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Vandalisme en série dans la ville de Palema, Qu'est-ce que Juliet était fière de son article! Il avait fait écouler de l'encre et surtout des clics sur le net. Bien partagé par la population de Palema, pour une fois, cela avait permis au Wake Up Palema de prouver encore une fois qu'il était important pour l'équilibre de la ville. Le clavier de la journaliste avait claqué toute la nuit pour produire un article avec juste ce qu'il faut d'acide contre les forces de l'ordre sans pour autant être trop agressive. Il fallait constamment utiliser des sous-entendu ou des phrases à demi-mot, pile ce que Juliet aimait!

Certes, ce papier n'était de loin pas ce dont elle rêvait de produire. Mais la plupart des choses intéressantes se passent dans l'Univers des Contractants, dont elle ne peut mentionner l'existence au risque de sacrées remontrances de sa hiérarchie ou même de Bey. Alors elle se contentait de cela. Après tout, ce n'était pas les meurtres qui courraient les rues dans la ville, et le destin du quartier Sud n'intéressait pas beaucoup de monde. De plus, le Journal ne pouvait pas sortir trop d'articles problématique, sinon il risquait d'inquiéter la populace. Alors, ce vandale était des plus idéal! Juste assez effrayant pour faire craindre les petits vieux ainsi que les personnes coincées, tout en jouant sur la peur sécuritaire sans pour autant être des choses trop graves.

Le soir avant, Juliet avait remarqué dans son carnet infini, l'apparition de nouvelles informations. Elle comprit que sa capacité avait été améliorée. Passant une bonne demi-heure à trier les informations pertinentes du reste. Elle tomba donc sur l'apparition d'un nouveau et magnifique graffiti sur le pont enjambant la grande avenue, avec la désormais connue signature : la Flèche. Ce n'en était pas vraiment une, ressemblant plus à un crochet inversé qu'autre chose, mais le nom 'La Flèche' faisait toujours plus impressionnant pour un criminel que 'Le Crochet' qui faisait trop pirate. Ce nom, Juliet ne saurait dire qui l'avait choisi en premier dans les médias, mais il était resté.

C'était donc pour cela qu'elle prévenu son boss qu'elle partait 'en enquête'. En réalité, la Nephil allait simplement se poser tranquillement dans un coin un peu discret non loin du pont. Elle aurait bien aimé avoir des capacités plus simple pour maitriser le vandale si celui-ci venait à la menace. Après tout, lui tirer une balle dans les genoux n'était pas le meilleur moyen. De toute façon, son but n'était nullement d’appréhender le jeune homme. Si elle l’arrêtait, son épopée en ferait de même. Non, elle comptait juste l'interroger et lui proposer de passer un message au reste du monde. Clairement, certain de ses tag étaient très connotés (en particulier celui de la banque, qui avait fait connaître la Flèche).

Attendant dans les ombres de la nuit noire, elle attendait que le tagueur arrive et dépose tout son attirail pour pouvoir le prendre, figurativement, le pantalon sur les genoux, ne pouvant fuir facilement.

Jason Reed avait tout planifié depuis une semaine. Les articles à son sujet lui avaient donnés une certaine notoriété. Sa signature était désormais connu et on lui avait attribué un surnom : ‘La flèche’. Jason Reed était plutôt satisfait de ce nom, avec l’allure de sa signature il aurait pu se faire connaître sous un nom bien pire comme ‘le triangle’ ou quelque chose comme ça. Cette notoriété l’inquiétait un peu et il avait décidé de faire plus attention. La ville et la plupart de ses habitants avaient désormais conscience de son existence et pour éviter les sanctions, il était impératif qu’il redouble de prudence. Il avait visité le pont chaque jours durant deux semaines, à différentes heures pour choisir le moment le plus tranquille. Durant ses recherches, il a comprit que le moment idéal était entre 2 et 3 heures du matin. C’était l’idéal puisqu’il se situait entre deux évènements qui pouvaient augmenter le nombre de passants : le changement de personnel pour ceux qui travaillent la nuit et la fermeture des bars. En agissant entre 2 et 3 heures il serait seul, avec moins de risque de rencontrer des passants.

Le plan était simple, il allait arriver à 2 heures. Il resterait près du pont pendant quelques minutes pour s’assurer que personne ne soit présent. Ensuite, si la voie était libre, il allait se dépêcher de monter sur le pont, de sortir sa cannete de peinture en aérosol pour ensuite se suspendre en l’air et laisser le message «Regardez ici» avec sa signature, avec sa ‘flèche’. Son but? Il voulait simplement que ‘La flèche’ soit encore plus connue. S’il laissait sa signature sur ce pont, il serait difficile pour les gens de Palema d’ignorer son existence.

Jason Reed arriva près du pont. Le ciel était noir, les nuages cachaient complètement la lumière des étoiles et de la lune. Jason Reed scrutait les environs, mais personne n’était présent. Du moins, c’est ce que la noirceur de la nuit laissait croire. Pour ne pas prendre de risques, Jason Reed a quand même attendu quelques temps. Jason était certain qu’il était seul. Tranquillement, il s’était penché et il avait fouillé dans son sac à bandoulière. Sa main avait d’abord effleuré une des canettes de peinture qu’il avait emmenée pour ensuite se diriger plus profondément dans le sac et sortir un morceau de tissus. Rapidement, Jason Reed couvrait son visage à l’aide du masque qui se trouvait dans son sac et il enfilait le capuchon de son chandail. Il avait pris son sac et il s’était mis à courir vers le pont. Il ne voyait personne, c’était le moment d’agir.

Une fois arrivé au centre du pont, il avait lancé un dernier regard derrière lui pour s’assurer que personne ne le suivait. La voie était libre. Il avait lâché son sac et il avait attrapé la canette de peinture en aérosol avec sa main droite. Sans même refermer le sac, Jason avait agrippé la barrière de sa main gauche et il avait sauté de l’autre côté. Il s’était ensuite laissé glisser pour atteindre la partie en béton. Cet exercice, Jason Reed l’avait fait des milliers de fois, il était capable de soutenir son poids avec un seul bras sans trop de difficulté. Après, Il avait secoué violemment la peinture avec sa main droite et il avait commencé à écrire, suspendu au-dessus de la route déserte.

Le temps passait si lentement... Juliet avait oublié à quel point faire une surveillance pouvait être ennuyant. A un moment, elle craignit même que son journal s'était trompé. Quand soudain, semblant crever la nuit, et venant de nulle part, surgit un tageur enroulé de noir. Il semblait très prudent, et la journaliste comprit que c'était l'homme qu'elle cherchait. A cette distance, elle ne pouvait pas déterminer à quoi il ressemblait, mais elle voyait bien ce qu'il faisait.

Elle sortit de sa cachette et commença son approche discrète. Mais une idée lui traversa l'esprit. Pour être sûre de ne pas être vue et de pouvoir se déplacer rapidement, elle allait ouvrir un Kekkai. Non seulement elle serait totalement invisible pour la tagueur, mais si il était contractant, elle ferait d'une pierre deux coups. Ouvrant donc la dimension parralèle, après avoir mémoriser l'emplacement de l'homme, elle sprinta en totale discrétion. Qu'est-ce que la vie de contractant était belle. Il n'y avait personne sur le pont, le tagueur était donc strictement humain.

Juliet arriva au milieu du pont, s'arrêtant là où se trouvait le sac du tagueur. Elle referma la Kekkai, apparaissant donc sans bruit juste au dessus de Jason. Elle hésita à l'appeler, mais craignant qu'il ne chute, décida d'être moins brute. Elle se pencha, prête à rattraper l'humain si il venait à lacher.

- "Bonjour, 'la Flèche', ou plutôt bonsoir" dit-elle en souriant "Ne vous en faîtes pas, je ne comptes pas vous faire de mal"

Jason Reed avait terminé d’écrire. Il était concentré, ses yeux étaient rivés sur sa signature fraiche. C’est à ce moment qu’il a entendu une voix qui l’interpellait directement. Jason, pris de panique, avait regardé en l’air. Il y avait quelqu’un.

«Non, impossible» se disait Jason. «Il n’y avait personne dans les environs, j’étais seul. » Il paniquait de plus en plus. Il évaluait les options qu’il avait. Il pourrait se laisser tomber sur la route. Cette option était très risquée, s’il était chanceux il allait uniquement se fouler la cheville, mais il était plus probable que s’il se laissait tomber, il se briserait une jambe. Il serait alors plus difficile de s’enfuir. Il n’avait pas d’autre option que de faire face à la mystérieuse inconnue.

Son sourire ne cachait pas de malice, si elle avait voulu lui faire du mal, elle aurait facilement été en mesure de le faire tomber. Elle n’aurait eu qu’à piétiner le bout de ses doigts.

Jason ne lui faisait quand même pas confiance, car il ne la connaissait pas. Jason avait déposé la canette de peinture pour commencer son ascension. En voyant la carrure de l’inconnue, il fut un peu rassuré. Elle n’avait pas l’air très menaçante. Il avait monté pour se tenir debout devant elle, mais en gardant la barrière entre eux.

Son visage était toujours masqué et à demi souffle il demanda :
«Qui êtes-vous? Et que me voulez-vous?»

Jason était stressé. Et si elle faisait partie de la police? Que ferait-il à ce moment là?

Au moins, il n'était pas tombé. C'était déjà cela. Mais il était clair que la Flèche ne lui faisait nullement confiance. Après tout, il restait là, sans dire bonjour ou rien, de l'autre côté de la barrière. Juliet se redressa et s'appuya contre la barrière, toujours souriante. Elle se sentait tellement en position de force, et elle adorait cela. Il fallait vraiment qu'elle se mette à travailler sur des humains plus fréquemment. Il y avait une bien plus grande différence, ils n'avaient strictement aucune chance. Sans compter que les humains, en plus, était une réserve d'un pouvoir immense... Oui, elle allait vraiment devoir travailler plus souvent sur des humains.

- "Je suis Juliet Hopkins, journaliste plutôt influente travaillant au Wake Up Palema. Je suis spécialisée dans les interviews et dans les articles qui sortent de l’ordinaire" dit-elle, toujours souriante "Vous êtes devenue une petite légende en très peu de temps. Bousculant les habitudes et le sentiment de sécurité d'un bon nombre de petit bourgeois"

Juliet s'éloigna de la barre et se mit bien en face de Jason

- "Et vos histoires attirent l'attention. Vous êtes le candidat parfait pour produire une petite série d'articles, dans lesquels je parlerais un peu de vous, de ce que vous représentez et de vos motivations" dit-elle en se rapprochant de lui "Tout ceci restera anonyme, bien entendu. Pensez-y, vous aurez l'occasion de vous faire connaître sans aucun risque, et de faire passer votre message. Alors, qu'en-dites vous?"

Si Jason refusait, Juliet n'allait de loin pas lui lâcher la grappe. Elle pouvait être du genre tenace, et elle avait du temps à perdre.

Jason Reed était encore planté de l’autre côté de la barrière. Il avait écouté ce que la journaliste lui disait. Une occasion de faire passer son message ? Pouvait-il vraiment faire confiance à cette femme ? Jason Reed ne le savait pas, mais ce n’était pas non plus le premier souci qu’il avait avec cette situation. Il était encore sur les lieux du crime. Il devait partir d’ici le plus rapidement possible pour éviter que quelqu’un d’autre ne le voie.

Jason Reed réfléchissait tout en traversant de l’autre côté de la barrière. Il avait deux options :

Option 1 : Il pourrait partir loin du pont avec la journaliste en répondant à ses questions. Cela aiderait certainement son message à se propager.

Option 2 : Il pourrait prendre la fuite, se sauver de l’inconnue, éviter de se faire connaître et se sauver du lieu du crime pour rentrer chez lui où il serait en sécurité. Cette option lui garantirait son anonymat à 100 %.

« Tout ceci restera anonyme, bien entendu. » Les mots de Juliet lui revenaient en tête. Devrait-il courir un risque ?


