Description:

C'était un beau vendredi soir, alors que le soleil lentement se couchait. Samantha était rapidement passée chez elle pour se changer et se mettre dans des habits plus modestes après son travail à l'hopital. Elle faisait toujours attention d'être impeccable là-bas. Elle prit un simple pantalon et un haut à longue manche. Au Centre d'aide, c'était différent. Elle pouvait être bien plus détendue, et les gens appréciaient cela. Après tout, paraître trop riche là-bas pouvait donner l'impression d'être supérieur et donc bloquer certaines personnes.

Samantha partit a pied et arriva rapidement. Elle était un peu plus stressée que d'habitude. Elle allait rencontrer quelqu'un qui avait besoin d'aide. C'était une personne dépendante et la jeune Seraph espérait pouvoir l'aider à s'en sortir. Elle avait raté en voulant sortir Russel de l'alcoolisme, mais cette fois-ci ça serait différent. Elle allait être proche et professionnelle à la fois, du moins c'était dans ses plans... Elle n'avait jamais vraiment eu de formations autre que celles proposées par le centre. Et elle n'était pas dupe, elle ne pouvait jamais remplacé un psychiatre. Mais elle pouvait être bien plus disponible. Elle pouvait être là au quotidien ou presque, suivre la personne comme une personne et pas comme un patient. En gros, lui rappeler que la personne était une humaine à par entière et que des gens s'inquiétaient pour elle.

Samantha entra, salua tout le monde et partit dans une petit salle. C'était habituellement dans cette salle que les groupes de paroles venaient pour discuter de leurs addiction ou simplement partager des moments de vies et de se soutenir. Il n'y avait pas de réunion ce soir, donc Samantha et la personne serait libre de discuter. Elle prévoyait potentiellement de faire une balade, si cela pouvait la soulager. Elle s'assit et regarda l'heure, l'homme devrait être là sous peu

J'avais pris contact, avec une femme, qui faisait parti d'une sorte d'association, je n'avais pas encore compris le sens exact de l'organisation. Mais peu importe, j'avais un rendez vous. Physiquement, j'allais pas trop mal. Je me sentais moins bien que la veille, des petits tremblements commençaient à faire leur apparition en fin de journée. Mais sinon, tout allait bien. J'avais la tête reposée, j'avais vu mon frère, un jour avant, et j'avais parlé longuement avec une femme très sympathique du nom de Naoto. La vie était bien partie, et je commençais à être plus déterminé pour reprendre une nouvelle vie. Seulement je le savais, l'envie pour la drogue allait reprendre, un jour ou l'autre. Je devais profiter, pendant que j'étais encore "sobre", profiter de la vie et de ce qu'elle pouvait offrir. Je devais la prendre en main, et ne plus me laisser faire bêtement.

Je me préparais alors, je mettais mes plus beaux vêtements (autrement dit des chiffons présentables), et partais pour me rendre au lieu de rendez vous. Il fallait que j'aille au quartier est, ce n'était pas la porte à côté, mais courage ! Il fallait que je suive pas moins de trois transports en commun différents. Seulement, une grève de bus me paralysait une trentaine de minutes sur une station. Les autres, qui attendaient, en était sûrs, celui de 18h30 sera là, c'est juste que le chauffeur qui passe à 18h02 fait grève à chaque fois ! Décidément, c'était des habitués. Alors je patientais. J'aurai pu être largement à l'avance, mais c'est avec cinq minutes de retard que je pointais le bout de mon nez.

La bâtisse avait l'air .. Comment dire ... Modeste, on connait bien pire dans le quartier Sud. L'ambiance par contre y était particulièrement chaleureuse. Je cherchais la femme, tournant la tête à droite, à gauche. Elle avait fait une description d'elle pour que je la retrouve facilement. Un haut avec ... Des manches longues et ... De couleur ... Aaaaah ! J'avais oublié, mais ce n'était pas grave. J'avais rendez vous avec une afro américaine, il n'y en avait qu'une dans la salle, elle était assise sur une table. Alors je la rejoignit. Je n'étais pas très sûr de moi ... Le peu de rencontres que je faisais étaient spontanées, et pas organisées comme là. J'avais un peu le traque, et toujours ces petits tremblements.

