Tout allait pour le mieux finalement, jusqu'à ce qu'une voix survienne de la ruelle. Une fille accourant au côté de la blessée, visiblement inquiète pour elle, et la reconnaissant. Merde, un témoin. J'aurais du ouvrir mon Kekkaï directement, mais si la victime était humaine, je l'aurais laissée seule... Ouais ça commence à être chiant. Néanmoins dans l'immédiat il y a bien une chose que je trouve sacrément stupide, outre les questions de la jeune fille.

"Vous vous rendez compte que si j'étais l'agresseur, vous venez de vous jeter à ma merci ?"

  Je soupire rapidement, c'était sacrément stupide. Même si une fois proche, la différence de blessure entre l'autre malade, et la pauvre fille montrait sûrement mon innocence, de loin elle n'a probablement pas pu analyser ça, en admettant qu'elle ait pu être capable d'analyser quelque chose en voyant son amie blessée. Alys donc. Si j'avais été dans une autre situation, j'aurais presque pu trouver la ressemblance de nom amusante. Malheureusement j'avais un problème à gérer. L'arrivant m'emmerdait gravement dans mon plan.
  J'ai un doute sur la Nature de cette Alys, et maintenant l'autre déboulait. Qu'elle soit humaine ou elle aussi contractante, ça me fait chier. Gravement chier. Néanmoins ne pas répondre à ses questions risque d'être suspect.

"Je l'ai entendue crier, et en arrivant ce type était entrain de la poignarder. Avant d’appeler l'hôpital, je vais faire ce que je peux."

  J'enlevais rapidement ma veste, et la passais autour de la blessure de cette Alys. En réalité je me fichais pas mal de bander la plaie, mais c'était un moyen de paraître logique, et surtout de cacher la guérison surnaturelle qui allait s'opérer dans les prochaines minutes. Une fois que ma veste sera pleine de sang, ça paraîtra presque normal. Cela dit la blessée sombrait rapidement dans l'inconscience, pour le mieux je pense. Pas envie de gérer une blessée délirante alors que j'avais la nouvelle à gérer.
  Bon... Comment je fais ça maintenant. Ouvrir un Kekkaï n'aurait aucun sens, si l'arrivante était humaine, je disparaîtrais, et potentiellement la blessée aussi. Laisser tout ça couler normalement et laisser les secours venir comme pour une agression normale ? Nan, je viens de tuer un type avec une arme que la police ne trouvera jamais, et la plaie béante va disparaître toute seule.
  Assommer la fille pour me barrer avec la gamine sous le bras et essayer de faire disparaître le corps du type ? C'est extrême mais ça pourrait être une idée à creuser... Je me barre avec la blessée, j'ouvre un Kekkaï pour savoir si oui ou non elle est contractante, si oui, je trouve ce qu'elle est, et j'avise, si non, je lui parle de Bey, et la soirée se finit bien. Sauf pour la pauvre fille que j'assomme, mais c'est autre chose ça.

"Tu la connais bien ? Et le type par terre ? Ils ont déjà eu des problèmes de ce genre entre eux ?"

  Questions pour gagner du temps, mais peut-être qu'en devinant quelques infos de ce genre je pourrais y voir un peu plus claire. Pendant ce temps je réfléchissais à un moyen de me débarrasser de l'intruse...

  Une amie de classe. Super. Fallait qu'elle passe par là, pile maintenant hein. Quel emmerdement, les lois de Murphy... Je soupirais un bon coup en regardant la nouvelle venue, elle semblait pas mal retournée par la scène, ouais, lui dire de regarder un type troué au visage, c'était peut-être pas très très malin. Mais bon, si j'avais pu savoir qui il était, ça aurait pu aider.
  En tout cas je voyais définitivement qu'une solution pour que tout ça ne paraisse pas louche. Il ne fallait pas que la blessée arrive à l’hôpital en guérissant miraculeusement, et il ne fallait pas que l'intruse non plus ne voit ça ou intervienne d'une quelconque manière.

