Spoiler:

Et voilà que John avait une vie sociale. Décidemment, Leeroy avait une sacré influence sur lui, et on ne pouvait pas dire que c’était une mauvaise. Après leur dernière discussion, ils avaient échangé leurs numéros et avaient convenu quelques jours plus tard d’une petite rencontre à la fac. Alors, John allait enfin voir à quoi ressemblait la fac, et les vraies études en général… Quel monde nouveau pour lui.

Il était midi passé, John était déjà en retard. Il faut dire qu’il s’était – encore – perdu dans ce dédale qu’était le campus, et après s’être retrouvé successivement dans un amphi de droit, un vestiaire féminin et même dans l’infirmerie, il  était enfin arrivé au point de rendez-vous. C’est-à-dire devant l’entrée de la fac. On pouvait se demander comment il avait fait pour se perdre alors qu’il devait simplement aller devant l’entrée ; mais John était capable de tout. Littéralement.

Une fois devant la fac, il remarqua Leeroy, qui semblait être là déjà depuis quelques minutes. John sourit en pensant à la ponctualité de son camarade, si différente de la sienne. En réalité John stressait à l’idée de cette entrevue, car il avait peur de ce monde qu’il ne connaissait pas. Il avait peur de désirer d’entrer dans cet univers du savoir, alors qu’il était tout à fait conscient que jamais, jamais, il ne pourrait en faire partie. John n’avait pas fait d’étude, n’avait pas d’argent, ignorait tout de cette vie. Il avait l’impression d’être un intrus sur ce campus, et un sentiment de malaise le gagner de plus en plus. Il craignait d’être jaloux de tous les gens qu’il allait rencontrer, jaloux de leur avenir. Il devait faire vite et aborder Leeroy le plus vite possible, sinon il allait fuir et détruire cette belle journée. Alors il pressa le pas jusqu’à son ami, s’affairant à vider son esprit de toute ces pensées.

« - Salut Leeroy ! J’suis bien venu comme tu vois, t’as intérêt à me vendre du rêve aujourd’hui, haha ! »

Il éclata d’un rire qui sonnait faux, puis baissa la tête, presque honteux.

« - Dis, on pourrait aller à un endroit où il y a moins de monde ? J’ai… J’ai du mal quand il y a trop de monde. »

À cause de sa migraine qui se répétait de plus en plus en cours, il avait eu du mal à le suivre correctement. Les notes étaient là, marquées sur des feuilles, mais une partie du travail de compréhension qui devait être faite en cours n'était pas là. Il se répétait sans cesse que c'était vraiment infernal, il y avait beaucoup trop d'élèves dans cet amphithéâtre, et en plus de cela le chauffage était allumé. Bien que d'habitude, le chauffage ne le gênait pas, aujourd'hui, il le gênait, car il y avait déjà bien de présence chauffante.

Grâce à sa détermination de vouloir réussir ses études, il était resté jusqu'à la fin, sans sourciller. Sortant de l’amphithéâtre, c'était presque une libération totale. Il n'y avait rien de mieux qu'un couloir où il n'y avait pas toute une promotion d'étudiant qui stationnait dessus. Surtout qu'il s'agissait de l'heure de midi, donc ils étaient déjà tous partis à la cafétéria. Pour le pas payer trop cher, Leeroy se faisait toujours des sandwichs au préalable la veille avant d'aller en cours.

Il avait rendez-vous avec John à l'entrée du campus, alors il se dirigea vers la porte d'entrée et une fois devant, il n'y trouvait personne. Entre Akiro et John, il ne savait pas dire lequel des deux étaient le moins ponctuel. C'était presque comme s'ils faisaient un concours alors qu'ils ne se connaissaient pas.

Alors qu'il ne regardait pas dans sa direction, une personne vient lui adresser la parole. Il s'agissait de la personne attendue : John Fallen.

- Salut Leeroy ! J’suis bien venu comme tu vois, t’as intérêt à me vendre du rêve aujourd’hui, haha !

Leeroy n'allait pas forcément lui rendre du rêve. Et quand il y pensait, il lui vendait sans doute déjà du rêve puisqu'il avait posé le pied sur cette terre de la Fac.

- Dis, on pourrait aller à un endroit où il y a moins de monde ? J’ai… J’ai du mal quand il y a trop de monde.

- Salut, allons ailleurs dans ce cas.

Le devant du campus n'était effectivement pas un endroit où il n'y avait personne, en général il y avait pas mal de monde, alors à la demande de son invité, il commença à marcher vers un quelconque endroit sans personne. Cela l'arrangeait bien aussi finalement, mais s'il voulait vraiment visiter le campus, ils seront obligés de passer par des endroits où il y a fréquemment du monde.

- Sinon, comment va ? Tu as réussi tes escapades nocturnes ces derniers jours ?

Leeroy emmena John un peu à l’écart, là où il n’y avait plus cette foule oppressante. John pouvait désormais respirer, et se concentrer sur ce qu’allait lui présenter son nouveau camarade. Même si John savait qu’ils allaient devoir passer un peu partout lors de leur visite, il appréciait de rester ici quelques minutes, pour se préparer. Il ne savait pas non plus combien de temps ils auraient devant eux, étant donné qu’il avait oublié de demander ses horaires de reprises à Leeroy.

« - Sinon, comment va ? Tu as réussi tes escapades nocturnes ces derniers jours ? »

Dernièrement John était resté sur la touche. Il faut dire, avec son opération qui approchait de jour en jour et sa récente discussion avec Leeroy, il n’avait pas vraiment l’esprit à s’occuper de ses petites escapades ces derniers temps. D’ailleurs, à cause de cela il avait du retard sur son paiement de loyer, mais étrangement au lieu de l’engueuler, son concierge lui adressait des clins d’œil indiscrets à chaque fois qu’ils se croisaient. Sacrée Nylian.

Avant qu’il ne puisse répondre à Leeroy, un jeune homme vint les aborder, l’air apparemment perdu :

« - Euh ... euh salut excusez moi mais je suis un peu paumé ha ha ... Je connais pas encore super bien la fac, j'aimerai juste retrouver ma salle de cours en fait ... »

John se tourna vers l’inconnu, et celui-ci lui parut étrangement familier. Etrange. Quoiqu’il en soit, c’était à Leeroy de répondre, car John ne connaissait absolument pas le campus, preuve en était son petit problème de ponctualité. Il sourit à l’étranger, puis lui répondu :

« - Euh, je vais laisser Lee’ te répondre, je fais que passer par ici, j’y connais rien… »

Puis John fit à nouveau face à Leeroy, pour continuer la conversation :

« - En fait ces derniers temps j’ai pas fait grand-chose, j’ai eu pas mal de trucs à planifier ou de choses… imprévues. »

C’est vrai que c’était quelque peu impoli de continuer sa conversation l’air de rien, mais de toute façon il ne cherchait pas à rencontrer d’autres gens. Il avait déjà deux personnes qui s’apparentaient à des amis, il ne voyait donc pas pourquoi il irait quémander d’autres connaissances.

Alors qu'il attendait la réponse de John, quelqu'un vint dans leur direction pour leur poser une question. S'il n'avait pas posé la question de savoir où était sa salle, Leeroy l'aurait sans doute pris pour un lycéen, voire même un collégien. Il se demandait comment quelqu'un pouvait paraître aussi jeune. Il tourna son regard vers John et il comprit aussitôt. John était majeur, pourtant, il avait l'air beaucoup plus jeune que Leeroy, qui lui, était mineur. Dans un an, il pourra fêter sa majorité, il n'en était pas loin.

John commença alors par lui adresser la parole en premier, tandis que Leeroy préféra tout de même rester silencieux. Il n'était pas asocial, mais à moins de vraiment lui parler, il n'engagera pas la conversation. Là, il y avait John pour y répondre, mais bon, il savait très bien qu'au fond, il ne pourrait jamais y répondre puisqu'il ne faisait pas partie de la fac. Donc, finalement, il allait devoir le faire.

- Quel est ton département ? Et ton numéro de salle si tu l'as.

Il espérait quand même que l'emplacement de la salle ne soit pas trop dur à expliquer, sinon il sera peut-être même obligé de l'amener directement là-bas. Et cela forcera John à bouger de cet endroit pour visiter le campus, et même les endroits les plus fréquentés du campus. Il était celui qui voulait visiter la fac et pourtant, il avait l'air de se défiler en voulant rester dans des endroits où il n'y avait pas beaucoup d’étudiants. Ce n'est pas en restant dans un coin qu'il allait pouvoir voir. Enfin, de toute façon, il lui avait proposé de venir et maintenant, il pouvait faire ce qu'il voulait. Leeroy n'allait forcer John en rien.

- En fait ces derniers temps j’ai pas fait grand-chose, j’ai eu pas mal de trucs à planifier ou de choses… imprévues.

Leeroy n'allait pas continuer cette conversation avec un inconnu dans les environs. Il valait mieux pour lui que personne ne sache qu'il s'agit d'un voleur.