- Bonjour ... Je suis Mathieu Descarmes. Vous êtes bien Samantha ?? J'espère que je ne me suis pas trompé !

Je prenais un air détendu, amusé ... La situation aurait été cocasse si je m'étais trompé ... L'humour était une arme contre mon traque omni présent. Mais la femme avait l'air sympathique, j'espérais me détendre le plus vite possible.

Samantha était patiente. D'habitude les personnes arrivaient avec facilement 30 minutes de retard, au minimum. Elle avait tout son temps devant elle, n'ayant au final aucun besoins désormais. Elle savait être compréhensive, en particulier pour les premières visites. Ce n'était jamais simple de venir parler de ses problèmes à une inconnue.

Mais arriva, sans aucun retard considérable, un jeune homme plutôt grand. Il semblait un peu perdu et surtout inquiet. C'était bel et bien la personne qu'elle devait rencontrer. Heureusement, Mathieu ne semblait pas être totalement abattu. Peut-être suffirait-il de discuter un peu avec lui, pour lui remonter le moral et le soutenir? Samantha espérait pouvoir n'être que la béquille sur laquelle le jeune homme pourrait s'appuyer dans des moments de besoins. La jeune Seraph se leva, souriante.

- "Bonjour. Je suis effectivement Samantha et je suis enchantée de vous rencontrer. Asseyez-vous, on va pouvoir commencer si vous le voulez bien"

Samantha lui désigna une place devant lui puis se rassit. Ce qu'elle comptait faire n'était pas un exercice qu'elle avait souvent fait. Après tout, elle était meilleure pour soigner les troubles du corps que le troubles de l'esprit... Mais elle savait faire preuve d'une grande empathie, et elle espérait que ça suffirait.

- "Comment vous sentez-vous? Oh et si vous le désirez, on peut se tutoyer. C'est plus amical comme cela"

- Bonjour. Je suis effectivement Samantha et je suis enchantée de vous rencontrer. Asseyez-vous, on va pouvoir commencer si vous le voulez bien

Elle me mis de suite en confiance. J'étais déjà soulagé de tomber sur une personne assez chaleureuse, qui ne soit pas un pauvre robot faisant son travail parce qu'il n'a pas le choix. Bien que de proposer un rendez vous non officiel m'avait conforté dans l'idée que l'association ne se prenait pas trop au sérieux, j'avais peur de tomber sur une femme froide et brute, s'occupant de moi comme un client comme un autre et non pas comme une personne.
Je m'installa alors, face à la femme, visiblement assez jeune .. Elle devait avoir mon âge, peut-être un peu plus, peut-être un peu moins.
Elle me proposa de la tutoyer, décidément, j'en étais certain, le but était de mon détendre, de m'ouvrir un peu plus ... Tant mieux, j'avais peut-être besoin de ça pour parler de mes nombreux problèmes.

- Heu ... Oui bien sûr Samantha ... Ne m'en veux pas si parfois je vous vouvoie ... C'est une question d'habitude, on m'a élevé comme ça.

Pour le peu qu'on m'aie élevé ... M'enfin, on m'a quand même appris à vouvoyer les autres, ce qui n'est pas toujours le cas dans le sud de la ville. Dans la rue où j'habite, on se vouvoie, mais dès qu'on sort un peu, on voit peu de gens emprunter les formules de politesse. Ils se connaissent tous, ils font un peu parti d'une très grande famille, avec plus ou moins d'affinité.

- Ah, au fait, à la fin de la séance, j'aurai des papiers à vous donner et à vous faire signer. Ce n'est pas l'association qui me l'a donné, mais la clinique Sud.

Je l'avais encore vouvoyé. Je me rappela qu'à cet instant que je l'avais vouvoyé en lui disant que je pourrai parfois ne pas la tutoyer. Je me repris rapidement.

- Mince, pardon, j'ai vraiment pas l'habitude, c'est fou ! Je suis vraiment désolé si je te vexe mais .. Les gens qui ne sont pas du quartier sud, je ne les tutoie que très peu ... Enfin, tu comprends ... Mais je vais faire un effort.