Jason Reed était désormais du même côté de la barrière que Juliet. Une multitude de questions lui venaient en tête :

Comment l’avait-elle trouvé ? Il avait étudié l’endroit plusieurs jours et il ne l’avait jamais vu. Avait-il manqué de discrétion à ce point là ?

Pourquoi s’intéressait-elle à lui ? Qu’est ce qu’elle retirerait de cet interview ? La réponse la plus simple serait que c’est pour l’argent généré par les articles. C’était une journaliste, c’était probablement sa motivation.

Comment l’avait-elle reconnu sur rapidement ? Elle ne pouvait pas avoir vu sa signature d’où elle se trouvait et il y avait plus d’une personne qui fait des graffitis dans Palema. Avait-elle seulement assumé que c’était « La flèche » ?

Pourquoi voudrait-elle l’aider à faire passer son message ? Aucune réponse ne lui venait en tête pour cette question.


Jason Reed se penchait devant la journaliste pour attraper son sac laissé sur le sol. Au moment où sa main toucha à la bandoulière de son sac, il dit :

« Ce n’est pas le bon moment, j’en ai peur. »

Jason Reed allait fuir. Il devait approcher l’heure de fermeture des bars, il se ferait voir.

Pensif et silencieux, le tagueur ne commenta rien pendant un peu trop long au goût de la journaliste. N'imaginait-il quand même pas pouvoir s'enfuir sans problème? Elle pourrait le traquer pendant plus longtemps qu'il ne pensait. Elle était pleine d'énergie, et la motivation de faire un scoop était immense. La seule difficulté qu'elle aurait si le tagueur fuyait serait de ne pas tirer une balle dans le genou pour l’arrêter. Elle détestait les personnes qui lui manquaient de respects, surtout quand elle offrait une telle offre.

La journaliste l'observa prendre son sac avec un peu de méfiance. Mais au moins il n'avait pas refusé directement la proposition de Juliet.

- "Pas de problème, je sais courir et je sais où on peut se cacher sans problème, le temps que les choses se tassent" dit-elle en le suivant, accélérant "Et j'insiste, il vaudrait mieux que vous acceptiez ma proposition, vous y gagneriez tant"

Car la journaliste pouvait avoir quelques obsessions et ne penser qu'à résoudre ce petit problème. Si en face d'elle se trouvait un contractant, elle serait probablement plus prudente. Mais là, c'était un simple humain sans grande capacité surnaturelle.

- "Je vous propose de me suivre jusque dans cette ruelle. Il n'y a personne à cette heure-ci. De là, je pense que l'on pourrait réfléchir de manière plus posée à ce que vous comptez-faire"

Juliet pointa une ruelle plus loin. Elle était encore souriante pour le moment, espérant que la Flèche ne fasse pas d'erreur.

Jason marchait rapidement et la journaliste le suivait au même rythme. Ils s’éloignaient du pont, de la scène de crime. Le stress de Jason diminuait. Plus il s’éloignait du pont, plus il était soulagé. Juliet lui pointa une ruelle plus loin sur leur chemin. Elle l’encourageait à s’y rendre. L’idée que Juliet faisait partie de la police lui est revenue. Et si ses collègues se trouvaient dans cette ruelle ? Non, si elle avait vraiment fait partie de la police elle n’aurait eu qu’à lui enfiler les menottes sur le pont. Il pouvait lui faire confiance.

Jason suivit la journaliste jusque dans la petite venelle. Celle-ci était faiblement éclairée par une seule ampoule. Des ordures trainaient sur le sol. Il n’y avait rien dans cette petite rue mis à part deux poubelles pleines. Juliet avait raison, il n’y avait personne. Jason s’enfonça un peu plus loin dans cette ruelle avant de s’arrêter net.

« Bon… Je crois que je peux vous faire confiance. »

Jason se retourna tranquillement tout en enlevant le masque qui lui couvrait le visage.

« Juliet Hobkine c’est bien cela ? Je vais vous avouer que l’idée de vous laisser là et de partir m’a effleuré l’esprit, mais vous m’intriguez. »

Jason prit une petite pause.  

« Vous saviez que j’allais être sur ce pont ce soir. Je n’ai parlé de ce plan à personne. Alors, avant que je réponde à vos questions, dites-moi simplement depuis combien de temps vous me suivez. »

Jason Reed enleva le capuchon de son chandail, dévoilant ainsi la totalité de son visage. Il espérait que cela pousserait la journaliste à lui faire confiance et à répondre à sa question. Ses yeux brillaient en regardant la journaliste. Il devait apprendre comment il a manqué de subtilité à un tel point qu’une journaliste a pu l’identifier.

Bien, tout se passait pour le mieux au final. La Flèche faisait de son mieux pour lui faire confiance, alors Juliet était plutôt satisfaite d'elle. Elle observa avec grand intérêt le visage de l'homme en face d'elle. Il était jeune, comme elle l'avait supposé.

- "Au moins, vous êtes honnête. Je vous en remercie" dit-elle en souriant "En tant que journaliste, je vous suis plus ou moins depuis votre grand éclat à la banque. Ca en avait fait jasé, mais je dois avouer que j'avais mis cela simplement sur un petit voyou à la petite semaine"

Il était vrai que quand on lui avait demandé un reportage là-dessus, elle n'en était nullement contente. Mais au final, à voir comme les foules étaient intéressées, Juliet a finit par s'y intéresser également.

- "Physiquement, je vous suis depuis ... " dit-elle en regardant sa montre "Je dirais quelques heures. Je vous suis depuis que je vous ai vu sur le pont"

Ce qui était strictement la vérité. Elle ne le filait que depuis peu, son carnet en revanche...

- "Quant au fait que j'ai su où tu te trouverais ce soir, j'imagine que tu ne me croirais pas si je te disais que j'étais médium?" dit-elle avec un grand sérieux

Jason Reed se mit à rire faiblement.

« Non effectivement, les médiums, c’est pas réel. »

Comme Juliet l’avait deviné, il ne croyait pas un mot de son explication. Il ne connaissait pas assez la journaliste pour comprendre si elle avait vraiment dit la vérité, mais il ne croyait pas aux médiums. Les rêves prémonitoires, les visions, parler aux morts, pour Jason, tout cela était faux. La justification de Juliet quant à la raison de sa présence sur le pont le laissa donc un peu amer. Il venait de lui montrer son visage, de lui faire confiance et elle osait lui dire des conneries.  

« Tu aurais quand même pu me sortir une meilleure excuse. »

Jason prit quelques secondes pour réfléchir.

« Ah, je comprends maintenant pourquoi tu m’as parlé de médium. Ça aurait été une réponse facile qui ne demande pas trop d’explication. Je crois plutôt que tu vis dans le coin et que tu m’as remarqué de ta fenêtre en réfléchissant un soir. Tu m’as vu venir régulièrement et tu as compris que ma cible était le pont. »

Jason releva les yeux vers la journaliste en souriant.

« C’est pour cela que tu m’as donné une réponse bidon, tu voulais éviter que je sache que tu vivais dans le coin, probablement de peur que je te fasse quelque chose. Ne t’en fais pas, je ne t’en veux pas, je suis moi aussi quelqu’un qui fait bien attention. »

Jason prit une petite pause, toujours en fixant la journaliste.

« Ça explique aussi pourquoi je ne t’ai pas vu tout à l’heure près du pont. Tu étais simplement dans ton appartement et quand tu m’as vu, tu es venue me rejoindre. N’est-ce pas ? »

Jason souriait. Il laissait voir ses dents blanches parfaitement droites. Il était persuadé qu’il venait d’élucider le mystère et il était très fier de lui.

Dommage, pourtant Juliet disait vrai. Elle n'avait fait que profiter de son pouvoir. Mais elle ne lui en voulait pas d'être sceptique, elle en aurait fait de même à l'époque. Trouver une excuse allait être des plus embêtant par contre, elle n'avait pas de quoi trop justifier sa présence. Elle pouvait toujours mentir ouvertement, mais ce n'était jamais agréable.

Mais au final Jason lui fournit sa propre explication. Bien que la logique était très impressionnante, même que cela était l'explication la plus probable si Juliet était humaine, il était si loin de la vérité. Mais il lui fournissait un alibi.

- "Et bien, j'ai bien eu raison de t'appeler la flèche" dit-elle l'air impressionné "C'est plus ou moins ça oui"

Juliet soupira, prenant l'air un peu gênée.

- "En fait, pour être honnête, j'avais peur que tu ne tentes de te venger un jour ou l'autre. Que tu fasses semblant d'être d'accord avec ce que je fais et qu'après, tu viennes soit endommager mon batîment, soit carrément de venir jusque dans mon appartement. Vu que l'on ne savait pas si tu étais une petite frappe ou quelqu'un de plus réfléchi"

Est-ce que ce jeune homme était particulièrement riche? La qualité de sa dentition montrait soit une chance parfaite à la loterie de la vie, soit de l'aide avec quelques opérations ou machines.

- "Je travaille pour avoir un article sur tes oeuvres et je dois avouer que c'est un vrai casse-tête. Alors quand j'ai vu du mouvement, j'ai essayé. Je te raconte pas le nombre d'échecs que j'ai eu en suivant des personnes innocente" dit-elle en riant "Merci de ta confiance. J'ai pas vraiment de secret à te donner en échange, mais si tu veux je peux être ta carte maitresse. Je suis plutôt douée pour sortir les gens d'ennui et j'ai beaucoup de contacts"

Juliet pouvait probablement le sortir des problèmes judiciaires, si tout d'un coup Jason se faisait attraper. Et en même temps, l'idée de faire de lui son propre Nephil germait gentiment dans la tête de la journaliste

« Tu pourrais me sortir d’ennui si jamais on m’attrapait ? »

Jason Reed souriait de plus belle. Il commençait vraiment à avoir confiance en cette journaliste. Jason voulait lui montrer un peu de quoi il était capable. Se suspendre d’un pont, c’est facile, grimper sur un bâtiment sans échelle, c’est autre chose. Il souhaitait impressionner sa nouvelle amie.

« C’est bien, mais je te préviens, je n’ai pas l’intention de me faire prendre ! Je suis plutôt doué pour me sortir des situations fâcheuses ! »  

Jason se mit à courir vers le mur avec l’ampoule. Il avait bien l’intention de monter sur le toit de ce petit commerce. Il sauta vers le mur. Il utilisa habilement sa jambe gauche pour se donner de l’élan sur le mur et ainsi sauter plus haut. Il utilisa sa main droite pour agripper la lampe. Il savait que celle-ci pouvait le supporter. Il avait déjà monté à cet endroit pour observer le pont de la 2e avenue. Il ramena sa main gauche sur la lampe et il prit de nouveau un élan. Cette fois-ci, il s’accrochait au toit du bâtiment. Il souleva rapidement le reste de son corps en se retournant et il s’assit sur le bord, laissant ses jambes dans la ruelle où se trouvait encore Juliet.

« Comme tu peux voir, je suis plutôt habile pour éviter les ennuis. Si tu n’avais pas piqué ma curiosité, je t’aurais sûrement échappé ! » dit-il, confiant de ses capacités.  

« Mais bon, si jamais je me faisais prendre, j’accepterais bien ton aide. Ça ne risque pas d’arriver, mais on ne sait jamais ! Comme le disais ma mère : il vaut mieux avoir un plan B, car on ne sait jamais ce que l’avenir nous réserve. »

Le vandale prit une courte pause après avoir dit cela. Pourquoi parlait-il de sa mère tout d’un coup ? Jason ne souhaitait pas créer de malaise alors il enchaina simplement en disant :

« Qu’est ce que tu voudrais savoir Juliet ? Je suis prêt à répondre à n’importe quelle question. »

Elle n'avait qu'à demander, il allait répondre honnêtement du haut de son perchoir.

Juliet hocha la tête. Elle pouvait le faire sortir de plein de manière. Un petit passe par ci, un peu de mensonge par là et paf, le jeune homme serait sortit en moins de deux. Par contre, elle pourrait aussi lui proposer un petit vœu avec son ami Bey, c'était l'idéal pour se faire une nouvelle recrue.