- Je vois.

«- Quel est ton département ? Et ton numéro de salle si tu l'as.»

« - Euh .. et bien si mes souvenirs sont bons, c'était le département de Biologie, salle de cours 4 je crois... Mais d'habitude j'ai toujours cours dans les départements de maths et de physique donc je n'y suis jamais allé et je ne connais pas du tout cette partie du campus... »

Leeroy avait pris la situation en main, heureusement pour l’inconnu. Quoique ce dernier avait l’air encore plus mal à l’aise que John, étrange pour un type habitué à la fac.
C’est vrai que ce type faisait jeune, on dirait un adolescent. Un adolescent que connaissait John… Peut-être un type qu’il avait déjà cambriolé par le passé. Ou pas. Il n’en savait rien à vrai dire.
John comprit que l’étudiant ne comptait pas partir sans avoir eu sa salle, et que pour cela il faudrait lui montrer le chemin. Qu’à cela ne tienne, John prendra son courage à deux mains et demandera à Leeroy de montrer la route. Il fallait bien commencer la visite quelque part…

« - Lee’, je pense qu’on pourrait commencer la petite visite du côté du département de Biologie, t’en penses quoi ? On pourra continuer notre petite discussion après. »

John n’avait aucune intention de paraître poli, ou même distingué face à cet inconnu. Ça ne l’intéressait pas vraiment d’être populaire auprès des gens, et il n’avait qu’une hâte : reprendre ses échanges avec Leeroy, tout en visitant réellement le campus.
Il n’empêche que ce jeune homme intriguait  John. Il n’arrivait pas à savoir d’où il connaissait cet homme, et il voulait se fixer. Alors, il se tourna à nouveau vers le jeune.

« - J’ai l’impression de t’avoir déjà vu, tu aurais un nom ? »

Non, vraiment, John n’avait pas de tact. Enfin, au moins il pourra mettre un nom sur ce visage, et c'était tout de même une bonne chose.

Ce nouveau venu devait donc aller dans une salle du département de biologie, département qu'il connaissait plutôt assez bien puisqu'il était un étudiant en biologie. Il avait donc eu de la chance de tomber sur lui. Les étudiants en biologie étaient peut-être les moins nombreux, les découragés, il y en avait beaucoup et partait généralement vite. John décida aussi alors de l'accompagner. S'il avait accepté alors il n'y avait pas de raison de ne pas l'accompagner vers la salle que ce jeune garçon recherchait.

- Je suis étudiant en biologie. Je sais où est la salle, donc tu peux me suivre si tu veux. Je vais t'y amener.

Alors que Leeroy avait commencé à faire un pas vers l'avant en direction du département biologie, John avait alors entamer une question sur le nom de la personne qui était-là. Pourquoi pensait-il connaître un étudiant alors qu'il n'avait jamais mis les pieds à la fac ? Très vite, il se disait que c'était une question assez bête puisque Leeroy était étudiant ici et pourtant John le connaissait.

Bien curieux d'aussi entendre la réponse, il mit ses mains dans les poches et aller se contenter d'écouter la réponse. De toute façon, ce garçon connaissait déjà le prénom de Leeroy, un peu d'échange ne ferait pas de mal. Le grappillage d'information était toujours bon. Quand même, cela l'intriguait pas mal que John le connaisse. Mais s'il l'avait oublié cela voudrait dire qu'il ne l'a vu, il y avait pas mal de temps. Peut-être quelqu'un qu'il avait volé ? Mais si c'était vraiment cela, il devrait plutôt s'enfuir au lieu de lui demander son prénom. À la fac, il n'était pas non plus à l'abri de tous problème.

Si quelqu'un reconnaissait John, il pouvait aussi être dans la merde. Les forces de l'ordre avait le droit d'agir ici et il était sans doute bien connu d'eux.

Leeroy avait décidé d’emmener l’inconnu jusqu’à sa salle, et John emboîta le pas. Il essaya de distraire ses pensées en observant le chemin qu’ils empruntaient, essayant de repérer la moindre des habitudes des étudiants d’ici, tentant de comprendre leur quotidien.

Beaucoup semblaient se diriger dans une direction commune, probablement le self vu l’heure. John esquissa un sourire à cette pensée, comparant ce flot d’humain à une file de mouton. Puis l’étudiant sorti enfin de son mutisme et se décida à répondre à la question de John.

« - Ah .. euh .. Non. Enfin si ! Si désolé de ne pas m'être présenté plus tôt, je m'appelle Ash ... euh Narraw. »

« - J'ai déménagé à Palema il y a à peine 4 mois, donc c'est pour ça que je ne connais pas encore très bien les lieux si vous voulez tout savoir... Et vous ? »

Merde.John s’arrêta net sur place, son sourire tout à fait effacé. Evidemment, il connaissait cet homme. C’était un des gosses avec qui il jouait sur la colline des années auparavant ; et c’était aussi maintenant un homme potentiellement dangereux. Il ne fallait absolument pas qu’il se rende compte de qui était John pour le moment, pas avant que John ne lui ait expliqué la situation. Tout pourrait être compromis sinon.
Se rendons compte de son visage trop pâle, John se ressaisit et prit une mine peinée.

« - Ash Narrow, tu dis ? J’ai dû faire erreur alors, ça me dit rien. Moi c’est … »

John s’arrêta. Il ne fallait ni dire son vrai nom, ni celui actuel. Il ne referait pas comme à Leeroy, cette fois il réfléchirait avant de parler.

« … Roger Moore. Ouais j’sais c’est pas terrible, mais j’ai pas eu trop de chance avec mes parents. »

Il avait même encore des papiers à ce nom sur lui, une chance. Une première pour John de mentir à peu près convenablement, et il arbora un léger sourire, fier.
Il irait peut-être rendre une petite visite à ce Ash Narrow un soir prochain, afin qu’il n’avertisse en rien les Brun si jamais il se rendait compte de la corrélation entre Roger Moore et Théodore Brun.

Après ce qu'il venait de dire, son nom était Ash Naarow et il venait d'arriver il y a peu dans cette ville. Ce n'était pas pour rien qu'il ne connaissait pas les lieux, cependant, à la rentrée qui avait eu lieu y a 4 mois, il aurait pu faire la visite des département. Il y avait eu clairement un jour de libre pour tous où ils pouvaient faire cela. Mais comme il venait de s'installer, peut-être qu'il avait eu autre chose à faire.

En tout cas, Leeroy remarqua bien le changement d'attitude chez John. Son visage était étrangement pâle. En tout cas, il ne savait pas ce qui pouvait le rendre dans cet état. Était-ce vraiment à cause de son nom ? Il n'était pourtant pas si horrible, mais s'il devait y réfléchir sérieusement que pouvait-il le rendre dans un état comme celui-là ? Il l'avait déjà vu lorsqu'ils avaient parlé ensemble de ce fameux Théodore Brun. Il avait un peu près afficher la tête et s'était senti mal. Leeroy pouvait peut-être son trompé, mais il préféra supposer que ce jeune garçon pouvait potentiellement connaître ce Théodore.

Après mûr réflexion, il pouvait aussi être quelqu'un que John avait voulu voler auparavant. Dans les deux cas, il était plutôt dans les emmerdes. L'étudiant de biologie le sentait presque. Il avait peut-être un don avec cela puisque pas mal d'emmerde lui revenait aussi à la tête.

Il trouvait la situation amusante même si elle ne l'était pas du tout pour John. Rien ne se montra sur son visage, ni le fait qu'il ai fait des suppositions, ni le fait que la situation l'amusait. Son visage restait parfaitement impassible.

Leeroy connaissait le faux nom que John avait utilisé auparavant. Roger Moore était sensé être la personne qui avait déposé les pauvres enfants à l'orphelinat, il n'y avait pas beaucoup de temps. Il comptait donc réutiliser ce faux nom pour aujourd'hui. Leeroy tâchera donc à ne pas faire de gaffe. Même si la situation l'amusait, il ne comptait pas non plus mettre John dans le pétrin avec quelqu'un. Pour le moment, il ne disait rien, les laissant discuter un peu pour voir les finalités de la choses pendant qu'il menait le pas vers la salle que ce Ash recherchait. Il répondit quand même à la question poser un peu plus tôt.

- Leeroy, disait-il simplement.

« - Enchanté de vous connaitre tous les deux ! Ha ha ne t'inquiète pas Roger, je ne vois rien qui cloche dans ton nom ... En tout cas c'est marrant, tu es sûr qu'on s'est pas croisé quelque part ? Je dois te confondre mais à moi aussi tu me semblais familier ... »

John avala sa salive. Non, vraiment, ce n’était pas le moment d’officialiser ses retrouvailles avec Ash, pas ici. Il n’avait pas envie de tout lui expliquer ici, de mauvaises oreilles pourraient entendre et faire échouer son plan. Alors il allait jouer celui qui s’était trompé de personnes, ou inviter une histoire, mais il fallait absolument faire en sorte qu’Ash s’éloigne. Il s’occuperait d’aller lui parler plus tard.
Il fouilla ses souvenirs afin de retrouver un quelconque hobby de son ancien ami, en vain.