  Du coup, je profitais vaguement de sa main tendue. Elle avait l'air perdue, jouer le bon type et profiter de ça, je me dégoute un peu, mais la situation le requérait. J'attrapais donc sa main, comme un gentil type qui veut la rassurer, articulant à peine quelques mots de ma phrase, avant de violemment faire descendre ma seconde main derrière son cou. Pas pour lui briser la nuque cela dit, juste de quoi la rendre inconsciente. Pratique les entrainements chez les Nephils, on a toujours des types avec de l’expérience au combat pour ce genre de prises.
  Tch.. Assommé une gamine. Ce que ça me fait pas faire cette altercation à la con. Bon, je me retrouve avec deux corps inertes. Trois avec l'agresseur. Je me relevais rapidement en me tournant vers le corps ensanglanté. Je pouvais pas non plus laisser la gamine assommée à côté de ça... Rha.... Bon, je la prenais rapidement sur mon épaule, et l'emmenait un peu plus, hors d'une ruelle, et la déposant sur un des bancs de la rue. C'était pas très... Sécurisé, mais j'avais une autre inconsciente à gérer.

  Retour dans la ruelle, où je récupérais le corps de la fameuse Alys donc. Que je portais dans mes bras pour ne pas appuyer sur sa blessure potentiellement pas encore disparue. Et puis, je me dirigeais vers la FAC, clés en main pour me rendre dans mon bureau. De toute façon le sang avait arrêté de couler, donc je ne devrais pas avoir de soucis, Je vidais l'une des petites tables sur le côté, et l'y allongeais à peu près confortablement. Décidant qu'il était temps de passer au vrai test.
  Kekkaï. Plus de corps.
  Fin du Kekkaï. Donc, humaine.
  Parfait. J'allais chercher mon fauteuil de bureau, le faisant rouler jusque devant la table de l'inconsciente. Pas trop prêt non plus, mon but n'est pas de la traumatiser au réveil. Juste de quoi surveiller quand elle ouvrirait les yeux. Et puis maintenant, patience. Bey aura probablement une nouvelle recrue d'ici peu.

  Je suis tranquillement entrain de perdre mon regard vers la fenêtre du bureau. Réfléchissant aux milles façons dont pourrait se passer la discussion qui suivra le réveil de la demoiselle. Je ne la connaissais pas, alors qui sait comment elle allait réagir, et comment tout ça allait s'enchaîner.
  Et au milieu de ces pensées, un grognement, d'une voix rauque et pas très assurée. Le genre qu'on pousse quand on a passé sa journée sans boire. Je reportais donc mon regard sur les yeux qui s'ouvraient à peine, visiblement pas encore bien revenue parmi les gens en bonne santé. J'attendais encore quelques petits instants, avant de me lever et me diriger un peu plus près de la table. Sans trop paraitre menaçant, me contentant de la regarder dans les yeux le temps qu'elle me repère et se réveille bien.

"Bonsoir, ta blessure se porte bien mieux, tu t'en sortiras sans rien."

  Je lui laissais le temps de s'approprier les informations, en vérifiant qu'elle ne paniquait pas plus que ça devant un inconnu qui se veut rassurant alors qu'elle était dans un lieu parfaitement inconnu. Et puis je m'avançais vers mon bureau, en faisant le tour pour sortir l'une de mes meilleures amies. Toujours des bouteilles d'eau dans mon bureau, râler sur des documents toute la journée, ça fatigue la gorge.
  J'en récupérais donc une avant de revenir vers elle, lui tendant la bouteille en attendant de voir si elle se sentait capable de la récupérer pour boire d'elle-même. C'est la première fois que je soigne une humaine avec mon Élixir. Ça fatigue déjà les contractants ces soins, alors je me demande si elle ne l'est pas encore plus. On verra bien, désolé de te voir comme un test pendant quelques instants gamine.

