Leeroy s’était occupé de débarrasser le plateau à la place de John. Il apprécia ce geste, mais ne put lui sourire ; définitivement Leeroy semblait ne pas saisir la véritable teneur des balades que John lui proposait. A son grand étonnement, Leeroy semblait avoir entièrement assimilé John à un délinquant à part entière, et ne semblait pas s’imaginer que John ne cherchait réellement pas à entraîner Leeroy dans son monde. Si la première fois il lui avait caché son téléphone, c’était pour éviter que l’on puisse faire une quelconque connexion entre eux deux – alors s’imaginer que John veuille embrigader Leeroy dans l’illégal et détruire sa vie agréable était absurde. Certes, Nylian était un cas particulier… Il devait lui proposer cette entraide. C’était comme s’il savait qu’elle en avait envie, et que de toutes manières  elle s’ennuyait fermement dans sa vie ; elle n’y perdait rien.

« - J’crois que tu t’imagines trop que je veux te souiller, Lee’. L’illégal, c’est juste pour arriver plus vite à destination… On pourra faire un détour si tu le veux vraiment. »

Maintenant il fallait continuer la visite de l’université, sauf que John n'avait pas envie de s'enfermer pour le moment, il voulait rester dehors.

« - On pourrait visiter un peu l’extérieur du campus ? J'ai pas trop envie de me cloîtrer dans un bâtiment pour le moment. »

Le ton froid de Leeroy avait quelque peu attaqué son ardeur, et désormais il ne savait plus si Leeroy voulait continuer cette visite. Enfin, il ne lui poserait pas la question, car il préférerait continuer cette découverte. Il était temps pour lui de reprendre l’activité pour laquelle il était ici à la base : découvrir et discuter. Et au sujet de cette dernière chose, John avait encore quelques nouvelles à apprendre à Leeroy ; la première serait sûrement l’affaire Nylian, qui ne manquerait pas de surprendre son ami.

John avait sans doute raison dans un sens, mais en même temps, Leeroy n'était pas vraiment spécialement fan de s'attirer des ennuis, surtout quand il ne s'agissait que de traîner avec un humain.

- Ne t'inquiète pas pour ça. Je te suivrais. Tant que tu ne vas pas trop loin.

Tant que John respectait cela, il ne dira évidemment rien. Il se demandait quand même s'il allait être capable de s'amuser pendant une petite sortie comme celle-là. Sortir avec quelqu'un n'était pas vraiment son truc. L'habitude l'obligeait souvent à rester chez lui, le nez dans un de ses livres de biologie s'il n'était pas occupé par des ombres ou des contractants.

Ensuite, il lui disait vouloir visiter l'extérieur du campus. Voulait-il simplement s'éloigner des bâtiments, ou voulait carrément sortir du campus pour le faire de l'extérieur, par-dessus les petites barrières qui l'entouraient.

- Si tu veux. Tu veux sortir du campus ou juste être à l'air libre ?

Après cela, il mit les mains dans ses poches pour commencer à marcher, s'éloignant de la terrasse sur laquelle ils avaient partagé un repas qui avait tourné un peu violemment.

Leeroy avait consenti, mais John sentait la réserve dans sa façon de parler. Il ne savait pas si Leeroy avait peur, ou s’il méprisait l’invitation de John ; et cette dernière pensée fit parcourir un frisson sur dos de John. Leeroy était son ami désormais, et de plus cherchait à faire en sorte de John ait confiance en lui – alors il ne pouvait pas mépriser ses actes. John mit cette réaction sur le compte du mystère qui enveloppait toujours Leeroy.

« - Non, juste voir un peu les différents bâtiments, je suis pas pressé de partir, haha ! »

Il était peut-être temps de relancer la discussion sur autre chose, quelque chose qui animerait plus Leeroy… Souvent celui-ci en revenait à questionner John, alors cette fois il devancerait son camarade. Il ne savait pas par quoi commencer, entre sa récente embauchée et son futur casse, il avait le choix. Peut-être qu’embrayer à nouveau sur de l’illégal renfrognerait quelque peu l’étudiant, alors John prit son parti.