Bon ... La séance allait commencer .. Enfin, est-ce une séance ? Je ne savais pas trop, certainement que si, bien que certainement, je ne m'en rendais pas compte. Cette femme en face de moi savait certainement ce qu'elle faisait, même si c'est juste dans le but de m'apaiser un peu.

Samantha voyait bien qu'il n'était pas des plus à l'aise. Mais au moins, il faisait un effort et ça, elle ne pouvait que apprécier. Ce ne devait pas du tout être facile pour quelqu'un ayant des problèmes de venir dans une situation comme celle-ci. C'était un lieu étranger, pas des plus cossu et ayant parfois mauvaise connotations. Mathieu avait fait le premier pas en venant, c'était un des plus importants.

Le jeune homme venait du Sud visiblement. C'était comme la plupart des personnes qui profitait des services proposé par le centre d'aide. Ils n'avaient généralement ni les moyens ni l'envie d'aller voir un thérapeute professionnel. Ils se méfiaient souvent des institutions. Cette information soulagea Samantha qui espérait que sa manière de faire non-traditionnelle pourrait bien fonctionner.

- "Très bien, je les signerais alors. C'est une sorte de fiche de présence j'imagine, pour s'assurer que tu viennes?" demanda-t'-elle, curieuse. Elle sourit gentiment en le voyant s'excuser "Tu ne me vexes nullement tu sais. T'en fais pas pour le vouvoiement/tutoiement, ça viendra avec le temps. Faut pas te forcer"

Si la clinique insistait pour avoir une fiche de présence, cela pouvait poser des problèmes. Peut-être qu'ainsi, Mathieu n'était là que pour 'remplir la fiche' et le résultat serait plutôt catastrophique. En même temps, le jeune homme semblait plutôt sincère dans sa gêne. Alors, il fallait garder espoir.

- "Alors, je vais t'expliquer brièvement qui je suis et ce que l'on va faire. Après, j'aimerais bien apprendre à te connaître un peu plus, que tu me parles de toi, si cela te va. Tu peux me raconter ce que tu veux"

Samantha parlait d'une voix douce et calme, qui se voulait amical. Elle aurait bien été plus tactile, à toucher l'épaule de Mathieu, mais elle savait que plus souvent que non, cela gênait grandement les gens.

- "Alors, je suis Samantha Williams. Je travailles dans ce centre d'aide en tant que bénévole depuis plus d'un an désormais. C'est une vraie passion. Autrement, je suis secrétaire médicale. Je vis dans le quartier Est, mais il m'arrive souvent d'aller dans le Sud, pour tenter de rencontrer les gens et leur prodiguer de l'aide. Je n'ai pas réussi à faire le lycée, et donc je me suis épanoui dans un apprentissage" résuma-t'-elle très brièvement pour ne pas ennuyer Mathieu "A ton tour. Sache que je suis soumises au secret professionnel et que personne n'osera me demander ce que l'on s'est dit, que ce soit la clinique ou l'association"

Elle aurait pu aussi rajouter qu'accessoirement, elle pouvait guérir les gens de toutes les blessures, sentir approximativement quand les gens allaient succomber aux ombres, qu'elle ne mangeait plus ni ne buvait, qu'elle était déjà liée directement au meutre deux personne, et indirectement à celui de nombreuses autre et qu'elle avait une relation secrête avec une personne potentiellement ennemie... Mais mieux valait en rester aux conversations humaines. Samantha regarda alors Mathieu, désireuse d'en savoir plus sur lui.

-Très bien, je les signerais alors. C'est une sorte de fiche de présence j'imagine, pour s'assurer que tu viennes?

Ce n'était pas exactement cela .... D'après ce que j'avais lu de la fiche, c'était pour que cette femme soit mise au courant en cas de problèmes, un peu comme un tuteur. Ce n'était pas des plus rassurant, mais c'était une démarche assez bien vue pour que j'ai au moins quelqu'un derrière moi s'il m'arrivait un malheur.
Je souriais poliment à sa remarque sur le tutoiement, et j'enchaîna avec la feuille, en la posant sur la table.

