sa chambre. Quelque chose de trivial, il va de soi, mais néanmoins nécessaire.
Un sourire béant et malicieux aux lèvres, il ouvrit lentement la plaque de bois pour être le plus discret possible. Il plongea ses yeux à gauches, en direction de la salle de bain, et tout semblait sans danger. Il avança, mais très rapidement sa tête en rencontra presque une autre.

Chanel était là, devant lui. Sa petite sœur de sept minutes – une Brun, donc une héritière des défauts de Georges – avait un regard sévère dirigé vers lui, et elle semblait s’imposer comme une sérieuse entrave aux opérations. Il fallait que Mad Théodore s’en sorte habillement s’il voulait continuait vers son Graal, ou alors il finirait sa journée dans cette pièce monotone.

« - Euh… Salut Chanel. »

Je venais de finir mes cours de violons. Maman me parlait de son passé de médecins et je lui avais donc demandé si c'était parce qu'elle était médecin qu'elle écrivait mal ou si écrire mal l'avait destiné à devenir médecin. Elle m'avait parlé longuement sans que je comprenne ce qu'elle disait. Des mots trop longs, trop compliqués. Je hoche la tête par intermittence et elle me lâche. Mais au final, je me retrouvais toujours avec ce dilemme digne de la poule où de l’œuf.

Mais passé quelques secondes, j'abandonne cette réflexion profonde. C'est trop compliqué pour mon petit cerveau. J'erre donc dans la maison, comme une âme en peine. Tous les domestiques sont présent. Papa est parti en dîner d'affaire et maman est allé au centre ville. Mes autres grands frères sont encore au lycée.

Je pourrais lire encore, mais ca fait longtemps que j'ai lu et relu la vieille bibliothèque qui sert de fumoir a papa. Il y invite des monsieur aussi gros que lui pour conclure des affaires. Je suis sur que eux ils ont acheté pleins de livre aux page jaunie pour se la peter. En vrai, je sais même pas si papa et maman savent lire ! Hihi, ca serait drole que ca soit pas le cas !

Je me balade dehors, cherchant Théodore pour l'embêter un peu. Ca fait longtemps que j'ai pas joué avec lui. Au fond, je l'aime bien Théodore, même qu'une fois il a joué avec moi au Barbis. Depuis ce jour, il arrête pas de le nier. Il dit a tout le monde qu'il joue pas aux jeux de filles, mais je le sais qu'il ment !
Je le cherche donc, en essayant de pas toucher les bords des dalles avec mes pieds, parce que sinon je perds au jeu.
D'ailleurs, en y repensant, je suis sur qu'il est encore partie jouer dehors avec ses amis. Ou alors il
est dans sa chambre, a faire un plan pour s'échapper et rejoindre ses amis.

Ne le trouvant pas, je décide qu'il doit être encore en haut. Je me précipite dans la maison, puis monte l'escalier à moitié en courant. C'est dommage qu'il me les fassent pas rencontrer, je m'ennuie toute seule.
Il est là, je le vois, avec son gros sac a dos Batman. Je croise les bras pour mieux l'intimider. Ca a l'air de marcher !

« - Euh… Salut Chanel. »

Je parle lentement comme un inspecteur de police :

« Bonjour môsieur Théodore !  Hum hum..."

Je m'éclaircis la gorge avant de dire tout simplement mon plan :

"J'aimerai devenir un hors la loi comme toi ! Allez, si tu dis non je dis a maman que tu as remplacé la farine par du plâtre le mois dernier ! »

Je pouvais pas cacher ma joie, elle irradiait de mon visage. C'est fou comment je pouvais faire chanter mon frère au vue de toutes les bêtises qui restaient à découvrir pour nos parents. Le visage fière, je supplie Théodore de m'emmener là ou va d'habitude !

« Allez ! Laisse moi jouer avec tes amis ! Steuplé,  s'teuplé, s'teuplé, s'teuplé, s'teuplé, s'teuplé, s'teuplé... »

Je continuerai, jusqu'à que Theodore accepte, on qu'une domestique monte, intriguée par le bruit !