« - Vraiment ? Je sais pas, ton nom me dit vraiment rien … J’me balade parfois dans le nord le soir, peut-être qu’on a déjà discuté avant ? »

Mine de rien, ses efforts payaient, et John commençait à émettre des mensonges à peu près correct, sa fierté en grandit quelque peu. Il se demandait si cela allait satisfaire la curiosité d’Ash, et décida de lui faire comprendre qu’il fallait les laisser. Il se tourna vers Leeroy, et continua :

« - T’as des cours cette aprem’ Lee’ ? »

C’était tout à fait bateau, et John avait beaucoup mieux à dire, mais il ne se voyait vraiment pas discuter de ses petites virées nocturnes en compagnie du jeune homme ; ce serait trop indiscret. Il eut une soudaine idée, et chercha à faire comprendre à Leeroy la situation, afin que celui-ci l’aide à se débarrasser d’Ash.

« - Ah, cette journée me rappelle notre café… C’était sympa, hein ? »

C’était une façon comme une autre de mettre Leeroy sur la piste. Il y avait mieux, mais de toute façon John n’avait aucun risque à parler du café en compagnie d’Ash. Après tout, comment ce dernier pourrait comprendre quoi que ce soit à cette allusion ?

Plus le temps avançait, plus il trouvait les événements amusants. Comment John allait-il faire avec lui ? En tout cas, il avait bien envie de voir ce que ça allait donner. Il espérait même avoir une petite occasion pour aider Ash. Cependant, il ne voudrait pas non plus que John se retrouve en prison si le jeune garçon était une victime d'une escapade nocturne de John. Il soupira un peu pour se trouver une solution. Finalement, John la lui donna.

Sous les paroles de John, il comprit quelque chose. La discussion du café ? Il s'en souvenait très bien. C'était là-bas que John avait parlé de lui alias Théodore Brun, l'un des enfants abandonnés et chassé par ses parents. C'était triste, mais si cela était bien un message envoyé par John, alors il voulait clairement lui faire comprendre qu'il connaissait cette personne et qu'elle venait de son époque où il se nommait Theo'. Si c'était vraiment le cas, pourquoi se cacher ? Était-il un ami ou un ennemi ?

Il avait donc fini par comprendre qui était ce Ash. Et effectivement, il allait faire en sorte de détourner un peu le chemin pour le rendre plus long. De toute manière, ni l'un ni l'autre ne connaissait la fac, personne ne pourra lui dire. Au moins, il laissait un peu de temps à ce jeune garçon de retrouver qui était vraiment Jonh.

- Non, je n'ai pas cours cet après-midi, du moins pas maintenant, dans 3 heures, oui.. Mais on a encore une bonne heure devant nous avant la fin de la pause déjeuné. Et m'ouais, je ne me rappelle pas trop de cette journée au café.

Il rajoutait bien qu'ils avaient encore pas mal de temps. Et cela allait très certainement embêter et inquiéter John. Leeroy était peut-être un peu cruel sur ce coup-là, mais il était curieux de comment les choses allaient tourner entre eux deux. De plus, il précisa qu'il ne se souvenait pas de cette journée au café uniquement pour lui dire qu'il ne souhaitait pas discuter dessus, car il s'en souvenait très bien. L'étudiant en biologie ne voulait pas écarter l'autre jeune garçon de la conversation.

« - Non, je n'ai pas cours cet après-midi, du moins pas maintenant, dans 3 heures, oui.. Mais on a encore une bonne heure devant nous avant la fin de la pause déjeuné. Et m'ouais, je ne me rappelle pas trop de cette journée au café. »

John lança un regard noir à Leeroy. Celui-ci avait très bien comprit la situation, et John déduit qu’il s’amusait de voir John en mauvaise situation, peut-être voulait-il évaluer sa capacité à sortir d’une situation complexe. Quoi qu’il en soit, John était dans une impasse et était obligé de se soumettre à la discussion qui allait suivre. Avec un peu de chance, Ash comprendrait que John souhaitait l’évincer.

«- euh .. dites moi, puisse qu'on a le temps ça vous direz que je vous paye le repas, histoire de vous remercier ! Et puis ... bah comme ça on pourra discuter un peu hein ? »

Sauf que de la chance, John n’en avait apparemment pas. Soit, il allait devoir discuter longtemps avec une personne qui ne devait absolument pas découvrir son ancienne identité. John décida de changer son regard sombre en un sourire vers Leeroy, pour lui faire comprendre qu’il se laissait prendre au jeu. John aimait le challenge après tout, et il sentit un petit frisson.
Il laissa planer un petit silence pendant qu’ils continuaient à marcher, puis consentit à le rompre.

« - Eh bien, t’es généreux toi ! Je vais refuser une invitation pareille, et puis ça nous laissera un peu de temps pour se connaître … Et puis au moins on aura une raison de se reconnaître après ! »

Après tout, si Ash en venait à se rendre compte de sa vraie identité, John ferait en sorte de s’isoler avec lui et Leeroy et expliquerait la situation. Ce coup-ci, il aurait peut-être la chance que celui-ci ne soit pas à la botte de Georges Brun ; tous ne peuvent pas être corrompus, si ?

Il sentit bien le regard de John qui voulait tout dire, ce regard noir. Il se disait qu'il lui en voulait en ce moment même, cependant plus tard il aurait peut-être déjà oublié les sentiments négatifs qu'il envoyait en ce moment à son guide pour la fac. Leeroy ne pouvait pas s'empêcher alors d'afficher un petit sourire à cause de lui.

- euh .. dites moi, puisse qu'on a le temps ça vous direz que je vous paye le repas, histoire de vous remercier ! Et puis ... bah comme ça on pourra discuter un peu hein ?

Leeroy tourna son regard vers l'ancien ami de John. Cela pourrait effectivement être une bonne idée. Il n'allait pas refuser un repas, mais à cause de cela, les gens de sa promotion risqueraient pour le prendre pour quelqu'un de sociable. Les personnes qu'il avait essayé d'éloigner de sa personne allaient revenir. C'était embêtant, alors il soupira un peu.

Il vit alors le regard noir de John se changer en petit sourire. Avait-il décidé de changer d'attitude quitte à risquer son identité ? Ash pourrait le reconnaître s'il restait de plus en plus avec lui. Leeroy croyait que cela allait gêner John , mais du tout.

- Eh bien, t’es généreux toi ! Je vais pas refuser une invitation pareille, et puis ça nous laissera un peu de temps pour se connaître … Et puis au moins on aura une raison de se reconnaître après !

- Pourquoi pas.

À ces mots, il montra alors rapidement une direction. C'était celle de la cafétéria, et il commença à s'y diriger, prenant un tout autre chemin. Il y allait assez lentement pour que John puisse voir l'étendue de l'endroit que représentaient le campus et tous les bâtiments.

Malgré son petit amusement du moment, Leeroy semblait avançait lentement, ce qui soulagea John. Il n’avait pas oublié la raison principale de leur entrevue, et John prit le temps d’observer les alentours avant de repenser à la situation actuelle. Même s’il avait relevé le défi, actuellement il était loin d’être à l’aise ; il suffisait de faire un seul lapsus et Ash serait en mesure de découvrir le fond de l’affaire. Et des lapsus, ce serait un miracle si John n’en faisait pas un seul.

« - Du coup Roger tu n'es pas à la fac toi, c'est ça ? Qu'est ce que vous faites de beaux tous les deux ? »

Question délicate. John ne s’imaginait pas lui répondre que sa passion dans la vie était de détrousser des riches pour sauver de pauvres gens ; mais il n’avait pas assez de connaissance dans d’autres métiers pour répondre à des questions plus pointues, nécessaire. Alors John joua sur la carte de la chance. Et s’il avait beaucoup, il ferait même peut-être rire Leeroy. Enfin, il rêvait un peu trop.

« - Ah, bah j’suis un voleur en fait, j’adore détrousser les riches, tout ça quoi. »
John se tourna vers Ash, et avant que celui-ci n’ait le temps d’afficher une expression, il ria.

« - On s’est rencontré avec Leeroy lorsqu’il faisait de l’œil à des gosses, forcément ça rapproche. »

Il souhaitait renvoyer la balle à Leeroy, après tout celui-ci l’avait mis dans de beaux draps. Il se demandait si Leeroy allait continuer de jouer à ce jeu, où s’il allait se comporter sagement le reste de cette petite discussion. John ne savait pas trop à vrai dire, il ne connaissait pas vraiment Leeroy en fin de compte, alors il réduit ses pensées à se concentrer sur ce qui l’entourait pour engranger un maximum d’informations ; inutiles, certes, mais néanmoins intéressantes pour quelqu’un qui n’avait connu que la misère depuis neuf années.