"C'est mon bureau, le type qui t'a agressée ne te trouvera pas ici." Autant éviter de lui dire qu'il est mort, à moins qu'elle ne s'en souvienne, je pourrais lui dire plus tard. "Tu te désaltères un peu, et je t'expliquerai pourquoi tu n'es pas à l'hôpital, il y a des raisons plutôt 'logiques' à ça."

  Bon, je sais pas si c'est super rassurant, mais ma voix en tout cas n'était ni agressive, ni détachée. Simplement j'essayais de paraitre au mieux de l'honnêteté pour ne pas qu'elle pense que je suis.. Mal intentionné.

  Au moins avait-elle la force de boire. Enfin, boire quelques secondes avant de s'écrouler à nouveau sur la table. J'ai l'impression que comme je pensais, mes Élixirs fonctionnent sur les humains, mais leur draine encore un peu plus d'énergie que contractants. Au moins j'ai la confirmation si d'aventure je dois à nouveau venir en aide à des non-contractants. Et même si sa voix était clairement faible, ce qu'elle demandait me laissait penser qu'elle comprenait ce que je disais.
  Un bon point donc pour la suite de la conversation. Je reprenais rapidement mon fauteuil pour me rassoir dessus. Et puisqu'elle avait plutôt bien réagit jusque là, je me rapproche un peu, au cas où elle voudrait boire un peu plus, ou qu'elle voudrait se relever bêtement. Histoire d'intervenir plus vite. Et puis maintenant... Par où commencer ? Juliet m'avait bien guidée lors de mon interview pour me recruter.
  Ici la situation était un peu plus... Directe. Je l'ai soigné 'magiquement', et je dois globalement lui avouer de but en blanc que sa vie pourrait changer à partir de maintenant. J'aurais peut-être même mieux fait de la soigner, et de la laisser dans un parc quelque part en espérant qu'elle se souvienne pas de moi à son réveil... Mais bon, maintenant qu'on en était là. Je parlais calmement, assez lentement pour m'assurer qu'elle comprenne tout.

"Si je ne t'ai pas emmené à l'hôpital, c'est parce qu'ils n'aurait pas comprit comment tu as pu guérir.. Si vite."

  Je me redressais légèrement du fauteuil, retirant ma veste ensanglanté de sa blessure, la laissant découvrir son ventre en un seul morceau, seul le sang un peu séché et ses vêtement sales restant comme preuve de l'attaque du type. Lui laissant le temps de s'assurer qu'elle n'était pas en pleine hallucination, je reprenais.

"Il se trouve qu'il existe dans ce Monde des... Créatures. Qui peuvent offrir un voeu, aux humains. En échange de pouvoirs. Je sais que ça peut paraitre délirant, et tu dois penser que c'est une hallucination. Mais tout ça est vrai."

  Je décrochais rapidement deux fioles à ma ceinture, les lui montrant sans vraiment en faire tout un plat. En soit, elle n'aurait aucune preuve qu'il s'agit d'un pouvoir, mais c'était à peu près la seule preuve que j'avais. Avec l'arme d'âme aussi. Quoi que le Kekkaï permet aussi de faire comprendre la réalité de tout ça...

"Mon pouvoir me permet de créer des Elixirs, avec différents effets. L'un deux permet de soigner des blessures comme les tiennes, avec une efficacité que ne connait pas la médecine. Et pour ne pas que tout se sache, j'ai évité de te mettre en contact avec un hôpital et t'ai plutôt amenée ici."

  Bon, et maintenant c'était la partie la plus compliquée à abordée. Lui faire comprendre qu'elle peut maintenant devenir autre chose dans la vie, mais par contre, au risque de mourir chaque jour. Un vrai plaisir de tout expliquer en apportant la confiance. Et si elle doit refuser, bha... Réussir à lui faire promettre de ne pas parler de ça, ou alors je la kidnappe et je demande au QG un type pour manipuler sa mémoire... Comme ce qu'on utilise pour les Solitaires.