Elle l'observa, amusée, alors qu'il grimpait sur le batiment sans problème. Le jeune homme avait définitivement un besoin d'impressionner les gens, ou un égo surdimensionné. Ou alors était-ce car elle était une femme. Dans tout les cas, il prenait des risques et ça, c'était plutôt positif pour Juliet.

- "Et bien. Adepte de parkours à ce que je vois. Ca expliquerait pourquoi tu as été si élusif jusqu'à maintenant. J'en ai pratiqué un peu, pour un reportage sur un casse-cou également. Mais effectivement, je ne suis pas à ton niveau"

Mais, Juliet elle se fatiguait moins vite que Jason. Alors il serait intéressant de voir qui des deux serait le vainqueur. Dans tout les cas, ce tagueur se révélait plein de ressources intéressantes.

- "Ta mère a bien raison" dit-elle en allant s'appuyer contre le mur en face, pour pouvoir plus facilement regarder en haut sans se casser la nuque. Elle sortit son carnet et de quoi écrire "Quelque petites questions sur tes motivations et tes compétences. Et après, je peux te proposer d'aller prendre une bière"

Juliet tourna quelque pages et regarda Jason

- "Commençons. Tu as fait un certain nombres de coups d'éclat dans la ville, dans des lieux où certains imaginaient impossible de réussir à placer un grafiti. Comment y arrives-tu?"

Juliet nota la réponse et rajouta

- "Et pourquoi? Pourquoi prendre des cibles à hauts risques et quel est ton message derrière tes tags?"

« Est-ce que tu me croirais si je te disais que j’étais capable de voler ? » dit-il avec un grand sourire. Évidemment, il faisait référence à son excuse de médium. Jason Reed ria un peu avant de reprendre son sérieux.

« Plus sérieusement, je choisis mes cibles à l’avance et je me prépare. Je ne te dirai pas comment je choisis mes cibles, mais, lorsque je choisis un lieu, je le visite à plusieurs reprises. Parfois seul, parfois avec des amis pour savoir quand l’endroit est le moins achalandé. C’est comme ça que je détermine si je peux laisser ma marque sur un endroit. S’il y a trop de gens, alors je regarde pour un autre lieu. »

Jason avala sa salive, il commençait à avoir soif. Cette aventure lui avait asséché la bouche, il accepterait volontier une bière.

« Et pour ce qui est des lieux impossibles à atteindre, il n’y a pas un seul endroit que je ne peux accéder. Je suis assez bien bâti pour me déplacer comme je l’entends et je n’ai pas le vertige. Il faut simplement arrêter d’avoir peur. Se suspendre comme je l’ai fait tout à l’heure, c’est dangereux. Je suis conscient des risques que je prends, mais les risques en valent la peine. La preuve, c’est que je suis maintenant connu à travers le quartier est ! Pour se faire connaître, il faut sortir de l’ordinaire. »

Jason regarda Juliet prendre ses notes puis il écouta sa seconde question.

« Plus il y a de risques, plus la récompense est grande », répondit-il. « Si je n’avais pas fait de graffitis sur la banque, jamais les journaux n’auraient pris le temps de se demander : qui est la flèche ? Ça n’aurait juste pas eu lieu. C’est aussi simple que ça, on te remarque quand tu agis différemment. Aussi, j’aime prendre des risques. J’aime sentir que j’ai le contrôle sur ce qui va m’arriver. Quand je suis dans des situations dangereuses, comment dire, je me sens… plus vivant que jamais ? »

Jason espérait que sa réponse n’était pas bizarre. Et si sa réponse effrayait Juliet ? Et si elle arrêtait de lui parler parce qu’elle a eu peur de sa réponse ? Non, il ne pouvait pas penser à ça.

« Et-et-et le message que je veux laisser… » Jason bégaya un peu. L’idée que Juliet le trouve étrange l’avait bouleversé un peu. « Voyons voir… » Jason balança sa tête en l’air et il regarda courtement le ciel noir. Il ferait jour dans quelques heures. Il ramena son regard vers la journaliste et il dit : « Les gens ne devraient pas avoir peur de faire ce qu’ils veulent. Je veux devenir un exemple de cela. Je fais ce que je veux, quand je veux et sans me faire prendre. C’est ça la vraie liberté et c’est cette idée que je veux répandre. »

Le vandale s’arrêta là. Il n’avait jamais vraiment préparé de réponse si on lui posait cette question. Il espérait qu’il avait été assez clair. Jason Reed baissa tranquillement ses yeux. vers sa montre. Il était passé les trois heures du matin. Les bars venaient de fermer. Le vandale souhaitait seulement ne pas se faire déranger par un ivrogne.

Si Jason n'était pas humain, elle aurait accepté sans sourciller qu'il soit capable de voler. C'était fou ce qu'un an parmi les Nephils pouvait changer les perceptions. Mais elle rit de bon cœur à sa blague, ce n'était qu'un juste retour de bâton. Mais Jason semblait être très minutieux dans sa préparation et très casse-cou. Peur de rien, le monde à ses pieds, la Flèche était encore à l'époque où l'on imaginait que tout était possible. Et surtout, il semblait se nourrir de la reconnaissance des gens, de la célébrité.

Juliet voyait bien qu'il prenait son pied comme pas possible de paraître dans les journaux, d'avoir son propre surnom et d'être connu par tous. Connu sans l'être vraiment, car derrière l'anonymat il restait encore invincible, sans que personne ne puisse l'attendre. C'était un sacré numéro, mais très dure sera la chute. Mais, si un jour Jason tombe, Juliet sera là pour le ramasser et récupérer la boule d'énergie qu'est le tagueur. Bien dirigé, il peut être un très bon élément et l'offre de Bey pourrait certainement intéresser un casse-cou comme lui.

C'était un jeune homme un brin perturbé qui répondit à sa question sur le sens des tags. N'y avait-il jamais pensé? Probablement qu'il vivait l'instant présent, prenant le rush d'adrénaline comme récompense de son labeur.

- "Très intéressant tout ce que tu me racontes, tu es une sacré personnalité tu sais" dit-elle en souriant "Je pense que tu seras un exemple qui fera vraiment jaser. Beaucoup, en particulier les jeunes, verront en toi un idéal de vérité et de liberté. Une sorte de personnalité traversant à contre-courant face à toutes les pressions que l'on nous applique au travers des règles et des demandes des puissants. Beaucoup te verront également en tant que perturbateur social, qui refuse les règles établies par égoïsme et qui n'est qu'un agent chaotique symbole d'une décadence de la société"

Juliet hésitait à sortir son grappin pour rejoindre Jason. Après tout, ça lui en boucherait un coin à l'humain et elle en serait plutôt fière. Mais elle se resaisit, la journaliste se devait de rester dans un rôle crédible d'humain.

- "Je te dis cela pour te préparer aux réactions. Il y aura probablement des commentaires des deux camps sur l'article que je mettrais sur le site du Wake Up Palema et je ne veux pas que cela t'influe négativement. Ce serait dommage que tu fasses une erreur à cause d'une provocation ou d'un excès de confiance" dit-elle en souriant "Est-ce que tu veux bien me parler de l'élément déclencheur qui t'a poussé à taguer? J'imagine que c'est quelque chose de relativement récent sinon on aurait entendu parlé de toi il y a déjà quelques temps"

Jason sourit timidement lorsque Juliet complimenta sa personnalité. Il n’avait pas l’habitude de recevoir des compliments. Jason écouta attentivement la journaliste. Elle avait raison, c’est impossible que la totalité de la population apprécie ses actes. Certains ne comprendraient pas le message derrière les graffitis et ils pourraient le considérer comme une sorte de nuisance. Il y avait déjà pensé, mais tant qu’il aurait l’appui de certaines personnes, il continuerait.  

« L’élément déclencheur… » Jason réfléchit un peu. Mais où commençait donc son histoire ? La séparation de ses parents était la source de son comportement à l’école qui a fini par se développer en vandalisme, mais ce n’était pas l’élément déclencheur direct des graffitis.

« Oui ! Je dirais que l’élément déclencheur a été mon aménagement à Palema. Il y a 3 ans, je ne vivais pas ici, je me promenais un peu partout aux États-Unis. Dans ce temps-là, je faisais seulement du Parkour, je ne peinturais pas. Je faisais beaucoup de conneries à l’école pour faire rire les autres. Je déménageais tout le temps, alors j’étais invincible, jamais on ne pouvait réellement me punir. »

« Quand je suis arrivé ici, je savais que je resterais pour longtemps alors j’ai préféré ne pas faire grand-chose, rester invisible. Ne pas exister pour un certain temps, c’est bien, mais rapidement on se sent seul. Je n’avais pas d’amis, mon père travaillait tout le temps, bref, j’étais toujours seul. » Jason disait tout ceci avec le cœur léger, ces expériences faisaient partie de lui. Il n’était plus la même personne qu’il était à son arrivée à Palema. Jason décida de descendre du toit.

Il fit dos à Juliet avant de se pendre avec ses bras pour se laisser tomber sur le sol. La collision entre ses chaussures et le sol était presque inaudible. Jason était habitué à ce genre de chute. « Un jour, j’en ai eu assez », dit-il avant de se retourner.

« J’avais entendu une conversation entre deux filles de ma classe. Elles parlaient de moi. Apparemment, on me surnommait le fantôme, je faisais peur aux élèves. Comment ? »  

Jason balança ses mains en l’air pour appuyer son histoire. « Aucune idée ! Rester silencieux ça fait peur aux étudiants apparemment ! » Jason se mit à rire devant l’absurdité de son histoire. La journaliste devait être déçue, ses origines étaient plutôt banales.

Jason reprit : « Bref, cette soirée-là je suis sorti, j’ai appelé mon employeur pour lui dire que j’étais malade. Je suis allé chercher de la peinture dans une quincaillerie et je me suis dirigé vers des bâtiments abandonnés. Et, pour me défouler, j’ai commencé à écrire ».  

Jason anticipa une éventuelle question de Juliet en rajoutant « Je doute que ces messages soient encore visibles aujourd’hui et dans ce temps-là je n’avais pas de signature alors on ne pouvait pas savoir qu’il y avait un seul responsable. Et c’est ça, petit à petit j’ai augmenté le défi en m’attaquant à des cibles de plus en plus visibles et j’ai developpé ma signature. »Il ne voulait pas lui dire que c’était ses « amis » qui l’avaient poussé à s’attaquer à la banque et à passer au prochain niveau. Il ne voulait pas avoir l’air de quelqu’un de facilement influençable. Pourtant, c’est ce qu’il était.

« L’élément déclencheur n’est donc pas récent, ça fait 2 ans que je tague des bâtiments. Comme je l’ai dit, on te remarque seulement si tu sors du lot ! »

Jason commençait vraiment à avoir soif, alors il relança simplement l’invitation de Juliet avec un petit sourire.

« Est-ce qu’on va toujours prendre cette bière ? »

Un brin de timidité derrière sa gueule d'ange et son brin impulsif, le jeune Jason devait probablement faire craquer toutes les midinettes si elles savaient ce qu'il faisait. Elle écouta avec grands intérêt l'histoire des origines du super-tagueur 'La Flèche'.

Jeune homme sans racine, voyageant de villes en villes sans jamais pouvoir former des liens, le tagueur prenait la voie express pour faire plaisir aux jeunes et s'intégrer superficiellement : les bêtises. Quoi de mieux pour gagner une existence que d'être connu comme le clown de la classe. Sans compter que le fait de voyager constamment devait l'entourer de mystère auprès de ses camarades et c'est peut-être à ce moment là qu'il s'est sentit tout puissant. Dans tout les cas, l'ennui et la peur de la solitude furent les premiers éléments perturbateurs, quoiqu'ils étaient toujours un peu présent dans ses comportements. Ayant une vie sédentaire définitive, la Flèche s'était retrouvé seul et sans la possibilité de faire ses bêtises.