Leeroy soupira un peu à la réponse de John. Dire qu'il faisait de l’œil à des enfants étaient franchement bien culotté. Ash était à la fac et ne voulait absolument pas que cette fausse rumeur se répande. Alors il répondit à cela.

- Est-ce que donner des croissants à des enfants est considéré comme leur faire de l’œil ?

Il avait répondit calmement, comme s'il s'en fichait de ce qu'avait dit John, bien qu'il soit en train de se défendre. Et à cause de cela, il allait tout de même se venger un petit peu. Leeroy attendit un petit peu pour s'arrêter pour faire semblant de prendre son portable. Au moment où John passa à côté de lui, il lui fit un rapide croche-patte discret que seul John pouvait déceler après se l'être pris. À l'endroit où il tombait, il y avait une jolie demoiselle avait des formes bien généreuses.

Leeroy se tourna donc vers la scène un moment pour parler à la jeune femme qui semblait assez énervée d'avoir la main d'un inconnu sur sa poitrine. Pour dire, l'étudiante en question tenta alors de le gifler.

- Il est un peu bête, il n'a pas vu de fille depuis longtemps, il n'a pas pu s'empêcher de vous sauter dessus, disait-il à la jeune femme.

Après ces mots, il se retourna pour continuer sa marche, sans même essayer d'aider John avec la demoiselle en furie. Il l'avait cherché et sur ce coup-là, il avait été plutôt rancunier.

- Sinon Ash, tu as quel âge ? Tu parais jeune.

« - Est-ce que donner des croissants à des enfants est considéré comme leur faire de l’œil ? »

La réponse déçu quelque peu John. Il s’attendait à plus de piquant, plus de sarcasme ; mais ce fut très plat. Dommage, ça aurait pu être un moment stimulant pour lui, mais il se contenterait alors d’en rester là.
Enfin, c’est ce qu’il pensait jusqu’à sentir le croche-pied de Leeroy, le projetant tout droit dans la poitrine généreuse d’une jeune étudiante. En comprenant le coup fourbe de Leeroy, il afficha un grand sourire, qui avait l’air d’envenimer la situation avec cette demoiselle.

«- Il est un peu bête, il n'a pas vu de fille depuis longtemps, il n'a pas pu s'empêcher de vous sauter dessus »

Leeroy en rajouta à nouveau, et John se retenu de rire face à la surprise que venait de lui faire son camarade. Alors finalement celui-ci avait de l’humour, c’était bon à savoir ; ce midi allait sûrement être plus drôle que ce qu’il avait imaginé.
Il fut très vite tiré de ses pensées, les mains toujours sur la poitrine de la jeune fille, par une magnifique baffe. John se releva, regardant incrédule la demoiselle. Alice avait une meilleure poigne dans ses souvenirs, mais il devait avouer qu’il avait tout à fait oublié de retirer ses mains, trop prit dans son rire. Ash vint l’aider à se remettre entièrement debout, puis John se décida tout de même à s’adresse à l’étudiante, afin d’éviter une seconde gifle.

« - Eh bah … »

En fait, John n’avait pas d’idée. Donc il se retourna et décida d’arrêter cette discussion-là, pour rejoindre ces deux camarades un peu en avance sur lui. La fille avait regardé, hébétée, ce goujat lui répondre puis décida d’en rester là, comprenant l’inutilité de la discussion avec John.

Apparemment, quand John rejoignit ses deux compères, ils avaient déjà entamé une nouvelle discussion. John allait réfléchir quelque peu à sa vengeance envers Leeroy, il voulait monter d’un cran cette fois-ci.

Leeroy fut bien déçu en tout cas que ce Ash vienne l'aider. Pour lui, il ne méritait pas cette aide après ce qu'il lui avait dit. En tout cas, il s'était quand même pris sa vengeance avec cette jeune femme étudiante. Cela ne se faisait pas pour elle, mais il s'en fichait un peu. Il avait même réussi à faire rire Ash. C'était pour dire, même si ce n'était pas vraiment son but premier.

Enfin, il avait pris quand même assez cher pour lui, et une fois qu'Ash l'ai rejoint, il reprit alors son trajet vers la cafétéria, tandis que John essayait de les rattraper.

- Ah, on me le dit souvent ! J'aurai bientôt 20 ans, je commence un master ici à Palema, plus tard, j'aimerais beaucoup étudier les lois physiques qui décrivent notre monde, ça me passionne ! J'en ferai sûrement ma spécialité, enfin du moins je l'espère ... Et toi ? tu es en biologie donc ? Qu'est-ce qui t'as poussé à partir dans cette voie ?

- La faune, je présume.

L'étudiant en biologie souhaitait effectivement travailler avec des animaux plus tard. Il se voyait bien dans la recherche en tant que scientifique. Pas le scientifique de laboratoire, mais plutôt le scientifique qui parcourait la nature à la recherche de nouvelle espèce. Ça vendait tellement du rêve, mais si cela se trouve, il n'arrivera jamais jusqu'à là. Il restait à voir s'il avait la motivation, la possibilité et surtout s'il était encore en vie à la fin de ses études. Les contractants avaient tendance à mourir jeune en moyenne. C'était normal après tout.

En fait, John n’écoutait pas vraiment la discussion entre Leeroy et Ash, et était occupé à s’étonner devant la foule qui envahissait l’entrée de ce qui pouvait s’assimiler à une cafétéria. Il sourit en repensant aux soupes populaires auxquelles il allait chaque hiver, et remarqua étrangement que ceux du sud était beaucoup plus éduqués à suivre une file que les étudiants de la fac. En effet, lors des soupes tous suivait un ordre précis, sans chercher à se passer devant, sûrement confondus dans la reconnaissance envers ceux qui les servaient ; tandis qu’ici, les étudiants se passaient les un devant les autres, sans témoigner le moindre respect aux agents présents, le tout dans une vraie cohue. Finalement, le monde dit plus éduqué ne l’était pas partout.

« - Et toi Roger, qu'est ce qui t'as poussé à devenir un robin des bois des temps modernes ? »

Pas encore accoutumé à son nom du moment, John ne comprit pas tout de suite qu’Ash s’adressait à lui, trop perdu dans sa moqueuse comparaison. Ce n’est seulement qu’après un vide de conversation de quelques secondes qu’il comprit que l’on s’était adressé à lui.

« - Hmm, pardon ? Tu m’as parlé ? »

Décidemment, John n’était pas le type le plus sociable qu’on ait rencontré, mais il s’en fichait. Le temps qu’il réponde à Ash, celui avait déjà pénétré dans le réfectoire et s’était servi, laissant ses deux comparses faire leur choix à leur tour. John était quelque peu déboussolé face au choix faramineux qu’on lui proposait, lui qui était habitué à se contenter du strict nécessaire. Il décida alors de laisser passer Leeroy, pour imiter ce qu’il allait prendre. John avait appris à aimer toute sorte d’aliments – même les périmés-, et il conclut facilement que les goûts de Leeroy allait sûrement se coordonner aux siens.

Pendant que Leeroy et Ash étaient en train de parler, John finit enfin par les rejoindre et sans même qu'il s'en rende compte, ils étaient déjà arrivés à la cafétéria. C'était un endroit comparable à une jungle. C'était pratiquement chacun pour sa peau. Alors que certains essayaient de respecter la file d'attente, d'autres s'amusaient bien à essayer de passer devant des gens. Leeroy faisait partie de la deuxième catégorie de personnes. De toute manière, il ne faisait pas exprès, en général les gens le laissaient passer. Par exemple, il s'approcha un peu de l'arrière de la file d'attente, généralement des jeunes femmes qui ne veulent pas se mêler au doublement de peur d'être bousculées, et ces jeunes femmes, faisaient partie de sa promotion le laissa passer devant.

Il n'était pas spécialement galant, ni rien, donc il acceptait toujours ces propositions. Très vite, il retrouva John et Ash. John avait l'air d'attendre qu'il se serve. Il se demanda alors effectivement s'il voulait prendre la même chose que lui puisqu'il ne savait pas ce qui était bon. C'était la première fois qu'il venait manger ici après tout. Leeroy prit donc son repas en double et présenta l'un à John.

- Ash, je te laisse payer alors. Je vais prendre une place sur la terrasse.

Il indiqua alors à la femme qui s'occupe de la caisse de voir avec Ash pour trois repas en tout. En attendant Leeroy se déplaça vers l'extérieur de la cafétéria pour réserver une table en s'asseyant à une des chaises. Il posa son repas sur la table et avant de commencer, il allait bien évidemment attendre les deux autres. Ce serait impoli surtout pour celui qui payait son repas.