Elle voulait … S’évader avec lui ? Ce n’était pas vraiment prévu dans le plan ça, il allait devoir improviser. Son super plan ne prenait pas vraiment en compte de faire sortir deux personnes de la maison, et il allait devoir y apporter quelques retouches si jamais il acceptait d’emmener sa sœur avec lui – mais de toute manière, il n’en avait pas envie. Elle allait sûrement raconter qu’il avait fait ça à Georges et comment il l’a fait, lui attirant bien plus d’ennuis qu’autre chose. Et puis, ce n’était pas des jeux de filles auxquels ils jouaient, ce n’était pas pour Chanel. Il y avait bien Michelle, mais… Ce n’était définitivement pas pareil.

Théodore recula un peu, souriant et réfléchissant à un moyen de s’en sortir. Pas une pensée ne traversait son esprit sans que des supplications aigües viennent la parasiter, et la menace de la petite fille était bien réelle. Mais bon, il ne pouvait pas savoir que Chanel allait découvrir que c’était lui qui avait fait ça ! C’était juste pour rigoler en voyant Georges se casser les dents en croquant dans le gâteau… Ça n’a même pas fonctionné, en plus.

« - Ecoute, j’sais pas si… »

Elle ne se taisait pas, et ça devenait insupportable. Mais s’il la disputait, ça allait très mal finir, alors il se résigna, la mine déçue.

« - Bon, ok. Rentre on va parler du plan. »

Il déposa son attirail au pied du lit et vint se poser dessus, attrapant une feuille de papier froissée et commença à griffonner dessus.

« - Si tu veux qu’on joue ensemble, alors il va falloir que tu t’évades avec moi ! J’ai un plan, mais faut que tu me promettes de rien dire à papa, ni à maman, et de pas faire la poule mouillée ! »

C’était dangereux de tout dévoiler de la sorte, sauf qu’il n’avait pas le choix. Chanel pouvait être ennemie ou alliée, et en temps de guerre, il valait mieux remplir un camp que l’autre. Pour se donner un air plus sérieux, il se vissa une casquette et dressa son dos.

« - J’serai le chef de la mission, agente Brun. »

Non négociable. Déjà qu’il la laissait jouer, alors si en plus elle se mettait à décider des choses … Autant se rendre tout de suite.

« - Bon, ok. Rentre on va parler du plan. »

Ouiiiiii ! Je retiens un crie de joie !
John me laisse entrer dans sa chambre, il dépose le sac au pied de son lit et se place en hauteur. J'ai presque envie de me mettre au garde a vous ! Ah ! Il est l'heure d'utiliser la strategie !

« - Si tu veux qu’on joue ensemble, alors il va falloir que tu t’évades avec moi ! J’ai un plan, mais faut que tu me promettes de rien dire à papa, ni à maman, et de pas faire la poule mouillée !
- J’serai le chef de la mission, agente Brun. »

Je ferais presque la moue parce que ce n'est pas moi la chef. Pourtant je suis la plus intelligente de nous deux, maman me l'a souvent dit !

« Si tu es le chef, est ce que je peux t'aider pour la stratégie ? Je sais plein de chose sur les adultes vu que je suis une infiltrée dans leurs rang ! Et puis ils peuvent même m'obéir si je suis gentille ! »

Je me redresse de tout mon haut, ce qui fait que même si Théo est sur son petit sac, je le dépasse encore de quelques centimètres. C'est petit, je sais... Un peu comme Théodore !

L’air irrité, Théodore fixa sa sœur du regard. Malgré son sac-estrade, sa jumelle demeurait plus grande que lui – une injustice terrible pour celui qui s’autoproclamait ‘Chef’ -, et acculé, il dû user de son dernier atout pour récupérer l’ascendant : être sur la pointe des pieds.
Maintenant qu’il dominait l’assemblée, il éclaircit un peu sa voix aigüe, prit une grande inspiration et commença à son discours, cherchant à être le plus convaincant possible.

« - Soldat Chanel, vos qualités en tant que stratège et espion chez nos ennemis pourraient en effet être appréciables. Mais avant cela, je vais vous … »

Cela faisait déjà trop longtemps qu’il forçait sur ses petites chevilles et qu’il bombait le torse, et ses joues tournaient peu à peu au rouge par manque d’air. Il perdit subitement sa superbe, respirant rapidement, puis continua, beaucoup plus bas.