- C'est un peu plus qu'un acte de présence ... C'est un peu comme si je demandais à un médecin d'être mon médecin traitant. C'est vous qui serez mise au courant d'un problème en priorité dans le cadre du soutien social ...

J'avais bien cru comprendre que c'était une démarche entièrement nouvelle, et le fait que Samantha ne soit pas mise au courant ne m'étonnait pas.

Je l'écoutais avec intention. Visiblement le but était de faire connaissance, telle était la vision de ce premier rendez-vous. Ensuite, certainement, nous allons devoir discuter de la vie, je devrai sûrement vider mon sac ... Bah, peut-être que ça me ferait du bien après tout ! J'étais dans cette optique là à cet instant, j'étais presque persuadé que ces rendez vous allaient se dérouler de cette manière.

J'émergeais un peu de mes pensées pour l'écouter. Elle se présenta brièvement, et vint alors mon tour.

- Ah .. C'est rassurant que vous soyez soumise au .. Secret professionnel.

Je me raclais la gorge. J'ai eu subitement comme un manque d'inspiration, un vide total.

- Par où commencer ...

Je regardais la table fixement, j'avais envie de fuir, j'avais vraiment honte de ne pas savoir quoi dire sur ma vie qui ne ressemblerait pas à un drame.

- Je suis Mathieu Descarmes, ma mère était française et elle est arrivée à Palema une dizaine d'année avant ma naissance. Je ... J'ai fait des études de biologie, et je me suis spécialisé dans l'analyse et la recherche médicale ... Je ne suis pas un grand chercheur, juste ... J'analyse et j'émet des théories. Enfin, ça c'est dans la pratique ... J'ai un petit frère qui a dix ans, c'est lui qui me fait garder le cap. Ma mère était assez spéciale, et pour résumer disons qu'elle en est morte il y a cinq ans ... Je voulais la garde de ce petit frère, j'avais trouvé un job, mes études étaient finies mais on me l'a refusé. J'ai pas accepté cette solitude et cette injustice alors j'ai sombré dans les problèmes qui m'amènent ici aujourd'hui.

C'était bien résumer ma vie. Je ne sais plus si je lui avais précisé que je ne travaillais plus. Enfin, je pensais que ça allait de soi ! M'enfin, pour quelqu'un qui n'avait pas d'imagination quant à la façon de me présenter, j'avais été relativement efficace.

- Ah, et je vis dans le quartier sud comme vous le savez, en face d'un vieux canal pourri qui a déjà tout un folklore derrière lui ... Mais le bâtiment est un des plus paisible du quartier. Au lieu d'abriter les pires racailles de la ville, il tient sous son toit des ratés malheureux et qui touchent une misère pour travailler dur. Gloire à l'Amérique !

Je ne m'attendais pas à cette pointe de sarcasme venue de ma part. A chaque fois quand je me met à parler de l'Amérique, je deviens amer, voire acide. J'ai tendance à oublier la fierté presque sans borne de ses habitants d'être nés sous le sol Américain. Alors très rapidement je m'excusais, peut-être avais-je froissé l'honneur de cette femme en pointant du doigt cet aspect nauséabonde du plus grand Pays du monde, bien caché par son aspect beaucoup plus clean, beaucoup plus net.

- Je ne vois pas quoi dire de plus là ... Vous pouvez m'aider ?

Ainsi, Samantha deviendrait une personne de référence pour le jeune homme. Elle se sentait flattée et touchée d'avoir de tels responsabilités... Certes, ce n'était de loin pas une tutelle ou une curatelle, mais c'était une grande mission que la jeune Seraph prendrait avec plaisir! C'était ce genre d'événements qui lui donnait un sens à sa vie, son moyen d'épanouissement.

- "Oh je vois, c'est avec plaisir alors que je serais ta personne de référence" dit-elle en souriant gentiment

Elle n'avait jamais été aussi loin. Cela lui faisait plaisir qu'on finisse par lui faire confiance dans sa capacité à gérer les gens. Elle ferait tout pour ne pas décevoir Mathieu.