"Maintenant. Il faut savoir quelque chose sur tout ça. Une fois ton vœu prononcé, ou même la créature qui te l'offre rencontrée, tu peux voir ce que nous appelons des 'Ombres'. Ce sont des sortes de monstres obscurs, qui absorbe lentement l'âme des humains, et nos pouvoirs nous servent à les combattre. Malheureusement, il faut aussi savoir qu'il existe deux camps. Les Seraphs, et les Nephils, dont je fais partis. Ils sont équivalent en tout point, sauf leurs membres."

  Bon, elle a l'air de le prendre assez bien cette histoire surnaturelle. Peut-être l'âge qui.. Ha nan, je vais pas commencer à me prendre moi-même pour un vieux. Manquerait plus que ça. Bref. Sa question est plutôt logique, et pour le coup... Je peux pas vraiment contredire. J'aurais pu la soigner et partir, elle se serait souvenu d'aucun détail logiquement, mais au final j'avais préféré lui parler de tout ça.

"Baka ? Encore une expression qui prouve que je suis largué..."

  Je soupirais avec un sourire en coin. En soit la discussion se passait bien vu qu'elle prenait tout assez bien. Elle faisait même l’effort de me regarder droit dans les yeux. De toute façon si elle refuse, j'ai encore la carte de la manipulation de mémoire, alors autant tout lui raconter. En plus dans son état, elle pourra pas vraiment s'enfuir pour éviter de perdre ses souvenirs...

"C'est une possibilité. Si un vœu ne t'intéresse pas, si tu préfères ta vie comme ça, on a moyen de te faire oublier tout ce que je t'ai raconté, et tu reprendras comme si de rien n'était, pensant que t'as simplement bien dormi."

  Je me reposais un peu plus le dos dans le fauteuil, comme si cette discussion était absolument normale. La regardant encore dans les yeux pour la dernière question.

"Donc, si ça t'intéresse, est-ce que tu souhaites être recrutée ? Une fois que tu auras vu la créature dont je parle, tu ne pourras plus faire machine arrière, sinon ta vie sera menacée par ces 'Ombres' sans même que tu puisse te défendre."

  En gros, elle doit décider maintenant si 'j'appelle' Bey, ou si elle ne souhaite pas se mêler de tout ça. Elle sait maintenant que c'est dangereux, mais qu'elle peut y gagner quelque chose. Je vais éviter de lui révéler que le type qui l'a agressé tout à l'heure était un Seraph, je voudrais pas que de rage elle accepte le vœu juste pour se venger, et le regrette plus tard."

  Non, les potions ne font pas ça. Mais si elle décidait de ne pas faire de vœu, je ne serais pas assez bête pour la laisser rester en tenue pleine de sang, et si elle voulait ne pas faire de vœu, je doute qu'elle refuse d'oublier cette soirée, donc elle pourrait très bien accepter de se changer avant que je ne l'amène se faire retirer les souvenirs. Mais bon, elle avait l'air plus intéressée par faire le vœu, que par ne pas le faire.
  La question suivante me fit rire un instant, balayant l'air de ma main comme pour retirer cette idée de l'espace. Me relevant en reculant un peu, la voix rassurante.

"Pas de panique devant ce que tu vas voir."

  Puis j'invoquais mon fusil, le tenant canon vers le bas en travers de mon corps. Haussant les épaules en la regardant avec un sourire en coin. Puis le révoquant avant de me ré-installer, reprenant des explications un peu plus longues cette fois.

"Nous avons différents pouvoirs. Certains sont communs à tous les Nephils, et Seraphs probablement. Comme l'invocation d'une arme. Ce n'est pas la même pour tout le monde, mais tout le monde en a une. Quand à savoir ce qui défini votre arme... On appelle ça une arme d'âme, donc on peut supposer qu'on a une arme qui nous définit, ou qu'on maîtrise déjà. Moi c'est une arme à feu, mais certains ont des armes blanches, des bâtons, des sabres, des arcs, et j'en passe."