En ayant marre de rester tout en haut du batiment, Jason put encore une fois montrer ses prouesses à Juliet qui était plus que convaincu de faire de lui une nouvelle recrue. Il ne restait plus qu'une seule chose : l'accroche.

L'élément déclencheur de ses grafitis fut une certaine colère face au commentaire de deux jeunes femmes de son école. C'était du moins ce qu'en tirait Juliet de son discours. Vexé ou peut-être blessé par la remarque de ses camarades, le jeune homme était partit se défouler et, peu à peu, avait ressenti une sorte de libération en peignant. Probablement que l'adrénaline du tag n'était plus assez forte et donc, il passa à plus gros. Après tout, l'histoire se tenait. C'était classique mais un peu d'histoire traditionnel ne faisait jamais de mal, ça aidait le lecteur à s'accrocher et à éprouver de la sympathie pour Jason.

- "Effectivement, seul ceux qui dépassent peuvent sortir de la masse de la foule" dit-elle en souriant "Bien sûr, mes invitations tiennent toujours"

Juliet lui fit signe de l'accompagner en dehors de la ruelle. Une fois sortie, elle le regarda d'un air inquisiteur.

- "Tu as l'âge au moins? Je m'en voudrais de te faire boire illégalement" dit-elle avant d'ajouter, en riant "En réalité, ça m'est égal. Je connais des endroits où je peux vite nous acheter un peu à boire, tu me diras ce que tu veux, et après on se pose dans un coin tranquille pour continuer à discuter. Ca te va? Il fait beau, alors autant en profiter"

Juliet reprit la marche dans les rues quasi-désertes. Elle était souriante et avait rangé son matériel journalistique. Le jeune humain était une sacré aubaine.

Jason Reed ne s’attendait pas à cette question. Évidemment qu’il n’était pas assez vieux pour boire légalement, il n’avait que 18 ans ! Ça, Juliet ne le savait pas, mais qu’est-ce que ça changerait de le faire boire illégalement ? Ce n’est pas comme s’il était quelqu’un de vertueux, c’était un vandale, il venait tout juste d’enfreindre la loi ! Son idée de la liberté, de faire ce qu’il veut quand il veut, passe au-dessus de n’importe quelle loi. Juliet ne devrait pas se sentir mal de lui offrir une bière, il avait commencé à boire à 16 ans, comme la majorité des jeunes. Il y a toujours un moyen d’acheter de l’alcool même quand on n’a pas l’âge.

« Non, je n’ai pas l’âge légal pour boire, mais ne t’en fais pas pour ça. Ce ne sera pas ma première bière. » Il sourit et il ajouta « J’ai 18 ans. »

Le vandale écouta Juliet tout en la suivant. Son plan lui plaisait. Il pourrait profiter de la balade pour en apprendre un peu plus sur elle.

« Ouais ça me va ! Tant qu’on s’éloigne d’ici et que j’aie ma bière. » Jason riait un peu. Quelle soirée (ou matinée) de fou il venait de passer! Il se sentait bien. On le cherchait LUI, et on voulait LUI parler pour connaître SES motivations. Il n’était plus le fantôme qu’il était à l’école, il existait et on s’intéressait à lui. Jason se sentait apprécié, si cette Juliet avait des ennuis, elle pourrait compter sur lui. L’intimidante inconnue était devenue en l’espace de quelques heures une personne de confiance pour Jason.

Le duo marcha à travers les rues presque désertes. Celles-ci donnaient l’impression que la ville était endormie. Dans quelques heures, elle se réveillerait.

Jason voulait en connaître plus sur sa nouvelle amie. Le problème est que Jason ne savait pas trop où commencer. Il ne connaissait rien sur elle mis à part son nom, son travail et une approximation d’où elle vivait. Quel âge avait-elle ? Elle avait définitivement plus de 21 ans, mais c’est tout ce qu’il pouvait dire. Il aurait peut-être une idée de son âge s’il s’intéressait à son travail.

« Ça fait longtemps que tu es journaliste ? » Jason écouta attentivement la réponse.

« As-tu toujours su que c’est ce que tu voulais faire dans la vie ? » Jason enviait tellement les gens qui avaient des rêves depuis leur jeunesse. Si seulement il savait ce qu’il voulait faire pour le reste de sa vie, il pourrait décider s’il allait continuer ses études.

« Intéressant », ajouta-t-il avant de dire « Je viens de penser à cela, mais tu dois être plutôt courageuse comme personne. Je veux dire… Tu es venue voir seule un criminel potentiellement dangereux… Si ça avait été quelqu’un d’autre, tu aurais pu te faire balancer en bas du pont ! » Jason Reed la complimentait de façon sincère, mais son air dans son visage montrait un peu d’inquiétude. Est-ce que la journaliste avait pensé à ce qui aurait pu se passer ? Était-elle courageuse ou téméraire ?

Le duo approchait de leur destination.

Juliet rit, elle était sûre que le jeune délinquant Jason avait déjà bu de la bière et probablement même plus. Après tout, cela collait bien à l’identité de rebelle que le jeune homme avait. Elle marcha donc avec lui, tranquillement. Elle allait se diriger vers un vendeur 24/24h, et acheter pour elle avant de retrouver Jason en extérieur. Elle le regarda, écoutant sa question. Elle allait lui répondre avec autant de sincérité que possible, après tout il lui avait apporté beaucoup d’informations.

« Ca fait 4 ans que j’ai fini mes études de journalisme. J’ai travaillé pendant un an dans une chaine nationale avant de revenir à Palema pour être plus proche de ma ville natale. Disons que je préférais être dans un environnement agréable »

La réalité était qu’elle préférait largement être dans un endroit où elle pouvait avoir un poids, comme le Wake Up Palema, plutôt que d’être dans une chaine nationale, noyée parmi d’autre pimbêche et dans laquelle elle n’aurait aucune liberté… ça et les disparitions étrange de Palema.

« J’ai toujours été très curieuse dans la vie, dès le plus jeune âge. Me suis attiré quelque soucis, mais jamais rien de très grave. Donc je savais que je voulais travailler dans l’information. Vu que je préférais l’interaction sociale avec les gens, je me suis dirigée vers un métier où je pouvais légalement être une fouineuse : journaliste. J’aurais pu être Policière ou détective, mais j’avais pas nécessairement l’envie et le physique pour »

Elle préférait largement pouvoir manipuler les gens et répandre des mensonges, plutôt que de devoir suivre un code moral policier. Juliet regarda ensuite Jason, amusée de la question. Si seulement il savait qu’elle aurait pu le dominer sans aucun problème. Une balle dans le genou et puis  basta, ni vu ni connu. Pas de trace d’arme, pas de douilles, pas de marque, rien… Le rêve idéal. Sans compter qu’à n’importe quand, elle aurait pu fuir.

« Je connais quelques techniques de défenses tu sais et je suis une vrai charogne en combat. Donc je sais exactement où viser pour faire mal, et si vraiment il risquait d’avoir des problèmes, j’ai de quoi me défendre sur moi. Mais merci de ton inquiétude, c’est très gentil de ta part » dit-elle en le regardant gentiment « Mais je sais pas si l’on peut dire que je suis courageuse. Après tout, je suis restée tout de même plutôt prudente. J’ai attendu que tu sois en position de faiblesse avant de t’aborder »

Non, Juliet n’était de loin pas courageuse. Ce serait la première à fuir si sa vie était en jeu… Mais les questions de Jason lui indiquait ce à quoi elle s’attendait : C’était un type bien, gentil comme pas deux qui ne ferait pas de mal à une mouche innocente. Plus le temps passait, plus il était idéal.

Au même moment, ils arrivèrent au 24/24. Juliet s’arrêta

« Normalement, le caissier ne pose pas de question tant que tu n’as pas l’air de vouloir consommer de la bière. Donc, ne mentionnons rien et ne porte pas le pack de bière et tout ira bien. Pendant que j’irais payer pour les bières, prends de la nourriture » dit-elle en souriant. Elle fouilla dans ses poches, prit son porte-monnaie et lui donna 10$ « Ca devrait suffire à acheter de quoi se casser la croute. Bien entendu, je t’offre tout, y compris les bières. C’est pour te remercier d’être cordial avec moi »

Juliet lui sourit et rentra dans le 24/24 accompagnée de Jason. Elle partit immédiatement vers le rayon de bière, prenant un pack de 6 bière irlandaise, et partit payer. L’intérieur était une échoppe des plus classiques. Vieillote, avec des installations datant d’au moins une décennie, ce n’était pas le plus moderne au monde. Quelques camera s’assuraient que les client ne fassent pas de  bétises et une caisse unique attendait qu’ils viennent déposer leur marchandises. Il n’y avait qu’une seule autre personne, probablement un travailleur nocturne vu qu’il achetait des sandwichs.

Jason fit un calcul rapide dans sa tête. Ça faisait maintenant 4 ans qu’elle a terminé ses études en journalisme ce qui veut dire qu’elle avait au minimum 23 ans ? Jason n’avait aucune idée à quel âge on pouvait se lancer dans des études journalistiques ni combien de temps ce genre d’études prend, son plan de deviner l’âge de Juliet tombait donc à l’eau. Il ne pourrait pas le deviner immédiatement, mais il pourrait certainement le savoir bientôt. Quand il serait chez lui, il n’aurait qu’à faire une petite recherche et il pourrait apprendre approximativement l’âge de Juliet. C’était mieux que rien. Il avait encore la possibilité de lui demander directement, mais il n’avait pas le courage de le faire. Ça serait un peu bizarre de lui demander ça tout d’un coup, non ?

Jason Reed était perplexe face à la réponse de Juliet. Oui, elle connaissait peut-être des techniques d’autodéfense, mais avec sa carrure elle ne pourrait pas résister à beaucoup de personnes. C’est à ce moment que Juliet lui dit : j’ai de quoi me défendre sur moi. Qu’est-ce quelle avait sur elle pour se défendre ? Elle possède un pistolet ? Si c’était le cas, elle aurait un petit calibre, le genre de revolver qu’on voit dans les films d’espion. Elle a un couteau alors ? C’était déjà plus plausible, mais un couteau, ça laisse de grandes blessures, seuls les psychopathes se promènent avec ça. Dans ce cas, elle devait avoir un pistolet laser ou une capsaïcine (du poivre de Cayenne pour brûler les yeux). L’important, c’était que Juliet se sente en sécurité. Jason était satisfait de savoir qu’elle prenait des précautions.

Jason comprit rapidement la stratégie de Juliet, ils n’avaient qu’à prétendre ne pas se connaître. Il allait la laisser entrer, attendre un peu, puis entrer à son tour. Juliet lui tendit le billet de 10 $. Celui-ci était un peu fripé, il laissait croire qu’il était en circulation depuis longtemps déjà. Juliet entra dans le magasin. Jason la regarda faire.

Après 5 secondes environ, Jason ouvrit la porte du magasin. L’éclairage en néon lui brûla un peu les yeux. Ça faisait déjà un bon moment qu’il était dehors où il n’y avait presque pas de lumière. Ses yeux prirent quelque temps avant de s’habituer. Le vandale se massa les paupières. Il commençait à être fatigué, mais il ne voulait pas aller dormir. Il remarqua un homme dans la trentaine qui se tenait devant le réfrigérateur des sandwichs. L’homme a finalement agrippé l’un des emballages et il s’est dirigé vers la caisse où Juliet était déjà avec un pack de 6 bières. L’employé avait l’air fatigué, mais il était tout de même souriant. Jason Reed se dirigea vers l’étalage des chips. Celui-ci était dans le coin de l’échoppe. Il y avait beaucoup de marques et beaucoup de saveurs différentes. Qu’est-ce qui ferait le plus plaisir à Juliet ? On va prendre une sorte sûre, en espérant qu’elle ne soit pas difficile. Il y avait un spécial 2 pour 1, il prit donc des chips barbecue et des chips nature. À cette heure-ci, de simples croustilles feraient l’affaire pour casser la croute.