« - J’ai une associée. Ouais, c’est un peu bizarre dit comme ça, mais j’vais être plus seul à sauver le monde la nuit … »

Il se demandait comment son ami allait réagir. Était-ce vraiment une bonne chose que John ne soit plus seul à faire ses petites virées nocturnes ? N’était-ce pas trop dangereux pour sa nouvelle camarade ? John commençait à percevoir le mal dans ce qu’il faisait, et pourtant il ne pouvait se résigner à arrêter ses activités.
En fait, s’il continuait à avancer c’était pour lutter pour cet équilibre impossible ; et s’il s’arrêtait, il serait réellement perdu dans sa vie. Avait-il survécu dix ans pour rien ? Définitivement, à chaque fois qu’il rencontrait Leeroy, son esprit se mettait à vagabonder vers des questions existentielles ; comme si croisait un être intelligent forçait le cerveau de John à se réveiller.

Comme l'avait demandé son compagnon d'aujourd'hui, il s'éloigna alors un peu de la cafétéria pour rejoindre la grande cour. De là, ils pouvaient voir le bâtiment principal. Il laissa un peu de temps à John de le regarder avant de s'en aller vers une autre direction, supposant que le jeune garçon allait le suivre. Leeroy comptait lui montrer de loin, le département biologique, celui où Leeroy se trouvait. Et évidemment, ils allaient croiser des étudiants de sa promotion, bien que cela ne lui plaisait pas vraiment, il faisait quand même la visite à John.

Alors qu'il s'était fait exprès cette réputation d'asocial, avec quelqu'un avec lui, cette réputation si bien fondée pour lui allait sans doute s'effondrer. Sa crédibilité va sans doute chuter.
Maintenant, il disait avoir une associée ? Il soupira un peu, ils étaient maintenant deux à faire des folies pendant la nuit. Il le regarda alors fixement du coin de l'œil.

- Fais quand même attention à ce que tu fais. Si vous vous faites choper tous les deux, je prétendrais ne pas te connaître.

Pour lui, être deux augmentait les risques de se faire prendre. On est jamais mieux servi que par soi-même. Bizarrement, il aimait cette réplique puisque de toute manière, il était presque habité par la solitude, bien que dernièrement, cela ai changé à cause de la présence de John qui se faisait de plus en plus présente à ses côtés.

- Si tu l'as entraîné dans tout ça, dis-toi que tu en es responsable.

Arrivée devant plusieurs bâtiments, il sortit une des mains de ses poches pour montrer alors la direction et lui indiquer de quoi il s'agissait.

- Le département de biologie.

Leeroy était étrangement solennel depuis qu’Ash était parti, et John avait de plus en plus de mal avec cette ambiance trop sérieuse. Il avait déjà compris depuis quelques temps que son camarade n’avait pas de second degré, mais il ne s’était pas attendu à ce que l’étudiant prenne autant au pied de la lettre tout ce que John lui avait raconté. Déjà, quand il lui avait parlé de ses petites sorties, celui-ci n’avait pas été très enjoué ; et maintenant on dirait qu’il lui faisait la morale. Enfin, il était vrai que ses petites activités n’avaient rien de très respectables, mais ils avaient déjà eu une longue discussion là-dessus. Un débat qui avait mené John à réfléchir sur sa condition et à prendre des décisions temporaires, mais surtout qui l’avait mené à une sorte de retour mental permanent sur la question.

« - Ouais, je sais. Et je dirai aussi que je te connais pas, que j’ai volé ce téléphone. Agir avec elle facilitera le travail, et ça me donnera une bonne raison de mieux couvrir mes arrières… Et t’inquiètes pas, si jamais on se fait choper, je prétendrai l’avoir forcée. Je suis le seul responsable de tout ça. »

Ils étaient désormais arrivés devant le bâtiment dans lequel Leeroy étudiait, et John s’arrêta pour l’admirer. C’était ici que son ami passait sa vie, et à mieux y regarder, c’était moins impressionnant que ce qu’il avait imaginé ; même s’il n’avait pas d’espérance sur une quelconque grandeur de l’endroit, il se l’était vu différemment. Dans sa tête, ç’aurait été un bâti qui imposait le savoir et donner l’envie de s’y engouffrer - alors qu’en réalité ce n’était qu’un endroit comme un autre de la fac. John était un peu déçu, mais il s’y était attendu.