  Puis ressortant une potion, j'entamais cette fois les explications plus détaillées.

"Puis nous avons deux pouvoirs liés à notre vœu. Notre vœu est exaucé de la façon dont on le prononce, puis des pouvoirs en découlent. Personnellement, j'ai souhaité dépasser les limites naturelles de la chimie. Et c'est pour cela que je peux créer ces Élixirs miracles."

  Maintenant, il y avait d'autres pouvoirs que tous les contractants avaient, ceux qu'on pense liés à notre Nature, mais c'était un peu compliqué et inutile d'en parler maintenant. En soit on avait pas encore toutes les clés pour tout comprendre. Par contre, autre chose pouvait être utile à dévoiler.

"Et enfin, nous sommes tous capable d'ouvrir des Kekkaïs. Des barrières. Qui nous séparent de la 'réalité'. En général c'est là-dedans qu'on combat les Ombres, sinon les humains nous verraient sortir des armes de nulle part, et combattre le vent."

  Puisqu'elle était encore humaine, je tendais les mains devant moi avant de créer un Kekkaï. Me retrouvant séparée pendant quelques secondes, avant de le refermer, la retrouvant aussi vite, ayant probablement disparu d'un coup, comme j'étais réapparu.

"C'est aussi un moyen de piéger les Seraphs. Un Kekkaï ne se referme que si son propriétaire le ferme, ou si il tombe inconscient.. Ou décédé."

  Elle était tout de même calme. En même temps à partir du moment où on guérit d'une blessure comme la sienne, sans intervention médicale, et en aussi peu de temps, j'imagine que ça doit ouvrir l'esprit pour accepter des trucs aussi surnaturels.
  Mais sa question me prend un peu au dépourvu. Je ne suis pas assez aveugle pour ignorer sur quel chemin elle se rend. Et pour être honnête, ça m'amuse presque, qu'elle ignore la possibilité de faire un vœu, pour pouvoir uniquement se concentrer sur les pouvoirs qu'elle obtiendra... Néanmoins, autant être honnête.

"Hmm.. Ça dépendrait de quels pouvoirs disparaissent. Si il ne s'agit que de mes potions, en soit, je peux m'en sortir sans. Mais d'autres auraient beaucoup plus de mal, certains se battent plus avec leur pouvoir que leur arme. C'est du cas par cas."

  Juliet n'a pas grande utilité de ses pouvoirs au combat par exemple. En revanche, quelqu'un qui se base beaucoup sur ses pouvoirs.. Comme John avant en fait. Son pouvoir lui permettait de prendre plus de risques par moment, en sachant qu'il pouvait revenir en arrière, fuir rapidement. Si quelqu'un comme lui se retrouvait d'un seul coup sans pouvoir, alors qu'il basait son action sur ce dernier, ça pouvait être des cas de problèmes.
  Et forcément, en entendant parler de cette annulation.. Je pense facilement à Cissnei. Honnêtement je me suis toujours demandé quel pouvait être son vœu, mais peut-être qu'elle se trouve dans le même cas que la fille devant moi. On lui a tout expliqué, posément, alors qu'elle était humaine. Et elle a fait un voeu pour des pouvoirs logiques et potentiellement meurtriers.

"Après, dis toi bien que tu n'auras toi-même pas de réel pouvoir. Si son idée est bien ce que je pense. Tu pourras prendre des adversaires par surprise, mais une fois la surprise passé, le combat pourra ressembler à un duel tout ce qu'il y a de plus normal."

  Sauf que Cissnei est également capable de faire disparaitre les armes... Ce qui la rend mortelle contre les personnes qui ne sont pas préparées à ça, autrement dit, toute personne qui n'a pas d'arme réelle sur elle.

"Tu sais déjà le vœu que tu aimerais prononcer finalement j'ai l'impression. Mais tu sais que tu te rends dans un clan qui se bat sans arrêt, et qu'au final, ton vœu n'apportera rien à ta vie humaine si tu suis ton idée ?"