John n’avait fait que suivre aveuglement ses deux comparses, et désormais il se retrouvait assis à une table, dégustant un repas bien meilleur que ce dont il avait l’habitude. Quoiqu’il se rendait évidemment compte que ce genre de mets ne satisfaisait pas la majorité des étudiants ici, cela était tout de même d’une qualité nettement supérieur au pain rassis, et autre pâtes brulées qu’il se coltinait quand il mangeait chez lui. Plongé dans son repas, il remarqua néanmoins le silence régnant sur cette table, et qui le mettait quelque peu mal à l’aise.
Même si John avait accepté le petit défi de Leeroy quant à Ash, la présence de celui-ci restait néanmoins dérangeante. Il avait envie de raconter à son ami sa collaboration naissante avec Nylian, lui parlait quelque peu de petites résolutions qu’il comptait prendre, et autres sujets qu’il ne pouvait aborder avec Ash dans les parages. Mais son égo l’empêchait d’abandonner le challenge, et il lui fallait donc trouver un sujet de conversation quelconque avec son vieil ami… Sans pour autant lui révéler la vraie nature de leur lien.

« - Bon, Ash, parle-nous un peu de toi. Genre, tu viens d’où si t’es à peine arrivé ici ? Tu fais des trucs en-dehors des cours ? »

Évidemment, John avait choisi le mauvais sujet. Forcément, Ash allait en venir à parler de son enfance ici avec Théodore ; et s’il a eu la malchance d’apprendre le présumé décès de celui-ci, cela ferait tiquer Leeroy. Pas que ce dernier ne soit pas au courant qu’il y ait une forte relation entre Ash Narraw et Théodore Brun, mais il n’avait eu jusqu’alors aucune occasion d’en venir à ce sujet. Et John se demandait si Leeroy allait pousser le vice du défi jusqu’à révéler la vraie identité de son camarade.
S’il faisait ça, alors John serait dans le pétrin : il aurait alors à découvrir à qui Ash prêterait-il le plus allégeance ; Georges ou Théodore ? Même s’il espérait savoir la réponse, il ne voulait vraiment pas en arriver là. Non, ce serait beaucoup plus simple si cette discussion se déroulait comme si c’était simplement des individus normaux qui discutaient entre eux, et non pas un asocial, un sans papier et un paumé. Vraiment, John avait le chic pour attirer les gens bizarres à lui.

Examinant sa nourriture, il aurait été plutôt d'humeur à se plaindre, car il y avait bien trop de mayonnaise dans ce qu'il avait pris, mais sachant qu'il y avait un habitant du quartier sud qui ne devait même pas espérer manger ça dans sa vie, il préféra ne rien dire par respect. Leeroy se contenta de manger tranquillement le sandwich qu'il avait pris, rempli d'ingrédient assez varié. Il s'était dit que cela serait bon pour John de se nourrir d'un peu près quelque bonne chose qu'il y avait dans ce repas.

Évidemment, il n'avait pas oublié le petit dessert qui accompagnait le tout, une petite compote de fruit avec un beignet au chocolat. John avait exactement la même chose que lui puisqu'il avait fait en sorte de piocher deux repas identiques.

Il regarda Ash puis John et leur adressa quand même quelques mots :

- Bon appétit.

Et à partir de ce moment-là, John adressa alors la parole à ce Ash Narrow, qui d'après les signes que lui faisait John, était une très vieille connaissance. Leeroy hésita encore à faire une référence à un certain Théodore Brun, pour essayer de lui faire comprendre. Ash n'avait pas l'air si méchant et ne voyait pas en quoi ça gênerait. Après tout, il n'était plus Théo, mais simplement John Fallen maintenant. Il avait choisi ce nom. Malheureusement, il savait très bien que John avait du mal à choisir l'un ou l'autre, soit il était les deux, soit il n'était rien.

Pour le moment, il allait les laisser discuter et verra bien par la suite s'il devait ou non intervenir. De toute façon, dans le tas de personnes se trouvant à la fac, il devait bien y avoir un Théodore, et peut-être que l'entente de ce prénom ferait tilter le cerveau d'Ash. Pour l'instant, il préféra y aller doucement et essayer d'anticiper la réaction du jeune homme face à la discussion. Mangeant son repas, il ne comptait pas non plus trop parler, il avait faim après tout.

Évidemment, John était déjà au courant de l’enfance d’Ash, étant donné qu’il y avait beaucoup contribué. Il se demandait si son véritable prénom allait déjà être prononcé, ou si Leeroy allait devoir lui forcer la main. Et après sa dernière phrase, John saisit que son comparse allait rebondir aussitôt dessus. Alors, avant que ce dernier balance la vraie identité de John et son passé, il allait tenter de passer pour un inconnu encore quelques instants devant son ancien ami.
Quoique, il ne put camoufler une mine triste quand Ash se tut. Après tout, indirectement il venait de rappeler à John qu’il était mort. Enfin, pas tout à fait, mais cela revenait au même ; cette nuit-là John était mort. Et de plus en plus, John se confondait : sa pire erreur avait été de choisir comme faux nom favori celui de son ami mort. Était-il Théodore Brun ou John ? Les deux étaient morts, et lui n’était aucun des deux. Qui était-il ? Il allait bientôt le décider. Enfin, ce n’était pas le jour pour ses questions métaphysiques, il avait encore à cacher son passé quelques temps. Ash saurait tout, bientôt. John en avait assez de se camoufler.

« - Ah, de Palema tu dis ? Pourquoi tes parents ont décidé de partir, la ville leur plaisait plus ? Quelle erreur, cette ville est sympa quand même, une belle plage, forêt, même des collines… »

John se tut. Forcément, il avait parlé de collines face à celui qui y assimilerait très rapidement l’identité d’un homme. John avait un don pour se mettre dans l’embarra ; sans oublier qu’il s’était amélioré ces derniers temps, alors il n’imaginait même pas penser au résultat de cette conversation quelques mois plus tôt.

Il détourna son regard d’Ash, et le porta sur Leeroy, l’air quelque peu résigné. Il se doutait de ce que celui-ci allait faire, et il se demandait à quoi ça allait les mener. Ash en ferait-il un malaise ? Hurler ? Le dénoncer aussitôt à son père ? Ou alors tout simplement le regarder, le visage blasé, hochant simplement la tête nonchalamment ? Après dix ans sans nouvelle, John ne connaissait plus le tempérament d’Ash.

Leeroy était plutôt heureux d'entendre ce genre de parole venant d'Ash. Il lui ouvrait totalement une porte pour pouvoir parler de John et de son passé. Bien sûr, il comptait aller doucement, pour ne pas trop brusquer, mais tout comme John, il n'avait pas vraiment de tact. Au moins, il avait son petit jeu d'acteur, entraîné par sa vie de contractant, et il cacha ses sentiments à propos de cela. Il afficha simplement un visage neutre, un peu l'air intéressé par ce qu'il disait.

Bien évidemment, le jeune homme ignora totalement John, préférant ne pas faire attention à lui pour le moment. Il voulait révéler sa vraie identité.

- Tu as l'air d'avoir des moments... Durs non ? Tes amis, comment étaient-ils ? Tu les aimais bien ?

Leeroy parlait un peu plus que d'habitude. Mais il essayait de s'intéresser à son cas et se ferait presque passer pour quelqu'un de social. Qu'est-ce qui ne fallait pas sacrifier pour essayer de rétablir l'ordre et la vérité entre ces deux-là.

Il savait que John l'avait regardé puisqu'il était sûr que Leeroy en parlerait et qu'il rebondirait sur les paroles d'Ash pour faire, lui faire, découvrir la véritable identité de Roger Moore.

Cette fois, il l’avait dit. Même si le nom manquait, Ash avait parlé de sa mort. A la fin de cette phrase, John détourna le regard, il ne pouvait le soutenir plus ; il était là, face à un vieil ami qui avait compté pour lui. Et à ce vieil ami, il mentait. Honteusement, et gravement. Pourtant, il ne voulait rien dire sur sa vraie identité ; celui-ci pourrait ne pas croire John, et imaginer qu’il se moque de lui. Cela empirerait alors la situation, et John n’avait vraiment pas envie de blesser Ash.
Au bout de quelques instants, il releva les yeux vers le jeune homme, compatissant. Il serait l’ami gentil aujourd’hui, et il comptait faire plus attention à ses paroles désormais. De toute manière, Leeroy vendra la mèche tôt ou tard, donc John avait tout à gagner à démarrer ses retrouvailles en passant pour le gentil.

« - Ah… Mes condoléances, Ash. Mais t’inquiètes pas, tu t’en sortiras, y a pas que des déceptions ! T’es à la fac, c’est quand même énorme gars, t’imagines pas, j’aimerais trop moi… Enfin c’est pas le sujet, mais on passera te voir s’tu veux, comme ça t’auras des nouveaux potes à Palema ! »

C’était risqué pour John de proposer à Ash de passer du temps ensemble, mais il ne pouvait s’empêcher d’aller aider les gens dans le besoin ; c’était sa façon de voir les choses. Il ne voulait pas faire prendre de risques inconsidérés à Narraw en le mêlant à ses affaires nocturnes, et même si celui-ci finissait par apprendre la vérité sur Théodore Brun, John n’avait pas la moindre intention de lui révéler sa vie illégale.