« - Ah, voilà donc le fameux endroit où tu passes ta vie, Lee’ ! Eh bien, je m’étais imaginé ça carrément plus impressionnant, mais on va dire que j’ai un peu trop rêvé, héhé ! »

Il se tourna vers son camarade, essayant de l’inviter lui aussi à sourire en le devançant dans le domaine.

« - Pour le prochain j’aimerais bien voir la bibliothèque s’teu’p, comme ça j’aurai vu tes deux maisons ! »

A vrai dire il n’avait pas vu non plus le vrai appartement de Leeroy, mais cela l’étonnerait que celui-ci finisse par l’y inviter.

Leeroy ne préféra ne pas du tout répondre sur le sujet de la vie de John, cela partirait effectivement mal. Disons, qu'il n'aimait pas vraiment le genre d'activité que John faisait puisqu'un jour, il se fera prendre. Tous les gens comme lui faisaient par se faire prendre un jour ou l'autre et il devait arrêter ces activités avant que cela soit le cas.

Enfin, il se concentra sur le bâtiment qu'il venait de montrer à John et lorsqu'il demanda à voir la bibliothèque, il soupira un peu malgré son sourire qui s'afficha un peu sur son visage. Il soupirait, car la bibliothèque était située dans le bâtiment principal d'où ils venaient, mais il souriait sur l'humour qu'il avait fait par rapport à ses deux maisons.

- Et pourtant, n'oublie pas ma troisième maison. Je révise aussi beaucoup chez moi. Et la bibliothèque était de là où on vient. Elle est dans le bâtiment principal.

Leeroy fit alors demi-tour pour répondre à la requête du visiteur de la fac et remit la main dans sa poche de veste pour marcher.

- Où veux-tu aller donc ce soir ? Je pense pouvoir me libérer puisque je me suis avancé sur mes exercices de bio' à faire. Enfin, tu pourrais aussi venir travailler avec moi, et faire le boulot à ma place aussi.

Il continua de marcher plutôt tranquillement, laissant John suivre le rythme de marche. Bien sûr, la personne qu'il ne voulait absolument pas voir se pointa sous leur nez. C'était Lulu, quelqu'un de vraiment insupportable.

- Waaah... Leeroy ! Moi qui te pensais totalement asocial. C'est vraiment trop mignon de te voir avec quelqu'un ! Qui est-ce ? Un ami ?

La jeune femme plutôt charmante mais surtout très énergique, avait vraiment l'air intéressé par l'inconnu de la fac.

- Ho et oui n'oublie pas ! Je vais vraiment crée un fan-club pour toi ! Tu le rejoindras n'est-ce pas ?, disait-elle avec un grand sourire.

Leeroy ne répondit pas, la regardant simplement, et finit par la contourner pour continuer son chemin, l'ignorant complètement. Cependant, elle s'accrocha un peu à son bras, alors il décida d'en placer une.

- Tu seras toute seule dans ton fan-club.

Leeroy venait d’inviter John chez lui. Cela faisait une décennie que cela n’était pas arrivé ; le cas de l’invitation chez Nylian ne comptant pas car cela avait été quelque peu forcé. Et John en était presque ému. Il s’arrêta net, prêt à répondre par la positive à la proposition de son ami – car il faut dire qu’un peu de détente après ce qui l’attendait ne lui serait que bénéfique-, lorsqu’il fut brusquement interrompu par une furie qui se rua devant Leeroy.
A ce que John comprenait, c’était une admiratrice de celui-ci, ce qui l’étonna quelque peu : il n’avait pas imaginé son comparse en Don Juan. Et encore moins avec un club qui lui était entièrement dédié. Enfin, ce qui était étrange dans le comportement de ce mystérieux Casanova, c’est qu’il jouait aussi le bourreau des cœurs avec cette demoiselle, pourtant charmante.
John tenait sa revanche.

« - Ok Lee’, on se retrouve chez toi cette nuit alors ! Prends tout, ça promet d’être une soirée fort agréable, si tu vois ce que je veux dire. »

S’en suivit un clin d’œil aguicheur, puis John se tourna en direction de la jeune fille, l’air faussement maladroit.