« - Il y a quatre ennemis à divertir, et j’ai déjà un plan concernant les deux premiers : on pourrait casser les toilettes pour qu’il y est plein d’eau, et que quelqu’un soit obligé de venir ! »

En même temps qu’il expliquait cette partie, il faisait des gribouillis incompréhensible qui devaient signifier la position des cabinets.

« - Ensuite, j’ai la clé du garde-manger. On pourrait prendre du maïs et faire du pop-corn, si on en met plein ça fera boom, et hop, un autre en moins. »

Deuxième dessins illisibles, mais cette fois il releva le regard vers sa sœur - agente secret – soldat, et tenta de reprendre son air à peine sérieux de plus tôt.

« - Quelque chose à revoir, maître stratège ? »

Décidément, il était vraiment gentil avec elle aujourd’hui. Peut-être le laissera-t-elle tranquille les prochaines semaines comme ça … Ou voudra-t-elle continuer ? Bien, un allié dans la maison pourrait bien finir par lui servir. Et puis, même si elle fricote avec l’ennemi, elle reste sa jumelle … Elle ne peut pas être mauvaise, si ?

Théodore se mit sur es chevilles pour me surplomber, c'était presque mignon de voir l'effort d'éloquence qu'il déployait avec son petit air agacé et sa voix a peine plus grave que la mienne.

« - Soldat Chanel, vos qualités en tant que stratège et espion chez nos ennemis pourraient en effet être appréciables. Mais avant cela, je vais vous … »

Il eu l'air assez mal. A cause de sa posture probablement Mais pour ne pas le vexer, je fis comme si de rien n'était.

« - Il y a quatre ennemis à divertir, et j’ai déjà un plan concernant les deux premiers : on pourrait casser les toilettes pour qu’il y est plein d’eau, et que quelqu’un soit obligé de venir !
- Ensuite, j’ai la clé du garde-manger. On pourrait prendre du maïs et faire du pop-corn, si on en met plein ça fera boom, et hop, un autre en moins.
- Quelque chose à revoir, maître stratège ? »

« Hum... »

Je me touche le bas du menton en réfléchissant. C'est un plan bourrés de fils blancs et assez destructeurs. Mais il fallait le dire avec tact

« C'est un peu nul, non ? »

Une fois chose faite, je commence à dévoiler les faiblesses de ce

« Déjà, détruire les toilettes ça sera dur de le faire sans marteau. Et puis ça fera trop de bruits. Ils vont se douter de quelque chose. Et comme il n'y a qu'un escaliers, si les adultes décident de monter on sera pris au piège. »

Je tourne un peu en rond dans la chambre, l'air de réfléchir sur la marche a suivre.

« Nan, ce qu'il faudrait c'est les attirer tous dans un même endroit et en profiter pour partir. Mais qu'est ce qui pourrait attirer a coup sur les adultes ? »

Petit silence, mon cerveau tourne a plein régime. Comment faisait papa pour attirer ces quatre personnes ? Mais oui ! C'est ça !

« L'argent ! C'est par ça que les adultes sont attirés ! On pourrait payer les adultes pour qu'ils aient tous faire quelque chose ailleurs et nous laisser le temps de partir a la colline non ? Ou on met plein d'argent dans le garage et on attend qu'ils soient tous en train de le ramasser pour partir ? »

J'étais fière de moi !

Le garçon croisa les bras quand sa sœur critiqua complétement la qualité de son plan. Non, ce n’était pas nul ! Il y avait quelques imperfections, mais globalement c’était réfléchi, intelligent et prometteur – mais définitivement, Chanel avait tort.
Avant que Théodore puisse râler et expliquer en bougeant les bras combien son idée pouvait fonctionner, sa jumelle avait déjà embrayé sur sa ruse à elle. Attirer les quatre à la fois au même endroit ? Oui, c’était un éclair de génie assez sommaire ; rien de nouveau pour le moment. Mais à la vue des différents postes qu’occupaient les geôliers, leur trouver un intérêt commun n’était pas des plus aisés.

A contrecœur, le petit fit une moue du visage d’acquiescement. L’idée était plutôt pas mal, surtout provenant de sa sœur, et il y avait des chances que ça fonctionne… Mais ça manquait d’amusement. Balancer de l’argent, c’était mieux, faire une bêtise en même temps, c’était mieux. Alors, quid de les brûler ?