  Dans tous les cas, je ne la forcerai pas à faire demi-tour, ça restait son choix. Même si je ne suis pas vraiment dans l'idée de laisser les gens qui s'ennuient ou qui veulent rajouter du 'piment' a leur vie rejoindre cette guerre, ça reste leur choix. De notre côté ça fait des membres supplémentaires pour affronter les Seraphs... Même si penser comme ça me fait ressembler à un tyran qui ne s'intéresse qu'à détruire le clan ennemi."

  Il est vrai qu'en équipe, avoir quelqu'un capable de supprimer les pouvoirs seraient un avantage. Tant qu'elle ne les supprime pas dans une zone, mais bien ceux d'une personne. Ou alors tant que la zone est contrôlable ou gérable, sinon ça peut devenir une sacrée plaie. Mais dans tous les cas, c'était un vœu comme un autre, si on peut dire. Après tout, elle avait beau dire n'avoir besoin de rien, je comprend difficilement ce qui pourrait la pousser à rentrer dans une guerre, avec des risques de morts, si elle n'a rien à y gagner.

"Pourquoi voudrais-tu participer à tout ça ? Tu vas risquer ta peau tous les jours. Sans même avoir besoin de ton vœu ?"

  C'était osé. Ou fou. Les deux en soi. Mais bon. Le monde des contractants est un monde de fou, alors pourquoi me sentir mal de voir une réaction comme celle-ci ? Elle n'était pas plus malade que certains vœux qu'on peut entendre être prononcés.
  Néanmoins, demander à dormir un peu plus, ça c'était inattendu. Même si je connais le pouvoir de mon Élixir, et sa capacité à fatiguer ceux qui les prennent, j'avoue que je m'attendais pas à ce qu'elle souhaite se rendormir maintenant qu'elle était revenu parmi les conscients. Je poussais rapidement un soupire en me relevant de ma chaise, me détendant les muscles en parlant normalement.

"Pour être honnête, je n'ai pas que ça à faire que de te surveiller te reposer. Même si je sais que mes Élixirs fatiguent ceux qui les boivent, j'y peux pas grand chose."

  Je me déplaçais doucement vers la fenêtre, posant mon regard vers l'extérieur sans vraiment regarder quelque chose de précis. C'était simplement un moyen de me sortir de la position assise fatigante que je maintenais depuis le début de la conversation.

"Donc, tu peux faire ton vœu maintenant, ou dans les instants qui suivent, et je t’amènerai te reposer au QG. Ou alors je t'amène te faire oublier tout ce que je t'ai raconté tout de suite, et je peux reprendre mes occupations."

  Je tournais la tête vers elle à la fin, haussant les épaules de façon un peu moqueuse. Ouais. Je peux être chiant aussi, mais avec le manque de sommeil de ma Nature, je dois bien avouer que rester assis ici pendant plusieurs heures à la surveiller bêtement, ça me donnait pas envie. Et je pouvais pas la laisser dormir puis repartir de son côté en attendant de la recontacter. Pas envie qu'elle croise un Seraph, même si ce serait un sacré hasard, et qu'elle balance des trucs sans s'en rendre compte.

"Maintenant, c'est à toi de voir."

  Petit rappel, et puis si elle se décide pas, je déciderai pour elle. Et ce sera surement pas le choix qu'elle aurait prévu.

  Oula, corde sensible, pour pas grand chose. Suffisait de dire qu'elle voulait le garder secret, pas besoin de se montrer aussi directe. Je lui faisais signe de se calmer avec mes mains, souhaitant ralentir la cadence un peu.

"Suffit simplement de le dire, ne te sens pas obligée de le prendre comme ça."