« - Oh ? J’ai parlé trop fort peut-être ? Merde ! »

Puis il attrapa le bras de Leeroy, et le força à courir s’échapper de cette jeune fille, afin de retourner dans le bâtiment de la bibliothèque.

« - Bon, tu m’en voudras pas, faut savoir faire des sacrifices, hein l’ami ! »

Décidément, John n’arrangeait pas sa réputation vis-à-vis de son orientation sexuelle : après l’événement avec Fox qui l’avait fait passé pour gay, voilà maintenant qu’il s’entraînait à nouveau là-dedans, et de son plein gré cette fois. Vraiment, il faudrait qu’un jour il fasse quelque chose afin que les gens comprennent qu’il est en réalité hétérosexuel – même si cela est moins amusant de dire la vérité.

Leeroy n'avait pas vraiment eu le temps de réagir à ce qu'il venait de se passer, ce que John venait de faire. A ses derniers mots, il lança un soupir. Évidemment, il n'avait pas du tout aimé ce qu'il avait fait, alors il lui lança un très clair regard noir, qui voulait dire « Je vais te buter ». Bien sûr, il ne comptait pas le faire tant qu'il était à la fac. C'était un très bon étudiant et voulait garder sa place de modèle.

Comme l'avait deviné Leeroy, cela n'allait pas du tout enlevé la détermination de cette jeune femme puisqu'elle les avait suivis en courant.

- Heeee Leeroy ! Tu m'avais pas dit que tu étais bisexuel...

Il se retourna alors vers elle, et fit signe à John de se taire.

- Je suis hétéro, il essaie juste de me mettre dans son lit. Tout comme toi d'ailleurs, et j'ai dit non.

Puisque John voulait se faire passer pou gay, alors Leeroy l'enfonçait forcément un peu plus et pour appuyer aussi ses arguments. Lulu, heureuse que Lee' soit hétéro, revint s'accrocher à son bras comme un aimant qui ne voulait plus se décrocher de l'autre. Cette routine commençait d'ailleurs à le fatiguer. D'habitude, les étudiantes qu'il rembarrait ne revenaient plus l'embêter, mais celle-ci était plutôt persistante.

- Maaais, Leeeroy, tu es tellement sexy et intelligent. Comment ferais-je si tu n'étais pas hétéro ? Je ne préfère pas imaginer.

- Lâche-moi le bras. Tu es pire qu'un parasite. Et tu es aussi plate qu'une planche à repasser.

Même s'il prononçait des mots durs, la jeune femme continuait dans ses petits délires et se fichait pertinemment de ce qu'il disait, quoique même parfois, elle préférait rajouter une petite couche.

- Il paraît que ma poitrine pourra grossir si je la fais masser par l'homme que j'aime. J'ai lu ça dans des mangas !

Après cette phrase, Leeroy déglutit complètement. Il s'agissait clairement d'une proposition et se retira totalement. Il prit John par le bras et s'en servi alors de bouclier en le mettant entre les deux.

- Lui c'est John. Il est intelligent et sexy aussi. Sors avec lui plutôt.

La situation n’avait pas vraiment été arrangée par la petite ruse de de John, et maintenant Leeroy lui avait renvoyé la balle sans comprendre qu’il avait, malgré les apparences, essayé de l’aide. Cette jeune fille avait l’air très insistante, et prête à faire n’importe quoi pour son prince charmant ; même si celui-ci ne daignait pas s’intéresser à son corps. Et John s’amusa de ce spectacle, enfin jusqu’à ce que le prince se serve de son corps comme bouclier. La fille était attirante, certes, mais John avait mieux à faire que de se faire remballer par une grognasse uniquement intéressée par son pote. Et puis, une si belle occasion de faire payer à Leeroy l’histoire avec Ash.
Il se tourna vers Leeroy, puis approcha sa tête pour lui chuchoter quelque chose, inaudible pour la fille.

« - Je suis en train de te sortir les fesses de cette affaire, donc boucle-la et laisse-moi parler. Et prends rien au sérieux, t’es sympa mais j’suis plutôt demoiselle, tu vois le genre ? »

Il retira sa tête puis se tourna vers la jeune adoratrice.