Puis il lâcha le regard d’Ash, et se décida à finir son assiette. Cela commençait à être mou à force de discuter, et ce serait irrespectueux de gâcher ce repas. Alors il s’attaqua à la mayonnaise au sandwich que Leeroy lui avait choisi, et eut un léger moment de nostalgie en le dévorant. A une époque, lointaine, John mangeait de la haute gastronomie, quelque chose de rare et de succulent… Une des rares choses qu’il regrette de cette époque à vrai dire. Il chassa ces quelques relents savoureux de ses esprits, puis se concentra à finir son repas. Ainsi, il avait laissé quelques instants à Ash pour se reprendre et pouvoir continuer la discussion moins à fleur de peau.

Après le petit monologue, le jeune homme concerné baissa légèrement la tête pour regarder le sol. Leeroy tenta alors d'analyser ce qu'il pouvait éprouver pour son meilleur ami mort, Théodore Brun, s'il avait tout suivi et compris. Il avait l'air de le regretter. La question était de savoir s'il voulait vraiment le revoir ou non. Au vu de son triste visage, c'était sans doute le cas. Il se demandait encore pourquoi John ne voulait pas lui avouer.

En écoutant ce que John disait, il avait vite eu envie de frapper, pourtant sa raison le retenait de le faire. Que faisait-il alors qu'il avait une chance de retrouver son meilleur ami ? Il ne le comprenait vraiment pas, lui qui se plaignait de la vie qu'il avait. Elle pourrait peut-être s'améliorer avec la présence d'Ash. Il devait être compréhensif et n'avait pas l'air méchant.

- Roger, dis-lui, où je m'occupe de le faire. Tu ne vois pas la tristesse qu'il reçoit d'avoir « perdu » son meilleur ami ? Si tu ne le fais pas, je le ferai à ta place, disait-il d'un ton sérieux.

Il lança un regard noir à son comparse assis juste à côté de lui. Il était sérieux, si dans les prochaines secondes, John n'avait pas tout dit, il le ferait sans doute lui-même. Cette action paraissait peut-être un peu salope venant de sa part, mais il ne voulait pas rester là à rien faire alors qu'il y en avait un qui jouait le comédien pendant que l'autre se lamentait sur des choses mal interprété. Leeroy allait les faire retourner à la réalité tout les deux, il n pouvait plus supporter ce spectacle.

Leeroy l’avait fait. Même si John avait pris cette petite discussion comme une sorte de challenge, il ne s’imaginait pas réellement que son camarade allait dévoiler sa vraie identité. Enfin, pas exactement lever le voile sur tout, mais il n’avait pas l’intention de laisser John s’en tirer en garant sa couverture. A cet instant, John était partagé entre l’envie de frapper Leeroy, et l’obligation de se sortir de cette situation des plus délicates. Et il n’avait pas vraiment envie de perdre le seul ami qu’il s’était fait depuis des années, alors il se résolu à suivre celui-ci.

« - J’ai pas le trop choix j’ai l’impression…Désolé de pas t’avoir tout dit dès le début, mais je vis dans une situation compliquée. En fait, on se connait depuis une dizaine d’années Ash, on allait souvent, enfants, jouer sur cette fameuse colline… Roger Moore c’est un faux nom, en réalité je m’appelle… »

Balancer son vrai nom restait néanmoins risqué en public. Il pourrait y avoir des étudiants proches de sa famille au self, voire même ses propres frères et sœurs – après des années sans les voir, John n’était pas en mesure de facilement les reconnaître.

« … John. Tu sais, j’venais du Sud, on jouait beaucoup tous les deux avec Théodore… J’étais là ce soir-là. J’ai vu comment Théodore est mort, et Georges t’a menti sur ce le déroulement de son décès. La vérité, c’est que c’est Georges Brun lui-même qui a ordonné à ses putains de gorilles de tabasser son propre fils parce que celui-ci avait osé lever la main sur lui… Et ils s’en sont pris à moi ensuite, mais j’ai eu de la chance. J’m’en suis tiré avec des fractures, des plaies, et toute l’affaire quoi, mais je suis pas mort. Voilà, désolé de t’avoir caché tout ça, mais je voulais pas te dire la vérité sur les Brun. Georges est plus gros enfoiré de cette putain de planète, et j’en ai vu des salopards… »

Il n’avait pas tout à fait menti ; il avait même dit en grande partie la vérité : ce soir-là, Théodore Brun était mort, et John Fallen était né… Ce n’était qu’une histoire de détails métaphysiques qui n’intéressaient personne d’autre que John lui-même. A la fin de ses révélations, il se tourna vers Leeroy. Il ne savait pas ce que celui-ci allait répondre à cette histoire. Serait-il satisfait ? Forcera-t-il John à en dire plus ?
John voulait s’en arrêter là pour aujourd’hui. Il comptait dévoiler le reste du passé à Ash plus tard, une fois qu’il aurait fini ce qu’il avait à faire à la demeure des Brun. Une fois qu’il aurait enfin tourné la page.

Apparemment, Ash n'avait pas l'air de vraiment comprendre ce que Leeroy venait de demander à John. Il allait très vite comprendre dans les minutes qui allaient suivre.

- Je vais laisser Roger expliquer.

L'étudiant en biologie laissa donc John expliquer lui-même. Et s'il ne comptait pas le faire, Leeroy allait se ramener dans la conversation et raconter sa version des faits comme John lui avait raconté cette fois-là au bar.
John commença alors à parler, et par son petit discours, il fut assez surpris. Il n'avait pas menti, mais ne disait pas tout pour le moment. Il posa alors son regard sur Ash pour voir sa réaction, et une fois que John eut fini son petit monologue, il le regarda. Son regard n'était plus aussi noir qu'avant, pourtant, il ne montrait pas non plus de la gentillesse.

Leeroy lança alors un petit soupir. Il allait peut-être arrêter de l'embêter pour le moment avec cette histoire. Ash avait l'air d'être gentil et compréhensive, en revanche, John voulait apparemment vraiment tirer un trait sur son ancienne vie, même avec ses anciennes relations. Il pouvait comprendre cela, mais il fallait qu'il arrête avec le « Je ne suis personne ». Il se demandait s'il avait bien compris la leçon cette fois. Il est John, et personne d'autre. Au moins, peut-être que comme cela, il saura vraiment. C'était un petit coup de pouce un peu violent mais peut-être nécessaire pour arranger certaines choses.

S'il c'était trompé et qu'à cause de cela, il s'attire des ennuis, c'était évidemment qu'il en prendrait la responsabilité et qu'il essaierait de réparer la situation. Pour le moment, il afficha tout de même un sourire à John, lui faisait comprendre qu'il n'allait pas en rajouter, et reprit son sandwich pour le finir tranquillement pendant qu'Ash allait faire sa réaction face à cela.

Ash s’était jeté, hurlant, calomniant, sur John. Tombé sur le dos, il grimaça en sentant une douleur l’élancer dans le bas du dos. Vraiment, tous ceux qui renversaient John avaient le chic pour le heurter au bon endroit. Après avoir reçu quelques coups mous de son ancien compagnon, il reprit ses esprits et entreprit de maîtriser Ash. Etant donné leur différence de gabarit, il y parvenu sans encombre.

Une fois la furie maintenue et John relevé, il s’approcha de l’oreille d’Ash, et lui chuchota :

« - Calme toi l’ami. J’avais onze piges tu sais, contrôler deux mammouths en puissance c’était pas facile avec mon corps de biscuit à l’époque. On reparlera de ça plus tard, quand on sera seul. C’est ni le moment, ni l’endroit pour t’en dire plus. Tu comprends ? »

Puis John relâcha l’emprise, espérant que le libéré se calme. Prendre de nouveaux coups ne le dérangeait pas, mais il ne souhaitait pas plus attirer l’attention sur eux ce midi. Il y avait déjà une cohue qui s’était attroupée autour des deux, et John avait peur qu’on cherche à les séparer. Il regarda à nouveau Ash, l’air triste.

« - Désolé, Ash. »

Et il partit se rassoir, relâchant sa garde. Si celui-ci tentait à nouveau de l’agresser, il se prendrait le coup directement, violemment ; il espérait simplement qu’Ash parte sans demander son reste, attendant que John le contacte à nouveau. Vu la réaction de son ancien ami, John avait compris qu’il serait nécessaire d’expliquer toute la vérité. Sauf que ce n’était pas, comme il lui avait dit, la place pour faire cela. Il ne voulait pas prendre le risque que des oreilles trop peu discrètes entendent certains noms et fassent des liens qui pourraient détruire la vie de John.

John s’arrêta net, sans continuer son sandwich. Il avait peur qu’on détruise sa vie. Il avait peur de perdre ce qu’il avait bâti. En fait, il commençait à se rendre compte qu’il faisait erreur sur certaines choses. A contrecœur, il devait s’avouer que Leeroy avait raison. John Fallen existait.