« - Mouais. Mais nous faut de l’argent. Tu sais où papa range ses billets ? »

L’avis semblait mitigé – parce que, tout de même, il ne pouvait féliciter sa sœur pour le moment. Et puis, il fallait combien de billets ? Les grands adorent en avoir plein, alors que les petites mains des deux jumeaux ne sont pas assez grandes pour en contenir autant ; il va sans dire qu’il avait déjà oublié l’existence de son sac.

« - Et p’is t’as pas le droit de dire que mon plan est nul, nah. J’suis sûr que les pop-corn ça auraient trop bien marché ! »

Une mine boudeuse pour accompagner son petit instant ronchon, et il avança en direction de la porte, reprenant un peu l’air décidé du début.

« - Bon, en route, Brun 2 ! »

« - Mouais. Mais nous faut de l’argent. Tu sais où papa range ses billets ? »

Hum... Je sais pas. Mince, pour une fois que mon frere dit des trucs intelligents... Il me pause uen colle. Mon front se plisse d'une ride de concentration.

« - Et p’is t’as pas le droit de dire que mon plan est nul, nah. J’suis sûr que les pop-corn ça auraient trop bien marché ! »

Si j'ai le droit ! Surtout qu'il était nul ce plan ! Mais je me tais, n'ayant pas vraiment envie de faire un combat de "Si ! - Nan ! -Si ! - Nan". Comme a son habitude, il rale un instant, mais ca ne dure pas. D'ailleurs c'est pour ca que je l'aime mon petit grand frère ! Quand il boude, c'est le seul de la famille où je peux compter dans ma tête jusqu'à dix et où je suis sûr qu'il arrête de m'en vouloir a la fin du décompte.

« - Bon, en route, Brun 2 ! »

Je sourie. Contente de pouvoir jouer a faire des bêtises avec lui

"Théo ! je me souviens où il est !"

Suite a cet éclat de voix je me fige avant de me baisser et de parler a voix basse, le doigt sur la bouche en chuchotant exagérément fort

"Il est dans la cachette secrète de maman, là ou elle cache mes cadeau de Noël !"

Je descends discrètement l'escalier pour l'emmener dans le garage ! là ou maman a sa cachette secrète a bijoux et a cadeau de Noël !

Attrapant son sac à dos un peu gros au passage, Théodore maudit le nom de sa sœur de dénominations légumineuses trois fois avant de se lancer à poursuite ; la petite étant partie un peu sans prévenir tandis que le garçon n’était pas prêt. Dans l’escalier, le chef de l’escouade miniature descendait à pas feutrés, talonnant sa subordonnée de près. Alors, l’argent de papa était dans la cachette de maman ? Le garçon était tout de même relativement sceptique à cette idée : Georges refusait de partager son morceau de pain avec sa femme, alors pourquoi il irait jusqu’à lui confier ses bouts de papier super précieux ?

Bah, il balaya ses doutes rapidement en se disant que Chanel devait s’y connaître là-dedans – après tout, c’était bien ses cadeaux qui étaient cachés là-bas, et c’était la chouchoute des parents. Enfin, il faut aussi avouer qu’à côté du rejet de Théodore par ses géniteurs, n’importe qui passerait pour le préféré ; à moins que ce ne soit l’enfant lui-même qui se détache de ces personnes susnommées.

Pourtant, alors que les deux lurons n’étaient plus très loin de leur objectif numéro un, porteur du même chiffre arrêta sa sœur en l’attrapant par l’épaule.

« - Y a de la lumière dans le garage. »

Il l’avait averti en chuchotant, et il lui fallait maintenant faire preuve d’ingéniosité pour pénétrer dans l’enceinte de la pièce, tout en faisant sortir son occupant. Lentement, le garçon dépassa sa sœur et avança vers l’endroit recherché, pour accomplir une mission de reconnaissance : s’ils voulaient déloger l’occupant, il fallait connaître son identité et ses mœurs. Bon, avec des mots plus utilisés, mais c’était globalement le sens des pensées du cerveau de la bande.