En le regardant, Samantha voyait qu'il n'était de loin pas à l'aise. Son regard fixant la table en disait long sur sa gêne. Le pauvre humain avait du souffrir beaucoup pour ressentir cela. Mais elle écouta avec grand intérêt ce que Mathieu expliquait. Il ne mentionna pas une seule fois son père, probablement qu'il y avait un problème de ce coté, un deuil ou une séparation douloureuse... Mais ses compétences étaient des plus impressionnantes, chercheur biomédical ce n'était pas rien. La vie n'avait visiblement pas été juste avec lui, ayant perdu son père, puis sa mère et finalement son frère de manière totalement arbitraire. Il y avait de quoi sombrer profondément. Mais il avait probablement les compétences pour remonter! Il avait des connaissances certaines, et il y avait probablement de quoi lui trouver une place.

Samantha remarqua qu'il était retourné au vouvoiement, mais elle n'allait pas insister. Il faisait déjà de très grand effort pour expliquer sa vie. A la fin de son discours, elle hocha la tête.

- "Mes condoléances pour ta mère, et je suis désolée que l'on n'ait pas accepté ta demande de garde" dit-elle avec sincérité avant d'ajouter, commentant sa dernière tirade "Le quartier Sud est rempli de malheureux qui sont exploité et dans un cercle vicieux, mais malheureusement beaucoup de monde ferment les yeux face à ce problème. Ils préfèrent se rassurer en disant que tout le quartier Sud, c'est une presque une zone de guerre. Et tu as raison, il y a bien des choses à changer dans notre pays"

Beaucoup plus d'aides, de soutien et d'équité, c'était tout ce que souhaitait Samantha.

- "Merci d'avoir partager cela avec moi et de me faire confiance. J'aurais une question, très importante : Quels sont tes buts à court et moyen terme, en particulier liés à ce que l'on fait maintenant?"

Samantha imaginait que Mathieu voulait peut-être renouer avec son frère, voire même l'héberger? Elle voulait savoir ce qui le poussait à se sortir de ses problèmes, pour pouvoir ensuite l'accompagner de cette mission. Elle espérait être pour lui une béquille sur laquelle s'appuyer quand on sent que l'on va sombrer de nouveau.

Ah ! Elle était d'accord avec moi sur une chose essentielle ! Ce n'était pas une autre patriote bornée qui se persuadait que ce Pays n'avait aucun problèmes. J'étais ravis d'entendre enfin qu'on pouvait être lucide. Je souriais alors à sa remarque, ne m'occupant absolument pas de ses condoléances. Je respectais le fait qu'elle me les aie faites, cependant je m'en fichais un peu, la mort de ma mère ne m'affecte pas le moins du monde.
Mais rapidement, nous passions à un autre sujet ! Nous n'étions pas là pour ça de toute façon, même si j'aurai aimé débattre avec elle. Elle avait l'air intelligente, et même si ses études ne se sont pas passées comme elle le voulait, je sentais qu'au fond elle avait largement les capacités. Mais bon, elle était épanouie dans son travail, l'humain est peut-être son domaine.
Voilà que nous nous mîmes à parler de but ... J'en avais un, c'en était certain, mais de là à l'accomplir ...

- Oui j'en ai bien un ... Cependant ... Il est peut-être un peu trop ambitieux ... En fait ... Je trouve qu'à l'orphelinat ils sont élevés par des robots. Il y en a dans le lot qui aiment les enfants, évidemment, mais ... Ils suivent des règles très strictes et n'ont absolument aucune souplesse. Je trouve ça malsain alors je compte me barrer de mon quartier et élever mon frère comme je l'ai toujours fait. Seulement, ils me l'interdisaient quand j'avais un appartement et un travail à portée de main. Alors maintenant que le frère est devenu ce junkie révoltant et immoral, je ne pense pas que j'y aurai droit un jour. Ils penseront que je m'y remettrai du jour au lendemain.