Leeroy fut plutôt surpris de sa réaction. Il ne pensait pas que cet adolescent allait réagir assez violemment. Heureusement pour lui qu'il ne mangeait pas au-dessus de la table, sinon il se serait sans doute pris la table dans la figure. Enfin, lui, il resta sur sa chaise bien calmement, tandis que John se faisait frapper par son ancien ami, apparemment énervé qu'il n'ai pas sauvé Théodore Brun.

Il pensait alors que John devra bien lui dire qu'il était Théodore, mais que maintenant, il était John et qu'il n'avait aucune raison de parler du passé. Ash était en droit de savoir la vérité, mais il ne devra rien dire à propos de cela.

En tout cas, le monde s'était regroupé autour, pendant que les deux se battent et que Leeroy finisse son sandwich. Ses yeux descendirent alors doucement sur eux, puis sans vraiment s'en occuper, il partit récupérer la table pour la remettre sur ses quatre pieds. Elle n'avait pas trop l'air amoché, il n'aura pas trop de problèmes de ce côté-là. Enfin, John avait chuchoté quelque chose, Leeroy n'avait qu' à peine entendu un mot sur deux, mais il n'y faisait pas trop attention, c'était entre eux que cela se passait. Il préféra se rasseoir, tout comme John, tout deux côtes à côte.

Il glissa son regard sur John et passa une main dans les cheveux du jeune homme, comme pour le rassurer. C'était le même genre de caresses sur la tête qu'il faisait à ces enfants de l'autre fois pour ne pas qu'il ai peur pour la suite. De toute façon, comprenant bien qu'il n'était plus un gamin, il avait presque retiré sa main aussitôt.

- Je suppose que je vais devoir t'acheter une sucrerie pour ça. Mais penses bien que c’est nécessaire que tu fasses ça, John. Ah et toi, vous avez eu la chance d'être ami. Peut-être que tu peux lier une nouvelle amitié basée sur la confiance en vous racontant la vérité. Si tu avais été ami avec lui sans rien lui dire, cela aurait été un peu... Triste ?

Leeroy ne savait pas vraiment si John comprenait où il voulait en venir. Il essayait d'expliquer que pour être ami, il faut savoir se faire confiance. Et c'était la raison pour laquelle Leeroy n'avait pas ou très peu d'amis.

Leeroy lui parlait comme s’il lui faisait la leçon ; son geste dans les cheveux lui rappelait celui d’un père qu’il n’avait plus eut. Il ne dit pas un mot, puis se concentra sur son repas. Après tout, Ash l’avait déjà payé, ce serait une honte de le laisser tel quel.
A la fin de son sandwich il lança un regard par-dessus son épaule, et put constater que son vieil ami était parti. Il soupira, puis reprit son activité – toujours sans répondre à Leeroy.
Une fois le plateau terminé, la foule entièrement dissipée sans avoir eu de réponse à leurs questions, et la scène précédente déjà oubliée, John s’enfonça dans son siège, et leva un poing. Il frappa mollement, presque avec la force d’un enfant, la joue de Leeroy, puis se décida enfin à le regarder, et éclata de rire.

« - Putain, toi t’y vas fort quand tu veux que les gens fassent quelque chose ! Le pauvre Ash, voilà qu’il était perdu et maintenant il a l’impression d’avoir agressé son vieux pote… Mais oui papa, j’irai lui parler un soir lui expliquer tout l’bazar, mais faut déjà lui laisser digérer ce petit événement… et moi le repas qu’il a laissé ici. »

Il ramassa le reste du repas d’Ash et se mit à l’entamer à son tour, l’air goguenard.

« - Bon, et si tu me racontais un peu ta vie des derniers jours ? Je crois qu’on a déjà dû assez en tendre de la mienne depuis tout à l’heure. »

Sa défense, c’était le déni. Enfin, la simulation du déni à vrai dire ; John savait que Leeroy n’était pas dupe, et que celui-ci savait qu’il n’avait pas oublié Ash aussi vite. Mais cela ne servirait à rien de ressasser encore le passé pour ce jour, chaque chose aurait son heure. John ne pouvait s’empêcher de s’imaginer ce que Leeroy pensait être pour lui … Son ange gardien ? Une sorte de grand frère plus jeune que lui ? Juste un ami ? Quoiqu’il en soit, John appréciait ce comportement téméraire et incorrect de son camarade. Cela rendait les situations plus drôles.

Il observa John et le regarda lever le poing. Leeroy s'attendait plutôt à un poing plutôt violent, mais finalement, il lui mit sur la joue avec une force ridicule. Il ne reculait que de quelques petits minis mètres histoire de dire qu'il l'avait un peu frappé. Il l'écouta alors tranquillement et prit son poing dans sa main pour l'abaisser.

- Je sais que j'y vais un peut fort, mais... C'est comme ça que l'on apprend le mieux. Pas trop violent non plus. Et puis, la prochaine fois, tu pourras t'expliquer correctement avec lui. Si tu veux, je t'arrange un rendez-vous avec lui. On est à la fac tous les deux.

Leeroy lâcha un petit sourire puisqu'il avait fait un petit sous-entendu. Enfin, pour le moment, John lui demanda ce qu'il avait fait de beau récemment. Comment expliquer qu'il ne pouvait pas lui dire pour sa vie de contractant. S'il devait se référer à sa vie « normale », il ne ferait pas grand chose. Elle n'était pas aussi remplie d'aventure que John.

- Je ne suis pas sûr que ça t'intéresserait. Ma vie est plutôt banale comparé à la tienne. Je vais en cours, le soir, je rentre, je révise, et je vais dormir. Je veux dire, dans ta vie, tu as tellement de choses à raconter et à faire.

Pour lui, il pensait que sa vie n'était que banal et ne comprenait pas pourquoi John s'y intéressait, à part le fait qu'il soit à la fac et que cela lui plaisait. Il ne voyait pas trop. Après, il n'enviait pas du tout la vie qu'il avait, une vie banale et en sécurité était bien mieux que celle de ce jeune garçon. Il pensait bien sûr en tant qu'humain. S'il devait comparer sa vie de contractant à celle de John, il prendrait sûrement la sienne sans hésiter.

Le repas était bon, vraiment. Cela faisait une décennie que John n’avait pas eu quelque chose qui n’était pas avarié dans son estomac, et il dégustait ce plat – pourtant classique- avec délice. Probablement ceux qui l’aurait regardé aurait trouvé ce type, mangeant avec passion une nourriture qui n’avait rien d’exceptionnel, presque dérangeant. C’était un axiome, personne n’aimait la nourriture de la cantine.

« - T’inquiètes, t’as déjà assez fait dans l’histoire… Laisse-moi m’en charger, j’irai le voir un soir. Si tu t’en occupes, il va sortir le couteau la prochaine fois, et j’aurai un peu plus de mal à m’en débarrasser, haha ! »

Il se tourna à nouveau vers Leeroy, remarquant son sourire. Putain, quel sadique… Pour qu’il sourie, ‘faut que j’me fasse frapper ! Il lui rendit celui-ci, puis l’écouta sans détourner le regard.
La vie de Leeroy n’était pas si inintéressante, en fait. Il n’avait rien à envier à celle de John, car même si elle était plus excitante, elle était inconstante et dangereuse. Quoiqu’il en soit, même après ce qu’il s’était passé aujourd’hui, le jeune homme n’avait pas l’air d’avoir envie de se confier d’avantage sur sa vie à John. Soit, il comprenait cela ; même s’il était déçu du peu de confessions de son ami.

« - Tu sais, ta vie est sympa. »

John avait envie d’en dire plus, mais il se contenta de cette petite phrase. Il n’avait pas envie de repartir sur un débat au sujet de sa vie secrète, son identité et toute l’affaire autour… Après ce qu’il venait de se passer avec Ash, il avait assez été Théodore Brun pour la journée.

« - T’as des trucs de prévu dans les prochains jours ? Genre, tu bouges un peu, un peu de sport ? »

Il resterait sur des sujets lambda pour le moment, en attendant qu’ils soient sortis de ce self. Il lui raconterait ses dernières nuits à ce moment là.

À vrai dire, se confier à quelqu'un ne serait pas une mauvaise idée, mais il ne pouvait pas savoir dans le futur s'il allait contractant ou non, Seraph ou Nephil. Il ne pouvait pas lui faire part, qui savait, John pourrait très bien le trahir. Il n'avait pas confiance en lui, pour le moment, il n'était pas son ami. Il ne le considérait pas comme tel, même s'il l'appréciait. Leeroy ne voulait pas dire des choses qui pourraient mettre en danger sa vie par faute d'information trop dévoilée. Il était méfiant, et cela pouvait se comprendre avec son statut de Solitaire, mais John ne pouvait pas vraiment le savoir. Peut-être qu'un jour, il comprendra.

- Ma vie n'est pas si sympa.