Jason Reed se rendit donc vers le comptoir. Il s’arrêta brusquement. Juliet avait l’air d’être en colère et ses yeux étaient rivés sur le client des sandwichs.

Que s’est-il passé ?

Tout se passait bien. Juliet était entrain de payer tranquillement, montrant en même temps sa carte d'identité au vendeur pour prouver qu'elle avait légalement le droit d'acheter ces bières. Par réflexe, et car cela était plus rapide, elle avait montrer son passe magique, qu'elle avait transformé en carte d'identité. Elle commençait à sortir le billet quand l'homme au sandwich arriva tel une brute. L'air pressé, il avait jeté ses achats sur la caisse, sans même attendre que la journaliste n'ait fini de payer. Les humains pouvaient être vraiment malpoli parfois. Juliet, bien décidée à lui faire payer son manque de politesse, prit alors tout son temps pour trouver la monnaie exact dans son porte-monnaie, ce qui énerva visiblement l'homme.

- "Bon la petite va se bouger, sinon"

- "Sinon quoi, grand dadet?" interrompit Juliet, le regarda méchamment.

Du coin de l'oeil, elle put voir que Jason s'approchait avec des chips, des choix classiques mais indémodable. Il n'était pas temps de chercher des embrouilles avec un humain, cela risquait de porter préjudice à l'image que Juliet voulait retransmettre. Elle fixa l'homme encore un moment avant de retourner à son comptage de pièce.

L'employé, bien que souriant, n'était pas des plus enchantés de ce qui risquait de se passer. L'homme au sandwich était un transporteur de marchandise. Très gentil, amical comme tout et serviable, mais il avait une patience quasi-nulle. Il n'était pas violent en tant que tel, le plus qu'il l'avait vu faire était d'empoigner un jeune homme qui lui aurait manqué de respect. L'employé regardait Juliet, un peu suppliant, espérant qu'elle se dépéche.

Mais Juliet prenait grandement son pied. L'homme au sandwich perdait visiblement patience.

- "Bon écoute, tu te bouges. Je vois bien que tu as un billet de 20$, tu peux l'utiliser. Alors te fout pas de moi!" dit-il en haussant le ton "Je suis quelqu'un de très pressé, alors soit tu paies avec ton 20$, soit je te force à le payer"

Juliet le regarda, l'air offusqué. Elle jeta un coup d'oeil à Jason avant de ramener son regard sur le porte-monnaie. Elle allait jouer le jeu. Mettre une balle dans la tête de cet humain n'était pas justifiable.

- "Très bien très bien. Pas besoin de vous énerver Mr.Brute. Vous saviez que si vous ne m'aviez pas aggressé, tout le monde serait déjà sortit?" dit-elle en payant avec le billet de 20$ "Mais si vous le permettez, sachez que vous êtes un profond idiot doublé d'un bien piètre être humain"

Juliet ne l'avait même pas regardé pendant son petit discours. Elle faisait de son mieux pour cacher son sourire. L'homme au sandwich ne le prenait pas de cette oreille. En même temps qu'il payait, il insista, en colère.

- "Va falloir qu'on t'apprenne le respect" dit-il, les dents serrés

L'homme au sandwich se retenait de la gifler et cela se voyait. Il n'était pas fou, il savait bien que remettre en place les gens ne se faisait malheureusement plus...

Jason s’approcha du comptoir. Il s’arrêta où les étalages commençaient pour observer, en silence, ce qui était en train de se passer. L’homme était en colère à cause que la transaction a pris trop de temps ? C’était quoi son problème au juste ? Quand on fait un achat, on attend que l’autre ait fini, pas besoin de brusquer les autres pensa Jason. Le vandale n’avait pas remarqué que Juliet faisait exprès pour prendre son temps et embêter le transporteur de marchandises.

C’est à ce moment que le client des sandwichs pris la parole en haussant le ton « Bon écoute, tu te bouges. Je vois bien que tu as un billet de 20 $, tu peux l’utiliser. Alors te fou pas de moi ! Je suis quelqu’un de très pressé, alors soit tu paies avec ton 20 $, soit je te force à le payer ».

Quoi ? Cet homme venait-il vraiment de menacer Juliet ? De menacer la nouvelle amie de Jason ?

« Comment dois-je gérer la situation ? Lui casser la gueule ? Je ne sais même pas si je pourrais le faire avec la taille qu’il a… Si je ne fais rien, Juliet va probablement me trouver inutile… Qu’est-ce que je… »

Juliet prit la parole et « s’excusa » avec arrogance avant de poursuivre avec « vous êtes un profond idiot doublé d’un bien piètre être humain »

Jason écouta sa réplique avec étonnement. C’était bien la première fois qu’il entendait quelqu’un dire à quelqu’un d’autre qu’il était un mauvais être humain. Une insulte raffinée ! Il était clair que Juliet était intelligente pour sortir ce genre d’insulte.

L’autre client grommela ce qui sonnait comme une menace. Pas question qu’il s’en prenne à son amie ! Le client se tenait entre Jason et le comptoir. Jason lança les sacs de chips sur le comptoir devant l’employé. Celui-ci avait complètement perdu son sourire. La situation qui se déroulait devant lui l’inquiétait, on pouvait le voir dans ses yeux. Cependant, il restait silencieux. Avait-il peur du client ? Jason n’y pensa pas plus longtemps, il prit la parole.

« Et toi, il va falloir qu’on t’apprenne à patienter. » Sa voix était pleine de détermination, pas question qu’il ait l’air d’un lâche devant Juliet !

Le transporteur de marchandise toujours aussi en colère se retourna tranquillement pour regarder Jason. Les yeux du client étaient pleins de rage.

« Qu’est ce que tu as dit ? J’ai cru t’entendre dire quelque chose. » Le transporteur avait un ton arrogant. Il tentait d’intimider Jason, de le forcer à se taire. Pas question que j’aie l’air d’un lâche.

Jason regardait l’homme directement dans les yeux et il avait toute son attention sur lui. Il ne voyait plus le caissier ni Juliet. Jason reprit la parole.

« J’ai dit qu’il faudrait qu’on t’apprenne à… »

Jason n’eut pas le temps de finir sa phrase que déjà l’homme l’agrippa au collet et le poussa jusqu’au réfrigérateur contenant les sandwichs. Pas question que j’aie l’air d’un lâche.

« Et c’est toi qui parles de respect » dit Jason en un souffle, aussi déterminé qu’avant.

L’homme n’apprécia guère la réponse de Jason. Il utilisa sa main forte, la droite et il lui donna un solide coup sur la mâchoire. Le vandale encaissa le coup avec stupéfaction, il ne s’attendait pas à recevoir le poing du transporteur dans la figure. Jason tomba au sol dans un vacarme infernal. Son sac à bandoulière plein de peinture était la source du bruit. Les cannettes se sont fracassées sur le sol et entre elles, heureusement, le sac est resté fermé. Jason s’assit en se frottant le visage. Il regarda son agresseur avec mépris.

Le pauvre employé espérait que le transporteur allait juste s'en tenir à ça, et il allait probablement le faire. Quand un jeune homme décida de rajouter son grain de sel, ce qui n'allait probablement que rajouter de l'huile sur le feu. Vu l'impétuosité du jeune homme, l'employé craignait que cela ne se termine en castagne. Il avait bien entendu de quoi se défendre, caché sous le comptoir, mais il n'avait jamais vraiment tiré... Et il ne voulait surtout pas tirer. Il restait aussi impassible que possible, espérant ne devenir que du mobilier.

Juliet regarda la scène avec interêt, et surprise. Elle ne s'attendait pas à ce que Jason intervienne, en particulier vu qu'ils étaient sensés être inconnu l'un de l'autre. De plus, probablement que le transporteur serait parti simplement en maudissant cette insolente personne qu'était la journaliste. Mais ça serait mentir que de dire qu'elle n'en retirait pas un certain plaisir. Mais probablement que cette provocation était de trop pour un homme qui n'avait qu'une envie, partir et être respecté. L'action de ce jeune homme était un manquement de respect supplémentaire, qui finit par pousser à bout le transporteur. Il aurait simplement fallu que ce jeunot s'excuse de son comportement, et rien de tout cela ne serait arrivé! Il n'y pouvait rien, il devait défendre un semblant d'honneur et de respect. Et se faire insulter par une femme insolente puis par un gamin, c'était trop.

La détermination de Jason était plutôt impressionnante. Mais sa surprise lors du coup trahissait qu'il ne s'attendait probablement pas à en arriver là. Le coup était fort, il fallait l'admettre, Juliet pouvait le sentir d'ici. Ce n'était pas l'envie qui manquait de tirer sur le transporteur. Une balle dans les genoux, comme pour le frère de Diechi, et on en parlait plus... Si y avait bien une chose que la journaliste aimait, c'était de vaincre des brutes comme lui... Mais là n'était pas la question, il était temps d'intervenir comme une humaine. En particulier car il valait mieux stopper les choses là, Juliet ne souhaitait pas que Jason ne se blesse en souhaitant répondre par la force.

- "Vous, allez chercher des glaçons" dit Juliet en pointant l'employé, puis elle se dirigea vers le transporteur "Félicitation, vous avez frappé un jeune homme devant les cameras, vraiment, y a plus malin que ça. Alors je vous laisse 3 secondes pour partir avec vos cliques et vos claques ou j'appelle la police. Et croyez-moi, nous porterons plaintes et vous pourrez dire adieu à votre travail. Puis, un casier judiciaire, ça fait très tâche surtout quand on est en période de difficulté économique. Je vous paries que vous risquez de perdre votre maison si vous êtes virés. Donc si vous ne partez pas immédiatement, je m'occuperais personnellement de détruire votre travail, votre vie et tout ce qui est cher à vos yeux"

Juliet regardait l'homme avec colère. Elle ne doutait nullement de la possibilité d'avoir les informations pour ce transporteur, et elle avait toujours rêvé de détruire la vie de quelqu'un. Il n'avait qu'un seul faux pas à faire, continuer son aggression.

Etait-ce à cause de la menace de Juliet, car il avait fini par se calmer ou car il était vraiment en retard, dans tout les cas, le transporteur n'insista pas. Il jura à basse-voix, puis partit précipitamment. Il laissa le prix exact sur le comptoir et partit, secouant la tête. L'employé revint avec de la glace qu'il posa sur le comptoir, le comptabilisant dans le prix total... Il n'y a pas de petit profit. Juliet sourit à Jason.

- "Bien joué. Désolé que ça se soit terminé comme ça. Je t'offre tes chips, faut bien ça pour m'excuser que tu te sois ramasser un poing" dit-elle en lui tendant une main pour l'aider à se relever "Et je vais devoir m'occuper de te mettre de la glace, on a pas envie que ton visage double de volume tout de même"

Juliet s'occupa de payer le tout. De manière générale, elle faisait de bonne rencontre quand il y avait des problèmes. Est-ce que cela allait encore être confirmé?

- "Pas trop sonné?" dit-elle, une fois les achats effectués "Plutôt courageux d'encaisser le coup comme ça. On sort, on va à quelque rue d'ici, y a un petit parc tranquille, et on s'occupe de ta blessure, ça te va?"

Jason était assis sur le sol, le regard rivé sur son agresseur. La haine s’emparait de Jason.

Je dois me battre. Je dois me battre. Je dois me…

Avant que Jason n’ait le temps de faire quoi que ce soi qui aurait pu empirer la situation, Juliet interpella l’homme au sandwich.

Je…

Jason n’écouta pas ce que Juliet disait à l’homme, il ne faisait que s’imaginer en train de se battre contre son agresseur. L’image était claire dans sa tête, il se relèverait en oubliant sa douleur et il dirait une phrase digne d’un gros plan dans un film d’action : « Je vais te montrer le respect ». Il sauterait vers son agresseur en évitant un coup de poing. Il le frapperait au visage avant de lui détruire le genou avec son pied. L’agresseur tomberait au sol devant lui et Jason l’achèverait avec un coup de coude. La brute tomberait au sol, dans un coma. Il aurait l’air d’un dur à cuire et Juliet serait certainement étonnée. Elle le trouverait vraiment trop génial.