C'est pour cette raison précise que je rechute à chaque fois. J'écoute mon corps qui réclame, et je lâche en me disant que quoi que je fasse, je ne gagnerai jamais rien. Alors "à quoi bon lutter". Et c'était reparti pour un tour.

- Ca .. C'était mon but à court terme. Irréalisable. Cependant ... J'ai la ferme intention de rendre mon frère fier de moi. Je suis le seul et l'unique qui lui donne une image du monde extérieur et surtout je suis sa seul famille. Ce serait tragique qu'il se mette à avoir honte de moi, vous ne croyez pas ? Alors quand il sera adulte et veux qu'il me regarde dans les yeux en sachant que je me suis battu pour lui.

Autrement dit, ce n'était pas grand chose. Je ne voulais que de la reconnaissance envers mon frère. Je voulais être ce pilier de la famille, celui qui tiendrait les rennes. quand il aura des enfants, je veux être cet homme qui a construit la famille. Je suis déjà, à 26 ans, le plus vieux de la famille. Et je ne compte pas flancher. Mon frère doit avoir une bonne base.

Comme Samantha l'avait imaginé, Mathieu désirait pouvoir revoir son frère et même, dans un monde idéal, pouvoir être celui qui s'occupera de lui. Mais il avait probablement raison. Ce n'était pas pour le moment quelque chose d'envisageable, surtout si ils lui avaient déjà refusé lorsqu'il était en meilleur forme. Peut-être que si il trouvait un couple 'stable', l'agence de placement d'enfant serait plus conciliante? Mais peut-être que cela était encore trop tôt, Mathieu devait en premier lieu se sortir de sa drogue et c'était le plus important. Après, il y avait toujours le moyen de Kyu... Mais on ne pouvait pas résoudre toujours tout à coup de vœux.

Samantha continua d'écouter Mathieu, qui précisait un vœu plus envisageable avec des moyens réalistes. Et ce but, ce souhait, était des plus louables. La jeune Seraph ne pouvait que compatir avec l'humain. Il désirait quelque chose de strictement non-égoïste. Il ne cherchait pas à couper le lien avec sa famille, ce qui lui en restait, ou autre. Il voulait aider son frère.

- "Je vois déjà que tu y a bien réfléchi à ça et c'est très bien. Tu as probablement raison d'imaginer que cela risque d'être difficile d'obtenir la garde de ton frère, mais cela ne veut pas dire que c'est strictement impossible. Ils penseront peut-être que tu risques de rechuter, mais on va leur montrer qu'il se trompe et que tu es une personne sérieuse et compétente, ce que je suis sûre que tu es" dit-elle en souriant gentiment "En attendant de pouvoir leur prouver qu'ils avaient tord, on va tout faire pour que ton frère soit encore plus fier de toi"

Pour ce faire, il n'y avait pas de miracle. Il allait falloir lutter face aux rechutes et aux syndromes de manques en premier lieu. Ensuite, réinsérer Mathieu dans la vie active et enfin lui redonner une joie.

- "A ce propos, tu peux m'appeler à n'importe quel heure du jour ou de la nuit et je ferais de mon mieux pour venir, peu importe où tu te trouve. Si à un moment ou un autre, tu sens que ça ne va pas bien, que tu risque de flancher ou simplement que tu as besoin d'aide, appelle-moi, je suis là pour ça" expliqua-t'-elle avec gentillesse. Elle allait probablement répèter cela au cours de la scéance, pour s'assurer qu'il comprenne qu'il ne devait pas hésiter "Dis-moi, quel est ta relation actuelle avec ton frère?"

Est-ce que l'Orphelinat lui autorisait quand même des visites?