Il disait cela comme si la banalité et la sécurité n'étaient pas sympas, mais encore une fois, John ne pouvait pas comprendre le vrai fond de ces paroles. Il ne connaissait pas du tout Leeroy, seulement une infime partie de sa personne. Il n'avait rien vu de lui pour pouvoir comprendre dans le bon sens ce qu'il lui disait en ce moment même.

- Ouais, je faisais de l'athlétisme, mais j'ai arrêté. Une fille un peu folle, elle s'appelle Lulu, a voulu me rejoindre. Ça me faisait pas spéciale plaisir de faire de l'athlé', c'était juste histoire de faire un sport.

Pourtant, Leeroy avait l'air d'être quelqu'un de sportif. Après tout, combattre des ombres ou des contractants étaient son sport de tous les jours qui augmentait bien l'endurance et la force en même temps. Malheureusement, il ne pouvait pas apprendre à faire du sport en équipe puisqu'il faisait ni sport collectif, ni combat à plusieurs puisqu'il était Solitaire.

- Sinon je n'ai rien de prévu spécialement dans les prochains jours. Ça va être les vacances, je vais peut-être pouvoir faire quelque chose.

En réalité, il passerait bien faire un tour au zoo, malheureusement, il n'irait sans doute pas avec John, ou il remarquerait vite son comportement bizarre avec des reptiles, surtout quand il leur parlait en fait. Et puis, en hiver, il n'y avait pas beaucoup d'animaux qui sortaient en dehors de leurs tanières pour rejoindre les humains près de leur grillage.

John se mit à regarder Leeroy d’un air blasé. Décidemment, celui-ci continuer le jeu de l’homme sans histoire, sans passé, sans plaisir. Sauf que s’il n’avait rien à raconter, il raconterait au contraire tout un tas de choses sans intérêt sur sa vie. C’est ça le principe, celui qui en dit le moins est celui qui en a le plus à dire, et John mettait souvent ce dogme en pratique. Sauf que dernièrement il avait été forcé de se confier, car il commençait à en avoir assez de la tournure des événements.
Alors John mit son bras autour de l’épaule de Leeroy, prit un sourire béant, et lui annonça :

« - Bon, écoute monsieur normal, va falloir que j’te fasse sortir un peu quand même. J’connais des coins sympas de la ville peu fréquentés, rien d’illégal, j’te rassure. J’t’emmènerai une nuit en balade, ça te fera un peu de bien de faire des trucs en dehors de tes livres… Et t’as pas le droit de refuser ! »

Il lui forçait quelque peu la main, mais il ne voyait pas vraiment quelles raisons pourraient amener Leeroy à décliner son offre. Celui-ci n’aimait pas montrer aux gens qu’il avait une vie sociale, et c’est pourquoi John lui proposait de l’emmener à des endroits où personne ne va ; ainsi, Leeroy ne pourrait pas jouer sur ce levier si. Et même si Leeroy se faisait passer pour un jeune homme sage et docile, en l’observant on pouvait comprendre assez aisément qu’il était en réalité bien bâti. Il ne devrait pas avoir alors de problème à suivre John dans ses petits sommets reculés.
Et puis, qui sait, peut-être que Leeroy prendrait goût à ces escapades nocturnes ; et alors John pourrait enfin utiliser ces termes sans en faire des métaphores pour ses cambriolages, ce qui n’était pas pour lui déplaire.

En sentant le bras de John passer autour de ses épaules, il fut d'abord surpris, puis tourna juste son regard sur le côté pour le regarder. D'un coup, John avait comme effacé la distance qui les séparait et pas que physiquement. De l'extérieur, ils avaient l'air de deux bons potes en train de passer du bon temps.

- Bon, écoute monsieur normal, va falloir que j’te fasse sortir un peu quand même. J’connais des coins sympas de la ville peu fréquentés, rien d’illégal, j’te rassure. J’t’emmènerai une nuit en balade, ça te fera un peu de bien de faire des trucs en dehors de tes livres… Et t’as pas le droit de refuser !

Quand même, il haussa un sourcil à la proposition de John. Voulait-il l'emmener faire des cambriolages avec lui ou il avait mal compris ? Enfin, il ne connaissait pas vraiment ces balades nocturnes dans des coins louches de la ville puisqu'il restait souvent le nez dans ses bouquins, étant d'ailleurs assez souvent tard le soir dans la bibliothèque de la fac jusqu'à la fermeture officielle du site.

- Je ne refuserais pas ta proposition. Tout dépend de ta définition du mot illégal. Si tu considères que les vols sont illégaux alors pourquoi pas.

Après tout, du point de vue de John, voler des riches n'avait pas l'air d'être quelque chose de méchant puisqu'ils avaient largement de quoi vivre. Mais comme il venait de le dire, tout dépendant de sa définition de l'illégalité, puisque lui-même ne l'était pas vraiment.

- Et puis, ne m'appelle pas monsieur normal.

Sa vie était tout sauf normale, mais il ne pouvait pas l'expliquer à un simple humain comme John. Garder ses secrets dans sa mémoire et dans son unique personne était la seule chose qu'il pouvait faire pour se garder en sécurité pour le moment.

Fidèle à lui – c’est-à-dire ronchon-, Leeroy accepta à moitié la proposition de John. C’était déjà une belle victoire pour lui, et quand il comprit que son camarade s’interrogeait sur la légalité de leur escapade, il rit, tout en retirant son bras, apportant un peu trop de proximité. Ce que proposait John n’était pas, au sens strict, tout à fait illégal. Enfin, c’était relativement peu illégal du point de vue de son point de vue, et serait un peu déçu du jeune homme s’il refusait.

« - Si tu veux monsieur pas-normal. En gros, par rapport à la loi, c’est pas trop illégal. Rien à avoir avec mes activités personnelles si c’est ce à quoi tu pensais, hein. Non, à part deux trois violations de propriétés privées pour prendre des raccourcis, y a rien de bien méchant dans ces balades. J’espère juste que t’es sportif Lee’, sinon tu vas pas arriver au bout, hé hé ! »

Peut-être que mettre un peu au défi Leeroy le ferait se décider à accepter ; il faut dire qu’il n’y avait pas grand risque à faire cela. Et puis si quelques personnes se plaignaient de leurs intrusions, ils n’auraient qu’à courir. En pleine nuit, il n’y avait aucune chance qu’on les reconnaisse, et John en savait quelque chose. Après tout, il n’avait toujours aucune idée du visage de la jeune Armani qu’il avait cambriolé quelques mois auparavant alors qu’il s’en était approché. Alors reconnaître celui de deux jeunes hommes entrain de déguerpir relèverait du Sherlock Holmes.

Son repas terminé, John se leva avant que Leeroy ne se décide finalement, et se rendit compte qu’il ne savait pas vraiment ce qu’il devait faire des restes du repas.

« - Euh, j’fais quoi de ça ? On sort ? »

Il avait cassé un peu le côté sympathique du moment, mais il ne voulait pas s’éterniser davantage dans cette cantine. Désormais, elle serait liée dans son esprit à Ash, et il voulait passer le reste de son temps avec Leeroy en isolant son ancien camarade de son esprit. Il aurait tout le reste de la journée pour penser à la façon dont il lui annoncerait le reste.

Il soupira un peu. Leeroy savait bien qu'il ne voulait pas faire de quelque chose de légal et autorisé par la loi. Évidemment, il aurait pu parier qu'il s'agissait de quelque chose dans ce genre-là. Il regarda alors doucement John, soupirant une deuxième fois. Qu'allait-il lui répondre ? S'il finissait délinquant, sa mère ne s'en remettra jamais, enfin, faudrait qu'il se fasse choper pour que cela soit le cas.

- Sache que je n'ai pas envie de mener une vie comme la tienne.

De l'action et de l’adrénaline, il en avait déjà assez dans sa vie au quotidien entre les ombres et les contractants. Leeroy n'avait pas trop besoin que John lui rajoute du danger en plus pour rendre sa vie plus excitante, cependant, le jeune garçon ne connaissait pas du tout sa vie. Il devait forcément penser que sa vie était monotone et presque fatigante. Il n'avait pas tort, elle l'était, mais pas dans le bon sens du terme.

- Mais je suppose que je vais quand même accepter.

Il s'appuya un peu sur la table avec son coude, et regarda un peu autour de lui. Ils avaient quand même réussi à attirer un peu l'attention. Même si pas mal de gens étaient déjà partis, il pouvait sentir quelques regards en leur direction. Ces personnes parlaient sans doute d'eux, et cela ne plaisait pas tellement à Leeroy.

Ensuite, ses deux yeux jaunes se mirent à fixés un peu John et écouta ses deux questions.

- Dans une poubelle à proximité.

Leeroy se leva de sa chaise pour venir prendre les déchets de John ainsi que les siens. Il se dirigea vers une quelconque poubelle et jeta les détritus à l'intérieur.

- Ça dépend, que veux-tu faire maintenant ?