Ses rêves illusoires se dissipèrent lorsque l’autre client quitta le magasin. Jason entendit le son des cloches de la porte et c’est à ce moment qu’il est revenu à ses esprits. La première chose qu’il aperçut était Juliet, souriante. Celle-ci s’excusa, Jason ne lui en voulait pas. Ce qui venait de se passer était sa faute à 100 %, il ne pouvait pas la blâmer. Il aurait pu simplement se fermer la gueule. Il aurait dû se fermer la gueule.

Juliet lui tendit la main, Jason la prit immédiatement. La journaliste l’aida à se relever. Le vandale sourit timidement à la journaliste. Il se trouvait stupide, il aurait vraiment dû fermer sa gueule. D’ailleurs, son visage commençait à le faire souffrir. Ce n’était pas une douleur insupportable, mais ce n’était définitivement pas agréable. Il avait l’impression d’avoir un ballon à la place de la joue gauche. Son visage enflait, et Juliet le voyait bien.

« je vais devoir m’occuper de te mettre de la glace, on a pas envie que ton visage double de volume tout de même »

Ça c’est sûr, Jason n’avait pas envie d’avoir l’air d’un écureuil avec des noix plein la gueule.

« Merci » dit simplement Jason à voix basse.

Juliet termina la transaction avec l’employé. Celui-ci avait l’air sous le choc. Il ne devait pas être habitué à voir des gens se battre, si on peut appeler ça une bataille.

« Pas trop sonné ? » lui demanda Juliet.

« Non pas trop avec de la glace je vais être comme neuf ! » Chaque mot qu’il disait lui faisait mal. Il allait devoir les modérer, du moins, en attendant la glace.

« Plutôt courageux d’encaisser le coup comme ça. On sort, on va à quelque rue d’ici, y a un petit parc tranquille, et on s’occupe de ta blessure, ça te va ? »

« On va se rendre au parc, mais je vais prendre la glace tout de suite si ça ne te dérange pas », dit Jason en allant chercher la glace dans le sac de plastique du magasin. Jason s’empara du sac de glace. Il l’amena sur sa joue gauche. Le contact créa une sensation de brûlure qui le força à le décoller. Il reposa le sac plus doucement. Ça lui faisait du bien, la douleur s’estompait peu à peu.

« Ah, merci. Là ça va bien ! » la voix de Jason était revenue comme avant le coup. Sa joue lui faisait encore mal, mais la glace l’aidait à tolérer la douleur.

Le duo sortit du magasin, puis il se dirigea vers le parc.

« Je vais être honnête, je ne m’attendais pas à ce qu’il me frappe. Je savais que j’allais le mettre en colère en disant ça, mais je ne m’attendais pas à ce coup… » Jason voulait se justifier, pas question qu’il ait l’air d’un lâche ou de quelqu’un de faible ! « Avoir su, je lui aurait casser la gueule avant ! » Jason n’était pas du tout le genre de gars qui cherchait à se battre. Il disait cela simplement pour impressionner la journaliste.

« Mais bon, c’est mieux que ce soit passé comme ça. On évite une discussion avec la police… » Après ce qu’il avait fait sur le pont, il préférait éviter parler avec la police.

Le vandale et la journaliste arrivèrent au parc après environ 3 minutes de marche. Celui-ci était faiblement éclairé, il y avait un simple lampadaire à l’une des extrémités. Sous ce lampadaire se trouvait une table de pique-nique en bois, saturée de signatures écrites, peintes et gravées.

Jason regarda Juliet en s’installant à la table de et il lui dit : « En tout cas, le client des sandwichs était impatient… » Il aurait quand même pu trouver une meilleure phrase pour amorcer une discussion.  

Jason ne savait toujours pas l’âge de Juliet et ça le tracassait. Il venait de prendre un coup de poing, il n’avait rien à perdre. Il lança « Et euh t’as… T’as quel âge au juste ? »

Juliet trouvait Jason des plus amusants. Son courage, ou témérité, risquait de lui attirer un certain nombre de problème, comme celui qui venait de se passer, mais pouvait également être très utile. Il prit la glace immédiatement, il avait raison après tout, mieux valait ne pas souffrir inutilement. En marchant, elle l'écouta avec interêt. Ainsi, le jeune tagueur était également un bagarreur? Elle sourit.

- "Si tu l'avais attaqué en premier, tu aurais probablement eu plus de problèmes car il aurait eu légalement le droit de te rendre, et il t'aurait donné plus qu'un coup de poing" dit-elle en le regardant. Elle s'assit "Parfois, le plus intelligent a faire, est de ne pas attaquer. Ou alors, attaquer de manière différente qu'un coup de poing. Là, on a la possibilité de porter plainte contre lui, ce qui lui porterait bien plus préjudice que n'importe quel coup de poing. Et puis, on passe pour les victimes, c'est toujours mieux pour pouvoir faire ce que l'on désire"

Après, pour quelqu'un plein d'honneur comme Jason, ce n'était pas nécessairement la meilleure solution.

- "Et comme tu dis, mieux vaut éviter la police pour le moment. Ca serait dommage que l'épopée de la flèche se termine à cause d'un idiot dans une superette qui était un brin trop pressé."

Juliet ouvrit deux bière, une pour elle et une pour Jason. Elle but un peu, la température était parfaite : juste froide comme il faut. Ce n'était pas non plus les meilleures bières du marché, mais ce n'était pas de la pisse de chat. C'était des bières que la journaliste prenait souvent.

- "J'ai 27 ans, bientôt 28 ans" dit-elle toute souriante "Quant à ce client, effectivement il était très pressé. Si j'ai bien vu, c'était un transporteur de nuit donc j'imagine qu'on l'a pas mal retardé dans son planning"

Juliet haussa les épaules, après tout, elle n'avait rien fait de mal. Elle but un peu de la bière. Elle se demandait si elle pouvait l'emmener à un concours à boire... Probablement qu'il accepterait.

- "Si jamais, là en ce moment j'ai posé ma casquette de journaliste. C'est juste une soirée entre deux gens normaux" précisa-t'-elle, histoire que cela soit clair "Tu m'as pas mal parler de toi, en tant que la flèche, de ce qui t'intéressait et de comment tu en étais arrivé là. Mais qu'est-ce qu'il y a à savoir sur toi? Tu aimerais faire quoi plus tard et comment ça se passe dans l'école, outre le fait que certains te voient mal?"

Jason prit une gorgée de sa bouteille de bière. Un goût plutôt léger sans trop de mousse, une bière classique. Il écouta Juliet attentivement, c’était devenu une soirée entre amis plutôt qu’un interview. Jason prit une autre gorgée et il manqua de s’étouffer. Juliet s’intéressait à lui ? Pas d’une façon romantique, mais elle s’intéressait à la personne qu’il était, pas seulement en la flèche ? Jason toussa tout en écoutant la question.

« Ce qu’il y a à savoir sur moi ? J’ai toujours trouvé ça drôle comme question. Je ne sais jamais quoi dire et quoi ne pas dire. Je dirais que j’ai eu une petite enfance très normale, entouré de mes deux parents. Je suis enfant unique aussi. » Le discours de Jason était un peu déstructuré, il n’a jamais vraiment parlé de lui aux autres, d’habitude, ça ne les intéresse tout simplement pas.

« Je dirais que ma vie a changé quand mes parents se sont séparés. Ma mère a développé un grave problème de drogues. Elle a flambé la plus grande partie des économies de mon père et pour me protéger il a demandé le divorce. À ce moment-là, je me suis mis à déménager de façon constante. Je ne vivais pas plus de deux mois au même endroit. En tout cas, ça, c’était avant d’arriver ici. »

Jason regarda Juliet et il anticipa sa question. « Et je n’ai pas revu ma mère depuis le divorce. C’est pour ça aussi que je ne consomme pas. Mes amis… » La gorge de Jason se serra un peu. La fatigue accélérait les effets de l’alcool. Il devenait un peu plus sentimental.

« Mes amis consomment, mais pas moi. Je reste silencieux, mais à chaque fois que je les voir faire ça me rappelle ma mère. » Jason prit une grosse gorgée, il avait dû avaler la moitié de sa bière d’un coup.

« Et je ne suis plus aux études. Je ne sais pas si je veux… En fait, je ne sais pas ce que je veux faire plus tard. C’est un peu comme si rien ne m’intéressait. Si je choisissais mon futur, je dirais que je veux être libre. Faire ce que je veux quand je veux. » Le ton de voix de Jason laissait paraître ses émotions. Il semblait terrifié du futur,

« Je déteste faire face aux conséquences de mes actes. C’est pour ça que je fais aussi attention. Si j’avais vu ta silhouette me regarder, tu peux être sûre que je n’aurais pas fait le graffiti. Je ne veux pas… » Jason s’arrêta là. Il finit sa bière et il en attrapa une autre. Il ouvrit le bouchon avec aisance et il prit une autre gorgée. Il changea rapidement de sujet.

« Sinon, ce qu’il y a à dire sur moi… Je travaille au Walmart comme commis de panier. Ce n’est pas un boulot très intéressant. Je passe beaucoup de temps à grimper un peu partout, c’est comme une sorte d’entrainement pour moi. » Jason expira bruyamment.

« Et toi Juliet, qu’est ce qu’il y a à savoir sur toi ? » lui demanda le vandale en la regardant dans les yeux.

Jason semblait perturbé en parlant de lui. Peut-être était-ce un sujet à controverse ou simplement quelque chose de sensible pour le jeune homme, qui voulait être reconnu pour autre chose que ce qu'il n'était? Ce qui était sûr en tout cas, c'était qu'il était une personne très sensible, ou du moins émotionnelle, et avec une forte descente de bière. Elle n'avait pas fini la première qu'il s'attaquait à la deuxième.

C'était une personne ayant eu vie un peu cassée. Entre sa mère abusive et son père absent pendant un moment, cela ne l'aida pas à se construire. S'en suivit ensuite une série de voyage durant lesquels il ne put également se poser et se construire. Ce n'était pas étonnant que Jason était dans un tel état. L'influence de ses amis risquait d'être problématique. Ce genre de personne avait tendance à tirer les autres dans la drogue, et il était hors de question que le tagueur finisse à se piquer au coin de la rue, dans le quartier sud. Au moins, Jason avait l'image de sa mère en tête.

Le manque de futur du jeune homme était très intéressant. Plus il parlait, plus Juliet était convaincue de son choix. Il allait devoir devenir Nephil. C'était tout bénéfice. Jason n'avait plus jamais à craindre les conséquences de ses actes, tant que cela restait correct, et il aurait un avenir, un but. La journaliste y gagnerait également et la Famille aurait un nouveau soldat compétent. Mais si une chose était sûre, le jeune homme n'était pas heureux.

- "Je suis désolée de tout ce que tu as du endurer. Entre le manque de considération de certains et le fait que tu n'as pas eu l'occasion de t'épanouir" dit-elle en le regardant avec sincérité "Mais au moins, tu as un travail. C'est certe pas le plus agréable, mais c'est toujours ça. ça te permet de rester en vie"

Juliet lui sourit, il était normal qu'il souhaite en savoir plus.

- "Je suis née à Palema même. Je suis également enfant unique, comme toi. J'ai toujours été une grande fouineuse. J'avais constamment mon journal intime sur moi, dans lequel je notais tout ce que je voyais d'intéressant. Je n'ai pas vraiment eu d'événements très bouleversant dans ma vie d'enfant. J'étais relativement appréciée des gens, même si j'avais tendance à trop chercher à en savoir. Les petits secrets, tout ça" commença-t'-elle, avant de prendre une gorgée "J'avoue que j'ai fait quelques petits trucs un peu questionnable. J'ai commencé à payer des gens pour avoir des secrets, de les espionner ou de profiter du fait que quelqu'un était amoureux de moi"

Elle soupira. La journaliste n'avait pas vraiment de regret à se propos, juste de s'être fait attrapée.