  Et la suite ne me plait pas beaucoup plus. Je crois que son ton me tape doucement sur les nerfs, je la sauve, je lui propose un vœu, ou revenir à sa vie humaine, et j'ai l'impression qu'elle m'envoie littéralement chier, sauf lorsqu'il s'agissait d'appeler Bey..
  Si ça ne tenait qu'à moi, je l'assommerai volontiers, pour suivre mon idée, mémoire à zéro sur cette soirée, et remise dans sa vie d'humaine lambda arrogante. Mais ça ne tient pas qu'à moi, et peut-être qu'une forte tête comme ça, avec une idée de vœu comme le sien, ça pourra nous être utile... Voila que je pensais comme un recruteur de l'armée, je vois les gens comme des pions. Bref.

"Tu sous-estimes ma capacité à cacher des preuves je crois. Et tu sous-estimes beaucoup de choses tout court. Cela dit, si tu le souhaites.. Alors j'appelle Bey."

  Enfin j'appelle. C'est un bien grand mot. J'ai jamais recruté personne moi, comment Juliet avait fait pour faire apparaitre le chat noir au café ? Me souviens pas d'une parole spécifique... Peut-être juste y penser, comme pour l'invocation des armes, ou des pouvoirs en règle générale.

*Allô ? Bey ? J'ai une chic fille à te faire recruter. Humble et sacrément maligne de ce que je vois.*

  Je sais que Bey ne pense pas comme les humains, mais peut-être que l'ironie passera. Nan, il en aura rien à faire, c'est le plus logique. Si il apparait et m'a entendu... Parce qu'à part resté planté à la fenêtre, je faisais que penser mon appel, si je me retrouve ridicule devant elle, je jure que je repars sur le plan de lui laver le cerveau...

    Je me retiens difficilement de pouffer de rire. Je ne sais pas si Bey fait dans l'humour, j'en doute même. Mais du coup, sans s'en rendre compte, il peut parfois dire des trucs décalés. 'Au moins a-t-elle un potentiel intéressant'... Si elle avait su ce que j'avais pensé pour appeller la bestiole, elle aurait probablement tout mal pris. Mais moi ça me fait rire. En tout cas ça allait bel et bien avoir lieu alors.
  Une nouvelle Nephil, et je suppose que j'allais devoir être celui qui la guide au QG et lui apprendrait probablement les bases, au moins le temps qu'elle soit capable de se débrouiller seule. Je ne me souviens plus vraiment si le pacte qu'on passe avec le chat nous fatigue ou non. Si c'est le cas, je pense qu'il va vraiment falloir la laisser se reposer cette fois. Mais au moins pourrais-je l'emmener en sécurité chez notre Famille.

  Et rapidement le vœu est prononcé, tel que je l'imaginais. Ça me donne toujours pas la raison pour laquelle elle souhaite se lancer là-dedans, sans rien y gagner personnellement. Mais bon. C'est sa vie, je ne vais pas demander à Bey de partir avant de conclure le pacte, sous le simple prétexte que j'ai l'impression qu'elle se lance stupidement dans tout ça.
  Connaissant bien ce qui allait se passer ensuite, je perdais un peu ma concentration sur la scène, laissant plutôt mon regard passer à travers la fenêtre. L'air un peu ailleurs, dans mes pensées. La nuit allait être encore un peu plus longue, mais si elle avait besoin de faire une sieste une fois au QG, au moins serais-je tranquille pendant quelques temps...

    Un contrat.. Un nouveau donc. Ça faisait longtemps que je n'avais pas vu cette scène... Quoi que.. En y réfléchissant, c'est la première fois que je suis présent sur le recrutement de quelqu'un. La seule fois que j'en ai vu un, c'était le mien. C'est bien la première fois que je suis spectateur de la magie de Bey.
  Ses appendices venant chercher le cœur de la nouvelle Nephil, il sort à nouveau son discours, que je note à nouveau dans ma tête. Que je garde bien comme preuve. 'Tu devras combattre les Ombres' etc... Aucune mention de Seraphs, ou d'autres contractants, dans son pacte. Et pourtant la guerre était bien présente... Je rangeais ça dans un coin de ma tête, pas besoin d'asticoter Bey de question devant une nouvelle venue qui ne connait rien pour le moment.
  Je me tournais donc plutôt vers elle. Et sa question presque innocente, ce serait presque un total changement de comportement. Mais bon, j'imagine que je peux l'amener au QG.. Trouver un lit pour qu'elle se repose à l'infirmerie, et lui parler de tout ça un peu mieux le lendemain. De toute façon le week end commence, elle ne ratera pas de cours.. Ouais, partons sur cette idée.