[HRP : Tout d'abord, je tiens à m'excuser pour l'attente ... J'ai eu des vacances difficiles qui me laissent peu voir pas l'occasion de RP]

Les sentiments que me laissèrent cette visite furent particulièrement motivants. Il est rare que quelqu'un, de proche ou non, me convainque de persévérer. Généralement, je ne reçois que des encouragements à continuer, ou alors un lourd jugement. Il faut dire que je ne fréquente pas forcément les bonnes personnes, mais ais-je le choix, dans le quartier Sud ? Cet endroit est truffé de défauts et de malheurs.
Du plus loin que je me souvienne, il y avait bien une personne qui a voulu me secourir. C'était une vieille femme qui habitait au dessus de chez moi. Elle a vite remarqué que quelque chose n'allait pas, et est venue me rendre visite. Je lui avait fait pitié, elle disait reconnaître les mauvaises personnes, et que je faisais parti des rares accrocs du quartier à mériter sa bienveillance. Cette femme se prenait pour la mère Théresa, et ma première réaction fit de la repousser, mais la dame insistait, si bien que c'est elle qui finit par me donner de la peine. J'acceptais alors son aide, même si je n'en avais que faire. Elle venait régulièrement voir si j'allais bien, et s'est même occupée de moi un jour où j'avais d'énormes bouffées de chaleur. Elle voulait prendre soin de moi comme un être fragile, si seulement elle avait su ce que j'ai fait quelques années plus tard ...
Mais la femme était vieille, et une mauvaise chute dans les escaliers de son fils a suffis à la tuer.

Rien de très plaisant dans ce que je viens de narrer, mais pourtant j'en gardais un agréable sentiment de nostalgie, et ces souvenirs n'étaient nullement synonymes de tristesse.
Eh bien c'est ce sentiment là qui m'avait envahi petit à petit ce soir là. Le sentiment d'avoir une main sur l'épaule, à la différence que cette fois-ci, j'étais moins "fier", et j'assumais parfaitement mes faiblesse. J'ai demandé de l'aide, c'est pour cela que mes ressentiments s'accouplaient d'une sensation de fierté, voire de dépassement de soi. Le tout combiné se transformé en une euphorie contrôlée, car j'étais pour le moins sceptique.

- En attendant de pouvoir leur prouver qu'ils avaient tord, on va tout faire pour que ton frère soit encore plus fier de toi.

Fier de moi ... Comme je devais l'être moi même. C'était la chose qui me donnait le plus envie, de façon sûre. J'étais déjà motivé, depuis un moment, mais la motivation ne fait pas tout hélas. Je suis une personne faible qui succombe vite aux besoins du corps, aux pulsions. Je suis un minuscule pilier en polystyrène.
Mais je souris à la femme, par respect, car la remarque m'a fait plaisir. Seulement, je doutais encore de mes capacités à mettre fin à ce cauchemar.

Elle enchaîna sur le fait que je pouvais l'appeler jour et nuit. Encore un détail qui me gêna, bien que je me sentais plus entouré que jamais. Je savais par avance que j'aurai peur de déranger, que j'aurai honte d'être vu dans ces états et par conséquent, d'être aidé. Je me mordais les lèvres, je ne pouvais rien lui promettre, ma présence ici était déjà une avancée énorme.

Soudain elle engagea un thème qui me fit beaucoup moins douter.

- Dis-moi, quel est ta relation actuelle avec ton frère?

Je répondais aussitôt.

- Nous sommes extrêmement complices. Notre mère était un cas spécial et on ne connait pas nos pères respectifs. Alors je suis à la fois sa mère, son père et son frère. Je l'ai élevé un peu durement mais il a aujourd'hui des principes que les enfants de son âge n'envisagent même pas. Je suis vraiment extrêmement fier de lui, il est intelligent, et un peu tête brûlée, comme moi. Ca peut paraître narcissique, mais il me ressemble sous beaucoup de points. Il me fait un peu peur pour ça .. Ca en vient à un autre point, je suis très protecteur envers lui. Il se laisse embarquer dans de sales histoires avec ses potes, uniquement parce qu'il est influençable. Et encore une fois, il me ressemble sur ce point .. C'est une des raisons pour lesquelles je me suis rapproché de toutes ces drogues. J'ai suivi quelqu'un qui me disait que j'irai mieux. Alors n'écoutant que mon coeur, et voulant me débarrasser de toute ma torpeur, j'ai imité ce même gars. Et j'en suis là.
Sinon ... Je le vois une fois par mois, exceptionnellement toutes les deux semaines, quand il y a son anniversaire, ou même le mien. Quant à lui, il me voit comme ... Comment dire ... Il fait tout pour que je sois fier de lui quitte à faire des bêtises qu'il pense que j'approuve, vous voyez ? Il veut être mon centre d'intention, il n'a pas encore compris qu'il était le seul et l'unique en ce moment. Mais il est jeune, il a pas encore ce genre de subtilité. Je me demande parfois s'il ne fait pas des bêtises pour que j'aie des nouvelles de lui ... Mais c'est un peu tiré par les cheveux. Enfin voilà.