- "J'en suis pas fière hein. Je pense que si j'avais continué sur ce chemin, j'aurais mal tourné. Mais mes parents m'ont suggéré de faire journalisme et je suis partie à l'université, en quittant l'état. J'ai réussi sans problème et j'ai travaillé pour une chaine nationale pendant quelques temps mais j'ai détesté. J'avais pas vraiment de poids" dit-elle en finissant sa bière "J'ai entendu qu'il se passait quelques trucs à Palema, et j'ai décidé de venir. On m'a engagé au Wake Up Palema et j'ai passé une année à enquêter sur divers affaires paranormale, comme des disparitions ou des choses dans le genre"

Et après, elle fut recrutée... Et là, sa vie fut bien plus agitée, non pas pour la déplaire.

- "Après ça, on m'a fait comprendre qu'il valait mieux m'arrêter avec ces recherches paranormales. Donc, je suis resté sur mon travail de journaliste, grâce auquel je fis de belle rencontre" dit-elle en souriant, prenant une seconde bière. "Voilà en gros mon histoire"

Elle regarda un peu si Jason la croyait. Il avait été plutôt réticent à la croire sur le medium.

- "Dis-moi Jason. Si tu avais la possibilité de faire un souhait, un seul, qui pourrait couvrir tout ce que tu désires, que choisirais-tu?"

Juliet attendait la réponse avec impatience.

« Si je pouvais faire un seul souhait ? On parle ici de souhait du genre, en frottant une lampe comme dans Aladdin ? » Jason retira le sac de glace de son visage et il le déposa sur la table. Il regarda le ciel.

Un seul vœu… si je pouvais avoir un seul vœu…

« Et bien, je souhaiterais d’avoir autant de vœux que possible ! Comme ça, je ne manquerais jamais de rien. Sauf que si le génie est contre, je souhaiterais d’avoir plus de lampes à génies ! » Jason oublia complètement que ce n’était pas Juliet qui avait parlé de génie.

« Je suis pas mal sûr que personne n’y a pensé ! » Jason baissa son regard vers Juliet. Il ne savait pas pourquoi, mais il avait l’impression qu’il n’avait pas bien répondu à la question. Il prit une gorgée de sa bière.

« Bien, si le génie peut tout faire, je souhaiterais la paix à travers le monde, je crois. Ou alors de me faire une… ou, ou alors d’être super connu et populaire, comme un chanteur ou quelque chose ! » Jason n’avait pas fini son deuxième vœu potentiel, il avait presque dit une bêtise devant Juliet. Le vandale ne souhaitait pas vraiment la paix dans le monde, il avait dit ça seulement dans l’espoir que sa réponse plaise à Juliet. Ça n’avait pas l’air d’être le cas à ses yeux. Elle prenait vraiment son jeu à cœur !

« Attends laisse moi réfléchir deux petites secondes… » Jason prit sa tête de ses deux mains et il fixa la table de pique-nique. Si j’avais un seul souhait… Il se frottait la tête avec force. Le spectacle devait avoir l’air étrange, mais c’était sa façon de montrer qu’il réfléchissait pour de vrai. Il en est venu à une conclusion.

« Je dirais que mon vœu dépendrait du contexte. Si je frottais cette lampe dans quelques années, je ne sais pas ce que je ferais comme souhait. Comme là, en ce moment, je souhaiterais savoir ce que je veux faire dans la vie et rendre mon parcours plus facile. Alors ton petit jeu est assez difficile ! » Jason se croisa les bras en se fermant les yeux à ce moment-là tout en faisant sortir ses lèvres. Il avait l’air d’un enfant qui boude parce qu’elle n’a pas eu de dessert.

Jason ouvra de nouveau ses yeux et il dit « Je ne vais pas m’attarder sur les détails, mais d’habitude un génie ça a 3 vœux à donner. » Jason leva trois doigts pour appuyer ses propos, comme si Juliet ne savait pas compter. Il laissa tomber le nombre 3 et il attrapa sa bière.

Jason prit une autre gorgée de bière. Il commençait vraiment à être pompette. Le vandale pensait que c’était un petit jeu pour qu’ils apprennent à se connaître. Après tout, il n’avait aucune idée de l’existence des ombres. Il rétorqua alors simplement la question.

« Et toi, si le génie te donnait un souhait, tu choisirais quoi ? »

Juliet ne confirma ni n'infirma la supposition du jeune homme, le laissant réfléchir. C'était très amusant de le voir se laisser emporter dans son imagination sans aucune intervention de la part de la journaliste. Mais si il y avait bien une chose qu'elle comprit, c'était qu'il n'avait strictement aucune idée de ce qu'il voulait souhaiter. Ou plutôt, il y avait trop de chose à souhaiter.

Premièrement, il souhaita de pouvoir tricher. Si seulement cela pouvait fonctionner avec Bey, la journaliste l'aurait fait avec plaisir. Mais le petit contracteur était plutôt malin et pas du genre à plaisanter. Jason comprit probablement au regard de Juliet que ce n'était pas ce qu'elle désirait savoir.

Deuxièmement, il souhaita plusieurs choses des plus banales, sans vraiment de grande conviction. Même si le second voeu non terminé tiqua un peu la curiosité maladive de Juliet, elle décida de ne pas insister. Elle ne pouvait quand même pas se jeter sur le moindre secret que le tagueur avait. Elle lui sourit quand il la regarda, voulant l'encourager à en dire plus, à dire les vraies raisons.

Troisième, Juliet fut convaincue que ce n'était vraiment pas le moment pour faire venir Bey dans la conversation. Le jeune homme risquait de foutre en l'air son unique chance de faire un voeu. Sans compter qu'elle ne pourrait rien lui suggérer, ça risquait d'empirer la situation. Mais elle fut très amusée en voyant sa réaction.

- "Bien sûr que le jeu n'est pas facile, sinon il est pas intéressant" précisa-t'-elle, amusée avant de rajouter "Trois voeux, c'est également trop facile. On peut faire beaucoup trop de chose avec ça. Un seul voeu, ça force à la réflexion"

Le jeune homme risquait d'être un brin alcoolisé à ce rythme. Cela rappelait de bon souvenir à la journaliste, quand elle faisait boire des gens pour en savoir plus sur eux, pendant l'université. Elle allait faire de son mieux pour ne pas être trop tentée.

- "Moi, j'y ai beaucoup réfléchi, vu que c'est une question que je me pose souvent. Choisir un vœu trop important c'est risqué, car cela attirerait l'attention sur soit. Le plus intéressant avec ça, c'est de voir ce que l'on peut gagner soit-même. Donc, je souhaiterais quelque chose dans l'idée de devenir meilleure, voire même la meilleure, en ce que je fais. Un voeu simple, mais efficace"

Ce n'était pas très loin de ce qu'elle avait souhaité elle-même. Et elle était plus que satisfaite des résultats. Juliet pouvait être désormais riche comme elle voulait, passer où elle le désirait et convaincre les gens qu'elle avait n'importe quel travail dans la vie. C'était le pied! Sans compter son arme qu'elle appréciait de plus en plus.

- "Mais je n'ai jamais parlé d'un génie. Je pensais à une sorte d'entité hypothétique. C'était surtout pour provoquer la réflexion" dit-elle en finissant finalement sa propre bière. Elle s'en servit une de nouveau "A ce rythme, j'aurais du prendre un pack de plus"

Si Jason buvait trop, Juliet devrait probablement l'emmener chez elle. Et cela risquait de poser problème, vu qu'elle avait dit habiter proche du pont. Mais elle trouverait probablement une justification.

- "Au fait, tu vas rentrer comment chez toi? T'as prévu quelque chose? Pas envie que quelqu'un te coince avec toutes tes canette des sprays"

Jason écouta la réponse de Juliet. Avec son état, il n’avait pas remarqué qu’elle ne lui a pas dit le souhait qu’elle ferait, même si elle avait mentionné qu’elle y a déjà beaucoup pensé. Elle devait certainement avoir une idée ! Jason aurait insisté s’il n’avait pas bu.

Lorsque Juliet lui mentionna qu’elle parlait d’une « entité hypothétique », Jason n’avait qu’une chose en tête. Un être fait à moitié en fumée qui vit dans une lampe et qui est bleu. Oui. Il pensait encore à un génie. Ça compte comme une « entité hypothétique » après tout. Il pensait vraiment beaucoup au génie, pourquoi n’avait-il qu’un vœu à donner ? Était-ce une période de récession de voeux ? Jason se secoua la tête pour éloigner ces pensées. L’alcool faisait vraiment effet, il sentait sa tête tourner. La deuxième bouteille de Jason était terminée.

Juliet lui demanda comment il allait rentrer chez lui. Chez lui... Il n’avait pas de plan. Normalement, il serait rentré à pied, du pont ça aurait pris environ 30 minutes. Par contre, depuis le parc, il n’avait aucune idée du temps que cela lui prendrait. Il ne savait pas non plus quel chemin serait le plus efficace. Et Juliet avait raison, il était mieux que personne ne le trouve avec ses canettes, avec les armes de son crime ! En plus de cela il était mineur et intoxiqué à l’alcool, la police lui poserait beaucoup trop de questions. Ça risquait d’attirer des problèmes à Jason et à Juliet, puisqu’elle lui avait fourni les bières.

« Non j’avais pas prévu de rentrer aussi tard. J’ai rien. Je comptais y retourner à pied » Jason ouvra sa dernière bouteille. « J’ai pas envie de monter dans un taxi, au cas où il fouillerait mon sac ! » Jason ne réfléchissait plus clairement, pourquoi est-ce qu’un chauffeur fouillerait son sac ?

Jason prit une gorgée en attendant la réponse de Juliet.

Pauvre Jason, il n'avait vraiment aucune résistance à l'alcool. C'était vraiment trop tentant de continuer à le faire boire comme un trou. Ca déliait vraiment les langues cette boisson, c'était magique! Juliet elle-même avait un brin trop parlé quand elle avait fait une soirée avec son Nephil Actée. Le jeune homme avait des pensées de plus en plus confuses, à tel point qu'il risquait d'être un danger pour soi-même. Autant il avait su se retenir lorsque le transporteur l'avait cogné, autant là, Juliet ne pensait pas qu'il resterait relativement calme. Et étant alcoolisé, il se battrait très mal et finirait avec la tête au carré ou avec un coup de couteau dans les côte. Il serait emmené à l'hôpital et sa carrière terminée.

L'idée du taxi était bonne. La peur du jeune tagueur était irrationnelle, mais il n'avait pas totalement tord. Si il rentrait chez lui, beurré de la sorte, son père risquait de le voir et de poser des questions. Au vue de l'article que la journaliste comptait produire, il ne ferait sans aucun problème le lien entre son fils et ce vandale... Auquel cas, probablement adieu la carrière de criminel du jeune homme. Mais garder Jason chez elle n'était pas nécessairement une bonne solution. Si il ne rentre pas de la nuit, on va poser des questions. Mais c'était toujours plus simple de mentir, en disant qu'il était sortit avec des potes, que son portable n'avait plus de batterie et qu'il avait décidé de passer la nuit chez eux.

- "Relax, les chauffeurs de Taxi sont pas du genre à se mêler d'histoire qui ne les concernent pas. Crois-moi, ils sont bien content d'avoir un client qui ne posent pas de problème, qui ne les volent pas, ne les arnaquent pas et qui sont relativement aimable" expliqua-t'-elle tranquillement "Mais je m'inquiète plus sur le fait que l'on te pose des questions une fois chez toi et que l'on fasse le lien avec les tag"

Juliet parut réfléchir.

- "Par sécurité, je peux t'emmener chez moi. Mais je dois te dire que je n'ai pas tout dit. Quand tu as deviné que je vivais pas loin du pont, ce n'était pas très exact. Je sortais de la visite de chez une amie et je t'ai aperçu au loin. Mais tu n'étais vraiment pas loin" dit-elle ausis gentiment que possible pour ne pas le blesser "Mais, est-ce que ton père ne risque pas de te poser des questions sur le fait que tu as disparu tout une nuit?"