« - Lee' a du mal à parler de notre relation en public, donc est-ce que tu peux nous laisser, s’il te plaît ? T’es beaucoup trop laide pour qu’il s’intéresse à toi, et il préfère les gens plus discrets, enfin le genre de filles qui vont pas le harceler jusqu’à faire un club. Et vu ce qu’il te manque au niveau des pectoraux, même avec de beaux massages tu l’intéresseras jamais. Non, vraiment, ma chérie, casse toi. »

Cela commençait à aller trop loin, et John éprouvait une certaine gêne à tenir ce langage. Même s’il était très ouvert sur les orientations, il avait beaucoup de mal à se faire passer pour ce qu’il n’était pas – ses talents de voleur en parlent pour lui-, et donner une image d’homosexuel de lui, lui causait de grandes difficultés. A chaque phrase il repensait à l’effet mystérieux qu’avait eu Fox sur lui, et ne comprenait toujours pas la source de cet attrait temporaire. A vrai dire, John était même encore plus mal à l’aise que Leeroy dans cette discussion.
Avant que la fille ne lui réponde, il se tourna à nouveau, brièvement face à Leeroy, parlant tout bas :

« - Pourquoi j’ai fait ça, putain …. Elle va me tuer ta copine. »

Bizarrement, il avait pressenti qu'il ne fallait pas faire confiance à John lorsqu'il lui avait demandé de le laisser faire, essayant d'arranger la situation. Au vu de ses paroles, il ne pourrait évidemment que l'aggraver, et cela se traduisit aussi facilement par le visage de la jeune femme qui s'était légèrement assombri. C'était clair, John ? Il le butera une fois qu'il se sera sorti de cette galère et quand ils ne seront plus dans l'enceinte de la fac. La tête de Lulu laissait présager qu'elle ne leur pardonnera pas à tous les deux, John et Leeroy.

- J-Je ne te pensais pas vraiment comme ça Leeroy... Tu aimes vraiment les g-gros seins ?, disait-elle avant de lever son regard vers lui, tu ne regardes que l'apparence d'une fille ?

Évidemment, ce qu'elle venait de dire promettait à Leeroy d'avoir une sacré raclé de cette fille vu comment il la connaissait. Et il n'avait pas tort sur ce point et Leeroy n'était pas le genre à frapper des jeunes femmes à condition qu'elle ne soit pas contractante. En la supposant humaine, il n'allait pas lui faire de violence physique pour riposter. Il voyait ses poings tremblés, montant un signe de la tempête qui allait se défouler sur eux.

Tout d'abord, elle s'approcha de John et sans lui laisser le choix, il se prit une gifle de la main gauche puis elle allait enchaîner sur un coup de poing, cependant, Leeroy attrapa John par le bras avant de le tirer vers lui, lui faire esquiver ce coup et commença à courir avec lui.

- Ne t'inquiète pas, je te tuerai à sa place.

Lulu grogna alors sur les deux qui venaient de partir et ne comptait pas les lâcher maintenant.

- Revenez là ! Leeroy ! Je vais te tuer aussi !

Ce n'était pas avec des mots comme ceux-là que Leeroy allait s'arrêter de courir pour sauter dans ses bras. Ces mots lui incitaient plutôt à continuer de courir et en tant que contractant, Leeroy se savait bien plus endurant que les deux autres grâce à sa nature.

Evidemment, John s’en était mal sorti, même très mal sorti. Son idée était beaucoup moins bien passée que prévu ; il s’était imaginé que la fille serait partie, dépité par ce qu’elle venait d’apprendre. Et non qu’elle se mettrait à vouloir massacrer sur place les deux compères. Enfin, ça n’empêcha pas John d’encaisser les premiers coups, hilare face à la situation que devra endurer Leeroy dans les jours à venir. Il se laissa facilement emporter par celui-ci, puis s’arrêta tant bien que mal de rire pendant qu’ils fuyaient tous deux. Maintenant, il se demandait ce que son camarade comptait faire pour se sortir de cette petite galère ? Courir jusqu’à semer la prétendante ? Ce serait assez ridicule, mais après tout John n’avait pas de réputation à préserver dans cette faculté, contrairement à Leeroy. Vraiment, John riait bien.