Lançant son regard à travers la fente qu’offrait l’espace entre la porte et le cadre, Théodore faillit pousser un soupir de soulagement. Ce n’était qu’un de ses frères qui était rentré en avance et en transit, pour changer de scooter car celui-ci qu’il utilisait auparavant ne lui plaisait plus – une habitude chez ce grand-là, pratiquement plus capricieux que le petit. Patienta tranquillement que la porte extérieure se referme, le mini châtain franchit le seuil et fit signe à sa petite sœur de le rejoindre.

« - Ouf, c’était rien. Elle est où la cachette de maman ? »

En passant, il était aussi curieux de découvrir si ses cadeaux étaient aux côtés de ceux de sa sœur – parce qu’après tout, même si les siens étaient en général plus basiques, ils existaient tout de même.

Après l'attente étrange muée dans un silence imparfait. Théo était revenu vers moi.

« - Ouf, c’était rien. Elle est où la cachette de maman ? »

Attends ? Il ne le sais pas ? Tss. Je sourie un peu. Mon dos se redresse et je commence a parler sur un ton de miss je sais tout.

"La cachette de maman c'est là ou elle met tout son argent liquide. C'est là où je me cache aussi pour jouer au jeu de l'imaginaire"

Je sais pas s'il connait ce jeu. J'imagine qu'il peut y jouer avec quelqu'un. Mais moi, je suis seule pour jouer a ca... C'est pas avec nos grand frère que ça va s'arranger
J'entre dans le garage la première. Savourant la douceur des lieux, je perce la semi obscurité de mon regard avant que mes yeux ne s’arrentent sur une barre métallique fine. Je me précipite et la saisit avec une habileté relative. Comme a chaque fois elle est un peu lourde pour mes bras d'enfant. Mas l'habitude prend le relaie et je la dirige sans être maladroite

Je me met tout de suite à courir sans considération pour théo. Mes pas m’amène dans la salle adjacente. Une pièce ou papa ne va jamais : une authentique buanderie avec son lot de machine à laver et de vêtements propres en train de sécher .
Le temps que Théo arrive, je vais au centre de la pièce. Admirant le hublot de la machine a laver qui tourne, infatigable et fascinant. Mais c'est bien les bruits discrets de Théo qui me font atterrir sur terre, me tirant de ma rêverie soudaine.
Après m'être un peu ébrouée, je révèle la cachette. Sans la moindre hésitation, je lève la tête et pousse la trappe au plafond avec la barre métalique. Le mécanisme s'active et une échelle tombe délicatement a mes pieds..

"Tu as pas peur des monstre hein ? Parce qu'il fait sombre là haut !"

Je me moque un peu de mon petit grand frère avant de prendre l'échelle et d'y grimper. Une fois en haut, j'active la lumière a tâtons. Y'a une multiprise pas loin... Ah ! Le bouton est là ! Après un petit *clic*,Une simple ampoule à nue qui révèle les alentours dans une lueur froide et jaunâtre. Comme a chaque fois que j'y vais, le grenier au dessus du garage est poussiéreux. Le plafond est formé d'une charpente au motif hypnotique et mystérieux pour mon regard d'enfant. La lumière basse fait d’immense ombres a chaque objet. et mon ombre semble gigantesque ! presque aussi grande que l'ainé de mes frères !
Je m'avance vers une malle métallique. Un objet comme un autre qui encombre les lieux. Un objet peu accessible et dont la banalité se fond avec le capharnaüm qui règne ici. Pas dupe, je soulève son couvercle. A l’intérieur, il y a plein d'argent et un deuxième téléphone. Je vois même dans le fond un imper sombre. Je montre le contenu a mon petit frère avec un sourire qui trahis une pointe de fierté.

"C'est ce qui me fait penser que maman est une agent secrète en vrai !"

Théodore eut un petit rictus amusé, suivi du petit soufflement typique des rires contenus. Tout le monde savait que l’on appelait ça le jeu imaginaire, et non le jeu de l’imaginaire – ce déterminant en trop montrait bien la différence entre les deux gosses. Enfin, s’ils parvenaient à atteindre la colline, Chanel découvrirait bien ce que cet amusement est véritablement ; et il y a fort à parier qu’elle s’en éprendrait définitivement.