"Et bien, à moins que Bey n'ait quelque chose à rajouter, je pense que je vais t'emmener à notre QG, comme ça t'en prendras connaissance. Tu t'y reposeras, y'a ce qu'il faut pour ça là-bas, et puis on verra comment te faire maîtriser tes capacités pour que tu ne meurs pas contre la première Ombre que tu croiseras."

  Je jette un rapide coup d’œil à la peluche noire tout en me dirigeant vers la nouvelle recrue, commençant à la hisser sur mon dos de façon un minimum confortable. De toute façon avec toutes ces améliorations Nephils, j'ai l'impression que le chemin jusqu'au QG ne sera pas aussi fatiguant que prévu. Et puis elle est pas très lourde la cruche.

"Je m'appelle Rekor d'ailleurs. Je suis prof de chimie à la FAC. Et également un Nephil qui s'occupe de l'infirmerie de notre QG."

  Je me postais devant Bey avant de partir, attendant de voir si il avait quelque chose à ajouter. Chose dont je doutais, mais d'un autre côté partir en l'ignorant aurait été... Malpoli ? Je suis pas sûr qu'il comprenne cette valeur cela dit. M'enfin. Ça m'empêche pas de rester normal envers lui.

    Entre de bonnes mains.. Entre de bonnes mains ? C'est Bey qui dit ça ? En parlant de moi ou des Nephils ? Mon côté humble voudrait penser qu'il parle du clan en général. Mais mon égo ici s'amuse à m'envoyer tout le mérite de ce compliment. Même si je ne sais pas trop à quel point c'en est un. Je sais pas si 'bon petit soldat de Bey' est un compliment. Et quand je dis soldat, peut-être qu'un type plus direct utiliserait des mots moins jolis. M'enfin, ça faisait un peu plaisir en soit.
  La suite, je la connais. Des petits mots de prudence, un petit café, un peu de baume pour la peur, et paf, un chat qui disparait dans l'ombre.
  Je reprend donc plus d'attention sur le paquetage que je transporte sur le dos. Ouais, son nom je l'ai noté dans ma tête. J'ai une bonne mémoire pour ça, et pourtant les profs de FAC sont pas les plus réputés pour retenir les noms de leurs étudiants. C'est en lycée qu'on les retient mieux, on en a moins, et les horaires sont plus stables. Mais je m'égare dans ma tête.

  Alys Rousseau donc. Et pour le reste, comme elle dit, on verra plus tard. Je sais pas qui se tape le sale boulot, entre celle qui se fait poignarder, soigner, plus ou moins séquestrer même si j'ai été réglo, puis embarquer dans une guerre de clans et d'Ombres magique. Et moi, qui doit me farcir le chemin, avec elle sur le dos. Ça doit se jouer à un cheveu, mais c'est peut-être elle qui a tout de même la palme de la soirée de merde.
  Mais plutôt que de continuer la discussion, j'entame donc la route silencieusement, profitant du calme de la nuit alors qu'elle somnolait de toute façon déjà sur moi, avant même de quitter mon bureau. Aucune idée de si elle tiendra jusqu'au bout, mais de toute façon elle verra bien le chemin du retour si elle doit retenir le chemin du QG, donc elle peut bien fermer ses yeux, et arrêter de parler accessoirement, pour le reste de la soirée. Je la lâcherai dans un lit de l'infirmerie, et puis hop, débarrassé pour quelques heures.