« - Ha ha, et avant de me tuer, tu as une idée de comment nous sortir de là ? Au pire embrasse-la, elle est pas si moche. »

Voyant que Leeroy courait plus vite que lui, John accéléra sa course, sacrifiant au passage une partie de son endurance. Ses petites virées nocturnes avaient considérablement développé son corps, mais il ne connaissait pas les limites de Leeroy. Même s’il imaginait dominer aisément la jeune fille à la course, il avait le drôle de pressentiment que Leeroy allait l’y écraser.
John se demandait comment Leeroy allait se venger après ce petit événement qui allait sûrement lui coûter une grande partie de sa crédibilité, qu’il avait apparemment si difficilement forgé. Enfin, avoir une vie sociale plus active ne devrait pas faire de mal à ce jeune étudiant après tout ; et si l’on se moquait de lui à l’inverse, ça renforcerait l’image de solitaire qu’il voulait se donner. Il n’était pas si perdant finalement.

Évidemment, Leeroy courrait plus vite que John et avec plus d'endurance. Voyant que la jeune femme ne pouvait plus suivre depuis longtemps, il s'était arrêté net, à peine essoufflé, comparé à son compagnon qui devait l'être complètement. Avant que Lulu ne fasse partie du club athlétisme, Leeroy y était, et faisait de très bons scores. En même temps, il était déjà contractant bien avant d'entrer à la fac.

- Ne fais pas de commentaire comme « embrasse-la» ou je t'étrangle. Elle est mignonne, mais chiante.

Et cela, John pouvait le concevoir. Il venait d'avoir une vision de cette jeune femme, collante et chiante comme pas possible, alors il ne pouvait rien lui dire à propos de cela. En plus de cela, Leeroy n'avait jamais embrassé une seule fille, alors il n'était pas non plus confiant sur ce sujet-là. La seule qu'il ai embrassée était un homme, et il le regrettait déjà. Rien que d'y penser, des frissons de dégoût lui parcoururent le corps.

- Enfin. Si on sortait de la fac ? J'ai mes comptes à régler avec toi...

Il disait cela pour l'unique raison qu'il se vengerait bien évidemment de ce que John n'avait pas arrêté de dire pour lui endurcir sa vie de tous les jours. Maintenant, il avait dû perdre de la crédibilité et Lulu pouvait répandre la rumeur qu'il était à fond sur les filles aux gros seins et qu'il ne regardait que l'expérience extérieure.

Effectivement, l’endurance de Leeroy était de loin supérieure à celle de John. Alors qu’il en crachait presque ses poumons, Leeroy semblait à peine épuisé, comme s’il venait simplement de marcher doucement à peine une petite heure. Il n’était pas très difficile de comprendre que Leeroy avait une dent après John à cause de ce petit événement, et John se retint à nouveau de rire face à son ami, qui faisait tout sauf cela .

Enfin, John comptait se prêter au jeu. Il avait compris qu’il n’avait aucune chance de vaincre Leeroy en combat à mains nues, mais après tout il n’en était pas à une rouste près. Et puis, cela pourrait s’apparenter à une amitié virile ; du moins c’est ce que se disait John pour se rassurer de la déculottée à venir.

« - D’où tu sors ton endurance Lee’ ? C’est pas humain ça, ha ha ! »

Conscient que tourner autour du sujet énerverait sûrement son camarade, il se décida à rentrer dans le lard.

« - Allé, je te suis. Fais gaffe, j’suis ceinture noire de fujitsu… Tu sais pas à qui tu te mesures ! Waa-ta ! »

John imita la position d’un maître d’arts martiaux de vieux films, sachant pertinemment que ses paroles n’avaient aucune crédibilité ; de toute façon il savait que ce combat était peine perdue, donc à quoi bon se brouiller dessus ? Il se décida donc à emboiter le pas de Leeroy dès que celui-ci déciderait de sortir de la fac, afin de régler ou non leur petit différent.
C’était vraiment une belle vengeance.

Le petit manège de John avait arraché un petit sourire à Leeroy, qui le trouvait assez amusant avec sa position bizarre de maître d'arts martiaux, tout en sachant très bien que le nom japonais qu'il avait donné à sa prise n'existait réellement pas. C'était sans doute cela qui rendait comique la scène. Enfin, une fois dehors, Leeroy se fit légèrement craquer les doigts en regardant John.