Jason écouta Juliet attentivement, elle avait raison, les chauffeurs de taxi n’étaient pas du tout du genre à fouiller dans les effets personnels de leurs passagers, mais elle amena un point intéressant. Était-ce sécuritaire de le laisser rentrer chez lui puisque son père lui poserait sûrement des questions ? Jason n’avait pas pensé à son ça. Sortir en douce à 2 h du matin, c’était une chose, rentrer en état d’ébriété c’en est une autre. Le vandale prenait des précautions pour réduire au maximum son émission de bruit pour ne pas réveiller son père lorsqu’il sortait. Son père avait le sommeil léger alors Jason devait être très discret. Lorsqu’il était à jeun c’était déjà une opération difficile, saoul ce serait tout simplement impossible.

Il avait alors l’autre option, aller chez Juliet pour la nuit. Quel genre de nuit est-ce que… Jason chassa ces pensées de sa tête. Elle était presque 10 ans plus vieille que lui ! Elle aurait pu être ma mère ! Les raisonnements de Jason n’allaient pas en s’améliorant. Il avait bu beaucoup trop vite. Il n’avait pas menti lorsqu’il a dit à Juliet qu’il a commencé à boire à 16 ans, mais quand il disait qu’il buvait, il buvait une bière. Il n’était donc pas résistant à l’alcool. C’était la première fois que la boisson l’affectait autant. Puisque Juliet lui a proposé, il préférait dormir chez elle.

Jason était un peu déçu d’apprendre que son explication quant à la raison de la présence de Juliet sur le pont n’était pas tout à fait exacte. Mais bon, la « vérité » était plutôt près de son explication alors il n’en fit pas un drame.

« J’crois que j’devrais pas rentrer, c’est sûr que j’le réveillerais et qui me poserais des questions pour savoir des choses. » La diction de Jason était mauvaise, une autre manifestation de son état d’ébriété.

« Mon père devrait pas regarder dans ma chambre si je dors encore, il part tôt alors il ne prend pas le temps de faire le tour de l’appartement. » Jason voulait simplement dire que son père ne risquait pas de vérifier s’il était encore couché, la boisson lui faisait sortir des phrases douteuses.

« S’il regard pas dans ma chambre, je suis OK, de toute façon j’peux inventer queq’chose. Je dirai que j’suis allé voir le lever de sleil. » Jamais le père de Jason n’accepterait cette excuse. Il connaissait son fils et se lever pour regarder le lever du soleil n’était pas du tout son genre.

« Donc si ça dérange pas, j’irais chez toi », dit Jason en finissant sa bière.

Du point de vue alcoolémie, Juliet s'en sortait plutôt bien. Elle était vraiment à la limite de la légalité, mais ce n'était de loin pas sa première fois et donc avait l'habitude de compenser les effets, léger, de la boisson à ce niveau. Donc, elle était relativement fraiche. De plus, le divertissement que lui offrait Jason la boostait encore plus. Le pauvre, il était bien partit pour avoir un bon mal de tête le lendemain matin. Mais heureusement, elle avait tout chez elle pour s'occuper de lui.

Au moins, Jason était le genre de personne ivre relativement facile à gérer, pour le moment. Il acceptait ce qu'elle disait sans trop discuter, et n'allait probablement pas créer de problème. Elle écouta donc ce qu'il disait, se concentrant pour réussir à ton comprendre malgré la diction un brin difficile du jeune homme. Comme elle l'avait imaginé, son père ne serait pas des plus enchantés de le voir rentrer ivre à la maison. Cela engendrerait des questions qui pourraient se révéler des plus embêtantes pour lui.

- "Très bien, nous réfléchirons à une excuse potentielle si jamais ton père t'embête. Je sais généralement faire avec les gens, alors trouver un bon alibi serait très simple, crois-moi" dit-elle en souriant "Dans quoi travaille-t-il au fait?"

Ce serait plutôt gênant si il était dans un milieu de la police ou détective. Mais si il n'était dans aucunes des branches problématiques, il ne serait nullement un problème. Après tout, elle pouvait toujours prétendre avoir été intéressée plus personnellement que cela en Jason. Peut-être que si le père était du genre à être fier des conquêtes de son fils, cela passerait? Autrement, il y avait une vingtaine d'autres justifications et la plupart pouvaient être supportées par le pouvoir de Juliet. Elle écouta la réponse de Jason à sa question puis lui sourit.

- "Je te propose que l'on aille à mon appartement maintenant. On sera sur place et ça sera plus pratique. Ne t'en fais pas, je pourrais te passer des habits de training, ils sont peut-être un peu petit pour toi, mais je pense que ça pourra te servir de pyjamas si tu préfère pour dormir" dit-elle en se levant. Elle pointa la dernière bière, sa troisième pas encore entamée "Tu veux cette bière ou tu préfères pas? Ca serait dommage que tu sois trop mal"

Chassez le naturel, il revient au galop. Elle s'approcha ensuite de Jason, lui proposant son bras au cas où il était trop entamé pour réussir à avancer correctement.

Jason écouta la question de Juliet quant à la profession de son père. Il plissa les yeux pour montrer qu’il réfléchissait à la réponse qu’il donnerait.

« Mon père est dans les voitures. Mais pas conducteur, il fait pas ça. Il vend dezautos. Ford, je crois, il vend. » Le regard de Jason alla se perdre dans la rue. Au loin, il y avait un passant. L’attention de Jason était rivée sur le passant inconnu. Qu’est ce qu’il fait à traverser la rue ? Où va-t-il ?

Des questions sans pertinence. Jason retrouva ses esprits et écouta Juliet de nouveau. Il ne comprenait pas trop ce qu’elle disait.

« ça pourra te servir de pyjamas si tu préfère pour dormir. »

Qu’est-ce qui pourra me servir de pyjama ? Jason remarqua que Juliet se levait. Elle lui pointa la dernière bière dans les 6 packs et elle lui demanda s’il la voulait. Jason ne voulait pas avoir l’air d’une fillette. Et en plus, dans sa tête ça sonnait comme un défi.

« Tu veux cette bière ? Je ne crois pas que tu peux la prendre parce que tu n’es pas assez fort. Tu serais trop mal si tu prenais cette bière. »

Ah ouais je serais trop mal ? Je vais te prouver le contraire ! Jason s’élança vers la bière avec l’agilité d’un panda obèse sur l’ecstasy. Le haut de son corps s’est abattu sur la table et sa main droite passa près de la bouteille, mais il ne la toucha pas. Pour se rattraper, il envoya sa main gauche. Opération réussie. Jason tenait désormais la bière. Il regarda Juliet avec la fierté d’un aigle majestueux. Il dévissa le bouchon et il le laissa tomber au sol. Il prit une gorgée avant de s’essuyer la bouche. Il se leva, mais il ne voulait pas garder cette bière dans les mains. Il la prit et l’avala d’un coup. Ah ! Tu vois que je suis capable d’en prendre hein ! Jason sépara ses lèvres du goulot. Il ne se sentait pas très bien.  

C’est à ce moment que Jason remarqua que Juliet lui tendait le bras pour l’aider à marcher. Jason refusa avec un simple signe de main et il se mit à courir.

« On fait la course ! J’arrive avant toi ! » Le vandale voulait encore une fois prouver sa valeur, n’importe quel détail comptait. Il voulait montrer qu’il savait courir pour une raison ou une autre. Jason sprintait de toutes ses forces. Il courrait en zigzaguant en manquant de tomber à maintes reprises. Il n’avait aucune idée où vivait Juliet, mais il fonçait droit devant, comme si c’était sa mission.

Ainsi, le père était vendeur de voiture. Rien de bien transcendant pour Juliet, mais au moins il ne risquait pas d'être un danger. Avec un peu de chance, sa théorie concernant une potentielle 'beaufitude' serait confirmée et l'excuse du "J'ai trouvé une miss pour la nuit, Papa" passerait sans problème si jamais Papa la Flèche venait poser trop de questions. En parlant de la Flèche, il était totalement jeté et avait mordu à l'hameçon que Juliet n'avait pas su retenir. La journaliste croisa les bras en l'observant s'évertuer sur la table avant de descendre la bière cul-sec. Il semblait fier de lui. Ce garçon était un vrai cadeau!

La suite, ce n'était qu'une question de Karma. Après tout, Juliet aurait du s'y attendre qu'avoir un jeune homme ivre risquait de poser quelques soucis. A ce rythme, il risquait probablement de dégobiller. La journaliste espérait que cela n'arriverait pas chez elle. Après l'avoir vu partir, dans la mauvaise direction, elle ne put s'empêcher de lâcher un petit soupir amusé. Elle récupéra le sac du jeune homme et lui fit signe.

- "Hey, Usain Bolt. Si jamais mon appartement est de l'autre côté" dit-elle en trottant gentiment derrière lui pour ne pas le perdre "Et je ne vais pas faire de courses, je sais que tu me battrais à plate-couture. J'ai beau être en forme, c'est pas moi qui est le surnom de la Flèche"

Ce tagueur était vraiment divertissant et rafraîchissant. Elle se débrouillerait pour faire de lui un bon Nephil, voire même son Nephil. Après tout, il lui fallait bien un garde du corps. Le danger était tout de même qu'il semblait prendre très facilement les défis, et aimer la compétition. Avec ce genre de personnes, on pouvait les pousser à presque n'importe quoi.

- "Va a mon rythme plutôt, comme ça on se perd pas" dit-elle en s'approchant de lui "Pour la vitesse en tout cas, tu as gagné"

Peut-être que ceci calmerait un peu l'impétueux tagueur? Elle avait tout sauf envie qu'il soit blessé ou qu'il attire trop trop l'attention.

Jason a ralenti progressivement pour reprendre un rythme de marche normale. Le jeune vandale était convaincu qu’il avait gagné la course, certes c’était par forfait, mais une victoire reste une victoire ! Le jeune homme s’arrêta puis il se retourna vers Juliet avec un grand sourire sur son visage.

« Bon d’acc, j’vais suivre ton rythme » dit Jason en levant son index. Il ferma les yeux pendant un instant. Son corps pencha vers l’avant, mais juste avant qu’il ne tombe, il sursauta et reprit sa chambranlante posture initiale. Il est presque tombé endormi debout. Il regarda à nouveau Juliet et il prit la parole. Il voulait savoir dans quelle direction ils se dirigeraient.

« Alors, euh, saoul ? » Jason prit une pause. Il attendait la réponse de Juliet. Il la fixait directement dans les yeux. C’était étrange, Jason n’avait pas l’impression que la journaliste l’avait compris. Il répéta sa question une fois de plus.

« Séoul ? » Le vandale venait de prononcer malgré lui le nom de la capitale de la Corée du Sud. La boisson lui faisait dire vraiment n’importe quoi. Jason regardait encore Juliet. Il prit son temps et répéta une fois de plus sa question.

 « C’est où ? » La troisième fois fut la bonne ! Le vandale a enfin pu demander clairement ce qu’il voulait. Jason voulait savoir où la journaliste habitait, ou du moins, dans quelle direction pour qu’ils puissent reprendre leur marche.

Jason se mit alors à suivre Juliet. Ils marchaient tranquillement dans les rues. Jason allait toujours en zigzaguant faiblement. Le jeune vandale regardait la journaliste attentivement. Je me demande ce qu’elle pense de moi. Est-ce qu’elle va parler de moi à ses proches ? Est-ce qu’elle a des proches ? Est-ce qu’elle a un copain ? Un mari ? Des amis ?

Jason demanda à voix basse : « des amis ? » Il n’avait pas du tout l’intention de dire cela. Il a dit à haute voix ce qu’il pensait. Jason ne voulait pas avoir d’un fou qui se parlait dans sa tête, il demanda alors à Juliet en étant un peu embarrassé :

« As-tu des amis ? »