« - On dit le … »

Alors que le garçon parlait, le doigt en l’air, il se rendit compte que son interlocutrice n’était plus ici. Dans le garage ? L’aventurier pénétra à nouveau dans la pièce, la scrutant du regard pour repérer sa jumelle, mais rien ; sauf une porte ouverte non loin et des bruits de pas qui fusaient. Il traversa la salle, puis rejoint la source du bruit au centre de l’espèce de buanderie.
Découvrant alors la trappe sur le plafond, l’enfant marqua un temps d’arrêt. Il y avait quelque chose en haut ? Vraiment ? C’était bien un coin dans lequel il n’était jamais allé ; ce qui n’était finalement pas très étonnant pour quelqu’un qui fuyait autant que possible sa maison.
Une fois la nouvelle assimilée, il plaça ses bras en triangles contre ses côtes et répondit, la voix claire, à l’individu bien trop grand qui se trouvait là.

« - Peuh, j’ai peur de rien ! »

Faux. Mais il ne devait pas perdre la face devant sa frangine, cela était parce que… parce que… Il ne devait pas, c’est tout. C’était Théodore l’agent secret, le rebelle, l’aventurier, celui qui s’élevait envers et contre tous – l’enfant sans peur, le héros méconnu. Du moins, c’était ce qu’il se plaisait à imaginer, et ce n’était pas un peu de noir qui allait l’effrayer.

Plus il montait, et plus il apercevait de … Ah non, rien en fait. Il faisait noir, et cela ralenti considérablement sa montée – il n’était peut-être pas autant parfait qu’il aimait le prétendre. Au bout de quelques secondes, la lumière allumée et sa sœur arrivée, il se décida à gravir rapidement le reste la petite échelle.

C’était bondé d’objets tous plus inutiles les uns que les autres. Là, une vieille lampe à laquelle le mauvais éclairage associée une ombre presque florale ; ici, un nain de jardin qui paraissait dont le verso sombre semblait monstrueux. Reculant par réflexe, Théodore arrêta bien vite son inspection pour retourner auprès de Chanel. Le contenu de la malle était assez surprenant, il faut l’avouer – et cela lui donnait presque envie de la prendre pour compléter son kit de l’espion.

« - Tu crois ? Tu penses qu’on peut prendre le manteau ? »

Que lui arrivait-il ? Tout portait à croire qu’il était en train de laisser le commandement à sa sœur, et cela ne lui plaisait guère. Alors, il sorti rapidement l’imperméable et l’enfila. C’était bien trop grand pour lui, mais il s’éloigna, dépassant la lampe, puis releva son espèce de cape veste jusqu’aux yeux.

« - Je suis le comte Draculaaaaa ! »

S’en suivit un rire diabolique ; mais soudain sa voix se tût.

« - Qu’est-ce que vous faîtes là-haut ? Descendez de là, Théodore et Chanel ! »

Alerte ! Exfiltration demandée ! Ils avaient été repérés ! Vite, il fallait une diversion, ou une sorte ; mais sans idée dans l’immédiat, le garçon lança un regard plein de désespoir en direction de sa sœur. Finalement, ils auraient dû suivre le premier plan.

J'éclate de rire en écoutant mon frere. C'est peut être la premiere fois que je rigole avec lui depuis un sacré bout de temps. Et au fond je l'aime bien théo. Ca me manque un peu quand on était encore plus petit et qu'il jouait avec moi. Avant qu'il décide de fuguer presque tous les jours pour jouer avec d'autre enfants.

« - Qu’est-ce que vous faîtes là-haut ? Descendez de là, Théodore et Chanel ! »
- Reste silencieux soldat. Je te couvre,
Apres avoir chuchotté ces mots, je me dirige vers la trappe. Montrant ma tête pour identifier l'ennemi.
- Désolée Oliver, je parlais toute seule. Et Théodore il est pas là !
« - J'ai bien entendu deux éclats de voix distincts. Théodore est avec vous ! »
Mmmh... Je dois pas prendre les adultes pour des débiles. Il faut que j'emploie des arguments. J'entends presque mon cerveau se mettre en branle quand je commence a réfléchir.
- Nan c'est moi. Je jouais un autre personnage alors j'ai changé de voix. Et puis Théodore il peut pas être avec moi : Déjà il a peur du noir et des monstres du grenier. Et puis il m'aime pas donc il joue jamais avec moi.  