- Comment veux-tu mourir ?

Il lui fit alors un petit regard noir, après tout ce qu'il avait dit à Lulu, il méritait une bonne correction. Même s'il avait l'air violent et faisait ce regard, il était devenu amical avec ce petit gars et ne pourrait pas vraiment le frapper. En même temps, s'il le faisait sans se retenir, il lui arracherait la mâchoire. Alors avant qu'il ne réponde à la question, il lui mit qu'un léger coup de poing qui faisait mal, mais pas assez pour le faire tomber par terre.

- Tu recommences, je t'arrache les dents une par une.

Il était clair là-dessus et pourtant, il ne se prenait pas lui-même au sérieux. Il se mit de profil par rapport à John puis mit sa main contre son visage. Leeroy devenait un peu plus sociable qu'avant, et surtout, il sentait qu'il commençait à devenir ami avec quelqu'un et il n'aimait pas ça. Il se demandait alors s'il devait simplement l'envoyer voir ailleurs maintenant avant qu'il ne soit trop tard ?

C’était une autre affaire que la gifle d’Alice ou encore de cette jeune fille qu’il venait de rencontrer. L’espace d’un instant des souvenirs de sa rencontre avec Lenka ressurgirent dans son esprit, puis il conclut tout de même que, ce soir-là, c’était vraiment d’un autre niveau la débâcle qu’il s’était prise.
Mais malgré l’affection qu’il avait pour Leeroy, son esprit reprit le dessus une fois la douleur ancrée dans son esprit. Il méprisait ceux qui usaient de la violence pour assouvir leurs fins, et même si c’était Leeroy, John ne pouvait s’empêcher de prendre un air presque hautain, comme il l’avait fait auparavant. C’était suicidaire, mais c’était depuis maintenant dix ans une sorte de réflexe impossible à contrôler. Enfin, il veillerait tout de même à ne pas se froisser avec Leeroy si tôt dans leur relation.

« - Ash y était allé plus doucement tiens. Tu sais que s’il avait eu un couteau tout à l’heure, avec ta connerie de tout balancer, j’aurai pu finir avec un beau trou dans le bide. C’est bizarre, mais je préfère qu’une folle entache à peine ma réputation que de finir par terre, le ventre perforé. Question de goût, j’sais pas, hein. »

Cette discussion allait mal finir, et John le savait très bien. Mais même s’il faisait souvent le fanfaron, il avait horreur de se battre. Etonnante pensée, sachant qu’elle venait de celui qui s’était fait expulsé de ses différents lycées car il était trop bagarreur ; mais même avec ce passé John méprisait, l’espace d’un combat, celui qu’il avait face à lui. Cela lui permettait de n’éprouver que très rarement de la peur, mais cela avait aussi comme immense défaut de le rendre inconscient de tous les dangers potentiels liés à ce combat. Il était tout à fait capable de se faire planter car il provoquait trop son adversaire, et c’était même très surprenant qu’il soit toujours en vie avec ce comportement.

Leeroy remarqua quelque chose de bizarre : l'attitude de John avait soudainement changé, pourtant, il avait fait attention à ne pas le frapper très fort. Il se tourna donc complètement vers lui pour l'observer.

- Ash y était allé plus doucement tiens. Tu sais que s’il avait eu un couteau tout à l’heure, avec ta connerie de tout balancer, j’aurai pu finir avec un beau trou dans le bide. C’est bizarre, mais je préfère qu’une folle entache à peine ma réputation que de finir par terre, le ventre perforé. Question de goût, j’sais pas, hein.

Qu'est-ce qu'il lui chantait ? Leeroy fronça les sourcils à sa remarque. Comment ne pas prendre mal ce qu'il venait de dire. Il s'approcha alors doucement de lui d'un air énervé, étant assez proche de lui, il s'arrêta pour le prendre par le col. Ces paroles l'avaient un peu énervé.

- Crois-tu que je t'aurais forcé à tout déballer si je n'étais pas sûr qu'il ne soit pas armé jusqu'à te tuer ? Me prends pour un irresponsable.

Évidemment, il était sûr qu'Ash n'était pas armé, mais pour cela, il ne pouvait même pas justifier puisque cela venait de son pouvoir. Entre la chaleur d'un vêtement, du corps et d'une arme, il y avait une différence. Lorsqu'ils étaient assis, et même lorsqu'ils avaient marché avec lui, il n'avait rien vu de tel.