Ma réaction fut immédiate, je ne peux pas m'empêcher de sortir un énorme monologue lorsqu'on me demande de parler de mon frère. Il n'y a pas grand chose dont je peux me venter de posséder. La fierté se ressentait, de toute façon, je ne pouvais pas m'attacher à quelqu'un ou quelque chose d'autre.

- Oh désolé, j'ai beaucoup parlé ! Vous pouvez poser les questions que vous voulez, j'essaierai de vous répondre le plus honnêtement possible. C'est une rencontre, récente, qui m'a vraiment poussé à venir ici. Je suis un peu trop fier de moi, j'ai un peu trop d'amour propre pour parler ouvertement de mes problèmes. Alors ... Ne m'en voulez pas si je suis un peu bloqué, hésitant .. Ou stressé. C'est un peu comme si je sortais du placard.

Je suis d'un naturel assez stressé et instinctif, alors comment ne pas faire ressortir au grand jour cette facette de ma personnalité dans un moment pareil ? J'étais littéralement transparent, rien qu'un coup d'oeil suffisait pour voir en moi, deviner ce que je pensais.

- J'espère ne pas trop vous déranger ... Si jamais j'ai un soucis ... Vous voyez ?

Samantha savait qu'elle demandait beaucoup au jeune homme, mais peut-être était-elle un brin trop optimiste quand aux capacités de Mathieu. Dans tout les cas, elle avait foi en lui. Le voir parler ainsi de son frère, de manière si spontanée et si expansive, cela fit chaud au coeur de la jeune Seraph. C'était toujours très beau de voir quelqu'un de passionné, en particulier quand cela concernait des humains.

Les craintes de Mathieu était effectivement fondées. Si son frère cherchait à attirer l'attention, il risquait d'être sur une pente glissante pouvant l'amener dans des endroits sombres et peu recommandable. Pauvre Mathieu, il devait s'occuper de tant de chose à la fois. Samantha sourit gentiment en voyant qu'il s'excusait d'avoir parlé. Il avait vraiment un bon fond.

- "Tu n'as pas à t'excuser de parler, vraiment pas. Je suis là pour t'écouter et te soutenir, et ça me fait vraiment plaisir de voir ça. C'est très touchant de voir comme tu aimes ton frère. On voit que c'est quelqu'un d’extrêmement important pour toi. Je pense aussi qu'il fait quelques bêtises pour attirer ton attention et que tu aies des nouvelles" dit-elle en souriant "Je comprends totalement que tu aies ton amour propre, et je tiens à le respecter. Sache en plus que rien de ce que tu ne feras, diras ou autre ne me blessera. Je n'ai aucune raison de t'en vouloir et je n'en aurai jamais, je t'assure"

Il était vrai que ce n'était que des mots ce que Samantha disait. Mais elle en était profondément convaincue. Elle était, depuis la mort de son frère, extrêmement patiente. Mais maintenant qu'elle était Seraph, sa patience était infinie avec ceux qui avaient besoin d'aide.

- "De même, tu ne me dérangeras pas en m'appelant, peu importe le problème. C'est un plaisir de pouvoir aider, et ma dévotion" dit-elle, tentant de l'apaiser un peu "Est-ce que tu aimerais boire quelque chose? Ou peut-être manger un petit morceau? Et quel était cette rencontre qui t'a convaincue?"

Samantha voyait bien qu'il était stressé, le pauvre. Peut-être qu'en changeant un peu le contexte, en passant simplement du temps à boire et manger, cela pourrait détendre Mathieu et faire de cette rencontre, une simple discussion?

[Pas de problème du tout ]