Je pense qu'Oliver me crois. Parce qu'il a l'habitude de me trouver seule ici. Ou alors qu'il s'en fiche.
"Alors rangez le désordre du grenier, éteignez la lumiere et fermez la trappe. Je veux plus vous voir à jouer dans le grenier seule et sans surveillance. C'est dangereux !"

Je me retourne vers théo en chuchottant du plus bas que je peux : "Je vais tous les distaire. Dès que je ferme la trape. Tu rallumes la lumiere. Tu compte jusqu'à mille avant de t'enfuir. Ok soldat ?

Je me dirige avec gravité vers l'échelle. J'éteins la lumiere avant de commencer à descendre les barreaux un par un. Je me glisse jusqu'en bas et Oliver se sert du truc en métal pour refermer la trappe et remonter l'échelle. Mais on peut facilement l'ouvrir de l'interieur. J'ai confiance en mon soldat Théo. Il est pas bien courageux et pas bien malin. Mais c'est mon frere donc je suis bien obligée d'avoir confiance en lui.
En attendant je commence les traditionnelles excuses avec des regards honteux et des réprimandes. Je lache un traditionnel : "Promis je recommencerai plus".

Mais une fois libre, je me dirige calmement dans le salon. Personne ne me voit ? Cool ! je me met par terre doucement et je hurle du plus fort que je peux : "AIEUH J'AI MAL ! AIE ! AIEEEEEUH !
Des vraies fausses larmes coulent sur mes joues.Mes plaintes sont entrecoupées de sanglots plus vrais que nature. Au bout de quelques secondes un adulte arrive en fanfare, il prévient les autres et j'attire les regards compatissants ou blasé de quatres méchants a la solde de nos mortels ennemis : Bientôt la panique guette les quatre alliers. Je n'ai qu'a esperer que le Soldat Théo s'en sorte !

A genoux sous sa cape, le garçon fixait le sol avec un intérêt fameux. Que devait-il ressentir ? D’un côté, la peur de se faire attraper et que sa mission soit avortée le tiraillait, et de l’autre il ne pouvait pas supporter de passer au second plan derrière sa petite sœur jumelle. Toujours était-il que le moindre bruit pouvait trahir sa présence, et que le type en bas des escaliers n’était pas un plaisantin ; c’était plutôt le genre gorille, avec ses deux mètres de haut et autant de large.
Pour autant, la mine hésitante de l’enfant s’accorda sur un léger sourire. Chanel s’en sortait plutôt bien à vrai dire, et il y avait peut-être même moyen qu’elle réussisse à cacher son frère – voilà une performance assez inattendue et appréciable. Tout compte fait, il était envisageable désormais de l’emmener sérieusement sur la colline.

Lorsque l’échange arriva à son terme, Théodore acquiesça brièvement à l’ordre que sa subordonnée venait de lui donner. Lentement, tandis que la petite fille descendait l’échelle, le chef s’approcha de l’interrupteur de la lampe. Un mince filet lumineux éloignait l’obscurité de la pièce, mais aussitôt que l’interstice serait bouché, sa hantise reviendrait.
Clic.

« - Un… Deux…Trois… »

S’aidant de ses doigts, le mathématicien en herbe s’adonnait à un compte des plus passionné ; mais son esprit était fréquemment distrait par le bruit qui provenait d’en bas. Sa sœur hurlait ? Etait-ce simulé, ou bien réel ? Enfin, la soldate s’était sacrifiée pour le bien de la mission, alors il était hors de question que ce malheureux événement perturbe l’agent spécial.

« - Quatre-vingt-huit… Quatre-vingt-neuf… Quatre-vingt-onze… Quatre… Euh non. Quatre-vingt-neuf…Ah, zut, mille ! »

Contre toute attente, Théodore s’était égaré dans les nombres – pour sa défense, compter jusqu’à mille alors que l’on dormait en cours d’arithmétique n’était pas facile.
Ouvrant soudainement la trappe, il descendit à pas feutrés l’escalier. Une fois en bas, alors qu’il se dirigeait vers la baie vitrée pour s’enfuir, un regret le prit. Soufflant un râle, l’enfant s’approcha de la pièce dont provenait les pleurs de sa sœur et la découvrit par terre, souffrant visiblement.
Le soldat se mordit la lèvre, mais lorsque son regard reparti de sa camarade il en croisa un autre. Oliver avait capté ses yeux, et savait très bien ce qu’il comptait faire, à son grand damne. Ecarquillant soudainement ses globes, Théodore se lança dans le sprint de sa vie, se ruant vers la sortie la plus proche pour l’ouvrir avec force et continuer à courir dans le jardin. La haie franchie, aucune main ne l’avait encore attrapé ; pourtant, il savait qu’il devait ruser s’il ne voulait pas se faire attraper.