- Et même s'il avait été armé, je ne serais pas resté assis comme je l'ai fais. Je sais prendre mes responsabilités. Je ne t'aurais pas laissé dans la merde si c'était dangereux.

Il lâcha assez brutalement John, le regardant assez sévèrement. Il avait beau être en colère contre lui, John ne pouvait même pas comprendre pourquoi Leeroy était sûr de tout cela puisque cela venait de son pouvoir. Dur à expliquer en effet. Leeroy soupira un peu pour se forcer à se calmer. D'un sens, John lui offrait l'opportunité pour couper les liens avec lui. Cette amitié, il la sentait mal et il se sentait mal à l'idée de se débarrasser de lui. Était-ce trop tard ?

John n’avait pas bougé sa tête ne serait-ce que d’un millimètre, sa mine était restée la même. Leeroy était énervé, mais John avait déjà atténué l’affaire ; s’il s’était laissé parler, Leeroy aurait sûrement lui aussi essayé de le tuer. Et ce jeune homme était étonnement fort – John était, lui, toujours essoufflé de sa course. Pourtant, étrangement l’étudiant semblait montrer une certaine retenue dans sa colère, comme s’il ne voulait pas en arriver au point de non-retour : celui de demander à John de partir ici et maintenant, laissant leur début d’amitié s’effondrer aussi vite qu’il s’était formé.
Si Leeroy souhaitait cela, John l’accepterait. Ce serait moins dangereux pour son ami s’il s’éloignait de lui ; et il pourrait s’en sortir absolument sans souci si jamais John se faisait attraper. Peut-être qu’au fond de lui il faisait en sorte de tout détruire, peut-être qu’il voulait continuer à être solitaire. Triste pensée pour celui qui venait à peine de commencer à lutter contre son sort et était en train de poser les fondations de son identité et de son futur.
Quand le jeune homme le relâcha, il consentit à répondre à son tour. S’il ne faisait rien de cela, la situation en serait bien pire.

« - Ha ouais, bien sûr, car monsieur est … »

Il se mordit la lèvre. Jusqu’à en saigner. Il savait que s’il disait un mot de plus, finalement, ç’en serait fini. Alors il décida de faire peut-être la première chose intelligente depuis longtemps : il tourna les talons, et commença à partir.

« - Merci pour la visite, Leeroy. »

Leur discussion ne pouvait aboutir à quelque chose de positif, alors il préférait en rester là et avoir une chance de renouer avec Leeroy plus tard. De plus, il pourrait se concentrer les jours à venir sur son plan pour cambrioler Georges, sans avoir à penser à de quelconques sorties avec Leeroy. Après seulement, il tenterait de le revoir ; enfin, si celui-ci y consentirait.

Il ne préféra ne pas faire de commentaire sur la phrase interrompue. Il ne voulait pas non plus envenimer les choses. Leeroy ne savait vraiment pas ce qu'il voulait faire à propos de John, se débarrasser de lui ou faire en sorte qu'ils soient amis ? En le voyant s'éloigner de la sorte et le remercier pour la visite, cela lui faisait presque de la peine et il s'en mordit la lèvre exactement comme John un peu plus tôt.

- Ouais, salut, répondit-il simplement.

A son tour, il se tourna pour aller en direction de la fac puisqu'il avait encore cours cet après-midi et d'ailleurs, ils allaient bientôt reprendre, sa pause de midi étant déjà terminée. Finalement, Leeroy n'avait pas vraiment eu le temps de lui faire visiter tous les bâtiments, mais voir un peu près un morceau de la fac pouvait lui donner une idée. Il aurait bien voulu lui montrer les amphithéâtre, c'était quelque chose propre aux études supérieures. Enfin bon, peut-être une prochaine fois.

Sur son trajet, il piétina sur un caillou puis l'envoya un peu plus loin avec son pied. Leeroy était bel et bien dérangé par l'autre jeune garçon. C'était plus qu'énervant. Il se disait que le temps où il travaillait, il n'avait pas besoin de penser à lui, et il avait déjà assez de problèmes comme cela.