Dans un éclair de génie, et d’un ultime élan de fraternité, le fuyard contourna la maison, tout en veillant à rester aux abords du jardin, et montra sa tête à travers les buissons face au salon. Si Chanel voulait le rejoindre, c’était le moment… Tant est qu’elle ait l’idée de le chercher un peu.

Mon regard larmoyant croise celui de soldat brun. J'essaie de lui communiquer vaguement quelques instructions mentale : "Ne te fait pas avoir par ca ! Trace ta route et disparait soldat ! Va joué je te rejoins les renfors, ils feront barage a l'envahisseur et..." Trop tard ! Oliver à capté notre échange mentale ! Du moins il me regarde et se tourne vers Théo. Probablement qu'il sait lire dans les pensée ce fourbe méchant ! Soldat brun  ! Oliver est parti a ta recherche ! Cours soldat, cours comme si ta vie en dépendait ! C'est ainsi que j'encourage mentalement Théo avant que Olivers n'entame le premier pas vers lui. Obéissant au doigt et a l’œil, théo s'enfuit en courant. J'entends la porte s'ouvrir et se claquer violement deux fois. Un brin d'orgueil vient gonfler ma poitrine. L'élite de l'élite ! la crème de la crème. Théo, le soldat le plus puissant du monde m'obéissait ! Youhou !

-Vous allez bien mademoiselle ?

Je me surprends a redescendre sur terre, accompagné de deux domestiques qui semble vaguement inquiète et septique. Grmbl... Faut que j'essaie de la jouer fine

- Oui, je vais très bien madame. Je peux retourner jouer ?

Apparemment ca ne leur plait absolument pas. Je vois une grimace de colère qui transparait dans ses yeux d'une des femmes.

- Tout ce cinéma pour ca ? Jeune fille, votre mère a été claire. Si vous faites encore ce genre de caprice, elle m'a autorisé a vous punir. Tu vas rester dans la cuisine avec nous jusqu'au retour de tes parents !

Sans autre procès, la domestique me prend la main et m'oblige a aller dans cette pièce. Par ma fenêtre, je vois encore la terrasse, et j'envie mon frère. Il doit déjà être sur la colline...

Trottinant sur le chemin de la colline, Théodore ne pouvait s’empêcher de lancer quelques regards en arrière, à l’occasion. C’était vraiment dommage que sa sœur n’ait pas réussi à l’apercevoir dans le jardin, parce que, au final, eh bien … Elle n’était pas si nulle. Jouer avec elle, même si cela avait été plutôt court, s’était avéré être amusant et même plein de promesses pour l’intégrer à son groupe d’amis.

Sauf que, malgré ses dix longues minutes d’attente – ou peut-être moins, il n’était pas le plus talentueux pour lire l’heure -, sa petite jumelle ne l’avait pas rejoint. Un grand qui avait percé son tour ? Un retournement de veste soudain ? Un sacrifice valeureux pour le bien du chef ? Impossible de dire quelle hypothèse était la bonne, mais pour sûr que l’estime du petit garçon montait pour la jeune fille. De là à dire qu’il l’inviterait une prochaine fois, il y avait encore un gouffre... Mais, qui sait, rien ne dit qu’il était insurmontable.

Arrivant finalement au point de ralliement convenu, son petit regret s’effaça bien vite sous le coup des jeux imaginaires entrainants de ses amis, tout à fait capables de lui faire oublier tous ses autres soucis ; et l’heure aussi, au grand damne de ses garants.

Après un long moment d’amusement, les enfants finirent par disparaître les uns après les autres, laissant Théodore seul la colline. Tout bien réfléchi, rentrer à deux pourrait être plus agréable.